Le numérique à l’école . .. l’Appel de Beauchastel

Note cet appel circule depuis décembre 2015, on le publie…Beauchastel au confluent de l’Eyrieux et du Rhône, au sud de Valence, Beauchastel a souvent été victime des crues de l’Eyrieux, jusqu’à la construction d’une digue en 1860.

Appel de Beauchastel

Une journée dans l’école numérique

Ma journée d’école commence, la sonnerie vient tout juste de

retentir, je rentre dans ma salle de cours et déjà je m’interroge : dois-je

accueillir la classe ou me tourner vers mon écran pour effectuer l’appel

électronique ? Dans un souci de «diversification de mes pratiques»,

dois-je capter le regard des élèves à l’aide de l’écran de mon vidéo-

projecteur, vérifier la mise en route de toutes leurs tablettes ou décider

de me passer de tout appareillage numérique ? Alors que la séance se

termine, prendrons-nous le temps de noter le travail à effectuer à la

maison ou dois-je renvoyer chaque élève devant son écran pour

consulter le cahier de textes numérique que je remplirai en fin de

journée ? C’est la pause du repas ; à la cantine, que penser de ce flux

d’élèves identifiés par leur main posée sur un écran biométrique et du

bip régulier de la machine signalant son aval à leur passage ? Ces

adolescents dans la cour scrutant sans cesse leur téléphone, ces

surveillants et ces professeurs derrière leur ordinateur, tout ce monde se

disant parfois à peine bonjour, est-ce cela le progrès ? En fin de

journée, dans la salle des profs, dois-je, toujours face à mon écran, trier

mes courriels administratifs et remplir le cahier de textes numérique, ou

ai-je encore le temps d’échanger de vive voix avec mes collègues sur le

déroulement de cette journée de classe ?

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Ces questions ne se posent pas en 2084 mais aujourd’hui, dans

nos écoles, collèges et lycées. D’ailleurs, le numérique a déjà

une emprise telle sur nos vies et celles de nos élèves, que parfois nous ne

nous les posons même plus. Et pourtant, si on nous avait dressé un tel

tableau il y a quelques années nous l’aurions trouvé outrancier. Mais les

innovations apparaissent progressivement, elles sont déjà dans l’air du

temps avant de s’imposer à nous et il n’y a apparemment pas de limite

à ce que l’on peut accepter.

Accepter, nous nous y sommes maintes fois résignés, et nous

sommes bien conscients que l’informatisation de l’enseignement n’est

que le point d’orgue de son délitement. Nous avons déjà cherché à

suivre des programmes incohérents, à comprendre l’incompréhensible

jargon de l’Education Nationale, à simuler une prétendue évaluation

par compétences, à enseigner à des élèves de plus en plus déconcentrés

parce que de plus en plus connectés. Pourquoi ne pas aller plus loin ?

Ainsi nous nous apprêtons à renseigner sur chaque élève des données

conservées à vie et bientôt consultables par un employeur grâce au

logiciel de notes et d’appréciations et le livret personnel de

compétences numérisé. On nous encourage à scotcher nos élèves aux

écrans durant les seuls moments où ils y échappent encore, et cela sous

le prétexte de les éduquer aux médias. Et finalement, pourquoi ne pas

renoncer à enseigner en feignant de croire qu’une connexion internet

suffit pour s’approprier un savoir réel ?

Pour nous, ça suffit.

voici l’appel complet ici pour permettre de le lire et le  diffuser à celles et ceux qui n’ont jamais le temps, l’occasion  de venir au laboratoire anarchiste lors des heures ouvertures voir ici aussi