Archives mensuelles : juillet 2018

Zadissidences 2 – Des voix off de la ZAD – 1ere vague d’expulsions (Avril 2018)

Tu tiens dans tes mains le deuxième numéro de ZADissidences. Il est en deux parties pour pas être trop gros à diffuser, divisé entre la première et la deuxième vague d’expulsions. L’idée est ici de continuer à compiler des textes qui causent de la zad, critiquent la tendance dominante dans le mouvement de lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et tentent d’enrayer ses pratiques autoritaires et réformistes.

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Plus précisément, nous voulons participer à diffuser des voix de ce mouvement qu’on entend moins et qui refusent les choix et les visions politiques d’une partie des occupant·e·s, notamment celle qu’on entend beaucoup et qui depuis quelques mois préfère se nommer « habitant·e·s », (comme pour se défaire d’un costume devenu gênant). Ces con?its ne sont pas nouveaux, l’abandon du projet n’a fait qu’ampli?er ce qui était déjà la direction prise depuis des années par quelques occupant·e·s en alliance avec les « composantes », direction qui en déjà fait fuir plus d’un.e depuis longtemps.

Zad dissidences 1 concernait la période allant de la « victoire » de mi-janvier et s’arrêtant au tout début des expulsions-destructions de début avril 2018. Celui-ci relate ces deux mois d’assauts et d’occupation militaires de la zad, avec en parallèle les nombreux rebondissements démocrates, des négociations aux « fiches ».

Nous avons écrit ces lignes dans un contexte de « fin d’expulsions » sur la zad, que l’état définissait comme « ciblées », et qui suivent leur cours par vagues plus ou moins annoncées et avec plus ou moins d’intensité. On ne va pas raconter ici dans le détail les expulsions, le siège de la zone, les affrontements, l’asymétrie face au dispositif militaire, entre les lieux attaqués et les lieux épargnés, entre les lieux soutenus et les autres, les destructions de cabanes (plus de 35), les arrestations (plus de 70), les peines de prisons (qui vont continuer à pleuvoir), et les blessés (plus de 300)…

On avait pu entendre la prévision clamée ces derniers mois que le mouvement d’occupation se retrouverait isolé et faible face aux expulsions. Qu’il serait donc suicidaire de ne pas aller négocier, que ce serait se couper du soutien vital des « composantes » du mouvement contre l’aéroport. On a pourtant vu débarquer des centaines de personnes, connaissant la zad ou non, pour la plupart hors de ces fameuses « composantes » dont il fallait tant prendre soin (et qui n’ont pourtant pas hésité à se désolidariser à la première occasion). Ces personnes sont venues sur zone affronter cette situation et faire douter l’état de sa maîtrise. Sa vieille stratégie couplée entre le militaire sur le terrain et l’administratif dans les négociations, et le médiatique pour la population, lui a permis de jouer l’épuisement et la dissociation, de maintenir la menace et la pression tout en sauvant la face démocratiquement. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela a bien fonctionné. Il faudra bien en tirer les leçons.

L’état a donc enfin trouvé comment sortir de son impuissance. Il a vu un tapis rouge déroulé devant lui par une partie du mouvement qui s’est proposée en interlocutrice, en donnant des signes de bonne volonté qu’il a su interpréter à juste titre comme des signes de faiblesse. De la route des chicanes aux fiches de projets individuels, en quelques mois la liste est longue de tous ces pas faits vers la préfète malgré qu’une à une toutes les limites que s’était donné « le mouvement » soient dépassées. Tout ça sans autre contrepartie de sa part, jusqu’à accepter des Conventions d’Occupations Précaires valables uniquement jusqu’à la fin de l’année 2018.

Chose étonnante, alors que la préfecture a finalement obtenu une liste très claire de noms et de parcelles concernées, on constate que le fameux flou du « manteau » l’est surtout pour les occupant·e·s elleux-mêmes. Illes doivent spéculer à partir des articles de la presse locale pour comprendre ce qui se joue, et même pour deviner si oui ou non une fiche a été déposée pour leur lieu, étant donné que cela s’est passé en moins de 48h et parfois sans leur consentement. : « Euh, est ce que tu crois que quelqu’un aurait mis sur une fiche l’endroit où on vit sans qu’on le sache ? Et qui ? Dis, t’as vu, quand même, quatre élevages ovins sélectionnés, y doit bien y avoir les voisins dedans non ? Ben ouais, parce que j’en vois que trois, moi ! Mais alors peut être on est même retenu·e·s pour « l’avenir » malgré nous ? ».

L’« avenir » nous dira ce qui parviendra à « rester », et à quel prix… En attendant, du côté de ce qui se vit sur place, beaucoup n’oublieront pas ces fameux « 6 points » passés à la trappe, les intimidations et dissociations, et tant de promesses non tenues dans le face à face avec les troupes venues éradiquer la partie moins « jolie » de la zad.

Nous choisissons de ne pas attendre un hypothétique « dénouement » pour publier ces textes, parce qu’il nous semble urgent de permettre à chacun·e de se faire sa propre idée de ce qui se passe ici, par d’autres angles de vue que le lyrisme à grands moyens de celleux qui dirigent le navire de « l’avenir dans le bocage ».

Il y a beaucoup à dire sur le processus en cours dans cette fin de lutte. De nombreuses personnes sont arrivées sur la zad ces derniers mois, comme lors de la résistance à l’opération César de 2012. Elles parlent des AG fermées aux dits « soutiens », du mépris d’être reléguées au rôle de « personnes de passage » sans qui pourtant cette zone n’existerait plus depuis longtemps. Elles viennent avec leurs propres perspectives participer ici à la lutte contre le monde de l’aéroport, ce monde qu’elle subissent et combattent déjà depuis longtemps partout ailleurs.

De même pour celleux qui sont ici depuis plus longtemps, les côte-à-côte et face-à-face permanents entre des visions tellement opposées du sens de ce qui se joue ici minent le quotidien, et polarisent comme rarement on a l’occasion de le vivre dans ce monde pacifié à l’extrême.

Certain·e·s trouveront triste de donner tant de place à ce qu’illes préfèrent appeler des « embrouilles internes » et se diront que ça n’a pas vraiment d’importance comparé aux grands enjeux de « l’avenir » de la zad. D’autres sauront y voir la densité des réels conflits politiques que la situation révèle, et chercheront à en tirer des leçons pour d’autres luttes. Déjà beaucoup sont parti·e·s écoeur·é·es, d’autres tiennent le coup vaille que vaille. Il y aura encore tant à raconter et à discuter de cette aventure dans les temps prochains avec celleux qui voudront y donner de la place.

On imagine pas que cette compilation soit lue d’une traite. Les textes ne sont pas écrits du même point de vue et ont chacun leur propre histoire à prendre en compte séparément. Mais on peut sentir qu’ils ont en commun une sorte de rage. Et ces temps-ci, c’est notamment cette rage qui nous permet de nous reconnaître dans la tempête. On a choisi ces textes-là parmi d’autres, sans être nécessairement en accord sur tout. On vous encourage à aller en lire d’autres sur internet.

Le Zadnews, hebdomadaire de la zad, a vécu une période de galère due aux expulsions, tant pour déposer des contributions dans des lieux qui n’existent plus ou avec internet difficile d’accès, que dans le travail de mise en page en équipe très réduite débordée et avec de petits moyens, sans parler de l’impression et de la distribution au milieu du carnage. Une spéciale dédicace à qui l’a fait exister malgré tout. Bon, du coup, même si la plupart des textes sont passés par le Zadnews, on suit plutôt la chronologie de leurs parutions sur internet. Cette fois la parole n’est pas restée sur zone…

Merci encore pour toutes ces contributions, et prenez soin de vous !

Merci de les lire, et tenez bon !

Et ne soyons pas tristes, car tout ce qui a été vécu dans cette lutte, y compris ces derniers mois, continue de nourrir des parcours et des rencontres contre ce monde de merde.

A la prochaine !

 

Sommaire

2. Éditoto

6. Résumé partial des épisodes précédents

8. Quelques définitions

9. Chronologie de la 1ère vague d’expulsions

13. Prise de position de la légal team sur les actions de milice à la ZAD

15. Quand Lama faché, lama cracher !

22. Prise de parole à l’assemblée des usages du 16 Avril 2018

26. Lettre de compassion aux signataires des C.I.

28. Contre les lèche-bottes et leur monde

32. Signe ton formulaire et ferme ta gueule

35. L’Ancre Noire a été expulsée, rien n’est fini, tout commence

37. Communiqué des sans fiche

39. Appel à détruire les routes circulantes de la zad hors période d’expulsion.

41. Face aux attaques de l’état et ses relais internes : guérilla sociale anti-autoritaire !

44. B.D stratégie de l’état et ennemis intérieurs

46. Bibliographie

 

[Repris d’indymedia Nantes, samedi 7 juillet 2018]

Montélimar( 26200) Contre le linky plus d’une centaine de personnes en réunion

montélimar new

L’opposition grandit et devient experte face à un dispositif se révélant nocif et la  continuation du fichage en zone nucléaire, un  tract grenoblois contre linky et son monde ici

Plus d’une centaine de personnes

C’était un vendredi 6 juillet à 19h30, week-end de fin d’école primaire et de début des vacances, Il n’empêche: la rencontre à propos du compteur Linky organisée par le collectif Stop Linky Montélimar a réuni plus d’une centaine de personnes. Un vrai succès qui révèle l’inquiétude, sinon au moins la curiosité, de la population face à cette machine intrusive, inquiétude qui vire en opposition puis colère.
Absence remarquable et remarquée de représentants de la municipalité pourtant propriétaire originelle des réseaux de distribution et des compteurs.
Ce sont les invités Serge Sargentini, de l’association NextUp, et Edouard Raffin, avocat au barreau de Lyon, qui ont informé en détail les Montiliens sur les risques techniques et financiers du Linky ainsi que sur les moyens de s’y opposer.

Angleterre : Infos à propos de l’ancien policier infiltré Mark Kennedy

Ce document veut rendre public des infos de base sur l’ancien policier infiltré Mark Kennedy. Il décrit ses allées et venues, son travail et ses loisirs. Il contient aussi une note sur l’ancienne policière infiltrée ‘Lynn Watson’. Nous espérons qui leur apportera, ainsi qu’à leurs semblables, un sentiment de peur et d’insécurité. Que cela fournisse aussi un bon point de départ à ceux qui voudraient agir à partir de ces informations…

Mark Kennedy a infiltré des groupes et des campagnes anarchistes et activistes entre 2003 et 2010 sous le pseudo de ‘Mark Stone’. À notre connaissance, il était impliqué avec des groupes et individus en Grande-Bretagne, Islande, Allemagne, France, Danemark, États-Unis et Espagne où il a recueilli des informations pour différentes forces de police, parfois de façon non-officielle, parfois en faisant partie d’opérations officielles internationales. Il a continué à exercer des missions similaires pour le secteur privé après avoir quitté la police et a fondé lui-même au moins deux entreprises.

Nous ne tenterons pas de documenter de façon exhaustive ses activités ici, pas d’avantage que nous ne pourrions espérer rendre compte du mal qu’il a fait. Nous ne sommes pas liés aux révélations initiales sur lui ou sur d’autres infiltrés. Des nombreuses informations existent déjà sur le net relatant leurs activités. Parce que les informations et les campagnes concernant ces révélations furent extrêmement problématiques et controversées, nous n’avons pas fait référence à des sites web ici, mais il y a beaucoup de sources sur le net. Cependant, nous encourageons fortement les individus à prendre connaissance de ces informations.

Donc…

Kennedy joue de la guitare dans un groupe de pub rock appelé ‘The Barnstormers’ (hxxxs://www.facebook.com/barnstormerstheband/). Ils jouent occasionnellement à The Anchor Inn sur Bridgewater Road à Bleadon. Ils ont aussi joué à The Ciderbarn (hxxxs://www.facebook.com/ciderbarners/) à Draycott à de multiples occasions. Ses collaborateurs pour ceci sont Lian Simmons, Jacob Monro, Corne van Touder et Tim.

Il a travaillé en tant que responsable des achats pour Darwin Escapes qui gère plusieurs stations touristiques dans le pays. Nous avons des raisons de croire qu’il travaille encore dans leur propriété à côté de Cheddar. (hxxxs://www.darwinescapes.co.uk/parks/cheddar-woods-resort-spa/ & hxxxs://www.facebook.com/CheddarWoods)

Il a été vu en 2017 en train de conduire une Hyundai Tucson gris métallisé avec la plaque HT17AUK. Nous avons des raisons de croire qu’il vit à Worle, une banlieue de Weston-Super-Mare.

Lynn Watson

Nous avons des raisons de croire que l’infiltrée connue comme ‘Officier A’ ou ‘Lynn Watson’ habite à Hull. Voici une photo d’elle : hxxxs://www.theguardian.com/uk/2011/jan/19/undercover-police-officer-lynn-watson

Nous croyons que ces informations ne doivent pas rester la propriété d’une petite minorité qui pense être capable de décider qui doit savoir et qui ne doit pas. Nous demandons à tous ceux qui détiendraient des informations à propos de Mark ou d’autres infiltrés de les rendre public pour qu’il soit possible à chacun d’agir.

Les révélations sur Mark Kennedy ont conduit la police à confirmer l’existence de nombreux infiltrés, par exemple Watson et ‘Marco Jacobs’ (photo ci-contre – hxxxs://bristle.files.wordpress.com/2014/06/marco-jacobs.jpg) qui étaient tous les deux actifs au même moment que lui. Depuis lors, beaucoup d’autres infiltrés ont été grillés. Il y a des cas qui datent de décennies et certains continuent encore. Ils doivent être considérés comme la partie émergée de l’iceberg, les miettes que l’État a choisi de lâcher.
Nous ne sommes pas étonnés par l’utilisation d’infiltrés comme stratégie d’État. Ce serait une erreur de comprendre le cas spécifique de Kennedy comme quelque chose d’unique ou d’extra-ordinaire. Bien sûr, il y a certains traits particuliers mais, malheureusement, ce n’est pas inhabituel. Il a simplement continué une tradition, dans une longue histoire d’individus sans scrupules, qui ont été préparés, formés et employés à envahir et à saper la vie de ceux qui cherchent à remettre en cause le statu quo. Ces individus sont responsables de toutes leurs actions et de tous les ordres et instructions qu’ils suivent ou ont suivi. Nous n’avons aucune sympathie pour eux. Ils sont responsables de leurs décisions personnelles au jour le jour et des dégâts causées aux projets anarchistes et activistes comme des luttes contre des catastrophes environnementales, contre l’exploitation animale, le fascisme, le capitalisme et l’État.

Nous ne cherchons pas de reconnaissance. Nous ne voulons pas d’excuses et ne cherchons pas de justice à l’intérieur ou à l’extérieur d’un tribunal. Nous ne trouvons aucun mérite à révéler la vérité au pouvoir, mais il est important que ces actions aient des conséquences.
Nous nous efforcerons de faire en sorte que leurs vies soient remplies de misère et de constante insécurité. Une vie où ils ne peuvent jamais être sûrs qu’ils ne sont pas observés et où ils ont toujours peur d’être reconnus par quelqu’un qui les déteste. Nous espérons qu’ils ne pourront pas oublier, pour les années qui viennent, les gens qu’ils ont fait souffrir, les vies auxquels ils ont causé du tort et la confiance qu’ils ont rompue.

Le texte anglais en PDF avec des photos : https://en-contrainfo.espiv.net/files/2018/05/Text.pdf

 relayé de sans attendre demain

Une journée ordinaire.

Les instruments sont formels ont se dirigent vers une journée de merde

Chacun  ses idées comme on dit: mais tout de même tous ces drapeaux me tyrannisent. »Si la patrie est l’atelier où j’entrerais  à sept heure du matin pour en sortir à huit heure du soir après n’avoir contribué qu’a la seule aisance de mon patron, non je ne suis point  patriote. Non , la patrie n’est pas la geôle où l’on souffre , où l’on pas de quoi manger, où les huissiers  vous expulserons de votre grabat »Albert Libertad

Produit et producteur de la mondialisation capitaliste, le sport de compétition spectaculaire est aujourd’hui l’horizon planétaire de la modernité libérale. La sportivisation totalitaire de l’espace public renforce non seulement les multinationales de la fausse conscience, mais institue également un ordre social uniforme qui exalte le national-populisme, la guerre sportive généralisée, la fabrication planifiée d’un homme-nouveau, la mobilisation des meutes sportives. Le sport-opium du peuple avec son caractère illusoire, sa massification, ses effets mortifères de masse – dopage, toxicomanies, violences, corruptions – et son idéologie mystificatrice – sport-intégration, sport-culture, sport-éducation, sport-fraternité, sport-pacification – est devenu le Veau d’or de l’unidimensionnalité marchande contemporaine. Contre la machinerie sportive et ses innombrables machinistes qui entretiennent les illusions humanistes de « l’esprit sportif y compris chez les militant·es supposément anti-autoritaires —, dans les conversations de couloir et de comptoir» pour arrêter la vision mécaniste et fonctionnaliste du corps qu’entretient l’idéologie sportive, pour en finir avec l’infinie capacité onirique du sport (rêve-spectacle-identification), pour arrêter la consommation aliénante des produits et pratiques sportives (les marques sportives ainsi que l’identification aux stars du sports). La critique sportive peut se fonder à la fois sur un réalisme écologique (le sport contribue à la construction d’infrastructures agressives et totalitaires, le pétrole dans le sport automobile, le sport-planète télévisuel qui contribue à la mondialisation prédatrice des cultures.)

« En effet, le corps est aujourd’hui l’objet fétiche de la postmodernité libérale. La religion sportive avec son culte de la performance et son obsession de la compétition, mais aussi, bien sûr, les nouvelles pratiques corporelles avec leurs illusions pédagogiques ou thérapeutiques forment une « économie politique du corps  » (J.-M. Brohm)..  , A la conquête du »Graal » » ,A  chaque pas  ils courent   derrière le bonheur.. Le bonheur?


« plusieurs milliers de policiers et gendarmes mobilisés afin d’assurer la sécurité des supporters. » d’après la presse

 

 

Marianne se saoule ! Populo s’amuse!

 

[reçu par mail]]

Léo est parti un 14 juillet, et depuis, comme c’était un copain d’mon papa, bah c’est à lui que j’pense ce jour là, sûrement pas aux guignols qui défilent au pas!
C’est aux anars que j’pense, aux yeux tout doux de Léo, et à tous mes copains qui pissent à raie des militaires et autres cravatés qui viennent nous parler de patriotisme sur fond nationaliste tout pourri!!
Qu’ils aillent se faire foutre et que grandissent les esprits libres, l’amour au poing!!

Virginie

note:Le 1er régiment des Spahis, basé à Valence, défilait à Paris pour ce 14 juillet. 2018

[Mexico]Les autorités pénitentiaires saccagent et détruisent la bibliothèque autonome Xosé Tarrio dans la prison nord . Répression contre le collectif CIMARRON

Les autorités pénitentiaires saccagent et détruisent la bibliothèque autonome Xosé Tarrio dans la prison nord de Mexico. Répression contre le collectif CIMARRON

Depuis le mois de novembre 2017, Fernando Barcenas (qui est sorti de prison le 11 juin dernier) et d’autres prisonniers du collectif Cimarron* lançaient l’idée de mettre en place une bibliothèque autonome gérée par les prisonniers eux-mêmes à l’intérieur de la prison Nord de Mexico. Après plusieurs mois de travail et de construction à l’intérieur, d’organisation et de soutien de l’extérieur, la bibliothèque « Xosé Tarrío González » ** est inaugurée le 28 avril 2018, non sans difficultés. La bibliothèque grandit peu à peu, elle se dote de 1000 documents et livres environ, jusqu’à ce que, le 5 juillet 2018, les autorités pénitentiaires décident de mettre fin à cette initiative.

« Construire une bibliothèque à l’intérieur de la prison va bien au-delà du fait de créer un simple espace « culturel » ou de « loisirs », cela implique d’assumer le fait qu’il y aura des tensions et des affrontements parce que, pour les sbires de l’administration pénitentiaire, il est inconcevable que les prisonniers soient capables d’autodétermination. » [Écrivait Fer Barcenas au mois de février 2018, depuis la prison Nord]

Communiqué envoyé par la Croix Noire Anarchiste de Mexico, 6 juillet 2018 :

Jeudi 5 juillet 2018, les compagnons incarcérés dans la prison nord, qui font partie du projet collectif CIMARRON ayant mis en place une bibliothèque alternative [à l’intérieur de la prison] nous ont informé que cette dernière avait été attaquée par les gardiens sous les ordres des commandant Hormigo (chargé de la sous-direction de la sécurité ) et Campos. Ces derniers ont obligé, mardi dernier, les compagnons à se couper les cheveux, en les menaçant d’être punis et envoyés dans le module de sécurité maximale de cette prison. Face à cette menace, les compagnons ont accepté de se couper les cheveux. Cependant, ils ont porté plainte contre les méthodes autoritaires du personnel de sécurité.

C’est pour cette raison que les commandants les ont convoqués à la direction pour renouveler leurs menaces. Cette fois-ci, ils ont dit que s’ils ne retiraient pas leur plainte, ils seraient transférés au module de sécurité maximale. Suite à tout cela, des fouilles violentes des cellules des compagnons ont été effectuées par les gardiens. Cela s’est fini par le saccage et la destruction de la bibliothèque alternative Xosé Tarrío González et le transfert du compagnon Gerardo Ramírez Valenzuela au dortoir de punition numéro 1 sous des prétextes absurdes.

Il faut rappeler que ce harcèlement dure depuis des mois. En effet, les autorités voient cette bibliothèque comme un danger pour leurs intérêts économiques.

Nous dénonçons l’attaque d’un espace culturel où les prisonniers peuvent s’exprimer librement. Nous mettons en question la duplicité morale et l’hypocrisie de l’administration pénitentiaire.

En effet, d’un côté, elle attaque des espaces culturels et artistiques, criminalise ceux qui refusent de se soumettre docilement à sa politique d’extermination et de mort, tout en autorisant et protégeant des entreprises criminelles auxquelles ces hauts fonctionnaires appartiennent.

Suite à ces faits, nous rendons responsables le directeur de la prison Enrique Serrano Flores, ainsi que Mónica Mandujano Rosillo la responsable de l’auditorium (où se trouve la bibliothèque) et les commandants Hormigo et Campos, des dégâts causés à la bibliothèque et à l’intégrité physique des compagnons du collectif Cimarron: Luis Lázaro Urgell, Alejandro N, Gerardo Ramírez Valenzuela. Nous exigeons que soit levée la punition de Gerardo et qu’il soit ramené à son dortoir.

Sources : Proyecto ambulante, Cruz Negra Anarquista Mexico

Notes :

*Le collectif CIMARRON est formé par plusieurs prisonniers en résistance de la ville de Mexico dont : Fernando Barcenas Castillo [qui est sorti de prison le 11 juin 2018], Gerardo Ramirez Valenzuela, Luis Lazaro Urgell et Alejandro N. Il s’agit d’un petit groupe de personnes qui ont décidé eux-mêmes d’appeler « cimarrón » «  cimarrón pouvant être tout animal domestiqué qui échappe à ses maîtres et redevient sauvage. Ce collectif a entamé un vaste travail de re-signification et de ré-appropriation de la vie à partir de la résistance culturelle, ignorant les espaces institutionnels pour mettre concrètement en place des ateliers, des discussions, une bibliothèque alternative, pour construire de la sorte une vie communautaire en marge du temps et des restrictions de la prison. En effet, la majorité de ceux d’entre nous considérés comme des « criminels » nous avons démontré que nous sommes capables d’assurer la subsistance avec intelligence, instinct et force physique en les combinant parfaitement entre eux, c’est ce qui fait de nous un ennemi en puissance à écarter par ceux qui nous dominent. C’est d’ailleurs pour ce motif qu’ils nous enferment dans des cages et qu’ils nous combattent de façon si brutale… Nombreux sont les « criminels » qui ne sont pas conscients de cela, mais d’autres comme nous l’ont perçu et sont prêts à livrer bataille contre le monstre carcéral et contre tout forme de domination… »

**Xosé Tarrío González est né en 1968 à la Coruña. A onze ans il est enfermé dans un internat, puis en maison de redressement pour se retrouver à 17 ans en prison où il contracte le SIDA. En prison, il met en œuvre l’anarchisme et la rébellion, menant de nombreuses tentatives d’évasions, pratiquant la solidarité réelle entre les prisonniers, luttant résolument contre la prison et les gardiens de prisons ; toutes ces attitudes entraînent humiliations, mises à l’isolement et il est de nombreuses fois torturé. En 2004, son état de santé se dégrade une nouvelle fois à cause de la maladie et finalement, le 2 janvier 2005 il meurt victime de l’institution carcérale et de la société qui la soutient. Xosé était un prisonnier du régime spécial FIES (Fichier Interne de Suivi Spécial) et auteur du livre « Huye, hombre, huye ».

____________________Plus d’infos:

Fanzine du collectif CIMARRON :
https://liberonsles.files.wordpress.com/2017/01/fanzincimarrondefa.pdf

[D.F, Mexico] Lettres de Fernando Bárcenas Castillo : A propos de la bibliothèque Xosé Tarrio González , à l’intérieur de la prison Nord :
https://liberonsles.wordpress.com/2018/06/06/d-f-mexico-lettres-de-fernando-barcenas-castillo-a-propos-de-la-bibliotheque-xose-tarrio-a-linterieur-de-la-prison-nord/

Paris, France : Retour sur le rassemblement-déambulation contre toutes les prisons du 21 juin dernier

Nous sommes une bonne cinquantaine, avec tables, tracts, journaux, à prendre la place vers 19 heures. Deux civils se présentant comme représentants de la préfecture essaient de nouer le contact pour savoir ce que nous comptons faire. Pas de dialogue avec les flics, cependant ils sous-entendent qu’ils ne sont pas là pour nous empêcher, juste nous « encadrer ».

Durant 1h30, des affiches sont collées et des banderoles tendues. Plusieurs prises de paroles contre la taule, et les CRA (centres de rétention administrative), racontant des bouts de luttes à l’intérieur et à l’extérieur des murs, entrecoupées de musique, rassemblent les présent.es en vue de partir en déambulation. Un feu d’artifice explose au centre de la place et nous voilà en mouvement vers l’une des seules rues sans flics visibles. Un fumigène, quelques slogans, une sono, mais voilà que plusieurs lignes de CRS arrivent en courant sans que leur intention ne soit explicite.

Après 200 mètres au pas de course avec les flics quasiment au contact derrière, on acte la dispersion. Les flics-chasseurs ne voulant pas perdre leur proie, commencent dans une relative confusion à gazer et foncer sur quelques personnes qui se dispersaient, pour les ramener en nasse vers le groupe, puis poursuivent la queue de cortège et arrêtent une personne. Deux autres se feront arrêter pour avoir réagi à son arrestation.

Les onze personnes arrêtées sont emmenées au comico du 13ème, bd de l’Hopital. Huit personnes sont placées en vérification d’identité. Deux, en possession d’un papier à leur nom, sortiront rapidement, les six autres n’en ont pas et décident de ne pas décliner d’identités. Elles refusent également la prise d’empreintes digitales, demandée par le procureur pour tenter de les retrouver dans le FNAED*. C’est sur ce motif que les keufs les mettront en GAV à la suite des 4 heures (durée légale d’une vérif d’identité) pour leur mettre plus la pression et prolonger leur sale besogne.

Elles ont tenu malgré les intimidations et menaces et ont vu leur choix de ne pas donner leur blaze récompensé, vu que les keufs relâcheront X, X, X, X, X et X le lendemain midi ! Trois seront mises en garde à vue (GAV), deux directement et une après un passage en dégrisement** (qui ne lui a pas été communiqué). Pour un gardé-à-vue accusé de violence sur flics, prétendument en état d’ébriété lors de l’arrestation, les officiers de police judiciaire (OPJ) se sont permis froidement un cassage de gueule, en préambule d’une audition, de ce qui était pour eux un « anti-flic », « gauchiste », « antifa », un « parasite » et qu’ils menaceront allègrement de viol ou de meurtre.

Le matin, durant une première audition qui tournera court du fait de la non collaboration du copain à décliner son identité que le flic avait déjà sur son écran, quatre OPJ étaient déjà menaçants et passablement agacés. Après quelques heures et l’entrevue avec son avocate, le copain verra le plus énervé du matin venir le chercher en cellule et l’emmener de nouveau à l’étage des OPJ sans les menottes pour une seconde audition qu’il mènera lui-même.

Les premiers coups sont donnés (grosses gifles et coup de genou dans les côtes) dans l’ascenseur avec son lot d’insultes et d’incitations à répondre aux coups. Le copain encaisse sans répondre aux provocations et est balancé à travers le couloir jusqu’à la salle où aura lieu l’interrogatoire. Il est placé sur une chaise au milieu de quatre bureaux avec autant de flics. La porte est laissée entrouverte mais les persiennes sont baissées pour l’occasion. Le keuf continue à distribuer quelques taloches tout en se relayant avec les trois autres pour insulter et menacer. Il sera saisi d’une légère panique quand il se rappellera que le copain avait vu son avocate, il se rassiéra soulagé après l’avoir fouillé rapidement à la recherche… d’un possible micro ? Un de ses collègues lâchera à son tour quelques coups, mais quant à lui, avec ses poings.

Une OPJ, ayant son bureau à côté, profitera de la situation pour s’approcher par derrière et couper une mèche de cheveux. Elle retournera à son bureau avec de l’ADN pour alimenter leurs fichiers. Les flics cesseront de cogner pendant l’entretien sur les faits durant lequel ils recevront comme seule réponse « je n’ai rien à déclarer ».

Tout l’étage rempli d’OPJ en civil a vu ou entendu de quelle manière se déroulait le transfert et/ou l’audition. En ramenant le copain vers les cellules le keuf fera même un petit passage dans le bureau du chef de service pour lui exposer l’ »anti-flic » avec son visage marqué par les coups. Cela n’était pas une attaque envers un individu en particulier mais bien contre ce qu’il représentait pour eux, un « anti-flic ». Cela n’a pas l’air non plus d’une initiative spontanée d’un ou quelques flics mais plutôt de quelque chose d’anticipé ou en tous cas de rodé. D’ailleurs, plus tôt dans la journée une des X avait également subi des insultes dégradantes et des menaces de viol, avant et pendant son audition, un des OPJ lui assurant en tête à tête dans l’escalier qu’elle avait « de la chance d’être une fille » sans quoi il l’aurait « défoncée ».

Les flics se réjouissent de l’absence d’avocat pendant les auditions et de pouvoir en profiter pleinement. Les insultes, menaces et coups font partie de leurs moyens ordinaires d’humiliation et de punition. La violence des flics peut aller jusqu’à blesser et tuer dans la rue et dans leurs comicos, les procs et les juges envoient des personnes en taule pour n’importe quel motif. Il ne s’agit pas d’espérer une police moins « violente » ou une justice plus « juste ». Se raconter comment ça peut se passer, sans vouloir transmettre la peur que les flics cherchent à distiller ni donner de recettes à suivre, peut servir à se donner de la force et alimenter la réflexion sur nos moyens et choix que l’on peut user face aux flics.

Le comico ou le tribunal sont le terrain des keufs et des juges, ils peuvent s’y permettre un peu de tout et beaucoup de n’importe quoi, mais on pourra toujours y mettre des grains de sable pour enrayer la machine répressive et renvoyer dans leurs gueules la rage qu’ils provoquent en nous.

La rue reste pour nous le terrain où nous continuerons à exprimer notre rage et nos idées contre ce monde d’autorités, à apprendre à être plus malin.es pour l’investir collectivement ou pas, publiquement ou pas, afin d’attaquer tout ce qui empêche nos envies de vies libres de se réaliser.

Une personne a eu un rappel à la loi pour outrage et rébellion. Deux personnes ont un procès le 20 novembre pour outrage, rébellion (la poursuite pour violences ayant été abandonnée) et refus de se faire ficher empreintes digitales et photos, une étant en récidive pour ce refus. De la bouche du proc on évite la comparution immédiate du fait du nombre important de personnes déférées ce jour-là, conséquence supposée de la fête de la musique.

La répression n’arrêtera pas nos rébellions, liberté pour tou-te-s ! Feu aux prisons (les comicos et tribunaux étant inclus) !

Quelques participant-e-s au rassemblement

Notes:

*FNAED : Fichier national automatisé des empreintes digitales.

**Le placement en dégrisement repousse le début de la GAV et donc de la notification des droits (demande de voir un médecin, avocat, droit de faire prévenir un proche,…) et de la connaissance de la qualification de l’infraction justifiant la mise en GAV. Théoriquement il y a des cellules spéciales dégrisement mais en pratique on peut se retrouver en cellule avec des gardé-e-s à vue. Le temps passé en dégrisement doit être pris en compte dans la durée de la GAV. Ici, la fin du placement en dégrisement a été décidé après un test d’alcoolémie.

[Publié sur indymedia nantes, mercredi 11 juillet 2018]

texte:L’âge de fer planétaire

[reçu par mail]

En pièce jointe un texte d’Yves Le Manach auquel cette remarque d’Adorno conviendrait très bien :

« Celui qui intervient aujourd’hui dans des débats d’ordre pratique découvre régulièrement, à sa grande honte, que les idées qu’il veut apporter ont été émises depuis longtemps et le plus souvent bien mieux la première fois. Non seulement la masse des écrits et des publications est devenue pléthorique, mais la société elle-même, en dépit de ce qui la poussa à avancer, semble souvent régresser à des stades antérieurs, même dans les superstructures, comme le droit et la politique. Voilà qui nous oblige à réchauffer sans plaisir des arguments trop connus. »

un texte d’Yves Le Manach en PDF

Point de vue Théorie critique :

 

https://www.editions-allia.com/files/pdf_523_file.pdf

 

Cordialement.

Henri

 

https://www.youtube.com/watch?v=0mlzyYoyLhA

 

 

texte: Grève et “besoin de grève”

note après  la lecture du texte capital total,

le débat continuera ,pour ne pas être enfermé-e dans des logiques partidaires et  de recrutement syndical..

mars 2018, Temps critiques


Le mou­ve­ment du Tous en­semble de 1995 a été la der­nière re­pré­sen­ta­tion d’une lutte col­lec­tive au-de­là de la stricte pers­pec­tive clas­siste, mais sans qu’af­fleure une ten­sion vers la com­mu­nau­té hu­maine puisque le mou­ve­ment est res­té cen­tré sur la dé­fense de la condi­tion sa­la­riale à tra­vers le re­fus de la ré­forme de la Sé­cu­ri­té so­ciale, pi­lier du mode de ré­gu­la­tion for­diste des conflits de classes. Si ré­fé­rence com­mu­nau­taire il y eut, ce n’était que celle de la com­mu­nau­té du tra­vail en­core sou­dée, tant bien que mal, par la conscience ou­vrière d’une ré­ci­pro­ci­té dans l’échange charges/co­ti­sa­tions so­ciales et sa sé­cu­ri­sa­tion dans le cadre d’une ges­tion par des or­ga­nismes pa­ri­taires in­cluant les syn­di­cats de sa­la­riés.

C’est ce mo­dèle — ou du moins ce qu’il en reste — qui est à nou­veau at­ta­qué au­jourd’hui avec l’aug­men­ta­tion de laCSG, mais avec beau­coup plus de dif­fi­cul­tés pour s’y op­po­ser puisque le rap­port so­cial ca­pi­ta­liste n’est plus aus­si dé­pen­dant du rap­port ca­pi­tal/tra­vail pour sa re­pro­duc­tion et sa va­lo­ri­sa­tion. C’est la no­tion même d’échange co­ti­sa­tions/pres­ta­tions so­ciales qui ne fait plus sens im­mé­dia­te­ment, ni pour les pa­trons ni pour une po­pu­la­tion ac­tive qui a lar­ge­ment per­due trace de son ori­gine ou­vrière et dont une frac­tion com­po­sée des en­trants non qua­li­fiés sur le mar­ché du tra­vail, des chô­meurs dé­cou­ra­gés, des “in­dé­pen­dants” ubé­ri­sés, se trouve ex­clue ou te­nue en li­sière de cet échange. En ef­fet, le pro­ces­sus d’in­es­sen­tia­li­sa­tion de la force de tra­vail — c’est-à-dire le fait que l’ex­ploi­ta­tion de la force de tra­vail n’est plus au centre de la va­lo­ri­sa­tion du ca­pi­tal — vient dé­sor­mais bou­le­ver­ser l’en­semble du “sys­tème-sa­la­riat”, clé de voûte pour­tant de la dy­na­mique ca­pi­ta­liste de­puis bien­tôt un siècle, en Eu­rope de l’Ouest tout du moins.

Ce n’est donc pas un ha­sard si les re­trai­tés se sentent at­teints  ; ils le sont certes dans leur porte-mon­naie, mais aus­si parce qu’ils ont l’im­pres­sion d’une fin de par­tie et d’être les der­niers des Mo­hi­cans.

Par ailleurs, mais de ma­nière com­plé­men­taire, c’est la no­tion de «  ser­vice pu­blic  » qui a son tour ne fait plus sens car si ces ser­vices pu­blics existent en­core, même sous un sta­tut pri­va­ti­sé pour tout ou par­tie d’entre eux, ils ont été vi­dés de leur an­cienne mis­sion d’ad­mi­nis­tra­tion éta­tique des biens et des ser­vices na­tio­naux ce qui fait que plus per­sonne, en de­hors de leurs agents, ne peut les dé­fendre. “L’opi­nion pu­blique” n’en perçoit plus que les dys­fonc­tion­ne­ments (re­tard des trains, at­tentes dans les hô­pi­taux, non-rem­pla­ce­ment des maîtres et sur­charge re­la­tive des classes, ins­crip­tions chao­tiques à l’uni­ver­si­té, pro­blèmes ré­cur­rents de sui­vi à la Poste).

C’est le cas pour la sncf. Le sta­tut spé­cial était non seule­ment le fruit des luttes de classes, mais aus­si ce­lui d’une fonc­tion col­lec­tive de cer­taines en­tre­prises et de ses agents dans le pro­cès de re­pro­duc­tion des rap­ports so­ciaux. Or, c’est cette der­nière fonc­tion col­lec­tive qui de­vient ca­duque avec la mise en concur­rence des dif­fé­rents ré­seaux de trans­port et avec lui le ré­gime spé­cial qui lui était af­fé­rent dans un contexte mo­no­po­lis­tique.

Il s’en­suit que la “dé­fense des ac­quis” perd aus­si son sens puisque ces ac­quis n’ap­pa­raissent plus comme cu­mu­lables et uni­ver­sels (le droit du tra­vail s’ap­pli­quait à tous, les conven­tions col­lec­tives réa­li­saient une har­mo­ni­sa­tion par le haut), mais au contraire comme conjonc­tu­rels et par­ti­cu­liers. Dans le mo­ment po­li­tique ac­tuel, que ce soit dans le sec­teur pri­vé ou dans le sec­teur pu­blic, l’État im­pose une dé­po­li­ti­sa­tion des luttes. Il n’y a plus d’en­ne­mis au cou­teau entre les dents avec un par­ti com­mu­niste ré­duit à peau de cha­grin et des sa­la­riés qui ne de­mandent que le main­tien du sta­tu quo. La de­mande de plus d’État qui ap­pa­rais­sait en­core clai­re­ment en 1995 semble moins nette au­jourd’hui. L’élec­tion et la re­la­tive po­pu­la­ri­té de Ma­cron tiennent jus­te­ment à l’am­bi­va­lence qu’il ren­voie sur le rôle de l’État, dans sa forme ré­seau  ; une am­bi­va­lence lar­ge­ment par­ta­gée dans la po­pu­la­tion.

L’heure est donc à la ges­tion de ce qui n’ap­pa­raît plus que comme des dif­fé­rends d’ordre pri­vé parce qu’ils ont per­du leur lé­gi­ti­mi­té so­ciale de lutte dans la so­cié­té ca­pi­ta­li­sée. Les grèves des an­nées 1960 à 1979 (la grève de la si­dé­rur­gie française, des ou­vriers de Fiat ou des mi­neurs an­glais fer­mant le ban) ont ain­si été les der­nières grèves “lé­gi­times” de la so­cié­té de classes, lé­gi­times pour la classe do­mi­nante, même si cette lé­gi­ti­mi­té était re­con­nue à contre­cœur  ; lé­gi­times pour les sa­la­riés aus­si, même quand il ne s’agis­sait pas de leur propre grève (rap­pe­lons-nous le sou­tien aux sa­la­riés de Lip des an­nées soixante-dix  ; le sens du “Tous en­semble” de 1995 et les “grèves par pro­cu­ra­tion”).

C’est ce qui change dans la so­cié­té ca­pi­ta­li­sée d’au­jourd’hui où la grève n’a plus au­cune lé­gi­ti­mi­té ni pour les pa­trons qui, glo­ba­li­sa­tion et mon­dia­li­sa­tion obligent, hurlent à la mort de leur com­pé­ti­ti­vi­té, ni pour l’État qui dé­nonce le cor­po­ra­tisme des gré­vistes (cf. la ré­forme des sta­tuts spé­ciaux et de la sncf), ni pour les sa­la­riés qui ré­cri­minent contre leur “prise en otage” par les gré­vistes, ni pour les chô­meurs et pré­caires qui en­vient des sa­la­riés ga­ran­tis car ils ont bien de la chance de…

La fonc­tion syn­di­cale ne fait plus mé­dia­tion parce que la so­cié­té ca­pi­ta­li­sée a ab­sor­bé l’an­cienne so­cié­té ci­vile. Quand le syn­di­cat existe en­core, c’est en tant que puis­sance qui par­ti­cipe di­rec­te­ment au ni­veau I de la do­mi­na­tion, ce­lui de l’hy­per-ca­pi­ta­lisme, comme c’est le cas en Al­le­magne, au Da­ne­mark ou en Suède et c’est à par­tir de cette puis­sance qu’il peut re­ven­di­quer et né­go­cier au ni­veau II de la na­tion ou de la ré­gion comme tente de le faire le syn­di­cat de la mé­tal­lur­gie al­le­mand pour la baisse de la du­rée du tra­vail. C’est ce qu’avait com­pris de­puis long­temps un syn­di­cat comme la cgt-fo, mais son pro­blème ac­tuel est de di­ri­ger par le haut des or­ga­nismes pa­ri­taires de­ve­nus ten­dan­ciel­le­ment ob­so­lètes. C’est ce qu’a com­pris aus­si la cfdt de­puis son re­cen­trage et la ligne ini­tiée par Ni­cole No­tat. Prendre en compte la crise du tra­vail et du sa­la­riat et donc la né­ces­saire ré­forme de la Sé­cu­ri­té So­ciale (fi­nan­ce­ment par l’im­pôt, cmu, etc.), la ré­forme du contrat de tra­vail pour as­su­rer la flexi­sé­cu­ri­té, tout ça n’a pas be­soin de pas­ser par la mise en scène syn­di­cale (type cgt) de la conflic­tua­li­té de classe. On peut en faire l’éco­no­mie. C’est du moins ce que pense Jean-Mi­chel Blan­quer, mi­nistre de l’Édu­ca­tion na­tio­nale quand il dé­clare au jour­nal Le Fi­ga­ro, (19 mars 2018)  : «  On n’a pas be­soin de grève en France  ».

Le conflit est donc mis hors jeu et la mé­dia­tion n’a plus lieu d’être ou, plus exac­te­ment, la mé­dia­tion se fait mé­dia­teur, ges­tion­naire d’in­ter­mé­diaires, et tout conflit est perçu comme ré­sul­tant d’un dé­faut de com­mu­ni­ca­tion dans une so­cié­té ca­pi­ta­li­sée qui se conforme au mo­dèle du ré­seau im­pul­sé par les nou­velles tech­no­lo­gies de l’in­for­ma­tion et de la com­mu­ni­ca­tion.

Certes, cer­taines grèves comme celle dans les ephad semblent dures parce que longues et re­la­ti­ve­ment mé­dia­ti­sées, mais il est dif­fi­cile de me­su­rer leur im­pact ef­fec­tif car se dé­cla­rer en grève ne si­gni­fie pas for­cé­ment blo­quer le fonc­tion­ne­ment de l’ins­ti­tu­tion. En ef­fet, ce blo­cage né­ces­site un dé­pas­se­ment de fonc­tion contre­di­sant jus­te­ment l’éthique du tra­vail qui ac­com­pagne l’idée de ser­vice pu­blic ou di­verses formes de “tra­vail so­cial”.

À la sncf, la ligne de dé­mar­ca­tion semble pas­ser entre une base qui pous­se­rait à la grève re­con­duc­tible coup de force et des syn­di­cats qui penchent pour une grève per­lée plus éco­nome fi­nan­ciè­re­ment, moins blo­quante, mais plus désor­ga­ni­sa­trice peut être dans la me­sure où elle ren­dra plus dif­fi­cile la ré­qui­si­tion des cadres et des “jaunes”. Mais l’es­sen­tiel ne nous pa­raît pas être cette op­po­si­tion si elle est prise comme op­po­si­tion entre deux po­si­tions de prin­cipe, mais plu­tôt de sa­voir com­ment le rap­port de force sur le ter­rain dé­ter­mine ce qui pour­rait rendre ces ac­tions à la fois of­fen­sives et ef­fec­tives. In­dé­pen­dam­ment des pré­sup­po­sés po­li­tiques qui peuvent op­po­ser d’une part, des mi­li­tants prêts à prendre des po­si­tions maxi­ma­listes et de l’autre des syn­di­cats te­nus par la né­ces­si­té de ne pas éla­bo­rer de stra­té­gie en de­hors du cadre de la re­cherche d’une né­go­cia­tion, c’est bien la vo­lon­té d’al­ler à la ba­garre qui doit être le cri­tère de vé­ri­té de la stra­té­gie de lutte à adop­ter. C’est-à-dire qu’avant même de par­ler en termes de rap­port de forces, il faut re­cen­ser et ap­pré­cier com­ment le mé­con­ten­te­ment se trans­forme de la ré­cri­mi­na­tion en co­lère ou ré­volte  ; en force, avant même d’ap­pré­cier le rap­port de forces et donc la conduite à suivre.

 

Temps cri­tiques, le 22 mars 2018