Journée de discussion sur les perspectives de lutte anticarcérale au CSA d’Ivry

indymedia  Nantes

Nous nous nourrirons de témoignages de luttes passées et présentes, de l’extérieur comme de l’intérieur ou dans une dynamique de va-et-vient entre les deux. Suivra une discussion sur les perspectives de luttes anticarcérales à Paris et ses alentours. Le samedi 7 avril, à partir de 10H

Personne ne peut être assuré.e de n’avoir jamais à subir la prison, que ce soit en étant enfermé.e ou à travers ses proches. Il faut garder en tête que la prison, ainsi que la police et la justice en amont, dirigent leur répression spécifiquement contre les personnes qui ne veulent pas rester à leur place de dominé.e. La prison représente la sanction ultime de l’arsenal répressif par lequel l’État cherche à anéantir toute envie de débrouille, de refus, de révolte. A l’extérieur, la crainte du passage en taule ou l’espoir d’un contrôle judiciaire moins strict te fais accepter de travailler gratos pendant des TIG ou encore de normaliser ta vie en fonction de leur morale. A l’intérieur des murs, la carotte des remises de peines, l’espoir d’une cellule en régime ouvert ou le bâton du mitard permettent à l’administration pénitentiaire d’obtenir le calme à peu de frais. Par cette gradation des sanctions la justice et l’administration pénitentiaire trient, isolent, pour mieux maintenir chacun-e sous contrôle, et qu’on devienne nos propres flics.

Même si ce constat du rôle de la prison dans la bonne marche de ce monde est plutôt partagé au sein des luttes anticapitalistes et libertaires, on peine à s’y attaquer réellement. Notre rapport à la prison se cantonne souvent à l’urgence : celle de l’antirépression pour éviter que des camarades s’y retrouvent enfermé-e-s, ou bien du soutien quand certain-e-s se retrouvent dedans. Même si ces formes d’entraide et de solidarité sont nécessaires et bienvenues, elles restent un privilège dont ne disposent pas tou-te-s les prisonnier.e.s et ne devraient pas se substituer à une dynamique de lutte contre la taule.

La lutte anticarcérale doit être dirigée contre la prison et son enfermement, mais aussi contre le système de surveillance et de gestion des populations qu’elle sous-tend. On ne peut pas se contenter de murs repeints, de douches qui ne sentent plus la pisse et de l’éloignement des rats. On ne peut pas souhaiter substituer à la prison la surveillance électronique, ou l’assignation à résidence. Il est temps que les luttes anticarcérales reprennent force et détermination. Il est temps que la prison soit considérée autrement que comme un simple outil de répression des luttes. La prison est au cœur des logiques d’exploitation et d’oppression, c’est pourquoi il faut la combattre.

Nous proposons une journée de discussion et de réflexion sur cette thématique. Nous nous nourrirons de témoignages de luttes passées et présentes, de l’extérieur comme de l’intérieur ou dans une dynamique de va et vient entre les deux. Ces témoignages précéderont une discussion sur les perspectives de luttes anticarcérales à Paris et ses alentours. On pense par exemple aux différents projets carcéraux actuels, comme le plan de construction de nouvelles prison où bien la réouverture prochaine de la prison de la Santé.

Le samedi 7 avril

Programme de la journee :
10h – extraits du film « COPEL : Une histoire de révolte et de dignité » (2017)
11h30 – intervention sur les luttes à l’intérieur
13h – repas
14h – discussion autour de la lutte contre la maxi-prison à Bruxelles
15h30 – discussion sur les perspectives de luttes anti-carcérales

au Centre Social Autogérée Vaydom
37 rue Marceau, 94200 Ivry-sur-Seine
M7 Pierre&Marie Curie / T3 Maryse Bastiee

N’hésitez pas à apporter vos gâteaux, on fournit le thé et le café !

Lyon 69001 Attaque fasciste contre le local de la CNT , Rassemblement mercredi 4 avril à 18h !!!

[IALA]



L'Union Départementale 69 des syndicats CNT (Confédération Nationale du
Travail) appelle à un rassemblement mercredi 4 avril à 18h devant son
local situé au 44 rue Burdeau dans le 1er arrondissement de Lyon.

   Celui-ci a en effet état attaqué dans la nuit du vendredi 30 au samedi
31 mars. Un groupe de fascistes a arraché la grille et brisé la vitre,
tenté de casser le rideau de fer et dérobé du matériel militant.


http://www.cnt-f.org/cnt69/attaque-fasciste-contre-le-local-de-la-cnt-no-pasaran/

https://rebellyon.info/Attaque-fasciste-contre-le-local-de-la-18915


    En mars 2010, trois camarades de la CNT étaient violemment
agressés par des fascistes dans le Vieux Lyon. Mars 2018, le local de la
CNT a été pris pour cible par des fascistes. En 2010 les identitaires
avaient un local dans le Vieux Lyon, depuis de nouveaux locaux ont été
ouverts (Pavillon Noir du GUD, local du PNF, local de l'Actione Française,
et des locaux commerciaux proches de ses idées). Ces implantations et ces
lieux d'émulation pour des groupes de jeunes fascistes ont engendré des
agressions, provocations lors de manifestations des soutiens aux
réfugiés, et attaques de locaux. En particulier sur le 1er arrondissement
de Lyon où depuis 18 mois pas moins de 4 lieux militants ont été la cible
d'attaque : la Plume Noire (local de la CGA, coordination des groupes
anarchistes) en novembre 2016, Radio Canut en décembre 2016 et mars 2017
puis le local du PCF en février 2018, et enfin le local de la CNT.

    Cette nouvelle attaque sur Lyon s'inscrit dans un cadre national tout
aussi préoccupant où les différentes mouvances de l'extrême droite
font le choix de s'en prendre aux luttes sociales et à ses acteurs.
Entre autres, cela a été le cas à Paris avec des agressions dans le
jardin du lycée autogéré de Paris par une dizaine de membres du GUD le
16 mars, l'attaque par des nervis cagoulés à la fac de Montpellier
dans la nuit du 22 au 23 mars, l'agression de 2 personnes à la sortie
d'une assemblée générale à la fac de Lille le 26 mars.

     L'attaque du local se veut une intimidation de la part de ces
groupuscules, elle ne freinera pourtant pas l'action de la CNT qui
lutte aux côtés d'autres organisations afin d'obtenir la fermeture du
local quai pierre Scize (Pavillon Noir, Bastion Social, émanation du
GUD).
Nous ne sommes pas dupes : si ces groupuscules se développent, c'est que
les gouvernements successifs, en banalisant des discours voire des
pratiques racistes et en détruisant les droits sociaux font le lit de
leurs idées. Que ce développement se fait grâce au silence (voire à la
complicité) de l'état, à la passivité de la police. En effet depuis
plusieurs années, les groupuscules fascistes ont pignon sur rue, ils ne
cessent de mener des actions violentes et la seule réponse de la
préfecture (représentant direct de l'état) a toujours été de minimiser
cela et de faire croire à une guéguerre entre des groupuscules
d'extrême-droite et d'extrême gauche.

    Face à cela l'union départementale des syndicats CNT réaffirme sa
volonté de continuer à lutter contre le fascisme et les idées
haineuses qu'il transmet, sa volonté de lutter au sein des luttes
sociales pour une société plus juste, émancipatrice, anticapitaliste
et anti-fasciste.

    Face au fascisme et à ses idées, ¡No pasarán !

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Prison de Valence: La tension monte….

radio France bleu Drome Ardèche le 3 avril 2018 à 19:19 – Mis à jour le mardi 3 avril 2018 à 20:20

Vers 17h30, à la suite d’une commission de discipline, un détenu du quartier maison centrale du centre pénitentiaire de Valence a demandé à accéder au téléphone. Après son coup de fil, il s’en est pris à une surveillante. L’homme a tenté de voler le trousseau de clés de la surveillante gradée. Une autre gardienne est arrivée en soutien. C’est elle que le détenu a attrapée par les cheveux avant de la projeter au sol. Il l’a ensuite saisie par le cou. « Le détenu a menacé de la tuer si sa collègue ouvrait la porte aux renforts qui arrivaient » précise Sylvain Royère, délégué régional et local UFAP-UNSa Justice. »Si vous ouvrez, je la bute, je l’égorge ! »

Les alarmes des deux gardiennes sur place se sont déclenchées.

Les deux surveillantes examinées à l’hôpital

Les renforts ont tout de même pu intervenir très rapidement et dégager leurs deux collègues. Le détenu a été replacé dans sa cellule en quartier disciplinaire.  Le calme est revenu en début de soirée. Les deux surveillantes ont été transportées à l’hôpital de Valence, très choquées, pour être examinées.

Le détenu n’avait pas d’arme assure l’administration pénitentiaire, contrairement à ce qu’indique l’UFAP-UNSa Justice, qui évoque une arme artisanale avec une lame.

Le syndicat exige « le transfert de ce détenu immédiatement après avoir purgé sa sanction au quartier disciplinaire« . Ce détenu purge une longue peine à la prison de Valence. Il fera l’objet de poursuites pour ces violences.

lu attaque.noblogs.;org

Prison de Valence : Les matonnes récoltent un peu de ce qu’elles méritent

Émission de radio:Social Cooling ?La Causerie n°246 du 01 avril 2018

[reçu par mail]

Dans la mode des mots qu’on importe et qu’on dit en anglais parce que c’est trop cool et super la classe, Social Cooling sort en ce moment. Mais il n’est pas facile de le définir clairement. En français cela pourrait donner « une adaptation aux modes sociales ». Mais même comme cela, ça ne parle pas à grand monde.

La Causerie, émission de Radio Canut à Lyon, et que j’ai la chance de co-animer avec plein de gens supers, a parlé de cette notion. Mon compagnon d’émission, Stan, tente une explication de ce que c’est, mais aussi les conséquences que cela peut avoir sur la vie en général. Et l’exemple chinois peut nous glacer le sang.

> https://blogs.radiocanut.org/lacauserie/2018/03/28/la-causerie-n246-du-01-avril-2018/

Voilà qui peut donner à réflexion après le CFA « Réseaux sociaux » 😉

À chacun sa vérité

attaquenoblogs.;org

Réflexions et actualisations à propos du procès Scripta Manent

Croce Nera Anarchica / 1er mars 2018

Il n’y pas des grandes réflexions à mener à propos d’un épisode répressif (au fond il s’agit du simple et cyclique jeu d’action et réaction) ni à propos des manigances de la répression, une autre chose bien connue ; tout au plus quelques remarques sur le développement de ses techniques et de ses stratégies.

C’est ce que je vais essayer de faire ici, à plus d’un an des arrestations, après l’ouverture du procès, ce qui a percé une brèche dans la bulle de la censure et a permis de découvrir les dossiers du Parquet, dans la complexité de leur misère. Cela après le bref compte-rendu paru dans le dernier numéro du bulletin Croce Nera [Croce Nera Anarchica, n. 3, février 2017 ; NdAtt. ] et les évolutions qui sont survenues entre la clôture du dossier et l’audience préliminaire [de juillet 2016 ; NdAtt.].

Toutefois, avant toute observation, je tiens à réaffirmer, tout simplement, ma fierté dans l’anarchie et dans les anarchistes, qui m’ont permis de me nourrir de solidarité faite d’actions, d’écrits, de rage qui ont rebondi au delà des portails et de prison en prison, montrant encore une fois à quel point la tension anarchiste est vivante, actuelle et capable de railler les catégories et dépasser les limites que la répression voudrait nous imposer, tout en abandonnant le poids des peurs et du mythe du consensus.

J’ai toujours pensé que l’anarchie est une chose sérieuse, si pratiquée par des femmes et des hommes pourvus de raison et d’instinct, de quelque chose qui, quand le pouvoir l’enferme dans ses cages, lui retombe dessus et transforme en force les faiblesses qu’il voudrait nous insuffler. Nous sommes là à cause de cela, dans une partie de dés sans fin entre l’autorité et sa négation.

Aussi, j’ai toujours pensé que l’anarchie a l’indiscutable privilège de pouvoir s’appuyer sur un puissant fondement philosophique, historique et culturel, en plus que sur un instinct atavique vers la négation ; des éléments qui se mélangent aujourd’hui encore dans d’efficaces recettes destructives.

« L’anarchie, quand elle le veut, est puissante », comme l’a dit le compagnon anarchiste Panagiotis Argirou dans son communiqué de l’été dernier, en solidarité avec les personnes arrêtées lors du G20 d’Hambourg.

L’idée anarchiste continue d’être un problème pour l’autorité, montrant aux esprits libres l’aspect concret qui se trouve dans la négation de cette dernière.

Mais je ne veux pas créer de malentendus : il n’y a pas de simples procès contre les idées. Quand la répression frappe c’est toujours à la suite de faits, actions précises qui portent atteinte à la pacification sociale diffuse et à l’habitude du contrôle si typique de ces temps.

Action et réaction : on met en place des procès contre des anarchistes, pour ce que les anarchistes sont, des ennemis de l’État.

La répression – ainsi que la codification et l’application du Code pénal qui la suivent – change de forme et s’adapte selon les aléas et le degré de dangerosité de l’affrontement en cours : elle peut avancer avec une férocité vengeresse, faisant table rase de tout ce qu’elle trouve sur son chemin, ou bien avec un certain paternalisme, ou encore avec tout le panel des nuances intermédiaires. Parfois ce sont les réfractaires eux-mêmes qui donnent le rythme de l’action, parfois ils subissent les coups répressifs – et ils répondent. Souvent ils se plaignent de ne bouger que quand ils sont acculés par la répression, au lieu d’attaquer les premiers. Il faut cependant garder en tête que recevoir des coups ne veut pas dire en être les « victimes ».

Peut-être que, pendant trop longtemps, la victime de la répression a été un vieux rôle, confortable pour certains, dans le théâtre de la démocratie, une étiquette fausse et désagréable qui a produit du piétisme et non pas une conscience combative.

C’est là qu’est l’importance de ces temps : dans la nouvelle, ou renouvelée, conscience d’être un objet contondant, porteur de germes subversifs si on veut, pas seulement à l’intérieur d’un « milieu » étriqué, mais aussi de se présenter, social ou antisocial selon chacun, comme fiers porteurs d’une critique intense de l’époque de la domination technologique, du contrôle et de l’homologation globale.

Déshabiller l’empereur et monter ses parties cachées a été et continue d’être, aujourd’hui comme hier, quelque chose qui provoque la répression, avec de vieux ou de nouveaux instruments. Les catégories ridicules du Code pénal – apologies, provocations, associations – visent à frapper le tissu qui relie pensée et action : la solidarité.

Nous ne pouvons pas nous permettre de nous étonner de cela ; il y a plus d’un siècle il y avait les associations de malfaiteurs et l’autorité royale faisait fermer les journaux et persécutait les subversifs et leur réunions, surveillait les lieux malfamés où ils se rassemblaient. Aujourd’hui ils surveillent aussi la toile et la télécommunication.

À la différence du passé, le contrôle est devenu envahissant à cause de l’avènement de nouveaux oripeaux technologiques, chose à laquelle s’accompagnent souvent une conscience et une confiance moins forte en son propre potentiel et en ses possibilités de s’y opposer [au contrôle ; NdAtt.].

Modèles et techniques répressives sont réintroduits et modernisés (parfois même pas), utilisés si besoin en est ; à l’heure actuelle ils sont utilisés, entre autre, pour contenir, ou essayer de contenir, une indéniable effervescence dans les milieux anarchistes.

Constater cela ne signifie ni s’immobiliser tel des animaux terrorisés car surpris par les phares d’un poids lourd qui arrive à grande vitesse, ni se jeter – mains et pieds liés – dans la gueule du monstre, persuadés de sa voracité inéluctable. Mais plutôt un changement de perspective : aspirer, aujourd’hui et toujours, à être une bouchée indigeste, sans tomber dans la paranoïa de voir une omniscience et une toute puissance du pouvoir, là où souvent il n’y a pas de stratégie générale, mais un enchevêtrement informe d’intérêts de carrière qui rentrent en contraste et de directives imparties à des fonctionnaires plus ou moins zélés.

Il ne faut pas oublier le facteur humain, même dans sa forme la plus amoindrie, telle un gratte-papier de commissariat, qui, volant et déformant des morceaux de nos vies, nous montre un large panorama de la misère de son existence.

Commençant par la fin : de l’association à l’incitation et vice-versa

Avec la notification de la clôture du dossier, en avril 2017 – pour les personnes arrêtées et les autres inculpés de septembre 2017 – en plus des délits dont ils sont déjà accusés, a été ajouté, pour 12 des premier 17 inculpés, celui du 414 C.p. (incitation à des crimes et délits) avec finalité de terrorisme, en tant que rédacteurs et/ou diffuseurs de Croce Nera, le bulletin en papier et le blog, en se référant explicitement à des publications et articles du n° 0 au n° 3. Signe des temps, le délit d’incitation est aggravé « pour avoir commis les faits à travers des instruments informatiques et de télécommunication».

De plus, le 2 juin 2017, avec un timing assez parlant par rapport à l’audience préliminaire du 5 juin, l’effet boule de neige de la répression a mené avec soi aussi 7 autres compagnons, inculpés comparaissant libres pour 270 bis [association à finalités de terrorisme ; NdAtt.] et 414 C.p., puisque rédacteurs (ou pas) de Croce Nera, du blog RadioAzione et de Anarhija.info, en plus d’accuser 2 de ces derniers de 280 C.p. [acte de terrorisme avec des engins pouvant causer la mort ; NdAtt.], à cause de la découverte, lors des perquisitions de septembre 2016, avec d’autres textes publiés sur Croce Nera, d’une copie de la revendication de l’attaque contre le tribunal de Civitavecchia, en janvier 2016, par le Comité pyrotechnique pour une année extraordinaire – FAI/FRI. Lors de l’audience préliminaire, les deux volets de l’enquête ont été fusionnés et tous les compagnons ont été envoyé à un jugement, laissant inchangés les différentes accusations. Après presque une année de contrôle obsessionnel (avec blocages et séquestrations systématiques du courrier des prisonniers, passé directement dans les dossiers du Parquet et ajoutés aux actes lors de l’audience préliminaire) et surveillance de la solidarité, le Procureur et la police ont réussi à sortir une mesure punitive, contre les compagnons qui ont maintenu le contact avec les prisonniers et poursuivi l’activité éditoriale.

Le fait d’utiliser ensemble les articles 270bis et 414 C.p. est en train de devenir habituel dans leurs stratégies, si on regarde ce qui a été fait avec le procès Shadow à Pérouse et l’emploi qu’on voudrait en faire dans ce procès.

Sans oublier l’intensification, ces derniers années, de l’utilisation « seule » du 414 C.p., sans l’employer en tant qu’accompagnement des accusations d’association, pour frapper tout écrit qui « défende » l’action anarchiste, tel un outil malléable destiné à étouffer les flammes des mots et des actions solidaires.

Il faut par ailleurs dire que les petites combines des flics n’ont impressionné personne.

Papier recyclable…
…la structure de l’enquête

Peut-être que les écrits restent, mais avec Scripta Manent le parquet et la DIGOS de Turin n’ont vraiment rien voulu jeter. Ils ont ressorti du cimetière des vieilleries des procès passés et classés, les mâchant et les recrachant, 20 ans de surveillance et de répression :

  • le procès ORAI (appelé aussi procès Marini, enquête menée par le ROS, Rome) de 1995 ;
  • l’enquête sur l’attaque contre Palazzo Marino [le siège de la Mairie ; NdAtt.] à Milan, de 1997, par Azione Rivoluzionaria Anarchica ;
  • l’enquête sur Solidarietà Internazionale (par le procureur Dambruoso, enquête menée par la DIGOS, Milan), classé en 2000 ;
  • l’opération Croce Nera (proc’ Piazzi, menée par le ROS, Bologne), qui avait mené en taule, en 2005, les rédacteurs de l’époque de Croce Nera, classée en peu de temps;
  • l’enquête sur un colis incendiaire envoyé au commissaire en chef de Lecce en 2005, signé Narodnaja Volja/FAI ;
  • l’enquête sur l’attaque contre la caserne des Carabinieri de Fossano et les colis incendiaires signés FAI/RAT [Rivolta Anonima e Tremenda ; NdAtt.], de 2006 (proc’ Tatangelo, ROS, Turin), classée en 2008 ;
  • l’enquête sur les colis incendiaires et l’attaque dans le quartier turinois de Crocetta, en 2007, signés FAI/RAT (proc’ Tatangelo, DIGOS, Turin), classée en 2009 ;
  • l’opération Shadow (proc’ Comodi, Digos, Turin) commencée en 2009 pour 270bis [association à finalité de terrorisme ; NdAtt.], 280 [acte de terrorisme avec des engins pouvant causer la mort ; NdAtt.], terminée en 2016 avec des condamnations pour 414 C.p. Pour le bulletin KNO3 et 2 condamnations pour un vol de voiture et une tentative de sabotage d’un chemin de fer ;
  • opération Ardire (proc’ Comodi, ROS, Pérouse), commencée en 2010, avec 8 personnes envoyées en détention préventive en 2012, le dossier a été versé dans son intégralité dans celui de Scripta Manent, pour passage et compétence territoriale, d’abord à Milan, ensuite à Turin ;
  • les enquêtes Kontro, Replay, Sisters, Tortuga (proc’ Manotti, ROS, Gênes), sur les attaques contre les casernes des Carabinieri de Gênes, le R.I.S. [Reparto Investigazioni Scientifiche , la « police scientifique » des Carabinieri ; NdAtt.] de Parme en 2005 et d’autres attaques ;
  • les enquêtes Evoluzione et Evoluzione II (procureurs Musto et Milita, ROS, Naples), commencé en 2012 avec l’attaque contre Adinolfi, puis qui « évoluent » dans la surveillance des blogs RadioAzione et RadioAzione Croazia ;
  • l’enquête Moto (proc’ Franz et Piacente, ROS, Gênes), qui a mené en 2012 à l’arrestation de Nicola Gai et Alfredo Cospito ;
  • l’enquête sur le colis piégé contre Equitalia (proc’ Cennicola et Polino, DiIGOS, Rome) de 2011, rouverte en 2014 ;
  • l’enquête sur l’attaque contre le tribunal de Civitavecchia et les cocktail Molotov contre la caserne des Carabinieri de Civitavecchia, en 2016 (proc’ Cennicola, ROS, Rome).

Cette longue liste a été faite en lisant en diagonal la table des matières [du dossier Scripta manent ; NdAtt.] – oubliant sûrement certaines choses – sans lister les autres surveillances et les fichiers passés d’une enquête à l’autre, d’une préfecture à l’autre, souvent source de batailles pour en avoir la compétence territoriale, à travers les combines rendues possibles par la formulation du délit associatif.

La stratégie qui est derrière tout cela est assez visible et la pile de papier, même si contradictoire, devient suggestive. Considérant que sont injectés dans les dossiers de Scripta Manent

presque en entier les actes des procès listés ci-dessus, en plus des foutaises du binôme Sparagna/DIGOS de Turin, ça fait 206 et quelques classeurs d’actes judiciaires.

Fichage et écrémage : des centaines de noms et de CV, d’épisodes de subversion quotidienne qui sont fichés, sectionnés et recomposés ad hoc. Aux trajectoires existentielles, aux fragments de discussions et aux journaux publiés se superposent des interprétations (discordantes selon le contrôleur de service), des acrobaties spatio-temporelles, des études comportementales dignes de Lombroso. Ce n’est pas la première fois que cela arrive, tout comme la bien rodée tentative de division entre « gentils et méchants », et la définition de la presse anarchiste comme «clandestine » et préparatoire à l’ « association ».

Souvent il arrive, et je le fais moi-même, qu’on fasse de l’ironie sur les grosses ficelles et les contradictions évidentes dans les dossiers judiciaires ; on oublie cependant qu’il y a en cela une consciente arrogance du pouvoir.

Au delà des résultats, grands ou petits, l’appareil répressif est bien conscient de la latitude que ses opérations d’anti-terrorisme lui donnent. Surveiller et punir… surveillance approfondie sur contacts, réactions, tentatives de pression sur la « tenue » et l’ampleur de la solidarité, longues détentions préventives…

Je crois cependant que les analyses qui veulent voir la répression contre certains secteurs du mouvement comme un laboratoire où tester des techniques répressives qui seront ensuite élargies à d’autres plus larges secteurs sociaux sont myopes et erronées. Il y a de la présomption paternaliste, bien que naïve, là dedans, en plus de la tentative de trouver du consensus, à travers le ciment de la lutte contre la répression, dans la dissension tiède de ces années.

L’emploi de la carotte et du bâton, au contraire, est bien plus articulé et sournois.

Le pouvoir n’a pas besoin de tester in vitro, sur les anarchistes, la répression ; tout simplement il utilise contre les anarchistes un petit peu de la violence déployée de façon bien plus féroce ailleurs : l’État ne se soucie guère d’entraîner des bandes de mercenaires armées pour défendre ses frontières et ses intérêts, de noyer tous les jours des milliers d’être humains, d’utiliser les éloignements de son territoire pour des simples délits d’opinion (il suffit de cliquer sur la page du premier débile d’intégriste religieux du 21ème siècle pour finir bâillonné sur le premier vol).

La répression élargit, pour l’instant, des punitions bien différentes et elle est bien consciente d’où elle peut s’élargir de façon aveugle, avec une couverture médiatique ample et asservie. Sans oublier que même dans les secteurs du mouvement les peines « exemplaires » ne manquent pas.

Souvent il arrive que les compagnons sont plus attentifs et conscients face à la répression. Ce n’est pas un hasard si c’est dans le mouvement qu’il y a le plus d’attention envers l’évolution des techniques de fichage, contrôle, surveillance massive et de celles de manipulation du consensus.

Psycho-anthropologie de commissariat

Dans un cadre d’accusation où tout est fondé sur des déductions/spéculations, on bricole des doses massives d’étude comportementale afin de donner une logique à tout cela. La conscience de l’invasive et omniprésente surveillance policière – et le fait de s’y soustraire – deviennent significatifs en soi.

Il y a des pratiques courantes dans les milieux du mouvement, des pratiques qui sont même diffuses socialement, pour les raisons les plus différentes : parler de façon évasive au téléphone ou encore l’utiliser de façon limitée, pas de la manière compulsive comme le voudrait le guide du parfait citoyen-consommateur ; faire attention aux filatures ; chercher micros et caméras chez soi, dans sa voiture et dans son lieu de travail ; faire attention à la surveillance des télécommunications, juste pour donner quelques exemples.

On connaît aussi depuis des années les interprétations opportunistes des flics en ce qui concerne les rencontres avec des amis et compagnons et de la participation aux moments rassemblant du mouvement : selon le jugement sans appel du voyeur de service, on est trop ou trop peu présent. On connaît aussi la passion des pandores pour prendre toute activité, voyage ou petite excursion, comme une « rencontre entre complices » (l’excès de zèle des roussins piémontais est arrivé jusqu’à prendre forme dans de longs vidéo-reportages à la plage, en Ligurie à la mi-août, avec des allers à la nage jusqu’à la bouée qui sont devenus des « rencontres réservés »).

Maintenant, dans l’intersection parfaite entre psycho-police et comédie à l’italienne, c’est l’absence qui devient évocatrice : absence physique, absence d’appels téléphoniques et de contacts. Cela n’est pas lié, dans la thèse accusatrice, à un événement ou une action particulière, mais [ce qui est évocateur pour la police ; NdAtt.] est le fait même de se soustraire au contrôle, plus précisément le fait de pas être surveillé pas à pas, et ce n’est pas clair si cela dépend de la volonté des personnes surveillées ou de l’évidente incapacité de ceux qui surveillent.

Trop d’ironie ? Peut-être, vu que la réalité est faite d’une surveillance obsessionnelle et inquiétante qui ne recule face à rien : perquisitions improvisées pour cacher l’intervention sur des micros cachés à la maison qui ne marchent pas bien, surveillance et radiographie de la poste, avec prélèvement des colis directement dans les boites aux lettres ou aux bureaux de poste, copies des clefs pour entrer dans les lieux de travail à l’insu des personnes sous enquête, caméras cachées dans des lieux publics considérés comme « objectifs potentiels ».

Voici quelques exemples d’une application assez dense de la surveillance, en plus des méthodes plus traditionnelles : téléphones sous écoute pendant des années, micros à la maison et sur les lieux de travail, GPS dans les voitures, caméras qui pointent sur l’entrée de la maison, de la cave, du lieu de travail, contrôles croisés des appels téléphoniques et positionnement géographique des portables, filatures avec photos et vidéos, interception des mails et écoute via les micros des ordinateurs.

Puis, toujours pour rester dans l’illusion technologique et pseudoscientifique du nouveau millénaire, un épanouissement de statistiques, diagrammes, pourcentages, croisement des données les plus curieuses : combien de fois les personnes sous enquête se sont vues tout au long des années (… même chez elles, entre membres de la même famille ou personnes qui vivent ensemble, et même lors des procès qu’elles ont subi ensemble) et combien de fois se sont rencontrés… leurs téléphones ; quels jours de la semaine arrivent le plus de colis piégés ; quelles villes sont les plus touchées par des attaques ; quels mots utilisent de préférence les anarchistes… mais là on dépasse l’étude sociologique statistique et comportementale et on va vers un autre pilier de tribunal…

La suggestion d’une expertise

Dans cette affaire, ce qui est frappant c’est une évidente technique de rafistolage, pour coller des délits précis à certains inculpés. Pour donner corps aux suppositions de l’accusation, il y a une utilisation massive d’expertises graphiques, linguistique-stylistique, afin d’attribuer à quelques inculpés la rédaction de certains textes de revendication.

Expliqué de cette façon, cela pourrait paraître une chose sérieuse (et c’est le cas quand cela sert comme excuse de détentions préventives), mais quand on creuse une expertise moderne, qui utilise la technologie et l’esprit humain, on peut en revanche voir à quel point les méthodes utilisées sont douteuses et malléables à souhait et les résultats aléatoires.

D’un côté on voit bien le choix de continuer, en ignorant en connaissance de cause les résultats qui contredisent la thèse choisie, du coup les comparaisons qui mènent à des résultats négatifs sont ignorées et on charcute les textes pour les adapter à ce qu’on cherche. Des mots d’usage commun ou propres au langage politique-poétique anarchiste deviennent caractérisants, à un point que dans ce paroxysme de correspondances il y a plein d’attributions… c’est à dire qu’il en sortent des plus disparates, qui vont même au delà des accusations.

La machine de la répression est bien consciente de l’inconsistance de certaines comparaisons et expertises – et l’admet elle-même –, mais elle est également consciente que l’utilisation de l’ADN et d’autres expertises techno-scientifiques a été refourguée à l’opinion publique comme une technologie sûre et incontestable, telle qu’on essaye de l’utiliser en tribunal. En réalité les exemples d’erreurs de manipulation ou d’approximations sont nombreux (et même la jurisprudence est désormais obligée de l’admettre, après les premières années d’utilisation « acritique » de toute trace biologique). On peut en voir des exemples récents à travers le monde, dans des procès contre des compagnons.

De cette cueillette compulsive de matériel et des confrontations croisées on peut cependant déceler quelques informations sur leur récolte et utilisations systématiques.

Le DAP [Dipartimento Amministrazione Penitenziaria, correspond à l’Administration Pénitentiaire française ; NdAtt.] s’offre comme source, en plus de photos signalétiques et d’empreintes digitales, aussi d’autres traces d’emprisonnements passés, fournissant des fichiers personnels et des traces graphiques de tous les anarchistes qui sont passés par la case prison, sortant de ses archives même le courrier, les instances judiciaires, les demandes à l’administration, etc. S’il n’y a pas eu d’arrestation ou de perquisition, ils arrivent même à les chercher dans les archives municipaux.

Depuis plus de dix ans, ils utilisent plusieurs bases de données d’ADN, nourries pas seulement avec les affaires embarqués lors des perquisitions, mais aussi en conservant des échantillons et en faisant des comparaisons croisées des pièces à conviction en possession des différentes archives [policiers et/ou judiciaires ; NdAtt.].

* * *

Ceux que je viens de décrire ne sont que quelques-uns des aspects, à développer et sur lesquels réfléchir. Ce qui reste est le fait que, dans un cadre où les procédures répressives sont des vases communicants, l’absence [de contrôle ; NdAtt.] devient une raison d’être accusé, la solidarité est une preuve aggravante et si l’opération Scripta Manent visait à frapper quelques anarchistes, elle a en revanche participé à faire grandir la solidarité et la conscience et cela, tout compte fait, malgré le tout petit bout de ciel que je peux voir en ce moment, ne peut que me donner le sourire.

 

Anna
Roma, janvier 2018

*****

Pour écrire à Anna et aux autres compagnons actuellement en prison suite à l’opération Scripta manent :

BENIAMINO ANNA
Casa circondariale Rebibbia Femminile
Via Bartolo Longo, 92
00156 – Roma

BISESTI MARCO
Casa circondariale
Strada Statale per Casale, 50/A
15121 – Alessandria

NICOLA GAI
ALFREDO COSPITO
DANILO CREMONESE
ALESSANDRO MERCOGLIANO

Casa circondariale
Via Arginone, 327
44122 – Ferrara

Berne, Suisse : Visite chez deux responsables du futur camp pour migrants de Chevrilles – 28 mars 2018

Pas de profit avec l’enfermement des réfugiés !

Le 2 avril 2018 sera inauguré un nouveau camp fédéral à Chevrilles. Il servira de camp de rétention et d’expulsion et sera le premier du genre à avoir cette fonction. C’est pourquoi il est aussi appréhendé comme un test. A l’avenir, des gens vont être enfermés dans ce camp fédéral puis expulsés sous la contrainte.

Afin que l’État puisse mener à bien sa politique raciste, il a sans cesse besoin d’entreprises privées et de personnes qui planifient, coordonnent et exécutent ses commandes. Le 28 mars au matin, nous avons rendu visite à deux des principaux profiteurs responsables, W2 Architekten et Toneatti Engineering AG, en engluant leurs serrures et en décorant leur façade.

W2 Architekten ont déjà été attaqués avec de la peinture au cours du mois de mars 2017. L’explication suivante a été publiée en même temps et nous aimerions la reprendre et nous solidariser de cette action :

W2 Architekten à Berne ont décidé de gagner leur sale thune par la restructuration du camp d’expulsion de Chevrilles. Ils profitent d’un système d’asile qui enferme, isole et expulse les gens. Dans l’arrière-pays reculé de Fribourg, des gens n’ayant pas de permis de séjour en règle vont être enfermés et détenus jusqu’à leur reconduite à la frontière par la police et les services à l’immigration

Toute la restructuration du système d’asile vise à rendre les procédures plus rapides et plus efficaces, dans le but d’expulser les « réfugiés » dits « économiques » le plus vite possible. En concentrant et en isolant les sans-papiers dans de grands camps, les autorités savent en permanence précisément où ils se trouvent pour pouvoir leur mettre rapidement le grappin dessus au moment du rendu de rejet de demande d’asile. Afin d’arriver à ce stade, ce nouveau camp sera construit comme une prison – avec clôtures, barbelés, contrôles à l’entrée, fouilles au corps, règles strictes, menaces de sanctions et de manière générale surveillance constante effectuée par les boîtes de sécurité ORS et Securitas.

Nous sommes en faveur d’un monde sans frontières ni nations, où tous les gens peuvent circuler librement et s’entraider, plutôt que de se définir vis-à-vis des autres sur des critères nationalistes.

En allant dans ce sens, nous voyons la nécessité de combattre ceux qui amassent des millions sur le dos des réfugiés. Rendons ces accords répugnants avec le système d’asile visibles. Faisons en sorte qu’ils soient cher pour les profiteurs du secteur privé tout en nuisant à leur réputation.

Pour un monde sans domination !

Salutations solidaires dans toutes les taules et toutes les planques !

 sans attendredemain  a raduit de l’allemand de Barrikade.info, 28. März 2018]

Quelques précisions sur les perquisitions à Toulouse et à Limoges : un inculpé en détention provisoire

sans attendre

Le 27 mars à Toulouse, deux personnes sont placées en GAV pour l’attaque incendiaire de la gendarmerie de Limoges au cours d’une nuit de septembre. Elles ressortiront après 36 et 38h de détention sans mises en examen. Au même moment à Limoges, une personne est elle aussi placée en garde à vue. On apprend ce dimanche 1er avril que la personne de Limoges a été placée en détention provisoire pour un an renouvelable. Le lendemain, à Ambert (Auvergne), deux autres personnes ont été mises en examen et écrouées pour une durée de 4 mois renouvelable deux fois. On ignore pour l’instant s’il s’agit de la même affaire que pour les perquis’ de la veille dans le sud-ouest.


Récit partiel de deux perquisitions à Toulouse, et d’une visite non choisie de la ville de la porcelaine.

6h00 du mat’, le 27 mars 2018, les gendarmes débarquent dans deux maisons toulousaines. Il y a là différentes unités : entre autres, les sections de recherche de Toulouse et de Limoges, ainsi que leurs PSIG associés (pelotons de sécurité et d’intervention de la gendarmerie). Ce qui va être pris au long de cette longue matinée, c’est du matos informatique, des carnets, de l’argent, des téléphones, mais aussi des caleçons et des taies d’oreiller, pour l’ADN. Surtout, deux personnes sont embarquées. Après un passage éclair à la gendarmerie de Balma, départ pour Limoges, où les personnes sont présentées à la juge d’instruction. Celle-ci leur signifie que leur garde à vue est reconduite jusqu’au lendemain. Chaque personne sera retenue dans une gendarmerie différente, à quelques kilomètres de Limoges. Dans le même temps, une personne de Limoges subit sensiblement le même scénario.

Il est annoncé aux personnes de Toulouse qu’elles sont retenues dans le cadre d’une enquête pour association de malfaiteurs en vue de commettre un crime et des dégradations en relation à des faits ayant eu lieu dans la nuit du 18 au 19 septembre 2017 à Limoges. Elles resteront 36 et 38 heures en garde à vue, auditionnées longuement sur leurs positionnements politiques et leurs fréquentations. Ces deux personnes sortiront sans mise en examen. Néanmoins, la personne de Limoges reste en GAV. Nous savons que d’autres perquisitions et arrestations ont eu lieu le mercredi matin à Ambert, et que les personnes ont été placées en détention provisoire pour 4 mois renouvelables deux fois. On ne peut affirmer un quelconque lien entre ces événements à l’heure actuelle.
Au vu de ce qui a été dit, on peut supposer qu’il y eu des écoutes et des filatures depuis plusieurs mois, dans le cadre d’une instruction, suivie d’une commission rogatoire, ouverte le 20 octobre 2017 et renouvelée le 13 décembre 2017 (13.12…). Gageons que cette surveillance ne concerne ni les seules personnes auditionnées, ni ces seules villes.

Derrière l’appellation floue d’association de malfaiteur-rice-s, il apparaît que l’Etat cherche à criminaliser des liens entre des gens, des lieux fréquentés, des modes d’organisation, idées politiques et pratiques. C’est là un éventail large qui peut être constitué en faisceau de suspicion : manger dans un squat, utiliser des listes mails sécurisées, participer à des actions, organiser des rencontres, faire du sport ensemble, communiquer, se déplacer. Et même faire des pâtes au fromage.

Il est important de repréciser nos solidarités, et de continuer à lutter, à tenir pour déjouer les stratégies judiciaires.

Toutes malfaiteurs,
Adhérons à l’association!

[Publié sur iaata.info, dimanche 1er avril 2018]

Solidarité avec la CNT de Lyon attaquée par des fascistes

[reçu par mail]

Dans la nuit du 30 au 31 mars le local de nos camarades de la CNT Lyon a été attaqué par des fascistes, grille arrachée, vitre brisée, vol de matériels militants, tentative de destruction du rideau de fer. Depuis de nombreux mois les agressions et les attaques fascistes se succèdent dans les rues de Lyon dans une impunité totale, la CNT de par son engagement contre l’extrême droite et notamment pour la fermeture du local fasciste, bastion social, se retrouve à son tour attaqué. Il y a quelques mois, c’était le local de la CGA, quelques centaines de mètres plus loin, qui en faisait les frais.

Nous apportons tout notre soutien à la CNT lyonnaise et condamnons fermement cette énième attaque fasciste.

Face aux nervis d’extrême droite et leurs idées nauséabondes, attaquons !

Fédération Anarchiste

Publication: mars 2018, Interventions #13 Grève et “besoin de grève”

Le mouvement du Tous ensemble de 1995 a été la dernière représentation d’une lutte collective au-delà de la stricte perspective classiste, mais sans qu’affleure une tension vers la communauté humaine puisque le mouvement est resté centré sur la défense de la condition salariale à travers le refus de la réforme de la Sécurité sociale, pilier du mode de régulation fordiste des conflits de classes. Si référence communautaire il y eut, ce n’était que celle de la communauté du travail encore soudée, tant bien que mal, par la conscience ouvrière d’une réciprocité dans l’échange charges/cotisations sociales et sa sécurisation dans le cadre d’une gestion par des organismes paritaires incluant les syndicats de salariés.

C’est ce modèle — ou du moins ce qu’il en reste — qui est à nouveau attaqué aujourd’hui avec l’augmentation de la CSG, mais avec beaucoup plus de difficultés pour s’y opposer puisque le rapport social capitaliste n’est plus aussi dépendant du rapport capital/travail pour sa reproduction et sa valorisation. C’est la notion même d’échange cotisations/prestations sociales qui ne fait plus sens immédiatement, ni pour les patrons ni pour une population active qui a largement perdue trace de son origine ouvrière et dont une fraction composée des entrants non qualifiés sur le marché du travail, des chômeurs découragés, des “indépendants” ubérisés, se trouve exclue ou tenue en lisière de cet échange. En effet, le processus d’inessentialisation de la force de travail — c’est-à-dire le fait que l’exploitation de la force de travail n’est plus au centre de la valorisation du capital — vient désormais bouleverser l’ensemble du “système-salariat”, clé de voûte pourtant de la dynamique capitaliste depuis bientôt un siècle, en Europe de l’Ouest tout du moins.

Ce n’est donc pas un hasard si les retraités se sentent atteints ; ils le sont certes dans leur porte-monnaie, mais aussi parce qu’ils ont l’impression d’une fin de partie et d’être les derniers des Mohicans.

Par ailleurs, mais de manière complémentaire, c’est la notion de « service public » qui a son tour ne fait plus sens car si ces services publics existent encore, même sous un statut privatisé pour tout ou partie d’entre eux, ils ont été vidés de leur ancienne mission d’administration étatique des biens et des services nationaux ce qui fait que plus personne, en dehors de leurs agents, ne peut les défendre. “L’opinion publique” n’en perçoit plus que les dysfonctionnements (retard des trains, attentes dans les hôpitaux, non-remplacement des maîtres et surcharge relative des classes, inscriptions chaotiques à l’université, problèmes récurrents de suivi à la Poste).

C’est le cas pour la sncf. Le statut spécial était non seulement le fruit des luttes de classes, mais aussi celui d’une fonction collective de certaines entreprises et de ses agents dans le procès de reproduction des rapports sociaux. Or, c’est cette dernière fonction collective qui devient caduque avec la mise en concurrence des différents réseaux de transport et avec lui le régime spécial qui lui était afférent dans un contexte monopolistique.

Il s’ensuit que la “défense des acquis” perd aussi son sens puisque ces acquis n’apparaissent plus comme cumulables et universels (le droit du travail s’appliquait à tous, les conventions collectives réalisaient une harmonisation par le haut), mais au contraire comme conjoncturels et particuliers. Dans le moment politique actuel, que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public, l’État impose une dépolitisation des luttes. Il n’y a plus d’ennemis au couteau entre les dents avec un parti communiste réduit à peau de chagrin et des salariés qui ne demandent que le maintien du statu quo. La demande de plus d’État qui apparaissait encore clairement en 1995 semble moins nette aujourd’hui. L’élection et la relative popularité de Macron tiennent justement à l’ambivalence qu’il renvoie sur le rôle de l’État, dans sa forme réseau ; une ambivalence largement partagée dans la population.

L’heure est donc à la gestion de ce qui n’apparaît plus que comme des différends d’ordre privé parce qu’ils ont perdu leur légitimité sociale de lutte dans la société capitalisée. Les grèves des années 1960 à 1979 (la grève de la sidérurgie française, des ouvriers de Fiat ou des mineurs anglais fermant le ban) ont ainsi été les dernières grèves “légitimes” de la société de classes, légitimes pour la classe dominante, même si cette légitimité était reconnue à contrecœur ; légitimes pour les salariés aussi, même quand il ne s’agissait pas de leur propre grève (rappelons-nous le soutien aux salariés de Lip des années soixante-dix ; le sens du “Tous ensemble” de 1995 et les “grèves par procuration”).

C’est ce qui change dans la société capitalisée d’aujourd’hui où la grève n’a plus aucune légitimité ni pour les patrons qui, globalisation et mondialisation obligent, hurlent à la mort de leur compétitivité, ni pour l’État qui dénonce le corporatisme des grévistes (cf. la réforme des statuts spéciaux et de la sncf), ni pour les salariés qui récriminent contre leur “prise en otage” par les grévistes, ni pour les chômeurs et précaires qui envient des salariés garantis car ils ont bien de la chance de…

La fonction syndicale ne fait plus médiation parce que la société capitalisée a absorbé l’ancienne société civile. Quand le syndicat existe encore, c’est en tant que puissance qui participe directement au niveau I de la domination, celui de l’hyper-capitalisme, comme c’est le cas en Allemagne, au Danemark ou en Suède et c’est à partir de cette puissance qu’il peut revendiquer et négocier au niveau II de la nation ou de la région comme tente de le faire le syndicat de la métallurgie allemand pour la baisse de la durée du travail. C’est ce qu’avait compris depuis longtemps un syndicat comme la cgt-fo, mais son problème actuel est de diriger par le haut des organismes paritaires devenus tendanciellement obsolètes. C’est ce qu’a compris aussi la cfdt depuis son recentrage et la ligne initiée par Nicole Notat. Prendre en compte la crise du travail et du salariat et donc la nécessaire réforme de la Sécurité Sociale (financement par l’impôt, cmu, etc.), la réforme du contrat de travail pour assurer la flexisécurité, tout ça n’a pas besoin de passer par la mise en scène syndicale (type cgt) de la conflictualité de classe. On peut en faire l’économie. C’est du moins ce que pense Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale quand il déclare au journal Le Figaro, (19 mars 2018) : « On n’a pas besoin de grève en France ».

Le conflit est donc mis hors jeu et la médiation n’a plus lieu d’être ou, plus exactement, la médiation se fait médiateur, gestionnaire d’intermédiaires, et tout conflit est perçu comme résultant d’un défaut de communication dans une société capitalisée qui se conforme au modèle du réseau impulsé par les nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Certes, certaines grèves comme celle dans les ephad semblent dures parce que longues et relativement médiatisées, mais il est difficile de mesurer leur impact effectif car se déclarer en grève ne signifie pas forcément bloquer le fonctionnement de l’institution. En effet, ce blocage nécessite un dépassement de fonction contredisant justement l’éthique du travail qui accompagne l’idée de service public ou diverses formes de “travail social”.

À la sncf, la ligne de démarcation semble passer entre une base qui pousserait à la grève reconductible coup de force et des syndicats qui penchent pour une grève perlée plus économe financièrement, moins bloquante, mais plus désorganisatrice peut être dans la mesure où elle rendra plus difficile la réquisition des cadres et des “jaunes”. Mais l’essentiel ne nous paraît pas être cette opposition si elle est prise comme opposition entre deux positions de principe, mais plutôt de savoir comment le rapport de force sur le terrain détermine ce qui pourrait rendre ces actions à la fois offensives et effectives. Indépendamment des présupposés politiques qui peuvent opposer d’une part, des militants prêts à prendre des positions maximalistes et de l’autre des syndicats tenus par la nécessité de ne pas élaborer de stratégie en dehors du cadre de la recherche d’une négociation, c’est bien la volonté d’aller à la bagarre qui doit être le critère de vérité de la stratégie de lutte à adopter. C’est-à-dire qu’avant même de parler en termes de rapport de forces, il faut recenser et apprécier comment le mécontentement se transforme de la récrimination en colère ou révolte ; en force, avant même d’apprécier le rapport de forces et donc la conduite à suivre.

 

Temps critiques, le 22 mars 2018

Paris : Le véritable problème en prison, c’est la prison

non fides

A travers l’écoute d’un document audio (22 mn) réalisé à partir d’une lettre anonyme d’un détenu qui nous invitait à « visiter » la prison de la Santé à Paris, en 2011, nous proposons de discuter des conditions de détention actuelles en France, au moment où les matons font entendre leurs complaintes assourdissantes de geôliers qui voudraient que leur activité mortifère se déroule en toute sérénité ; et alors que, depuis des décennies, l’État prévoit sans cesse de nouvelles places de prison et construit les bâtiments high tech qui vont avec cette bonne gestion. Un enfermement qui sert à la fois de menace et de punition pour une partie de plus en plus nombreuse de la population.

 

Discuter des conditions de détention n’a pas pour objectif ici d’envisager la nécessité d’une réforme de la carcérale, mais d’appréhender ce qui fait de la prison ce qu’elle est dans la vie quotidienne : la punition par l’enfermement. Réfléchir à ce dont est faite la vie en prison, c’est se rendre compte à quel point ces conditions de vie sont déterminantes et ont une incidence sur les révoltes individuelles ou collectives, sur la présence ou l’absence de mutineries. Parler de la réalité de ce que fait l’enfermement à la vie, au temps qui passe, aux relations avec les codétenus à l’intérieur, avec les proches à l’extérieur, c’est à la fois comprendre le rôle et la place de l’enfermement dans le monde qui le produit, mais aussi comprendre son fonctionnement et ses codes, tenter d’appréhender comment y survivre, s’y organiser, comment maintenir le contact avec l’extérieur et, alors que l’enfermement judiciaire ou administratif ne cesse de se généraliser, c’est aussi se mettre en mesure d’y faire face.

Cette discussion sera aussi une occasion de parler de l’actualité chaude des prisons françaises : grève des matons, révoltes de prisonniers, essor de la haute sécurité conjointement à la mise en place de ces mesures «  alternatives  » à l’enfermement qui, loin de diminuer le nombre de prisonniers, sont toujours là, en fait, pour enfermer autrement, de mieux en mieux, et de plus en plus.

« La prison existe parce qu’une société a besoin d’elle pour injecter la peur qui la maintient et je ne vois pas bien comment on pourrait s’attaquer à la prison sans en finir avec le monde qui la produit et en a besoin, et vice-versa. Je ne vois pas bien non plus à quoi peut servir de lutter pour des prisons « plus humaines », ou des « alternatives  » à la prison quand le réel problème transcende si largement la simple question de la prison et se retrouve dans tous les aspects de la société : le principe même de domination et d’autorité. Nous voulons recouvrer notre liberté, mais dehors non plus nous ne sommes pas libres. C’est parce que je suis pour la destruction des prisons que je suis révolutionnaire, c’est parce que je suis révolutionnaire que je suis pour la destruction des prisons. »

Le vendredi 6 avril à 19h aux Fleurs Arctiques.
45 Rue du Pré Saint-Gervais, 75019 Paris
Métro Place des Fêtes (lignes 7bis et 11 du métro)
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Cliquer sur l’image pour lire le texte intégral et/ou les extraits audios.

[Repris du blog des Fleurs Arctiques.]