L’étiquette des choses

Val Basilio

Résultat de recherche d'images pour "lunette livre"Nous venons au monde en tant qu’êtres parlants ; la langue nous précède en tant que structure. Elle est l’expression de rapports sociaux concrets et, en tant que telle, elle ne peut être neutre. Une perception critique de la réalité a aussi son propre vocabulaire. Réduire ce vocabulaire signifie réduire la possibilité de percevoir la réalité de façon critique.

Journalistes, politiciens, économistes, intellectuels, personnalités du monde du spectacle, tous s’accordent à dire que nous vivons dans le meilleur monde possible. Un monde dans lequel les habitants vivent pour travailler et sont contraints de travailler pour vivre, où ceux qui n’ont pas de travail se sentent dépossédés de la vie elle-même. Et où attendre quelque chose de l’autre est considéré comme une tragique illusion démentie par l’Histoire. Rien ne devrait bouleverser cette conviction qui, à force d’être répétée, est devenue un constat, un état de fait, une vérité. Se pose ainsi le problème de l’abolition de tout ce qui constitue une menace pour la paix qui règne dans le paradis des marchés. Lisser les contrastes. Apaiser les tensions. Modérer les extrémismes. Une entreprise difficile mais possible.

Il n’existe pas une réalité objective univoque. Ce que nous appelons réalité est toujours un aspect partiel d’une totalité jamais accomplie, une sélection de celle-ci. Sa consistance n’est pas limitée seulement par les moyens dont nous disposons pour la saisir, mais surtout par notre capacité à les utiliser. Nous définissons la réalité non pas comme la totalité qui nous entoure, dont faisons nous-mêmes partie, ni même la partie de cette totalité que nous avons réussi à saisir, mais seulement cette ultérieure petite partie que nous réussissons à maitriser, à faire nôtre, à laquelle nous parvenons à donner un sens. La réalité dont nous nous disons sûrs est toujours et seulement notre œuvre. On pourrait dire que la réalité n’existe pas, que seules ses interprétations existent. Laissant ici de côté la question des images, l’homme communique par les mots sa propre vision de la réalité. C’est donc à travers les mots que l’homme a non seulement justifié les conditions de vie dans lesquelles il se trouve, mais a aussi incité à leur dépassement. Toutes les actions qu’il a engagé à cette fin ont toujours été précédées ou suivies de mots : pour exprimer des analyses, revendications, commentaires, propositions.

Nous venons au monde en tant qu’êtres parlants ; le langage nous précède en tant que structure et en tant qu’environnement social. Il est l’expression de rapports sociaux concrets et, en tant que tel, il ne peut être neutre. Il se transforme suite à des changements sociaux, peu importe qu’ils soient importants (en France, après la révolution de 1789, le nouveau dictionnaire académique a incorporé environ 11 000 nouvelles entrées) ou concernent plutôt de petits changements au sommet de la politique. Une perception critique de la réalité possède donc aussi son propre vocabulaire. Réduire ce vocabulaire, signifie réduire la possibilité de percevoir la réalité de manière critique : une réduction qui peut se faire de différentes manières. En faisant passer un terme du vocabulaire de la critique à celui du consensus par une mutation du sens, par exemple. Personne n’aura plus peur de la révolution si elle vient à indiquer l’avènement d’une nouvelle vague d’outils technologiques. Tous se méfieront de l’anarchie si elle permet à quiconque de nous attaquer au premier coin de rue. Mais ce vocabulaire critique peut aussi être dénué de son sens d’une autre manière. Forgeant de nouvelles définitions apparemment neutres capables de remplacer les anciennes, désormais discréditées. Si chaque mot correspond à une chose, l’introduction d’un nouveau mot pour indiquer une chose ancienne aidera à en reconstruire une virginité. Un antique philosophe affirmait que les mots sont « les étiquettes des choses illusoires », tandis que selon un écrivain « l’expression est un remplacement ». Ce n’est décidément pas un hasard si les philosophes et les poètes ont toujours trouvé une place à la Cour du roi.

Pour modifier la réalité en la laissant inchangée, c’est-à-dire en changeant non pas la substance mais la perception, il suffit de remplacer les étiquettes. En ce sens, les endroits où cette technique a été le mieux expérimentée sont, et ce n’est pas un hasard, les supermarchés où quotidiennement les produits avariés sont vendus frais du jour, car leur fraîcheur est garantie par une étiquette. Peut-être est-il maintenant possible de mieux comprendre l’origine de cette bruyante invasion du langage par des mots asservis, leur empressement à démettre et à remplacer les vieux vocabulaires rendus inadéquats non par leur obsolescence réelle, mais plutôt par leur irrévérence envers les besoins du nouvel ordre social.

Les possibles exemples de la capacité des mots à rendre agréable ce qui ne l’est pas sont infinis. Un tel art ne néglige rien, il est utilisé aussi bien dans les grandes occasions que dans les petits événements quotidiens. La personne qui ramasse les ordures est devenue un « opérateur écologique ». L’innovation terminologique n’a pas amélioré l’air que respire ceux qui font un tel travail, ni remis en question le mode de vie qui produit des tonnes de déchets, mais ce n’était pas les raisons qui ont conduit à l’introduction d’un tel néologisme ; plus simplement il était destiné à gratifier ceux qui passent leur propre vie à occuper des déchets des autres. Le même souci de consoler ceux qui font un travail humble a conduit par exemple à rebaptiser les femmes [et hommes] de ménage « collaborateurs domestiques ». Si ce n’est pas déjà le cas, ce genre de fantaisie en uniforme aura libre cours pour trouver une définition qui compense le travail et les frustrations des grooms, serveurs, portiers, mineurs pour n’en citer que quelques-uns.

La nécessité de bannir tout outrage de l’horizon de l’existence va jusqu’à la suppression des différences physiques des individus. En attendant que l’ingénierie génétique trouve un moyen de nous rendre tous Adonis et Vénus, la tâche d’estomper les contrastes qui peuvent surgir de la réalité manifeste de notre corps a été confiée aux mots. Les aveugles sont devenus « malvoyants » et les sourds « malentendants », les obèses « personnes en surpoids », les nains « verticalement défavorisés » [ndT. Ces termes qui exigent une attention toute particulière vu la quantité d’oppressions et de normes liés au corps mais ce n’est pas le propos ici, l’auteur souhaite selon moi parler de la réduction et suppression de la complexité des corps derrière des mots]. Derrière le but charitable de soulager le désespoir humain, apparaît l’objectif de diminuer la marge d’espace aux occasions de « trouble à l’ordre public ». Les exemples ci-dessus peuvent même faire sourire. Après tout, ce sont de simples jeux de mots. Mais les jeux de mots perdent toute leur innocuité lorsqu’ils sont élaborés sur bien d’autres thèmes. Bien que tout le monde fasse l’éloge des progrès de la civilité, les guerres continuent. Il est impossible de les arrêter car ils servent des intérêts économiques, politiques et religieux qui ne peuvent être ignorés, étant donné le système social actuel. Il faut cependant supprimer l’impression suscitée par tous ces sont morts, ces blessés, cette douleur. Facile. Il suffit de les appeler « missions humanitaires ». Après tout, les missiles ont déjà été appelés « pacificateurs ». Le rugissement des avions ressemblera à la sirène providentielle. Les généraux deviendrons des médecins à qui confier notre vie. Les bombardements, et ce n’est pas un hasard, sont réalisés avec une « précision chirurgicale ». C’est ainsi que l’horreur de la guerre, si elle est correctement stérilisée, peut trouver un consensus.

Et les inégalités sociales ? Elles n’existent plus, elles ont été abolies. Une révolution sociale n’a pas été nécessaire ; pas d’assauts contre le Palais d’Hiver, pas d’attaques au cœur de l’État, pas de généralisation de la révolte. L’exploitation a été supprimée d’un trait par la révolution lexicale. Il y a des années – vous vous en rappelez ? – Les détenteurs de la richesse étaient des « maîtres ». Précisément pour cette raison ils étaient considérés comme des ennemis, parce qu’ils nous rappelaient notre condition d’esclaves. Au lieu de cela, maintenant qu’ils sont devenus des « entrepreneurs », tout le monde les respecte. Non pas qu’entre-temps, ils se soient privés de leurs richesses, vous comprenez. Ni de leur pouvoir. Mais toutes ces caractérisations suintaient précisément de cet horrible mot, « maître ». Celui-ci et ceux-là ont disparu. Aujourd’hui, les « entrepreneurs » respectent la misère de leurs « employés » ou aspirants employés, tout autant que ces derniers respectent la richesse des premiers. Ainsi, tout le monde parvient à vivre heureux et content, ou presque.

Bien sûr, de temps en temps, le maquillage des mots ne peut pas couvrir complètement les horreurs sur lequel il est appliqué. Il arrive, par exemple, qu’un « missile intelligent » prenne le cœur pour une tumeur et massacre des civils. Ou qu’un rapport de l’ONU rende public que le patrimoine personnel de trois seuls hommes dépasse la richesse produite par plus de quarante pays dans le monde. Il y a plus d’argent sur les comptes bancaires de ces trois personnes que dans les poches de quelques milliards d’être humains. Face à ces faits, un certain malaise continue de s’installer. Mais s’épuise en un laps de temps assez bref, après que tous aient poussé leurs soupirs de désaccord ou leurs cris de colère. Pendant quelques dizaines d’heures, ces missiles seront considérés comme des instruments de mort, et ces trois personnes qui peuvent s’acheter un demi-monde seront considérés comme des maîtres. Puis ils redeviendront respectivement « coupes chirurgicales » et « employeurs ».

Du reste pourquoi s’étonner ? Le capitalisme a triomphé partout, sa toute-puissance est telle qu’il est superflu d’en parler. Ne prononcez pas son nom en vain ; c’est là le premier commandement de sa loi, celle du profit et de l’argent. Mais le capitalisme n’est pas seulement omnipotent, il est aussi omniprésent. Aucun endroit sur terre n’a échappé à son intervention. Du Pérou à l’Australie s’étend un seul hypermarché tout en couleur. Si quelqu’un voulait faire-part de sa propre perplexité, il se rendrait vite compte qu’il ne peut pas le faire. Ses mots n’auraient plus de sens L’un des trois hommes mentionnés ci-dessus, Bill Gates, l’homme le plus riche du monde, aime répéter que « tout est une question de comment, pas de si ». Dans ce monde, les raisons de l’économie deviennent les raisons mêmes de l’Homme. Le capitalisme peut donc ainsi disparaître de nos lèvres, qui doivent apprendre à s’occuper exclusivement de ses effets, le « néolibéralisme » ou la « mondialisation ».

Le pouvoir des mots. S’ils sont utilisés à bon escient, ils réussissent à transformer un tigre en poussin : leur capacité anesthésique semble inépuisable. Prenons l’Idée. Qu’est-ce qu’une idée ? C’est une pensée armée, une pensée qui pousse vers l’action. Pour une idée on pourrait mourir. L’idée défie ses possibilités, cherche sa réalisation, si correctement soutenue et accompagnée elle est capable d’ouvrir une brèche dans l’histoire et la transformer. Les exemples ne manquent pas. Mais il est dangereux de laisser les pensées armées circuler à travers le monde sans être dérangées. Il faut donc se débarrasser des idées. Depuis des décennies, on enseigne à l’homme à ne pas exprimer des idées mais des « opinions », c’est-à-dire des pensées désarmées, des pensées qui se satisferont d’une manière ou d’une autre par une simple déclaration. Inutile de dire que personne ne vivrait ou mourrait pour une opinion, ce qui, en soi, ne fait référence à aucune pratique. Naturellement, cette substitution doit aussi apparaître comme un pas en avant, et non pas comme une censure ou un acte d’obscurantisme. Il suffit alors de dire que l’opinion est la démocratisation de la pensée, le fait de la rendre universelle. Posséder une idée demande un effort ; d’étude, de compréhension, d’interprétation. Et l’effort requis est encore plus grand pour mettre cette idée en pratique. Pour avoir une opinion en revanche, il suffit d’ouvrir la bouche. Facile et à la portée de tous. Tous les opinions sont identiques, parce que tous les hommes sont égaux. La fin de l’Idée a conduit à la disparition de ses produits. La fin des théories, la fin des idéologies. La fin aussi des grands idéaux, des utopies. La fin de la lutte, et la fin de l’ennemi à combattre. Trop dangereux, il faut baisser le ton, atténuer la couleur, endormir les sens. Le poids du passé, le poids d’un arsenal divers, a été remplacé par la légèreté de l’inconsistance. Hier, les idées étaient des pierres à jeter contre l’ennemi pour l’abattre : la vie une barricade. Aujourd’hui, les opinions sont des plumes à lancer dans les airs pour se perdre dans la contemplation de leurs cabrioles : la vie, un vide aseptisé. Comprenons-nous bien, rien n’a changé. Seulement il ne reste plus rien à critiquer. Le monde dans lequel nous vivons est au mieux digne d’opinion.

Extrait de la revue Diavolo in corpo n°1 – Décembre 1999

Angoulême ( charente), France: et de deux!

Après Seppois-le-Bas (Alsace) le 6 juillet et Saint-Pern (Bretagne) le 14 juillet, les fameux « coeurs indomptés qui ne se résignent pas à la perpétuation de l’existant » ont une raison de plus de se remplir de joie : un 3e pylone est en effet parti anonymement en fumée la nuit de dimanche à lundi 15 juillet !

Il s’agit d’un émetteur TDF situé dans le quartier de Ma Campagne à Angoulême (Charente), qui a pris feu vers 2h30 au lieu-dit « Petit Beauregard ». Lundi 15 juillet en fin d’après-midi, c’étaient ainsi 70 000 foyers (soit plus de monde encore selon la composition des dits-foyers) qui étaient touchés par les conséquences de l’incendie du pylône de 33 mètres de hauteur, avec une coupure de diffusion de la télévision en TNT, et des 4 opérateurs de téléphonie (Orange, SFR, Bouygues et Free). Si les services ont été très provisoirement rétablis le lendemain, ils ont à nouveau été interrompus le 18 juillet afin de pouvoir réparer le câble d’alimentation des équipements, ce qui prendra peut-être une semaine de plus sans téléphone ni télé, selon les journaflics.

Pour rappel, un énorme émetteur TDF avait déjà cramé dans le département de Charente à Saint-Saturnin en avril dernier, touchant -ils ne le disent que maintenant- près d’ »un million de foyers »… En tout cas, comme le dit le fameux proverbe chinois, « l’eau est au poisson ce que le barbeuk d’antennes est à l’été », indispensable pour qu’il ne soit pas pourri !

[Reformulé de Charente Libre, 15 et 17.07.2019]

 

Iitalie: Des nouvelles de Natascia depuis la prison de l’Aquila

 

Round Robin / lundi 22 juillet 2019

Après un parloir avec Natascia, toujours enfermée dans la sections AS2 (mais qui au fait est un régime de 41bis) de la prison de L’Aquila, on apprend qu’après la fin de leur grève de la faim, elle et Anna (Silvia est encore dans la prison de Turin) ont commencé à faire entre trois et cinq formulaires de demande chaque jour, pour exiger tout ce qui leur est interdit.

Après la grève de la faim, les matonnes qui les surveillent, du GOM [Gruppo Operativo Mobile, comme les ERIS français; NdAtt.] sont devenues encore plus hostiles à leur égard, aussi celles qui, au début, se comportaient de façon « neutre ». Leurs demandes sont ignorées, les matonnes nient les avoir reçues, et ainsi de suite.

La bibliothèque de la prison ne leur donne pas de livres, même pas ces quelques-uns qui devraient leur être accordés selon le règlement. Elles n’ont même pas le droit d’utiliser le terrain de sport. La raison, expliquée après une longue série de réponses qui allaient du fait qu’il soit condamné à cause de travaux, au fait que d’autres prisonnières s’y trouvaient, est qu’elle n’ont pas droit au terrains de sport. Point.

L’administration de la prion a bloqué l’argent que des compagnonnes et des compagnons ont envoyé à Natascia. Même son avocate n’a pas pu lui verser de l’argent, avec l’excuse que la trésorerie était fermée à ce moment là; cela même si auparavant on lui avait assuré  qu’en cas d’urgence elle aurait pu lui en verser quand-même. Une grosse partie de son courrier est bloqué par la censure. Cependant, elle demande qu’on lui écrive malgré tout, parce que quand une lettre ne passe pas à travers les mailles de la censure, les matonnes lui notifient  qu’elle a reçu une lettre et qui c’est l’expéditeur, et même si c’est pas grand chose c’est déjà ça. Pour ne rien laisser passer, les matonnes ont collé une sanction disciplinaire à Natascia à cause d’une jupe qu’elles ont trouvé « trop courte ». On lui a interdit toute activité pendant trois jours, mais comme de toute façon elle et Anna n’ont pas le droit à aucune activité, cette sanction s’est réduite à l’interdiction de déjeuner avec Anna pendant trois jours.

Le 11 juillet il y a eu l’audience du Juge des libertés et de la détention, Natascia a pu y participer seulement par visioconférence. Après environ une semaine, la décision du tribunal est tombée : comme pour Robert et Beppe, la détention préventive est confirmée. Les motivations devraient être données sous 30 jours.

Par contre, mercredi 24 juillet le tribunal de L’Aquila statuera sur les instances de Natascia, Anna et Silvia à propos des conditions de détention dans la prison de L’Aquila.

 

Pour lui écrire (Natascia lit le français) :

Natascia Savio
(et aussi Anna Beniamino)
Casa Circondariale de l’Aquila
Via Amiternina, 3
località Costarelle di Preturo
67100 – L’Aquila (Italie)

Brême, Allemagne: Revendication de l’incendie d’un camion de la prison- 5 juillet 2019

« La maison d’arrêt te cherche »… « Nous vous avons trouvés » [1]

Dans la nuit du 4 au 5 juillet, un poids lourd de la maison d’arrêt de Brême a brûlé sur le parking grillagé du centre de contrôle technique-Nord du quartier de Walle.

La maison d’arrêt de Brême se caractérise par des conditions misérables ; les cellules sont surpeuplées, il arrive que la pluie s’y infiltre et les soins médicaux sont très mauvais voire tout bonnement refusés.

Mais nous ne voulons en aucun cas prendre fait et cause pour une réforme des prisons ou même renforcer l’illusion qu’il existerait possiblement une prison « humaine » ou « juste ».

Saboter ce système d’enfermement, l’industrie carcérale telle qu’elle est notre affaire ! Car c’est une structure qui vise à briser les sujets « rebelles » et « inadaptés ». Les suicides à la maison d’arrêt de Brême de ces dernières années étayent cela.

De façon cynique, le véhicule était orné d’une inscription qui faisait la publicité pour travailler à la prison de Brême. « Tu es la clé », c’est le rôle qu’ils nous ont réellement réservé.

Nos pensées vont à nos compagnon.ne.s qui ne sont pas à nos côtés ces temps-ci. Ils se trouvent au sein de l’architecture de l’ennemi, mènent leurs vies derrière les barreaux et doivent être puni.e.s par la privation de leur liberté de mouvement.

Mais notre feu n’est pas seulement pour elles/eux. Nous ne voulons pas oublier non plus les personnes qui se sont soustraites à l’idée inhumaine de l’enfermement. Celles qui ont tout laissé derrière elles et sont désormais en cavale.

Mais nous qui sommes dehors, ne sommes pas les seul.e.s à lutter contre la société carcérale. Derrière les murs aussi des personnes essaient de préserver leur dignité et leur liberté. A elles aussi nous envoyons des salutations solidaires.

Liberté pour tou.te.s les prisonnier.e.s.


NdT :
[1] Slogans détournés ici qui, à l’origine, sont utilisés pour le recrutement de matons.

 

[Traduit intégralement de l’allemand de Chronik]

Italie:Arrestation et tentative d’expulsion du compagnon Divine Umoru

Le 15 juillet 2019, des compagnon.nes ont appris l’arrestation en vue de l’expulsion vers le Nigéria, de Divine Umoru. Le lundi 15 juillet vers 13 heures, la police s’est rendue chez Divine pour l’emmener au commissariat, où il a été informé d’un décret inattendu d’expulsion ad personam, signé directement par le ministre Matteo Salvini. Malgré le fait que le compagnon vivait en Italie depuis vingt ans et qu’il avait tous les papiers nécessaires pour séjourner en Italie, le juge a validé la mesure d’expulsion par une audience directe, en s’appuyant sur différentes inculpations, dont une avec finalité de terrorisme pour laquelle Divine avait été acquitté il y a des années.

Il a ensuite bénéficié, à la demande de l’avocat, d’une heure pour prendre des vêtements et un téléphone, qui lui a été saisi, puis il l’ont fait monter dans une voiture qui s’est dirigée vers l’aéroport de Milan Malpensa, où une soixantaine de personnes se sont rendues dans l’après-midi (mardi 16 juillet), et où à 19h10, un avion d’Air Italy, à destination de Lagos (Nigeria), devait partir avec Divine à bord.

Les personnes solidaires présentes se sont déplacés en petits groupes à l’intérieur de l’aéroport avec des banderoles et des mégaphones, toujours suivies évidemment d’un nombre important de flics, pour informer les personnes sur place de ce qui était entrain de se produire et bloquant certaines portes d’embarquement.

Entre temps, les avocats ont préparé une série de recours, dont un adressé en particulier à la Cedu (Cour européenne des droits de l’homme), pour suspendre l’arrêté ministériel, appuyés notamment par le fait que Divine a été acquitté pour les infractions sur lesquels l’arrêté d’expulsion se base. La Cedu a demandé la suspension de l’expulsion. Bien que Strasbourg ait accepté l’appel des avocats par le biais d’une sentence de suspension exécutive, les autorités présentes à l’aéroport pendant une journée entière ont refusé de donner des garanties vis à vis de la non expulsion et la libération de Divine. Ce n’est que tard dans la soirée que les compagnons ont appris que Divine n’avait pas été rapatrié, c’est la seule nouvelle qui leur est parvenue.

Mais ce n’est pas tout : le matin du 17 juillet, Divine parvient à trouver un moyen de contacter ses compagnons, leur disant qu’il avait été transféré la veille au soir au CPR [centre de séjour et de rapatriement] de Bari, informé de la suspension de son expulsion peu avant le transfert. Quelques heures plus tard, nous avons appris que Divine était en audience avec un avocat officiel – concernant son maintien en détention – mais le compagnon a catégoriquement refusé d’y assister, demandant à être défendu par ses avocats. Le juge a accepté le report et l’audience a ensuite été reportée au vendredi 19 juillet à 9 h, le jour où ses avocats seront présents.

Ce n’est pas un hasard s’il a été envoyé au CPR à Bari, l’un des pires camps en Italie, sinon le pire, connu par tous pour être une structure punitive dans laquelle sont souvent déportés les migrants rebelles.

résumé depuis insuscettibilediravvedimento.noblogs.org

Belgique: Procés contre les anarchistes- l’État fait appel

Suite à l’acquittement déclaré par la juge dans le cadre d’un procès contre une douzaine d’anarchistes inculpés notamment « d’association de malfaiteurs », le procureur a décidé de faire appel.

Voici ce qu’un des inculpés écrivait en avril 2019 dans une lettre que vous pouvez retrouver dans un bulletin confectionné à propos de ce procès :
« Cet apogée vient jeter une zone d’ombre sur le fait que ce procès et son verdict ne seront probablement qu’un nouvel épisode dans cette saga où les rebondissements judiciaires se sont enchaînés depuis la mise au jour de cette enquête ainsi qu’après sa clôture.
(…) Ce procès n’est donc rien d’autre qu’un épisode plus spectaculaire que les autres dans cette série-choc autour de la répression. »

Il avait vu juste.

Il n’y pas de date fixée pour le moment. Mais ça risque bien de ne pas être pour tout de suite, tout de suite.

En attendant des nouvelles, on vous quitte sur une jolie promesse écrite par un autre inculpé et reprise dans ce même bulletin:
« je ne peux répondre à ma condamnation potentielle que par une promesse pleine de vie : je ne m’inclinerai pas, ni aujourd’hui ni demain, devant les lois des hommes. Et je continuerai, en cohérence avec ma conscience et ma sensibilité, à frayer mon propre chemin de combat pour l’anarchie »

Solidarité par la lutte !

NO G7 2019 ni a Biarritz ni ailleurs (suite)

note du laboratoire:bien loin de la critique du site reporterre notre critique/pratique   du tourisme ne  se limite pas à des actions symboliques..

un mail est arrivé au laboratoire à propos d’un communiqué. Une critique nous a tiré l’œil dans le long texte intitulé la lutte par procuration « ‘En revanche, pas la moindre mention, dans ce communiqué co-signé par 6 élus EHBai – il fallait faire « sérieux » sans doute ! -, des incidences sociales, sociétales, environnementales, etc., de cette activité longtemps priorisée par les sphères dirigeantes de l’État français et de ses satellites et qui, malgré les déclarations d’intention et les formules lénifiantes est très loin d’être un « tourisme intégré » ou « tourisme équitable » ou autres formules du même tonneau. Ah, elle est bien loin l’époque où les abertzale se battaient contre la « touristification » en organisant, entre autres actions, des « opérations escargots » sur les routes du Pays Basque nord ! Sans parler des interventions clandestines d’Iparretarrak… Aujourd’hui, un élu EHBai est chargé de la question du tourisme au sein de la Communauté d’Agglomération Pays Basque et ses collègues de parti s’inquiètent… de l’incidence de la réunion du G7 sur la fréquentation touristique !!! Autres temps, autres moeurs ? »

 

La stratégie de l’escargot

« Il faut porter la panique à la surface des choses »

Ce matin – dix jours après le vingt-et-unième anniversaire de la mort de Maria Soledad Rosas, deux jours après le dix-huitième anniversaire de la mort de Carlo Giuliani, et quelques heures avant l’annonce du verdict du tribunal de Florence contre une trentaine d’anarchistes – la ligne ferroviaire qui relie Rome et Florence est à l’arrêt, suspendue, bloquée. Qu’est-il arrivé ? A l’aube, en proche banlieue du chef-lieu toscan, une cabine électrique du TGV s’est réchauffée au point de s’enflammer. Serait-ce un hasard ? Une coïncidence ? Une « vile provocation » ? Ou bien, plus simplement et humainement, un geste d’amour et de rage ?

Il est facile d’imaginer que se trouvent sur place un ramassis de techniciens des chemins de fer et de la préfecture de police. Après les premières constatations, les responsables de Rfi [Rete ferroviaria italiana] ont déclaré que « l’origine de l’incendie contre les installations qui gèrent la circulation des trains est liée à un acte volontaire causé par des inconnus ». Des inconnus qui avec un petit rien ont provoqué le chaos dans la circulation ferroviaire nationale, un secteur important de ce système public de transport qui fait chaque jour fonctionner notre aimable société, déplaçant des marchandise humaines et inhumaines selon les besoins du marché. Et quand plus rien ne fonctionne, on le sait, on est alors obligé de penser à toute autre chose.

Oui, on le sait bien, on le sait que les flics et les journalistes – habitués comme ils sont au mutisme de l’obéissance ou au choeur du consensus – prendront nos mots rien moins que comme une « revendication ». Mais que voulez-vous ? C’est plus fort que nous. On ne réussit pas à contenir notre émotion en constatant comment ce géant nommé Pouvoir a encore et toujours des pieds d’argile. Comment il suffit d’allumer une cigarette à l’air libre de la campagne sous la lune pour l’envoyer en tilt. Comment toute sa magnificience exhaltée, toute son invincibilité arrogante dépendent de fragiles câbles disséminés un peu partout. Si vulnérables qu’ils peuvent mettre être neutralisés par une limace*.

Le spectre de la mort et la menace de la prison pourront arrêter ceux qui doivent cultiver leurs propres intérêts, mais ils n’ont jamais arrêté ceux qui désirent ardemment leur propre liberté.

[Traduit de l’italien de finimondo.org, 22/7/19]

* NdT :
Le 30 mai dernier, sur plusieurs lignes du sud du Japon, une grosse panne de courant avait stoppé des dizaines de trains et provoqué des retards pour 12 000 passagers. La Kyushu Railway Company avait été contrainte d’annuler 26 trains et d’autres avaient été affectés par des retards qui avaient semé le chaos sur un réseau ferré célèbre pour son efficacité et sa ponctualité. Fin juin, on apprenait finalement que c’est officiellement une limace s’étant introduite dans un boîtier électrique avant de griller net qui avait fait disjoncter le tout.

NO G7 2019 ni à Biarritz ni ailleurs

Mobilisation contre le sommet du G7 à Biarritz – 2019
Après la magnifique période de résistance autour du sommet du G20 de Hambourg en 2017, après le sommet du G7 de Juin 2018 au Québec – placé sous un niveau répressif inégalé, avec sa “zone d’expression libre” – , l’histoire des luttes locales, …Voilà que le sommet du G7 2019 est annoncé pour avoir lieu à a la fin de l’été 2019 à Biarritz. Des entreprises collaborent. Par exemple Colas- Sud -Ouest  qui a fait des travaux de restructuration  à l’aéroport  afin d’accueillir le G7
Nous ne nous faisons aucune illusion sur le niveau répressif que l’on est en droit d’attendre de la part de Castaner

Le G7, une aberration démocratique, entre autres

Le sommet du G7 approche et l’effervescence monte. Du 24 au 26 août, sept des chefs des Etats parmi les plus riches de la planète se retrouveront à Biarritz.

Les répercussions concrètes de l’organisation de ce sommet en pleine saison estivale, au cœur de la zone de fréquentation touristique déjà insupportable en temps normal, se précisent. Une partie du Pays Basque Nord sera en état de siège : réquisitions d’établissements scolaires, de campings, de terrains, du centre de rétention administrative d’Hendaye, annulation des transports en train, du marché de Bayonne, de certaines manifestations culturelles ou festives, telle la menace d’annuler la cavalcade d’Itxassou pour assurer la sécurité et la tranquilité des conjoints de chefs d’Etat qui se promèneraient par là… Cette réunion implique une importante limitation des libertés publiques de circulation. L’occupation policière sera étouffante (15 000 militaires et policiers annoncés).

Ce type de sommet représente un gaspillage d’argent public considérable (500 millions de dollars en 2018) pour de pures opérations de communication, alors même que l’on nous explique à chaque réforme qu’il faut faire des efforts de rigueur budgétaire !

Et si tout cela ne suffisait pas, nous assistons ces derniers jours à une guerre psychologique, qui consiste à instiller la peur, chez les commerçants, les habitants, les potentiels manifestants anti-G7… par des menaces et intox diverses. La préfecture appelle même, de-ci de-là, la population à la délation si toutefois elle remarquait quelque individu suspect.

Mais, au delà des entraves qu’il suppose, le G7 est avant tout une abbération démocratique. Les sommets du G7 symbolisent la domination des principales puissances occidentales. Les sept puissances concernées ne représentent que 10 % de la population mondiale (mais 40 % du PIB mondial) et n’a aucune existence juridique. Mais il conditionne pourtant le quotidien et l’avenir de la planète. C’est dans le cadre des compromis définis entre les sept que se décident les politiques économiques et financières qui seront imposées aux peuples du monde.

D’ailleurs, sur le site du gouvernement français traitant du G7, on peut lire que dès 1975, la déclaration issue du premier sommet “montre déjà le sentiment de responsabilité des pays membres envers les pays les plus pauvres”. Et pour cause ! Ces sept puissances se rencontrent pour perpétuer un système au service des plus riches et des multinationales. Les déclarations finales de ces sommets se résument à une liste de bonnes intentions jamais suivies de mesures contraignantes.

Les luttes et les alternatives construites de longue date au Pays Basque, pour la reconnaissance des peuples, pour l’urgence écologique et sociale, sont à l’opposé du modèle inégalitaire et climaticide perpétué par les sept. C’est pourquoi, l’implication de certains acteurs locaux, entreprises ou particuliers dans l’organisation ou les opérations de blanchiment du sommet fait mal.

Mobilisons-nous pour nous opposer au G7 et au monde qu’il représente !

Anita LOPEPE
Porte-parole EH Bai

Mexique:Les migrants du Cameroun et de l’Érythrée bloquent le port d’entrée

https://itsgoingdown.org/

Rapport de Commotion.World sur les récentes actions des migrants à la frontière à Tijuana contre les conditions et la corruption d’agents publics. Toutes les photos sont de A. López Uribe.

Le 9 juillet 2019, une centaine de Camerounais et d’Érythréens ont bloqué l’accès aux fourgonnettes mexicaines qui transportaient des migrants vers les États-Unis. Les migrants ont protesté contre le fait que des responsables mexicains prenaient des pots-de-vin, non des numéros d’appels, et oubliaient les noms des Africains.

Les migrants africains, dont beaucoup fuient la persécution politique, sont bloqués à Tijuana depuis des mois.