Archives mensuelles : août 2017

Parution: COUP POUR COUP Émile Henry édition l’assoiffé

 

.non-fides

Déclaration d’Émile Henry à son procès

Messieurs les jurés,

Vous connaissez les faits dont je suis accusé : l’explosion de la rue des Bons-Enfants qui a tué cinq personnes et déterminé la mort d’une sixième, l’explosion du café Terminus, qui a tué une personne, déterminé la mort d’une seconde et blessé un certain nombre d’autres, enfin six coups de revolver tirés par moi sur ceux qui me poursuivaient après ce dernier attentat.

 

Les débats vous ont montré que je me reconnais l’auteur responsable de ces actes.

Ce n’est pas une défense que je veux vous présenter. Je ne cherche en aucune façon à me dérober aux représailles de la société que j’ai attaquée. D’ailleurs je ne relève que d’un seul Tribunal, moi-même ; et le verdict de tout autre m’est indifférent. Je veux simplement vous donner l’explication de mes actes et vous dire comment j’ai été amené à les accomplir.

Je suis anarchiste depuis peu de temps. Ce n’est guère que vers le milieu de l’année 1891 que je me suis lancé dans le mouvement révolutionnaire. Auparavant, j’avais vécu dans des milieux totalement imbus de la morale actuelle. J’avais été habitué à respecter et même à aimer les principes de patrie, de famille, d’autorité et de propriété. Mais les éducateurs de la génération actuelle oublient trop fréquemment une chose, c’est que la vie, avec ses luttes et ses déboires, avec ses injustices et ses iniquités, se charge bien, l’indiscrète, de dessiller les yeux des ignorants et de les ouvrir à la réalité. C’est ce qui m’arriva, comme il arrive à tous. On m’avait dit que cette vie était facile et largement ouverte aux intelligents et aux énergiques, et l’expérience me montra que seuls les cyniques et les rampants peuvent se faire une place au banquet. On m’avait dit que les institutions sociales étaient basées sur la justice et l’égalité, et je ne constatais autour de moi que mensonges et fourberies. Chaque jour m’enlevait une illusion. Partout où j’allais, j’étais témoin des mêmes douleurs chez les uns, des mêmes jouissances chez les autres. Je ne tardais pas à comprendre que les grands mots qu’on m’avait appris à vénérer : honneur, dévouement, devoir, n’étaient qu’un masque voilant les plus honteuses turpitudes. L’usinier qui édifiait une fortune colossale sur le travail de ses ouvriers, qui eux, manquaient de tout, était un monsieur honnête. Le député, le ministre dont les mains étaient toujours ouvertes aux pots-de-vin, étaient dévoués au bien public. L’officier qui expérimentait le fusil nouveau modèle sur des enfants de sept ans avait bien fait son devoir et, en plein Parlement, le président du Conseil lui administrait ses félicitations ! Tout ce que je vis me révolta, et mon esprit s’attacha à la critique de l’organisation sociale. Cette critique a été trop souvent faite pour que je la recommence. Il me suffira de dire que je devins l’ennemi d’une société que je jugeais criminelle.

Un moment attiré par le socialisme, je ne tardai pas à m’éloigner de ce parti. J’avais trop d’amour pour la liberté, trop de respect de l’initiative individuelle, trop de répugnance à l’incorporation pour prendre un numéro dans l’armée matriculée du quatrième Etat.

D’ailleurs je vis qu’au fond le socialisme ne change rien à l’ordre actuel. Il maintient le principe autoritaire, et ce principe, malgré ce qu’en peuvent dire de prétendus libres penseurs, n’est qu’un vieux reste de la foi en une puissance supérieure. Des études scientifiques m’avaient graduellement initié au jeu des forces naturelles. Or j’étais matérialiste et athée ; j’avais compris que l’hypothèse Dieu était écartée par la science moderne, qui n’en avait plus besoin. La morale religieuse et autoritaire, basée sur le faux, devait donc disparaître. Quelle était alors la nouvelle morale en harmonie avec les lois de la nature qui devait régénérer le vieux monde et enfanter une humanité heureuse ?

C’est à ce moment que je fus mis en relation avec quelques compagnons anarchistes, qu’aujourd’hui je considère encore comme les meilleurs que j’ai connu. Le caractère de ces hommes me séduisit tout d’abord. J’appréciais en eux une grande sincérité, une franchise absolue, un mépris profond de tous les préjugés, et je voulus connaître l’idée qui faisait des hommes si différents de tous ceux que j’avais vu jusque-là. Cette idée trouva en mon esprit un terrain tout préparé, par des observations et des réflexions personnelles, à la recevoir. Elle ne fit que préciser ce qu’il y avait encore chez moi de vague et de flottant. Je devins à mon tour anarchiste. Je n’ai pas à développer ici la théorie de l’anarchie. Je ne veux en retenir que le côté révolutionnaire, le côté destructeur et négatif pour lequel je comparais devant vous. En ce moment de lutte aiguë entre la bourgeoisie et ses ennemis, je suis presque tenté de dire avec le Souvarine de Germinal : « Tous les raisonnements sur l’avenir sont criminels, parce qu’ils empêchent la destruction pure et simple et entravent la marche de la révolution. »

Dès qu’une idée est mûre, qu’elle a trouvé sa formule, il faut sans plus tarder en trouver sa réalisation. J’étais convaincu que l’organisation actuelle était mauvaise, j’ai voulu lutter contre elle, afin de hâter sa disparition. J’ai apporté dans la lutte une haine profonde, chaque jour avivée par le spectacle révoltant de cette société, où tout est bas, tout est louche, tout est laid, où tout est une entrave à l’épanchement des passions humaines, aux tendances généreuses du cœur, au libre essor de la pensée. J’ai voulu frapper aussi fort et aussi juste que je le pouvais. Passons donc au premier attentat que j’ai commis, à l’explosion de la rue des Bons-Enfants.

J’avais suivi avec attention les évènements de Carmaux. Les premières nouvelles de la grève m’avaient comblé de joie : les mineurs paraissaient disposés à renoncer aux grèves pacifiques et inutiles, où le travailleur confiant attend patiemment que ses quelques francs triomphent des millions des compagnies. Ils semblaient entrés dans une voie de violence qui s’affirma résolument le 15 août 1892. Les bureaux et les bâtiments de la mine furent envahis par une foule lasse de souffrir sans se venger : justice allait être faite de l’ingénieur si haï de ses ouvriers, lorsque des timorés s’interposèrent. Quels étaient ces hommes ? Les mêmes qui font avorter tout les mouvements révolutionnaires, parce qu’ils craignent qu’une fois lancé le peuple n’obéisse plus à leurs voix, ceux qui poussent des milliers d’hommes à endurer des privations pendant des mois entiers, afin de battre la grosse caisse sur leurs souffrances et se créer une popularité qui leur permettra de décrocher un mandat – je veux dire les chefs socialistes- ces hommes, en effet, prirent la tête du mouvement gréviste. On vit tout à coup s’abattre sur le pays une nuée de messieurs beaux parleurs, qui se mirent à la disposition entière de la grève, organisèrent des souscriptions, firent des conférences, adressèrent des appels de fonds de tous les côtés. Les mineurs déposèrent toute initiative entre leurs mains. Ce qui arriva, on le sait. La grève s’éternisa, les mineurs firent une plus intime connaissance avec la faim, leur compagne habituelle ; ils mangèrent le petit fonds de réserve de leur syndicat et celui des autres corporations qui leur vinrent en aide, puis au bout de deux mois, l’oreille basse, ils retournèrent à leur fosse, plus misérables qu’auparavant. Il eût été si simple, dès le début, d’attaquer la compagnie dans son seul endroit sensible, l’argent ; de brûler le stock de charbon, de briser les machines d’extraction, de démolir les pompes d’épuisement. Certes, la compagnie eût capitulé bien vite. Mais les grands pontifes du socialisme n’admettent pas ces procédés là, qui sont des procédés anarchistes. A ce jeu il y a de la prison à risquer, et, qui sait, peut-être une de ces balles qui firent merveille à Fourmies. On y gagne aucun siège municipal ou législatif. Bref, l’ordre un instant troublé régna de nouveau à Carmaux. La compagnie, plus puissante que jamais, continua son exploitation et messieurs les actionnaires se félicitèrent de l’heureuse issue de la grève. Allons, les dividendes seraient encore bons à toucher.

C’est alors que je me suis décidé à mêler, à ce concert d’heureux accents une voix que les bourgeois avaient déjà entendue, mais qu’ils croyaient morte avec Ravachol : celle de la dynamite. J’ai voulu montrer à la bourgeoisie que désormais il n’y aurait plus pour elle de joies complètes, que ses triomphes insolents seraient troublés, que son veau d’or tremblerait violemment sur son piédestal, jusqu’à la secousse définitive qui le jetterait bas dans la frange et le sang. En même temps j’ai voulu faire comprendre aux mineurs qu’il n’y a qu’une seule catégorie d’hommes, les anarchistes, qui ressentent sincèrement leurs souffrances et qui sont prêts à les venger. Ces hommes-là ne siègent pas au Parlement, comme messieurs Guesde et consorts, mais ils marchent à la guillotine. Je préparais donc une marmite. Un moment, l’accusation que l’on avait lancée à Ravachol me revint en mémoire. Et les victimes innocentes ? Mais je résolus bien vite la question. La maison où se trouvaient les bureaux de la compagnie de Carmaux n’était habitée que par des bourgeois. Il n’y aurait donc pas de victimes innocentes. La bourgeoisie, tout entière, vit de l’exploitation des malheureux, elle doit toute entière expier ses crimes. Aussi, c’est avec la certitude absolue de la légitimité de mon acte que je déposai la marmite devant la porte des bureaux de la société. J’ai expliqué, au cours des débats, comment j’espérais, au cas où mon engin serait découvert avant son explosion, qu’il éclaterait au commissariat de police, atteignant toujours ainsi mes ennemis. Voilà donc les mobiles qui m’ont fait commettre le premier attentat que l’on me reproche.

Passons au second, celui du café Terminus. J’étais venu à Paris lors de l’affaire Vaillant. J’avais assisté à la répression formidable qui suivit l’attentat du Palais-Bourbon. Je fus témoin des mesures draconiennes prises par le gouvernement contre les anarchistes. De tous côtés on espionnait, on perquisitionnait, on arrêtait. Au hasard des rafles, une foule d’individus était arrachée à leur famille et jetée en prison. Que devenaient les femmes et les enfants de ces camarades pendant leur incarcération ? Nul ne s’en occupait. L’anarchiste n’était plus un homme, c’était une bête fauve que l’on traquait de toutes parts et dont toute la presse bourgeoise, esclave vile de la force, demandait sur tous les tons l’extermination. En même temps, les journaux et les brochures libertaires étaient saisis, le droit de réunion était prohibé. Mieux que cela : lorsqu’on voulait se débarrasser complètement d’un compagnon, un mouchard déposait le soir dans sa chambre un paquet contenant du tanin, disait-il, et le lendemain une perquisition avait lieu, d’après un ordre daté de l’avant-veille. On trouvait une boîte pleine de poudres suspectes, le camarade passait en jugement et récoltait 3 ans de prison. Demandez donc si cela n’est pas vrai au misérable indicateur qui s’introduisit chez le compagnon Mérigeault ? Mais tous ces procédés étaient bons. Ils frappaient un ennemi dont on avait eu peur, et ceux qui avaient tremblé voulaient se montrer courageux. Comme couronnement à cette croisade contre les hérétiques, n’entendit-on pas M. Raynal, ministre de l’Intérieur, déclarer à la tribune de la Chambre que les mesures prises par le gouvernement avaient eu un bon résultat, qu’elles avaient jeté la terreur dans le camp anarchiste. Ce n’était pas encore assez. On avait condamné à mort un homme qui n’avait tué personne, il fallait paraître courageux jusqu’au bout : on le guillotine un beau matin. Mais, messieurs les bourgeois, vous aviez un peu trop compté sans votre hôte. Vous aviez arrêté des centaines d’individus, vous aviez violé bien des domiciles ; mais il y avait encore hors de vos prisons des hommes que vous ignoriez, qui, dans l’ombre, assistaient à votre chasse à l’anarchiste et qui n’attendaient que le bon moment pour, à leur tour, chasser les chasseurs. Les paroles de M. Raynal étaient un défi jeté aux anarchistes. Le gant a été relevé. La bombe du café Terminus est la réponse à toutes vos violations de la liberté, à vos arrestations, à vos perquisitions, à vos lois sur la presse, à vos expulsions en masse d’étrangers, à vos guillotinades. Mais pourquoi, direz-vous, aller s’attaquer à des consommateurs paisibles, qui écoutent de la musique et qui, peut-être, ne sont ni magistrats, ni députés, ni fonctionnaires ? Pourquoi ? C’est bien simple. La bourgeoisie n’a fait qu’un bloc des anarchistes. Un seul homme, Vaillant, avait lancé une bombe ; les neuf dixièmes des compagnons ne le connaissaient même pas. Cela n’y fit rien. On persécuta en masse. Tout ce qui avait quelque relation anarchiste fut traqué. Eh bien ! Puisque vous rendez ainsi tout un parti responsable des actes d’un seul homme, et que vous frappez en bloc, nous aussi, nous frappons en bloc. Devons-nous seulement nous attaquer aux députés qui font les lois contre nous, aux magistrats qui appliquent ces lois, aux policiers qui nous arrêtent ? Je ne pense pas. Tous les hommes ne sont que des instruments n’agissant pas en leur propre nom, leurs fonctions ont été instituées par la bourgeoisie pour sa défense ; ils ne sont pas plus coupables que les autres. Les bons bourgeois qui, sans être revêtus d’aucunes fonctions, touchent cependant les coupons de leurs obligations, qui vivent oisifs des bénéfices produits par le travail des ouvriers, ceux-là aussi doivent avoir leur part de représailles. Et non seulement eux, mais encore tous ceux qui sont satisfaits de l’ordre actuel, qui applaudissent aux actes du gouvernement et se font ses complices, ces employés à 300 et à 500 francs par mois qui haïssent le peuple plus encore que le gros bourgeois, cette masse bête et prétentieuse qui se range toujours du côté du plus fort, clientèle ordinaire du Terminus et autres grands cafés. Voilà pourquoi j’ai frappé dans le tas, sans choisir mes victimes. Il faut que la bourgeoisie comprenne que ceux qui ont souffert sont enfin las de leurs souffrances ; ils montrent les dents et frappent d’autant plus brutalement qu’on a été brutal avec eux. Ce n’est pas aux assassins qui ont fait la semaine sanglante et Fourmies de traiter les autres d’assassins. Ils n’épargnent ni femmes ni enfants bourgeois, parce que les femmes et les enfants de ceux qu’ils aiment ne sont pas épargnés non plus. Ne sont-ce pas des victimes innocentes que ces enfants qui, dans les faubourgs, se meurent lentement d’anémie, parce que le pain est rare à la maison ; ces femmes qui dans vos ateliers pâlissent et s’épuisent pour gagner quarante sous par jour, heureuses encore quand la misère ne les force pas à se prostituer ; ces vieillards dont vous avez fait des machines à produire toute leur vie, et que vous jetez à la voirie et à l’hôpital quand leurs forces sont exténuées ? Ayez au moins le courage de vos crimes, messieurs les bourgeois, et convenez que nos représailles sont grandement légitimes.

Certes, je ne m’illusionne pas. Je sais que mes actes ne seront pas encore bien compris des foules insuffisamment préparées. Même parmi les ouvriers, pour lesquels j’ai lutté, beaucoup, égarés par vos journaux, me croient leur ennemi. Mais cela m’importe peu. Je ne me soucie du jugement de personne. Je n’ignore pas non plus qu’il existe des individus se disant Anarchistes qui s’empressent de réprouver toute solidarité avec les propagandistes par le fait. Ils essayent d’établir une distinction subtile entre les théoriciens et les terroristes. Trop lâches pour risquer leur vie, ils renient ceux qui agissent. Mais l’influence qu’ils prétendent avoir sur le mouvement révolutionnaire est nulle. Aujourd’hui, le champ est à l’action, sans faiblesse, et sans reculade. Alexandre Herzen, le révolutionnaire russe, l’a dit : « De deux choses l’une, ou justicier et marcher en avant ou gracier et trébucher à moitié route. » Nous ne voulons ni gracier ni trébucher, et nous marcherons toujours en avant jusqu’à ce que la révolution, but de nos efforts, vienne enfin couronner notre œuvre en faisant le monde libre. Dans cette guerre sans pitié que nous avons déclarée à la bourgeoisie, nous ne demandons aucune pitié. Nous donnons la mort, nous saurons la subir. Aussi, c’est avec indifférence que j’attends votre verdict. Je sais que ma tête n’est pas la dernière que vous couperez ; d’autres tomberont encore, car les meurt-de-faim commencent à connaître le chemin de vos grands cafés et de vos grands restaurants Terminus et Foyot. Vous ajouterez d’autres noms à la liste sanglante de nos morts. Vous avez pendu à Chicago, décapité en Allemagne, garroté à Jerez, fusillé à Barcelone, guillotiné à Montbrison et à Paris, mais ce que vous ne pourrez jamais détruire, c’est l’anarchie. Ses racines sont trop profondes ; elle est née au sein d’une société pourrie qui se disloque, elle est une réaction violente contre l’ordre établi. Elle représente les aspirations qui viennent battre en brèche l’autorité actuelle, elle est partout, ce qui la rend insaisissable. Elle finira par vous tuer.

Voilà, messieurs les jurés, ce que j’avais à vous dire. Vous allez maintenant entendre mon avocat. Vos lois imposant à tout accusé un défenseur, ma famille a choisi Me Hornbostel. Mais ce qu’il pourra dire n’infirme en rien ce que j’ai dit. Mes déclarations sont l’expression exacte de ma pensée. Je m’y tiens intégralement.

Émile Henry.

 quatrième de couverture:
« Au surplus, j’ai bien le droit  de sortir du théâtre
 quand la pièce me devient odieuse
 et même de faire claquer la porte en sortant,
au risque de troubler la tranquillité de ceux qui sont satisfaits »
Émile Henry

 

 

Bar-le-Duc, France : Beaucoup de rage et quelques flammes chez ENEDIS

sansattendre.noblogs.org

À Bar-le-Duc, dans la nuit du 16 au 17 août, nous avons brûlé plusieurs voitures sur le parking de l’entreprise ENEDIS.

Notamment pour le lien que cette entreprise entretient avec le projet CIGEO, l’enfouissement des déchets radioactifs à Bure étant une étape nécessaire vers une production toujours plus grande d’énergie nucléaire. Mais aussi pour toute la merde qu’elle représente, comme les compteurs linky, les coupures d’électricité chez celles et ceux qui peuvent pas payer, la course au profit, bref.

Ces derniers mois, plusieurs attaques contre ENEDIS¹ ont été revendiquées, nous avons voulu y faire écho, ça nous a fait plaisir, et la nôtre est un clin d’oeil aux personnes qui se sont mises en jeu pour les faire.

Nous pensons qu’il n’y a pas besoin d’attendre d’être beaucoup et faire masse pour attaquer, qu’il est aussi possible de le faire a quelques un-e-s, les possibilités sont différentes, mais pas moins réjouissantes. Nous nous réjouissons des attaques récentes sur les antennes relais², qui ouvrent de nouvelles perspectives d’actions directes.

Par cette attaque nous envoyons toute notre solidarité aux compagnon-ne-s de Turin et de Florence qui subissent la répression en Italie parce qu’ils ou elles ne baissent pas la tête, à Kara et Krem emprisonnées en france pour la voiture de keuf brûlée, à Damien à qui on souhaite le meilleur rétablissement possible, et aussi aux prisonniers et prisonnières anarchistes arrêté-e-s pendant le G20 à Hambourg.

Des anarchistes.

 [Publié sur indymédia Nantes, jeudi 17 août 2017]

NdSAD:

¹Petite chronologie des incendies contre ENEDIS, pour rafraîchir la mémoire:

²Pour rappel:

 

Hambourg, Allemagne : Lettre d’un prisonnier du G20 – 14 août 2017

/sansattendre.noblogs.org

Hambourg été 2017 : j’y suis, j’y reste !

Lettre d’un prisonnier du G20 du 14.08.17, depuis la prison de Billwerder à Hambourg:

 

Voilà près d’un mois et demi que j’ai été incarcéré, pendant le douzième sommet du G20, à Hambourg, dans une ville qui a été assiégée et prise en otage par les forces de l’ordre mais qui a aussi vu naître pour l’occasion une contestation locale et populaire assez importante.

Des dizaines de milliers de personnes, si ce n’est plus, affluant de toute l’Europe, voire de plus loin, se sont rencontrées, organisées et ont convergé, discuté, défilé ensemble pendant plusieurs jours dans un grand élan de solidarité tout en ayant conscience de pouvoir subir à tout moment la violence et la répression de la police. Un immense tribunal de police en algeco avait même été construit pour l’occasion, afin de sanctionner dans les plus brefs délais toute contestation contre ce sommet international.

Mon interpellation, comme celle de beaucoup de compagnon(ne)s, ne reposant uniquement sur la seule base de la sacro-sainte parole policière, celle d’une brigade habilitée à s’infiltrer, observer et prendre en filature « ses proies » (quarante-cinq minutes dans mon cas, pour un supposé jet de projectile…), jusqu’à ce qu’une fois isolées, il y ait la possibilité de les interpeller en leur envoyant des collègues qui interviennent rapidement, violemment, ne nous laissant aucun échappatoire.

Me voilà donc enfermé dans ces lieux primordiaux au bon fonctionnement d’un ordre social global, ces lieux servant d’outil de contrôle et de gestion de la misère, essentiels au maintien de leur « paix sociale ». La prison agissant comme une épée de Damoclès au dessus de chaque individu afin qu’il soit pétrifié à l’idée de déroger aux codes et diktat d’un ordre établi : « métro, boulot, conso, dodo », auquel aucun dominé ne devrait échapper pour ainsi s’aliéner au travail et à la vie qui va avec, être à l’heure, sans jamais broncher, et pas seulement au second tour des présidentielles, où on a exigé de nous d’être « En Marche » ou de crever, mais de préférence lentement et silencieusement.

Le droit n’ayant aucune vocation à assurer l’intérêt général, ni d’être neutre, il est l’expression d’une domination toujours plus accrue et instituée par les plus puissants afin de leur garantir propriété et sécurité et ainsi tétaniser, sanctionner, marginaliser toute personne ne voyant pas les choses ainsi ou ne s’y pliant pas.

Au-delà des cas des militant(e)s enfermé(e)s, assez soutenu(e)s et mis en avant dans ces cas-là, perdurent aussi mais surtout ceux d’hommes et de femmes livrés à la brutalité et à la cruauté de l’enfermement carcéral. Par ici le travail est gratifié un euro de l’heure, dont la moitié de cet euro n’etant touchable qu’une fois libéré. Dans mon aile, des détenus en détention provisoire ou pour de courtes peines (de six mois à quatre ans) ne le sont principalement que pour une seule raison : leur condition et origine sociale. A part le personnel, très peu sont du pays hôte, tous sont étrangers, réfugiés et/ou précaires, pauvres, fragilisés par la vie. Leur crime : ne pas s’être soumis à « leurs » règles du jeu pour la majorité en se livrant à la vente de stups’ ou en commettant vols, escroqueries, seuls ou en bandes organisées à diverses échelles.

L’enfermement est un pilier primordial de ce système mais on ne peut le critiquer sans s’attaquer à la société qui le produit. La prison, ne fonctionnant pas en autarcie, est le parfait maillon d’une société basée sur l’exploitation, la domination et la séparation sous ses formes variées.
« Le travail et la prison sont deux piliers essentiels au contrôle social, le travail étant la meilleure des polices et la réinsertion un chantage permanent. »

Pensées pour les camarades italiens faisant face à une énième vague de répression, en particulier ceux inculpés dans l’enquête sur « l’engin explosif » déposé devant une librairie liée à Casapound. L’extrême droite se doit de faire face à une riposte organisée, populaire et offensive. Elle qui est si utile et complémentaire à ces États qui se nourrissent de ses aspirations et délires sécuritaires et de sa stigmatisation incessante de « l’étranger ».

Pensées également aux camarades qui affronteront en septembre prochain le procès de la voiture de flics brûlée le dix-huit mai de l’année dernière, à Paris, pendant le mouvement « loi travail ». Beaucoup de personnes sont passées par la prison et deux sont encore incarcérées. Force à eux !

Remerciements aux militants locaux organisant des rassemblements parfois devant notre prison, initiative appréciée par ici et cassant la routine et l’état de léthargie ambiant auquel on nous formate. Remerciements à tous ceux/celles qui nous soutiennent de près ou de loin ici et ailleurs.
Aux Bro’, 161, MFC, OVBT, jeunes sauvages, ceux qui BLF et autres ami(e)s…
Camarades, force !

Libérons les prisonnier(e)s du G20 et tou(te)s les autres ! On n’est pas tout seul !

Un enfermé parmi d’autres
Prison de Billwerder,
Hambourg
14.08.2017

[Publié sur indymedia nantes, mercredi 16 août 2017]

Sous la plage les pavés – Un site anarchiste de Nice et du Sud-Est: Marius Jacob à Sète

note: le fil  noir  de l’histoire est repris,

Sur le passage à Sète de l’anarchiste et cambrioleur Alexandre Marius Jacob et la formation de sa bande « Les Travailleurs de la Nuit »…

 

 

  Alexandre Jacob ne se cache pas à Sète par hasard après son évasion de l’asile Montperrin d’Aix en Provence dans la nuit du 18 au 19 avril 1900. La ville bénéficie en effet d’une solide tradition d’activisme libertaire. Ernest Elisée Saurel n’est pas non plus un anarchiste inconnu. Le commissaire central de Sète voit d’ailleurs en lui le 21 août 1898 « un des plus militants » de la ville. Saurel y est d’ailleurs né vers 1862. Il exerce la profession de tailleur d’habits et loge chez sa maîtresse, Aliette Amiel, rue Concorde. L’amitié qui le lie à Caserio ferait même de lui un compagnon localement de premier ordre.

Après être passé par Lausanne, Genève, Lyon et Vienne, l’assassin de Sadi Carnot arrive à Sète en octobre 1893. Il est immédiatement pris en charge par le groupe anarchiste local. « Saurel devient aussitôt son ami tandis que le boulanger Viala l’engage comme garçon » écrit Jean Sagnes dans l’article Complot contre Sadi Carnot, qu’il donne au magazine L’Histoire en mai 1994. Caserio loge chez Saurel mais est très vite repéré par la police. Le 6 mars 1894, le commissaire central de Sète dresse un portrait à fortiori équivoque du jeune Italien, né à Motta Visconti en Lombardie le 8 septembre 1873. « Je ne le crois pas dangereux » affirme-t-il en conclusion de son rapport. La notice individuelle de Saurel, établie un mois plus tôt, indique au contraire « un caractère sournois ».

Le 23 juin, Santo Géronimo Caserio quitte Sète pour aller à Vienne ; de là, il se rend à Lyon. Le 24 juin; il y poignarde le président de la république vers 21 heures. Carnot décède le 25 à 0h30. L’événement fait date. Si la thèse d’un complot savamment ourdi par le groupe anarchiste que dirige Saurel est fréquemment avancée, rien ne permet d’affirmer concrètement que les compagnons sétois aient projeté l’assassinat. Caserio indique d’ailleurs à la police de Lyon avoir agi seul et la justice de cette ville retient cette hypothèse. Il est exécuté le 16 août.

Saurel semble ne pas avoir été inquiété outre mesure pour cette retentissante affaire même si son nom revient très souvent dans les rapports de la police sétoise par la suite. Tous ses déplacements sont surveillés. Un rapport du 15 décembre 1899 signale à ce propos que « Saurel est à tous les points de vue un individu des plus dangereux ».

Aussi les notes de police se multiplient-elles, à cette époque, pour annoncer une deuxième tentative d’installation de l’anarchiste à Paris. Un an plus tôt, il avait pendant trois mois cherché vainement du travail dans la capitale et s’était inscrit à l’hôtel des Acacias, 11 rue Feutrier, sous le nom de François Bouvilla. Le pseudonyme utilisé est issu des nom et prénom de sa mère Françoise Boubilla. Le deuxième séjour parisien de Saurel se solde comme le précédent par un échec.

C’est à Sète qu’Alexandre Jacob vient trouver un appui après son évasion de l’asile Montperrin sous la fausse identité de Jean Concorde. L’honnête cambrioleur a pris le nom de la rue où réside Saurel. Mais le fait prouve que l’anarchiste sétois a su depuis son retour de Paris se faire discret au point que la police ne s’alerte pas d’un quelconque activisme de sa part à ce moment. La propagande par le fait aurait-elle cédé le pas à la reprise individuelle ; la pince monseigneur remplace la marmite à renversement.

Un anarchiste de la Belle Epoque, Alain Sergent« Jacob projetait de constituer une bande d’anarchiste cambrioleurs bien organisée, soumise à une discipline librement consentie mais très exigeante. L’unité de base devait en être la brigade. Chez Saurel, la première brigade fut créée. Elle se composait de quatre hommes dont Jacob fut le chef » (Alain Sergent, Un anarchiste de la Belle Epoque, p.52).

Nous ne savons pas avec exactitude qui fait partie de la bande. Tout au plus pouvons-nous nous risquer à avancer quelques noms : Joseph Ferrand, Honoré Bonnefoy, Jules Clarenson, Marius Royère et Ernest Saurel. Marius Baudy est en prison à cette époque. Il paraît douteux que Saurel se soit contenté d’un simple hébergement. Son nom revient d’ailleurs en 1902 dans une série de rapports de police. Les 25 et 26 février de cette année, il accueille « un nommé Jacques Sautarel, marchand de bijoux d’occasion, venu à Cette, a-t-il dit, pour son commerce. Sautarel serait connu à Paris comme anarchiste militant ». Saurel joue ici le rôle de receleur et écoule les produits d’une bande de voleurs dont le siège est désormais établi à Paris depuis le commencement de 1901.

Mais auparavant, et pendant huit mois environ, le groupe de voleurs va travailler dans le Midi de la France. Nous ne connaissons pas le nombre de cambriolages commis durant cette période. En retenant la moyenne d’un vol par semaine, moyenne établie par le président Wehekind du tribunal d’Amiens en 1905, Alexandre Jacob et ses compagnons auraient ainsi œuvré au minimum 36 fois. Un seul cambriolage est néanmoins retenu lors du procès des Travailleurs de la Nuit dans cette même ville d’Amiens, du 8 au 22 mars 1905.Et c’est dans la ville d’Ernest Saurel que le vol a lieu :

« Vol à Cette

Voici une des opérations fructueuses de la bande. Jacob l’aurait menée à bien après son évasion de l’asile d’aliénés d’Aix. Elle fut découverte dans les circonstances suivantes. Le 23 juillet 1900, vers 2h1/2 de l’après-midi, M. Torquebiau, avocat à Montpellier, en arrivant à la maison qu’il possède à Cette, quai de Bone 27, qu’une des carreaux avait été cassé à une porte vitrée. Avec l’aide de la police, il constata que des malfaiteurs s’étaient introduits chez lui par une lucarne d’une maison voisine, en passant par le toit. Toutes les chambres de la maison avaient été fouillées ; un coffre – fort placé contre un mur avait été couché sur un matelas et éventré. De nombreux bijoux avaient été enlevés ainsi que cinq obligation Ville de Paris, trois obligations Crédit Foncier, cinq bons Exposition 1900, deux bons Panama, etc. Le total du vol s’élevait à 40000 francs. (…) Personne n’était venu dans la maison depuis quinze jours. Des journaux marseillais, abandonnés par les voleurs et portant la date des 16 et 17 juillet, permettent d’établir que le vol a été commis entre le 17 et le 23 juillet. Jacob avoue en être un des auteurs. Les titres dérobés ont été négociés chez M. Lestibondois, agent de change à Paris. M. Torquebiau Emile raconte le vol dont il a été la victime. Il estime que les bijoux qui lui ont été pris valaient 40000 francs et qu’il y avait 8 à 10000 francs de valeurs. Jacob conteste le préjudice causé à la victime.

– Vous n’étiez pas seul ? Demande le Président.
– Oui, oui, en nombre suffisant ; nous étions en nombre suffisant ».

Le vol Torquebiau est intéressant à plusieurs titres. D’abord, il révèle une opération minutieusement préparée. Jacob et ses acolytes passent en effet par une maison mitoyenne pour dévaliser celle de l’avocat. Le butin est ensuite conséquent et il convient ensuite de l’écouler rapidement. Enfin, Jacob refuse de donner les noms de ceux qui l’ont accompagné. Le principe de solidarité prévalant « le chef » des Travailleurs de la Nuit ne compromet ainsi pas un compagnon de plus.

Les journaux marseillais trouvés dans la résidence ne permettent pas d’identifier ceux qui, « en nombre suffisant », ont participé à l’affaire. Tout au plus, pouvons-nous subodorer des amis de Jacob fréquentés dans la métropole des Bouches du Rhône, soit ceux cités précédemment. Mais le vol est commis à Sète et Saurel ne fut jamais inquiété pour celui-ci. Y-a-t’ il participé ? La question ainsi posée reste en suspens.

Trois ans plus tard, le commissaire central de Sète annonçant le départ de l’ancien ami de Caserio et  indique le 29 octobre 1903, qu’il « manifeste ne vouloir tirer ses moyens d’existence que du vol et peut devenir dangereux ».

Saurel se trouve à cette date à Nice où il se cache chez un tailleur italien, Del Piano, résidant au 7 de la rue Malausséna. Il a pris le nom de Pierre Laudes et serait passé par la Suisse, à Genève, où il aurait laissé son fils à un ami. Au même moment, le juge Hatté d’Abbeville mène l’instruction qui doit aboutir au procès des Travailleurs de la Nuit à Amiens.  Mais la justice picarde ne semble faire aucun lien entre Jacob et Saurel. Toujours est-il que ce dernier semble vouloir fuir sa ville natale en se réfugiant à Nice. Il y est pourtant arrêté peu de temps après comme le signale un rapport du commissaire spécial de Cette en date du 25 février 1904. Saurel est alors inculpé de complicité dans divers vols commis à Nîmes et dans la région :

« Saurel fut transféré à Nîmes puis à Montpellier où il est resté à l’instruction jusqu’au 23 courant. Ayant bénéficié d’une ordonnance de non-lieu, il est rentré à Cette avant-hier par le train de 7h55 du soir, (…) et loge chez sa maitresse, la femme Amiel, qui habite une petite maison isolée au quartier du Garrigou. Saurel doit à nouveau et sous peu quitter Cette pour une destination qu’il n’a pas encore fait connaître. »

Le 28 octobre 1904, le commissaire spécial de Cette signale au préfet de l’Hérault la présence de l’anarchiste à Barcelone. Saurel réside avec Aliette Amiel chez Gustave Sauzet au 83 de la Calle Salva mais l’épisode catalan ne dure pas. Après avoir cherché entrer en contact avec un certain Emile Dupré, recherché pour désertion depuis 1901, en envoyant une annonce dans le Libertaire du 15 au 22 novembre 1904, Saurel et Amiel rentrent sur Sète au mois de février de l’année suivante. Les fréquents déplacements sur Nîmes, Montpellier mais aussi Avignon en 1907 ne semblent pas indiquer une certaine aisance financière. Tout au plus pouvons-nous avancer l’existence de réseaux lui permettant de trouver de l’aide dans le Midi de la France. Nous perdons ensuite la trace d’Ernest Saurel, anarchiste et militant convaincu, ami de Caserio et complice d’Alexandre Jacob.

 

C’était bien chez Saurel

–          C’est maintenant qu’il fait sa bande ?

–          Oui, oui, tu peux sortir tous les autres Jacobils ?

–          Et c’est Jacob le chef ?

–          Y a pas de chef chez les anarchistes ! Mince ! je te l’ai déjà dit 20 fois.

Les discussions vont bon train chez François Bouvilla, rue Concorde à Sète. On est à deux pas du centre et à quelques encablures de la gare.  Le jeune homme écoute attentivement les souvenirs de son hôte. De temps à autres, il jette un coup d’œil furtif, à travers la fenêtre de la baraque. Rien en vue. Il ne se complait plus à refaire le monde autour d’un verre ou deux, il se projette dans le concret. Tous deux y croient à cette révolution qui semble, pourtant, s’éloigner de plus en plus. Jean Concorde ne boit pas d’ailleurs. Il ne s’appelle pas Jean Concorde non plus. Il n’est pas allé chercher très loin son pseudonyme. Comme François Bouvilla. Au pied de la table, le chien sommeille paisiblement :

–          Tu vois le cabot que tu caresses ? Il pourrait t’en dire plus que moi sur Caserio. Le gamin l’adorait pourtant et le chien lui rendait bien. A chaque fois qu’il rentrait de la boulangerie, c’était une véritable fête. Ça fera bientôt six ans maintenant qu’il est parti sans rien dire pour suriner Sadi Carnot.

–          Pécaïre ! Encore une tête d’anarchiste qui a roulé dans le son !

–          Comme tu le dis, l’a embrassé la Veuve mais, avant, ils te lui ont flanqué une sacrée raclée et l’ont exhibé comme une bête fauve alors qu’il n’y avait pas plus doux et attentionné. Et on a eu les flics qui flairaient partout après. La marmite on l’a vite remballée que j’te dis !

–          Moi ? Ils m’ont bien couillonné aussi avec l’Indicateur Anarchiste à Marseille.

–          Tu leur as rendu leur compte, non ?

–          Si on veut. Six mois chez les fadas à Aix en Provence quand même !  Certes, j’ai éprouvé la rapidité de mes réflexes, j’ai mis la solidité de mes nerfs à l’épreuve mais, à tout prendre, il ne s’agissait que d’escarmouches. Pas grand-chose. Non. Il faut une bataille d’envergure contre le capitalisme et ses privilégiés et ne plus s’attaquer, comme Ravachol, Henri ou Caserio, à des symboles mais aux fondements même de l’injustice sociale : la propriété et le coffre-fort. La marmite a fait couler le sang et le sang du bourgeois se paie trop cher pour un seul individu. Avec la pince monseigneur, en revanche, on peut vivre et propager nos idées.

–          Voler pour l’anarchie ?

–          Et pas seulement ! Pour la révolution … et pour nous, Ernest. Les malfaiteurs, les bandits, les démolisseurs comme moi sont loin d’être des ineptes. Crois – moi. Aujourd’hui j’use de tous les moyens pour démolir l’édifice social parce qu’il pue avec ses chancres et ses immondices, qu’il indigne avec ses injustices et ses cruautés.

–          T’as raison. Sais-tu que Darien n’écrit pas autre chose dans son Voleur en 1897 quand il fait parler son héros, Georges Randall : « Et pourquoi ne serait – ce pas le malfaiteur au bout du compte qui délivrerait le monde du joug infâme des honnêtes gens ? Si ç’avait été Barrabas qui avait chassé les vendeurs du Temple, peut – être qu’ils n’y seraient pas revenus ».

–          Barrabas, le roi des voleurs ? C’est drôle, j’ai signé certaines de mes visites du nom d’Attila pour me foutre de leur gueule à ces cul-bénits d’aristos et de bourgeois. Si je te disais ce qu’on lui a pris à l’autre cagole de comtesse de Cassagne ! Les copains de Barcelone en ont bien profité de son fric. Dommage que tous ne partagent pas, ici, notre point de vue.

–          T’étais encore qu’un gamin mais, à l’époque, avant que les bombes n’apeurent nos bouffe-galette et leurs moutons, Grave avait défendu Duval dans les colonnes du Révolté en 1887. Le droit à l’existence justifiait le vol selon lui et, lors de son procès, Duval avait revendiqué hautement ses actes : « Non, le vol n’existe que dans l’exploitation de l’homme par l’homme, en un mot par ceux qui vivent aux dépens de la classe productrice ». Mais, après, il y avait eu Pini, Parmeggiani, Schouppe et plein d’autres encore. Aujourd’hui, le pape de la rue Mouffetard nous compare aux bourgeois. On vivrait sur le dos de la société. Salaud !

–          C’est vrai, il a raison. Mais le tout est de savoir et de distinguer comment et sur qui chacun d’eux consomment. Le bourgeois consomme en dévalisant le travail, c’est à dire les ouvriers, alors que le cambrioleur consomme en livrant des assauts au capital, c’est à dire aux bourgeois. Le premier vole des millions au coin du feu, avec l’appui et la protection des gendarmes ; l’autre se révolte contre les lois en entreprises périlleuses, demeure pauvre et va crever au bagne ou sur l’échafaud.

–          Pire, on serait même des parasites !

–          Et c’est toujours vrai. mais là encore faut-il savoir distinguer. Le bourgeois est un parasite conservateur ; tous ses soins, tous ses désirs, ses aspirations tendent à un même but : la conservation de l’édifice social qui le fait vivre ; alors que le cambrioleur est un parasité démolisseur. Il ne s’adapte pas à la société ; il vit sur son balcon et ne descend en son sein que pour y livrer des assauts ; il ne se fait pas le complice et le dupe du parasite conservateur en allant passer ses journées à l’usine ou à l’atelier, comme le fait l’ouvrier, en consolidant avec ses bras ce que son cerveau voudrait détruire. Il ne travaille pas pour le compte et le profit de Monsieur Fripon et de Madame Fripouille mais pour lui et pour l’avènement d’un monde meilleur.

–          Tout seul ? Putain, il construira pas grand-chose ton voleur..

–          Ça, c’est sûr ! Et c’est pourquoi on est ici non ? L’ordre moins le pouvoir. Il faut s’organiser. Il faut travailler sur une plus grande échelle. On attend les autres et on s’y met.

Depuis le temps qu’il se planquait chez Ernest Saurel, Alexandre Jacob avait échafaudé son plan, mâché longuement sa réflexion. Il tenait désormais le vol pour une entreprise collective et pérenne, motivée qui plus est par un discours et une finalité politique : l’illégalisme. Or, une telle opération suppose au préalable l’existence d’un groupe, d’un rassemblement d’hommes et de femmes, en fin de compte d’une association : les Travailleurs de la Nuit.

Chacun, à l’intérieur de la bande, devait  apporter son expérience et tout un réseau de relations. Liberté aussi de venir et de partir, de donner son avis et de participer à l’honnête travail associatif mais, une fois les décisions prises collectivement, on devait s’y tenir. La réflexion dissout le geste, se plaisait-il à dire. Le butin ? Une partie, 10% minimum, irait à la cause, soutiendrait l’effort de propagande, aiderait les camaros dans le besoin, permettrait de faire vivre l’anarchie. Le reste pour le travailleur.

Saurel acquiesçait d’autant plus que, comme Jacob, ses efforts pour  vivre honnêtement s’étaient tous soldés par des échecs. La police républicaine le tenait pour un dangereux activiste et ne l’avait plus lâché après l’assassinat, le 25 juin 1894, de son plus haut représentant par un anarchiste italien. Saurel avait été l’ami de Santo Geronimo Caserio quand celui-ci était arrivé à Sète l’année précédente et, maintenant que les choses s’étaient calmées, que la pression s’était faite moins forte, il accueillait l’évadé Jacob. Il le suivait aussi dans tous ses retranchements dialectiques et défendait, comme lui, la reprise individuelle. Si la propriété était le vol, alors les voleurs pouvaient être des travailleurs honnêtes et hâter la révolution tout en vivant dignement des fruits de leur soi-disant délictueux labeur.

Le reste ne devait être qu’organisation. Saurel connaissait bien Sète et sa région. Il saurait indiquer les coups à monter. Et petit à petit, la première brigade de Travailleurs fut formée. La fine fleur des monte-en-l’air du Midi est peu à peu arrivée à Sète, puis, s’est installée à Montpellier pour ne pas éveiller les soupçons. Beaucoup sont anarchistes. Presque tous ont un casier judiciaire et pour certains très fourni :

Ferrand Joseph, né à Varambon dans l’Ain le 18 janvier 1880, signalé par la police comme un homme au « caractère emporté, parlant beaucoup, d’allure décidée », il porte le numéro 188 de l’Etat Vert des anarchistes considérés comme disparus. Onze condamnations au compteur. Il aurait quitté Marseille le 31 août 1898.

Clarenson Jules, né à Saintes en 1867, tentative d’homicide sur agent de police, appartenance à une bande de cambrioleurs qui écumait tout le Sud-ouest de la France, possession d’explosif, violence et rébellion, implication à Langon, en Gironde, dans une  bagarre en 1893 qui se solde par la mort du compagnon Daekeler, arrêté à Montpellier en 1897 en flagrant délit de cambriolage, simulateur ou vrai fou, interné de nombreuses fois en asile d’aliénés dont celui de Montperrin à Aix en Provence … et évadé aussitôt. Jacob a bien retenu la leçon. Joueur invétéré, en ménage un temps avec Rose Roux puis avec Antoinette Bernard, femme de chambre de Marcelle Deschamps, elle-même compagne d’Honoré Bonnefoy. Signalé comme anarchiste, Clarenson disparait de Marseille de manière impromptue en 1900.

Bonnefoy Honoré Alphonse Joseph, né à Paris le 10 janvier 1861, famille « honorable » selon la police, sergent-major au Tonkin, déserteur en 1881, séjour en Australie, Suisse et Angleterre, marié à Marcelle Deschamps, deux enfants. Le ménage vit d’expédients plus ou moins légaux. Son associé, un certain Bernard, est retrouvé mort dans le même wagon qu’il empruntait un jour de 1894. Non lieux judiciaire. Bernard se serait suicidé. Signalé comme anarchiste la même année, on retrouve sa trace à Marseille en 1897. Addiction au jeu comme son ami Clarenson. Fait l’objet d’un avis de recherche à partir de septembre 1900.

Jacques Sautarel a trente ans. Pas de condamnation pour vol mais de forts soupçons de recel. Jacques Sautarel est bijoutier. Une connaissance de Saurel et aussi un anarchiste convaincu, exalté, partisan de méthodes radicales. Catalan d’origine, il est installé à Paris et a travaillé à Toulouse, Montpellier, Sète, Perpignan … et à Marseille. En 1898, la police française le recherche activement à cause de ses écrits. Sautarel se pique de littérature ; il a fait publier une brochure au titre des plus évocateurs : Quand égorgerons-nous enfin ? Pour ces lignes, il s’est enfui … à Barcelone où il est emprisonné quelques temps au mois de juin de cette année. Des idées qui, fatalement, ne pouvaient que pousser cet anarchiste militant à passer de la théorie aux actes.

François Chalus, 25 ans, tenancier à Toulon d’une maison close, à maintes reprises jugé pour ivresse sur la voie publique ; Rose Roux, de son vrai nom Henriette Beziat, née le 1er septembre 1863, « ancienne femme galante de Marseille » selon un rapport de police, amante de Jacob, Marie Jacob, née Berthou, mère d’Alexandre, elle partage les idées de son rejeton, etc. D’autres encore viendront. Marius Royère, l’infirmier, a quitté son asile d’Aix en Provence pour suivre son ami Jacob. Marius Baudy, lui, repéré comme anarchiste exalté à Marseille en 1896 alors qu’il n’a que 21 ans et un parcours familial et professionnel des plus chaotiques, attend sa libération de la centrale de Nîmes où il purge une peine de trois ans de prison pour vol, violence et autres menus délits.

D’autres ne viendront pas. Alexandre Jacob se méfie de son père Joseph. Trop instable, trop imbibé aussi et surtout de gros, de très gros doutes après qu’il soit sorti libre de sa comparution en juin 1899 pour le coup du Mont de Piété. Même chose pour Maurel qui a disparu dans la nature. Arthur Roques fait carrière en solo depuis leur séparation au retour d’Espagne. Installé à Vichy, puis à Bordeaux, il se fait pincer à La Rochelle en 1901. Direction le bagne de Guyane, la souffrance et, au final, la mort en 1921.

A Sète, Jacob cherche à limiter les risques, à être le plus efficace, à porter de sales coups à cette gueuse de société capitaliste. Il a  réuni un groupe. Tous, en son sein, ne volent pas, certains ne font qu’appuyer, indiquer, receler, transmettre, négocier … Tous ne sont pas anarchistes non plus. Mais tous participent de leur plein gré, de près ou de loin, à l’entreprise qu’il vient de monter. Jacob and Co, entreprise politique de démolition économique et sociale, une pratique quasiment industrielle du vol : les Travailleurs de la Nuit sont nés.

 

 

Sources :

–          A.P.P.P., EA/89, dossier de presse “La bande sinistre et ses exploits“.

–          A.D. Hérault, 4M1102

–          A.C.F., 19940474/article 97/dossier 9401 : Jacques Sautarel 1893-1929

–          Alain Sergent, Un anarchiste de la Belle Epoque, Le Seuil, 1950

–          Sagnes jean, « Complot contre Sadi Carnot », dans L’Histoire, n°177, mai 1994, p.76-78.

 

 

Trouvé sur le blog Alexandre Jacob, l’honnête cambrioleur

 lu  dans le blog Sous la plage les pavés
souslaplagelespaves(a)riseup.net
https://souslaplagelespaves.noblogs.org
 et bien  d’autres  textes à visiter et aussi l’émission anti carcérale passe- muraille

 

 

Valence: centre pénitentiaire:Un drone vient « livrer » dans la cour de la prison [ +M AJ]

Image associée

france bleu Drôme Ardèche 15 août 2017 à 18:45

ouest france

Un cap a été franchi dans la façon de procurer des objets illégaux aux détenus. Hier c’est un drone qui est venu livrer un colis jusqu’à l’intérieur de la cour. Du jamais vu auparavant au centre pénitentiaire de Valence.

C’est du jamais vu à la prison de Valence. Un drone s’est posé dans la cour du centre pénitentiaire, avec une caméra embarquée et un colis accroché. La drôle de livraison s’est faite vers 15 heures ce mardi après-midi. Un horaire où presque tous les détenus de la maison d’arrêt sont à l’extérieur.

A travers les filets de protection

L’engin a pu se faufiler à travers les mailles du filet anti-hélicoptère qui couvre la cour de promenade de cette prison ultramoderne qui a connu deux mutineries en septembre et novembre 2016 dans le quartier réservé aux longues peines.

Ce drone a pu se faufiler à travers les mailles du filet anti-hélicoptère qui couvre la cour de promenade. L’alerte a aussitôt été donnée, les détenus tous fouillés. Mais rien à faire : la livraison a été bien dissimulée. Impossible de mettre la main sur le contenu du colis. Le drone, en tout cas, est un tout nouveau moyen d’approvisionnement en objets illégaux à l’intérieur de la prison. Jusqu’ici, les amis ou familles des détenus lançaient les colis par-dessus les grillages et murs d’enceinte. Mais les interpellations sont de plus en plus fréquentes pour les « lanceurs ». Il y a 10 jours un majeur et un mineur ont été interpellés un dimanche après-midi.


Dauphiné libéré le 16 août

« Après les projections extérieures c’est un acte que nous condamnons  fermement.. Nous demandons  une plus grande  sécurisation de l’établissement » déclare un représentant syndical..

 


 « La hiérarchie du centre pénitentiaire, la police, qui tente de remonter la piste du drone, ont été très réactives et le parquet a été saisi ».

« La hiérarchie du centre pénitentiaire, la police, qui tente de remonter la piste du drone, ont été très réactives et le parquet a été saisi ». | AFP

France Bleu Drome Ardèche           mercredi 16 août 2017 à 17:24

Drone à la prison de Valence : une opération contrôlée de l’intérieur

L’atterrissage d’un drone dans la cour de promenade de la prison de Valence ce mardi est une opération minutieusement préparée selon un syndicat de gardiens. Le contenu du colis n’a pas été retrouvé, et les enquêteurs recherchent toujours les destinataires et l’expéditeur.

Y avait-il un complice à l’intérieur de la prison de Valence, lorsque le drone s’est posé en pleine cour de promenade, ce mardi vers 15h30 ? Un syndicat de gardiens en est persuadé. Le drone transportait un colis. Mais impossible pour le moment de savoir à qui il était destiné, ni ce qu’il contenait.

Une opération très bien orchestrée

Au moment de l’atterrissage, une cinquantaine de détenus se trouvaient dans la cour. Ils n’ont montré aucun signe de surprise lorsque le drone a franchi le filet anti hélicoptère, pour se poser dans l’une des cours de la maison d’arrêt. Au contraire : ils ont entouré l’engin, pour le masquer des caméras. Puis le contenu du colis est passé de main en main. Pour le syndicat de gardiens UFAP UNSA Justice, peu de doute : le pilote du drone, à l’extérieur, avait un complice qui le guidait depuis l’intérieur, avec un téléphone.

Une fouille qui ne donne rien

Alertés, les gardiens se sont immédiatement précipités dans la cour. Le drone a tenté de redécoller, sans y parvenir. L’un des détenus l’a alors projeté dans une seconde cour de promenade, où d’autres détenus ont tenté de récupérer ce qu’ils pouvaient. Puis eux aussi ont envoyé l’appareil au-dessus du mur d’enceinte, dans la zone neutre.

Dans la première cour, la fouille a été effectuée immédiatement sur chacun des détenus présents, par petits groupes, pour éviter qu’ils ne se passent le contenu du colis. En vain : impossible de mettre la main sur lui.

Un colis qui fait craindre le pire

Le syndicat UFAP UNSA Justice assure que l’engin coute près de 1.000 euros. Soit ce qu’il transportait est donc plus cher, peut-être une grosse quantité de stupéfiants, soit il livrait quelque chose de difficile à se procurer. On craint évidemment un transport d’arme, type couteau en céramique. Le syndicat réclame la pose d’un filet anti projection (celui en cours de pose à Villefranche-sur-Saône coûterait environ un million d’euros), et des rondes plus fréquentes de la police lors des promenades des détenus.

De rares précédents en France

En France, de telles livraisons par drone sont très rares. Des téléphones portables ont été livrés par drone à la prison d’Annoeulin dans le nord en janvier 2017, un appareil a été retrouvé détruit en mars 2017 au pied d’un bâtiment à Villefranche-sur-Saône, et un drone a survolé la prison de Bourg-en-Bresse en juin 2017. Aux Etats-Unis, un détenu de Caroline du Sud avait lui réussi à s’évader début juillet après la livraison d’une tenaille par les airs.

 

Ni loi, Ni ordonnances Ni Travail

Avant septembre 2017 pour éviter de se  répéter


Zones subversives

Les révoltes ouvrières de 1936

Publié le 3 Septembre 2016

Les révoltes ouvrières de 1936
La révolution espagnole de 1936 et le Front populaire en France restent des références historiques incontournables. Mais il ensemble important d’analyser les limites et les échecs des révoltes passées. 

 

En 1936 éclatent deux importants mouvements de révolte. En Espagne et en France, la classe ouvrière se soulève pour transformer la société. Les histoires politiques, idéologiques ou diplomatiques sont souvent privilégiées pour décrire ces événements. Michael Seidman, dans Ouvriers contre le travail, privilégie une approche sociale. Il propose une analyse comparative et explique les causes des révoltes par la structuration de la bourgeoisie et de l’industrie. Michael Seidman se penche surtout sur les villes de Barcelone et de Paris qui demeurent les principaux centres urbains et industriels de chaque pays.

En Espagne les anarchosyndicalistes de la CNT (Confederacion national del trabajo) mènent la révolte. Mais les anarchistes doivent moderniser l’appareil productif, dans les conditions difficiles de la guerre civile espagnole. Cependant, les ouvriers refusent le productivisme et la discipline de l’usine imposés par les anarchistes.

En France, les syndicalistes encouragent au contraire l’absentéisme, les retards, le sabotage et l’indiscipline. Le Front populaire ne s’inscrit pas dans une perspective révolutionnaire, mais dans une lutte pour le temps libre. Ce mouvement débouche vers la plus importante législation sociale en France, avec notamment les congés payés.

Michael Seidman questionne le consentement des salariés et leur résistance au travail. Les ouvriers continuent de se rendre aux usines, notamment pour pouvoir ensuite consommer. Mais des pratiques de refus du travail se développent également. Les historiens marxistes et les théoriciens de la modernisation occultent cette résistance au travail. « Ils considèrent le travail surtout comme création, et non coercition, et l’ouvrier comme un producteur, et non un résistant », observe Michael Seidman. Les anarchistes et les marxistes insistent sur l’expropriation des moyens de production mais ne remettent pas en cause la soumission au travail. Au contraire, si les ouvriers souhaitent contrôler le lieu de production, c’est pour travailler moins.

 

barricade 19 juillet 1936

 

L’Espagne et les anarchistes

 

La situation en Espagne reste différente de celle de la France. L’Etat espagnol reste lié aux autorités religieuse et militaire. Ensuite, les élites agraires et industrielles créent moins de richesses qu’en France. Les méthodes tayloriennes d’organisation scientifique du travail restent peu développées. Les ouvriers semblent trop indisciplinés et il manque encore un personnel qualifié pour l’encadrement. L’industrie textile conserve un fonctionnement artisanal, sans adopter les méthodes de rationalisation du travail. Contrairement à la région parisienne, Barcelone n’a pas développé de grandes industries.

Face à la faiblesse de la bourgeoisie espagnole, un puissant mouvement anarchosyndicaliste peut se développer. La misère et la pauvreté des ouvriers les incitent à se tourner vers l’anarchisme. La répression des grèves alimente la défiance à l’égard de l’Etat et de son armée. La domination d’une bourgeoisie réactionnaire nourrit l’idéologie libertaire. Les anarchistes s’appuient sur un syndicat puissant comme base de la révolution et de la société future.

En revanche, ils ne remettent pas toujours en cause les fondements de l’économie capitaliste. « Si les anarchosyndicalistes voulaient un contrôle démocratique des usines par les ouvriers eux-mêmes, ils ne s’opposaient en aucun cas à l’industrie, à la science ou au progrès en général », souligne Michael Seidman. Les anarchistes critiquent la bourgeoisie pour son incapacité à développer les forces productives. Ils glorifient le travail comme émancipateur et valorisent l’industrialisation. La CNT ne reconnaît comme unité de base du communisme libertaire que le « producteur ». Les anarchistes ne cessent de fustiger la paresse et le parasitisme.

 

Pourtant, les anarchosyndicalistes valorisent la démocratie dans la production et s’opposent à l’autorité du parti défendue par les bolcheviques. Mais cette autogestion ne remet pas en cause le contenu productiviste du capitalisme. « Les théoriciens anarchosyndicalistes n’ont jamais réfléchi en profondeur entre l’éventuel conflit entre la forme démocratique des conseils et le contenu du programme de rationalisation économique et d’industrialisation », observe Michael Seidman. Mais les travailleurs peuvent aussi s’opposer au projet de modernisation anarchosyndicaliste et à la discipline du travail.

La CNT reste attachée à une idéologie révolutionnaire, mais reste traversée par d’importantes contradictions. La critique de l’Etat reste abstraite et n’empêche pas des pratiques de collaboration avec les réformistes et les partis parlementaires. La CNT valorise la spontanéité des masses mais pratique des réunions secrètes en petit comité pour préparer des insurrections. Lors de l’insurrection de 1933, la CNT proclame le communisme libertaire, mais qui se traduit par une soumission absolue au folklore et aux idées anarchistes.

Ensuite, le contrôle des usines ne change pas la nature de la production ni la division du travail. Malgré son idéologie contradictoire, la CNT soutien les grèves ouvrières. Ces luttes visent à gagner plus et à travailler moins. Une contradiction peut donc s’observer entre les aspirations exprimées par les luttes ouvrières et le projet politique de la CNT.

 

Les révoltes ouvrières de 1936

La révolution de 1936 et le refus du travail

 

C’est un coup d’Etat militaire qui déclenche la révolution sociale de 1936. Les anarchistes s’emparent des usines et des moyens de production. La Generalitat exproprie les comptes bancaires des patrons pour les redistribuer. Les entreprises sont collectivisées. Ce sont les ouvriers qui gèrent directement ces collectivités. Mais la division du travail perdure avec la collaboration des ouvriers avec les techniciens et les anciens patrons. La CNT conserve le pouvoir économique à travers le contrôle des usines et de l’armement.

Mais l’autogestion ne suscite pas l’enthousiasme des ouvriers. La CNT n’hésite pas à contrôler et à sanctionner l’absentéisme au travail. Le syndicat au pouvoir s’oppose à l’augmentation des salaires et à la diminution du temps de travail. Au contraire, les ouvriers rechignent à l’effort de guerre, au sacrifice et au devoir militaire. Comme pendant la révolution russe, une classe gestionnaire s’empare des moyens de production pour moderniser l’économie. La CNT impose même des camps de travail.

L’art de la Révolution développe une esthétique uniformisée au service de la propagande. « Sur ces affiches, qui ressemblaient beaucoup au style soviétique du réalisme socialiste, les ouvriers étaient en train de travailler, de combattre ou de mourir pour la cause », décrit Michael Seidman. Les affiches représentent des personnages héroïques et musclés, jamais fatigués. Ces affiches de propagande visent à éradiquer la résistance au travail manifestée par les ouvriers.

 

La CNT impose la rationalisation et la modernisation de l’économie. Elle introduit l’organisation scientifique du travail dans l’industrie espagnole. La productivité prime sur les conditions de travail et de vie des ouvriers.

Mais les injonctions au travail et à la productivité ne touchent pas les ouvriers. Ils ont développé des pratiques de lutte pour défendre leurs conditions de travail. « Les résistances directes et indirectes au travail devinrent les points majeurs du conflit entre la base et les militants, comme il l’avait été lorsque la bourgeoisie avait le contrôle des forces productives », analyse Michael Seidman.

Avec l’autogestion, les ouvriers doivent participer à leur propre asservissement. Ils désertent les organes de la démocratie directe qui, de toute manière, refusent de prendre en compte leurs revendications qui s’opposent au bon fonctionnement de l’économie anarchiste.

Les révoltes ouvrières de 1936

Le Front populaire en France

 

Le Front populaire en France montre que les ouvriers refusent de se soumettre au conformisme de l’usine. Ce mouvement social débouche vers la diminution du temps de travail et les congés payés. En France, la bourgeoisie contribue à moderniser l’économie. Les méthodes d’organisation scientifique du travail sont déjà développées, contrairement à la situation espagnole.

Le Parti communiste français abandonne tout projet révolutionnaire d’expropriation des moyens de production. Il se contente d’un programme de planification pour aménager le capitalisme. Il valorise notamment les nationalisations. Le contrôle ouvrier est abandonné au profit de l’Etat. L’extrême gauche et les anarchosyndicalistes n’ont aucune influence politique et restent marginalisés.

Le Front Populaire arrive au pouvoir en 1936 à travers Léon Blum. Mais les ouvriers refusent de rester passifs. Ils déclenchent le plus grand mouvement de grève en France. Surtout, ils décident de lancer des occupations d’usine. « Elles attaquaient le droit de propriété et mettaient les machines et les moyens de production de l’usine directement aux mains des travailleurs. Le sabotage et la destruction faisaient partie des possibilités », décrit Michael Seidman. Cette vague de grève apparaît comme joyeuse et spontanée. Les occupations d’usines permettent de faire la fête, de danser, de chanter, de créer de nouvelles relations humaines et amoureuses.

 

La discipline de l’usine est ébranlée, même après les accords de Matigon. Les ouvriers arrivent en retard, partent tôt et désobéissent à leurs supérieurs. Les délégués syndicaux tiennent tête aux contremaîtres et nuisent au rendement de l’usine. A chaque licenciement dans une branche, une grève éclate. Les ouvriers refusent les cadences, les accélérations de production et la recherche de rendement productif.

Les ouvriers français ne luttent pas pour la réappropriation des moyens de production. Mais ils déclenchent des grèves contre les cadences et pour le temps libre. « En France, l’exigence d’une révolution fut supplantée par une guérilla contre le travail », observe Michael Seidman. Les ouvriers ne cessent de résister à la discipline de l’usine et du salariat.

Le mouvement ouvrier reste enfermé dans l’idéologie productiviste des Lumières. Marxistes et anarchistes, malgré leurs divergences idéologiques, partagent le culte du travail. Leur projet révolutionnaire consiste à contrôler et à développer les forces productives.

Les révoltes ouvrières de 1936

Le communisme libertaire contre le travail

 

L’approche de Michael Seidman propose un éclairage original sur les révoltes de 1936, malgré quelques limites. Michael Seidman propose une histoire par en bas, du point de vue des ouvriers. Il insiste sur les pratiques plutôt que sur les idéologies.

L’historien décrit très bien l’idéologie productiviste des anarchistes et de la gauche. Les syndicalistes et les révolutionnaires veulent prendre le contrôle des moyens de production, mais ils refusent d’inventer une nouvelle manière de créer. Ils ne sortent pas de la logique du capital et du travail. L’autogestion s’apparente finalement à une nouvelle forme de capitalisme, sans modifier le contenu ni les objectifs d’un système productiviste et oppressant.

La critique du travail est éludée au profit d’une remise en cause du salariat, notamment chez les anarchistes. En effet, ils restent attachés à l’importance de produire des richesses et d’imposer une gestion plus efficace de l’économie. Ils restent enfermés dans la logique du capital, même en critiquant l’Etat et l’exploitation. La critique du travail permet une remise en cause du capitalisme non pas uniquement d’un point de vue idéologique, mais pour changer radicalement la vie quotidienne. La révolution ne doit pas se contenter d’autogérer le travail et l’aliénation. Il semble indispensable de transformer les relations humaines, la manière de produire et de vivre.

 

En revanche, l’interprétation du livre de Michael Seidman peut laisser place à quelques confusions. Ces analyses peuvent alimenter l’idée d’un mouvement ouvrier entièrement intégré à la logique du capital. L’idéologie révolutionnaire et la perspective de dépassement de la société existante ne peuvent que déboucher vers une nouvelle forme d’aliénation, selon cette interprétation du livre. Surtout, Michael Seidman semble présenter le refus du travail comme découlant du simple dilettantisme des ouvriers contre un mouvement révolutionnaire productiviste.

En réalité, l’indiscipline des ouvriers relève également d’une démarche politique. C’est une pratique de lutte qui ne doit pas être vidée de son sens politique. Les ouvriers qui tiennent tête aux petits chefs et qui refusent les cadences ne se contentent pas de faire un caprice. Ils veulent changer la société et sortir de leur vie de misère. L’historien Chris Ealham évoque la diffusion de pratiques de lutte dans les quartiers populaires de Barcelone.

Il existe deux communismes libertaires. Celui des organisations et de la CNT qui impose la rationalisation du travail et l’autogestion du capitalisme. Mais aussi celui des ouvriers en lutte qui portent une perspective de transformation de tous les aspects de la vie quotidienne. Les luttes ouvrières ne renvoient pas uniquement à une dimension sociale. Elles portent une démarche profondément politique d’une civilisation radicalement nouvelle qui insiste sur le plaisir et la joie de vivre contre toutes les contraintes sociales.

 

Source : Michael Seidman, Ouvriers contre le travail. Barcelone et Paris pendant les fronts populaires, Senovero, 2010

Argentine:Santiago Maldona , un anarchiste enlevé par la gendarmerie

Protesta de la comunidad mapuche

 

Santiago Maldona anarchiste insurrectionaliste a disparu  depuis le  1er Août,  il a été vu pour la dernière fois dans une manifestation de la communauté mapuche, alors que la gendarmerie chargeait violemment les manifestants qui étaient en train de bloquer une route dans la province méridionale de Chubut.

 

. Santiago a été embarqué par les gendarmes qui l’ont passé à tabac, ils auraient ensuite voulu attendre que les marques de coups s’estompent avant de le relâcher, mais il n’a toujours pas été retrouvé, faisant craindre le pire.

Santiago Maldonado

 

Argentine: La lutte des Mapuche contre Beneton + [Maj]

publié par le laboratoire anarchiste le 14 août

Nous avons interviewé un correspondant de Milan pour une mise à jour sur la lutte pour l’autonomie culturelle nationale du peuple Mapuche en Argentine, qui depuis deux ans essaye de récupérer 900.000 hectares de terres confisqués par la multinationale italienne Beneton.(

Un porte-parole des communautés mapuches, Facundo Huala, arrêté par les autorités argentines le 27 Juin, le jour même de la rencontre entre les présidents du Chili et d’Argentine, est en prison depuis des semaines sans raison, après le délai après lequel le Chili doit demander l’extradition.

Le 1er Août, le presidio des Mapuches contre Benetton a été attaqué violemment par la police,après cette attaque un jeune militant argentin, nommé Santiago, est disparu, on ne sait pas où il est et ne donne des informations.

Dans différentes villes, où le nouveau président Macri est l’allié direct dans les affaires de Benetton, ces jours-ci il y a des protestations. Le Réseau international pour la défense du peuple Mapuche (blog en https://mapucheit.wordpress.com/ italien) signifie passer le mot sur ce combat et de promouvoir des contre-initiatives et contre Benetton. Il prévoit en Septembre pour organiser une journée simultanément dans plusieurs villes italiennes.

écouter sur le site de radio black out


08/09/2017. Le compagnon anarchiste Santiago Maldonado a disparu après le raid de la police d’argentine contre les  communautés de la résistance mapuche, où il était en solidarité le 1er Août. De l’autre côté de la chaîne de montagnes, Nous envoyons un geste minimal de soutien à ceux qui luttent pour l’apparition de Santiago, nos consciences sont là avec vous tous.

traduit de l’ anglais à partir de    contra info

https://es-contrainfo.espivblogs.net/files/2017/08/lunes-lechu-544x770.jpg

un lien vers la prise de parole du 14 août et la manifestation pour Santiago Maldonado

Chili: Bannière pour l’apparition à la vie du camarade anarchiste Santiago Maldonado

Apparition with life of Santiago Maldonado –
Made disappear by the police, in Argentina on August 1st.

« Solidarité avec les camarades  de la guérilla sociale, otages en Grèce, au Chili, en Argentine, au Mexique et partout dans le monde! »

 

Allemagne : Attaques solidaires avec les prisonniers du G20 – Août 2017

 

sansattendre.noblogs.org

Hambourg : attaque incendiaire d’une voiture de sécurité privée

« Dans la nuit du 3 août 2017, une voiture de POWER (Personen-Objekt-Werkschutz GmbH) a été livrée aux flammes. Solidarité avec les prisonniers du G20 »


Flensbourg et ses environs : attaque à la peinture de deux comicos

Dans les nuits du 1er au 2 août et du 8 au 9 août, les commissariats de Flensbourg et de Tarp (dans les environs de Flensbourg) ont été pris pour cible en solidarité avec tous les prisonniers du G20. Lors de ces deux attaques, de la peinture a été propulsée sur la façade et le slogan anti-G20 « Welcome to Hell » y a été apposé.


Münster : Rebelote contre les véhicules des keufs

Au petit matin du dimanche 6 août, aux alentours de la Weseler Straße, sept véhicules de police ont été tagués: « Tous les flics sont des cibles (slogans en anglais) » ou encore « Ouvrez les yeux sur le choix de votre profession! »

Dans la nuit du 13 juillet déjà, 15 véhicules de police avaient été dégradés quelques heures seulement après le sommet du G20, nécessitant le remplacement de toutes les vitres (70.000 euros de dégâts).

Les enquêteurs supposent qu’il y a un lien entre ces deux attaques qui se sont déroulées à presque un mois d’interval.

Paul Bernard et Ravachol [MAJ]

note la modification de l’éphéméride anarchiste a été faite à partir du livre  :Ravachol l’homme rouge de l’Anarchie de René Dumas édité à  saint -étienne

Paul Bernard

Paul Bernard

Le 26 octobre 1861, naissance de Paul Auguste BERNARD à Crest (dép. de la Drôme).
Militant et propagandiste anarchiste.
Orphelin à l’âge de 2 ans, il est le demi-frère d’Auguste Jeannet. Après une enfance difficile, il devient ouvrier boulanger à Lyon, où il crée un syndicat. Il exerce la profession de galochier, puis de tallandier. Devenu anarchiste et compagnon d’Octave Jahn, il était vers 1888-89 un des principaux orateurs des meeting anarchistes sur Lyon, et faisait preuve d’une grande détermination révolutionnaire. Lors du premier mai 1890 à Lyon, bien qu’opposé à la revendication des 8 heures qu’il jugeait trop réformiste, il milite pour la grève et fait venir les orateurs Joseph Tortelier et Henry Riemer. Le 16 juin 1890, il prend part avec Henri Boriasse à un meeting de protestation contre les arrestations du 1er mai, puis le 11 octobre 1890 à Roanne avec Octave Jahn, il prononce un discours qui lui vaudra d’être condamné à cinq jours de prison et à une amende pour infraction à la loi sur les réunions publiques. Il collabore au journal « La Révolte« , où il signe ses articles du « Groupe Initiative individuelle de Genève ». Début novembre 1890 avec Octave Jahn et Ernest Nahon, il tente d’organiser un congrès régional, mais lors du meeting préparatoire du 31 octobre, des propos violents et des appels à la propagande par le fait sont exprimés publiquement. Le 1er novembre, la première session du congrès peut se dérouler en présence de 150 délégués, mais le lendemain la police vient l’interrompre et arrêter quelques délégués. Paul Bernard et Octave Jahn parviennent à s’enfuir et à rejoindre la Suisse. Jugés par contumace le 22 novembre, ils sont condamnés pour provocation au meurtre, pillage et incendie et incitation de militaires à la désobéissance, à deux ans de prison et 100 francs d’amende. Peine aggravée le 8 décembre, d’une nouvelle année de prison pour les propos tenus à Roanne.
Le 15 décembre 1890, Bernard est expulsé de Suisse avec divers anarchistes dont Lucien Weil, et l’italien Luigi Galleani, pour avoir diffusé un manifeste anarchiste rédigé en trois langues. Désirant se fixer à Milan, il fait venir sa femme et son enfant mais est arrêté à Côme. Il part alors pour Barcelone où il travaillera comme maçon. Durant l’hiver 1891, il assure la partie française du journal trilingue « El Porvenir Anarquista » dirigé par l’italien Paolo Schicchi. Ravachol avait trouvé asile en Espagne à Barcelone.. Paul Bernard  habitait une maison  de la rue Corsegeas avec deux autres anarchistes , l’espagnonl Hugas et d’un italien Scharrini. les trois hommes  fabriquaient des bombes dans leur maison ils furent soupçonnés  d’être les auteurs  d’un attentat, l’attentat de la Plaza Real à Barcelone.Une nuit , les locataires de la maison furent réveillés en sursaut par une violente détonation qui brisa  les vitres de l’immeuble. le lendemain Paul Bernard  et Ravachol avaient le visage ensanglantés ils expliquèrent  qu’un paquet de cartouche  avait explosé accidentellement et dédommagèrent largement les voisins.

 Cet incident  attira l’attention  de la police sur Paul Bernard , la police essayant alors de prouver leurs liens avec les révoltés de Xéres. Aussi Ravachol  dont la présence a été signalé au consulat de France à Barcelone , jugea t’il plus prudent  de quitter la ville ..et il resta quelque temps dans la région de Figueras.Lors de la perquisition du domicile de Paul Bernard , deux bombes auraient été retrouvées ainsi que des publications anarchistes.Et Ravachol  sachant que la police espagnole le recherchait et il repassa la frontière  vers Paris

Notes importantes tirées du livre femmes anarchistes espagnoles Libertarias ouvrage coordonné par Hélène Finet

 » Francisca Saperas était la mère des anarchistes ; (son )foyer , le havre des persécutés qui débarquaient à Barcelone ». Pendant de nombreuses années , (sa) maison [….] fut le refuge  de tous ceux  qui[…] se trouvaient  sans pain ni toit. dans son humble demeure ,  tous les fugitifs  étrangers , tous les agitateurs qui , fuyant  leur pays , se réfugiaient  en Espagne ( il y avait toujours un, deux, trois compagnons , italien, espagnols, français)tous les espagnols  qui avaient besoin de solidarité  que cette femme, les mains et le cœur ouvert  à tous, n’a jamais refusé à personne.

En effet Barcelone  et plus particulièrement Gracia, se  convertit en une plaque tournante de l’anarchisme européen. Français _ Octave Jhan, Paul Bernard, Ravachol, etc, Italiens_ Paolo Schicchi, Michele Angiolillo, etc_ allemand, etc se succédèrent, se réfugient un temps ou s’installent et militent