Archives mensuelles : décembre 2015

L’anarchisme d’État, La Commune de Barcelone

averti par mail, après le débat autour du flm:ortiz,général sans dieu ni maître, nous sommes heureux d’annoncer la parution de ce livre
L’anarchisme d’État, La Commune de Barcelone
Ni Patrie, ni frontières, 2015.

Les éditions Ni patrie ni frontières viennent de nous gratifier d’un nouveau livre sur la Guerre d’Espagne après nous avoir offert, en 2012, un recueil de textes du marxiste révolutionnaire Grandizo Munis dont beaucoup avaient trait à la guerre civile qui déchira la péninsule ibérique entre 1936 et 1939. Encore un livre sur cette question me direz-vous. Certes, mais c’est un livre intéressant puisqu’il rend de nouveau accessible le célèbre « rapport secret » de Helmut Rüdiger rédigé pour le congrès de l’Association internationale des travailleurs de décembre 1937 et que la CNT espagnole décida de rendre public. Dans ce rapport, Rüdiger défend devant les anarchistes du monde entier la participation des libertaires espagnols au gouvernement de Front populaire et leur choix de privilégier la victoire sur le fascisme plutôt que la liquidation immédiate de l’État bourgeois et l’instauration du communisme libertaire.

Résumons. En 1936, des militaires réunis autour du général Franco tentent de renverser la jeune république espagnole. La tentative de putsch est contrée sur une large partie du territoire par l’action énergique et armée des militants ouvriers, notamment anarchistes. En Catalogne, bastion ouvrier et poumon économique de l’Espagne, ces derniers sont hégémoniques. Alors qu’il peuvent prendre le pouvoir et faire la révolution qu’ils appellent de leurs vœux depuis des décennies, les dirigeants anarchistes décident de ne pas toucher aux institutions en place et, mieux (ou pire !), de prendre pied dans les institutions au nom de la défense de la République contre le fascisme. Et c’est ainsi que des anarchistes devinrent ministres. Les mois passant, les relations au sein du camp républicain se dégradent et les anarchistes doivent avaler nombre de couleuvres (arrêt de la collectivisation, militarisation des milices) jusqu’aux tragiques journées de mai 1937 à Barcelone où une partie des anarchistes affrontent les armes à la main le pouvoir républicain de plus en plus contrôlé en sous-main par l’URSS stalinienne. Mais là encore, les dirigeants de la CNT et de la FAI les appellent à rentrer dans le rang au nom de l’unité antifasciste.

C’est dans ce contexte tragique que s’inscrit le rapport Rüdiger. Rüdiger défend la participation des anarchistes au gouvernement de front populaire par pragmatisme : les anarcho-syndicalistes sont certes puissants mais ils ne le sont pas assez pour dominer politiquement la situation et instaurer leur « dictature », ce qui irait à l’encontre de leurs principes ; il leur faut des alliés pour abattre le fascisme et ensuite faire la révolution ; le mouvement libertaire espagnol est généreux mais il manque de cadres et d’une vision claire de ce qu’il faut faire ; l’enthousiasme et le volontarisme ont leurs propres limites ; les anarchistes ont le droit de critiquer le choix effectué par leurs camarades espagnols, mais ils ont avant tout le devoir d’être solidaires avec eux ; la très grande majorité des anarchistes espagnols sont en accord avec la position défendue par la CNT et la FAI ; les opposants qui ont créé le groupe Les Amis de Durruti, ne forment qu’une minorité, sans lien avec les larges masses.

Que fallait-il faire en ce mois de juillet 1936 puis en ce mois de mai 1937 ? Depuis 80 ans, les anarchistes se déchirent sur cette question, et les années passées n’ont pas permis de dépassionner les débats. Pour certains, les dirigeants anarchistes de l’époque ont trahi l’idéal libertaire et la Révolution sociale, et ils l’ont fait par naïveté ou par calcul. Pour d’autres, ils n’avaient guère le choix : le contexte international était clairement réactionnaire, et le prolétariat espagnol ne pouvait guère compter sur le soutien actif des classes ouvrières européennes, rendues apathiques par le réformisme ou le fascisme.

Au pessimisme et au pragmatisme d’un Rüdiger répond l’optimisme et le volontarisme d’un Hugo Oelher, trotskyste américain parti se battre sur le sol espagnol, pour qui le drame de la révolution espagnole est de ne pas avoir pu compter sur « une avant-garde révolutionnaire marxiste ». En mai 1937, Oelher était favorable au renversement du gouvernement du front populaire par les révolutionnaires. Dans un texte reproduit ici, Il écrit : « Toutes les conditions étaient réunies pour une telle offensive qui aurait pu défaire les forces capitalistes avant que n’arrivent les troupes de Valence (NDLR : comprendre franquistes). Elle aurait balayé ces troupes, ou la plupart d’entre elles dans le flot révolutionnaire. Elle aurait pu au moins s’assurer de la neutralité des marins, si ce n’est de leur sympathie. Les ouvriers du monde se seraient soulevés pour défendre les travailleurs espagnols victorieux ! La camisole de force stalinienne n’aurait pas empêcher les masses russes de se rassembler pour offrir leur aide, en hommes, en argent, en machines, et la force de l’État ouvrier. » Hugo Oelher pensait-il vraiment qu’un soulèvement ouvrier général était possible en cette année 1937, y compris dans l’URSS sous chape de plomb stalinienne ? Comment peut-il imaginer que les éléments les plus radicaux des classes ouvrières d’Europe de l’Ouest, aux ordres de la Troisième Internationale, puissent aller à l’encontre des intérêts de Staline ? Et pourquoi diable cette « avant-garde révolutionnaire marxiste », indispensable selon certains pour faire triompher la révolution, n’est-elle jamais là quand on a besoin d’elle ?

Que fallait-il faire en juillet 1936 ou en mai 1937 ? Ne comptez pas sur moi pour, loin de la tempête, faire la leçon aux uns et aux autres, distribuer bons et mauvais points. Je m’en tirerai en citant un long extrait d’un article de l’anarchiste italien Errico Malatesta intitulé Graduelisme. Dans ce texte de 1925, il écrit ceci : « Commençons par dire que la révolution, nous ne pouvons pas la faire seuls et que, le pourrions-nous matériellement, il ne serait pas désirable que nous la fassions seuls. (…) il nous (faudra) donc agir de concert avec toutes les forces de progrès existantes, avec tous les partis d’avant-garde et attirer dans le mouvement, soulever, intéresser les grandes masses, laissant la révolution, dont nous serions un facteur parmi d’autres, produire ce qu’elle pourra produire (…) Si malgré nos efforts, de nouveaux pouvoirs prêts à faire obstacle à la volonté populaire et à imposer la leur propre réussissaient à se constituer (…) Dans tous les cas, réclamer et exiger, même par la force, notre pleine autonomie et le droit et les moyens de nous organiser à notre manière pour expérimenter nos méthodes. »

sans patrie ni frontières site mondialisme.org

[Publication] : Avalanche n°6, journal international de correspondance anarchiste, est sorti !

Les anarchistes se sont toujours appropriés des moyens pour faire des idées antiautoritaires et des luttes une matière pour alimenter le dialogue et l’action subversives. C’est en ce sens-là que cette publication se veut aussi un moyen et plus précisément, celui d’offrir un espace pour nourrir le débat international entre anarchistes. C’est pourquoi ces pages laisseront surtout la place aux combats dont le ressort est anarchiste : des luttes autonomes, directes et auto-organisées ; des combats qui poussent vers la destruction du pouvoir sous toutes ses formes ; des luttes qui se déroulent aujourd’hui, comme hier ou qui sont à venir.

Lire ici Avalanche n°6, décembre 2015, 48 p
ou sur leur site (en anglais, français, espagnol, allemand) : http://avalanche.noblogs.org/

Début de l’introduction
:

La moitié du monde en guerre, l’autre moitié attend d’y entrer à son tour dans le bal cruel des massacres et des bains de sang. Pendant que les États claironnent les trompettes de la mobilisation totale, le gangrène islamiste dévore les soulèvements, au début pourtant animés de puissants désirs de liberté et de rejets de l’idée d’une conquête du pouvoir, comme en Égypte ou en Syrie. Dans les quartiers des exclus toujours plus nombreux des métropoles européennes, fleurit la confusion, produite par des décennies de programmes d’abrutissement, de privation d’instruments d’analyse et de compréhension et de destruction de l’esprit et de la sensibilité par un monde hypertrophié de technologies. Une confusion qui garantit la continuité de la domination capitaliste et étatique, mais favorise en même temps aussi le recrutement par une religion, une idéologie, une nation. Le massacre au nom de la conquête du pouvoir guette alors au coin de la rue.

Valence[drome] tribunal :une employée du S.P.I.P, un sac à main en moins à l’intérieur des locaux

la presse 26
VALENCE Il avait volé dans… le palais de justice !

Il y a quelques jours, une employée du Service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip) découvrait que son sac à main avait été volé alors qu’elle se trouvait dans un bureau du palais de justice de Valence.Dans la foulée, la victime constatait que plusieurs retraits d’argent avaient été effectués avec sa carte bancaire volée, dont l’un dans un distributeur situé à proximité du palais.Les policiers du quart judiciaire, en charge des investigations, visionnent les enregistrements de l’appareil. Mais le voleur a le visage dissimulé derrière une capuche. Les enquêteurs vont alors s’appuyer sur les images de vidéoprotection de la Ville et découvrir que l’homme, accompagné d’une femme, ont été contrôlés par les policiers municipaux ce même jour. Identifié, le couple, (lui a 29 ans, elle a 27 ans) domicilié à Montélimar et qui a bien été reçu par la victime au palais le jour du vol, a été interpellé lundi.

Laissé libre hier, le couple fait l’objet, en janvier, d’une Convocation par officier de police judiciaire (COPJ) devant le tribunal correctionnel de Valence pour vol aggravé (escroquerie et recel de bien obtenu à l’aide d’escroquerie).

À l’heure où l’on est ( mise à jour)

note du laboratoire:
face à la cogestion du nucléaire de la part la part de l’Anccli déjà dénoncée dans le tract « du saké au cote du Rhône  » de (ANCCLI sont une composante essentielle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection) avec l’état. A la lecture de ce texte en pdf

voici un texte recu par mail

l’heure où l’on répond au sang par le sang. À l’heure où les ventes d’armes abreuvent nos économies humanicides. À l’heure où la pensée de nos sociétés aveuglées par la consommation est gangrenée par un fanatisme inculte.
L’échappée du temps © Cécile Brice, 2014

A l’heure où l’on est

A l’heure où l’on répond au sang par le sang.

A l’heure où les ventes d’armes abreuvent nos économies humanicides.

A l’heure où la pensée de nos sociétés aveuglées par la consommation est gangrenée par un fanatisme inculte.

A l’heure où l’Etat-protecteur s’arroge le droit de perquisitionner les intégristes (?) agricoles[1] qui mettent moins en péril la sécurité civile que celle du TAFTA et autres marchés de l’environnement.

A l’heure où l’avenir climatique débattu lors du COP 21 sera aux mains des industrieux promenant leur impunité au soleil, tandis que des innocents pourrissent dans la terre (Zola, Débâcle, 1892).

A l’heure où les manifestations institutionnelles seront maintenues quand les manifestations civiles seront interdites.

A l’heure où l’on nous vendait du « involvment of the stakeholders » à tout bout de chant de conférence en conférence, la participation citoyenne deviendrait soudainement un danger :

La participation… : oui ! L’opposition… : non !

La seule participation civile autorisée dans l’Etat sécuritaire se doit d’être résiliente, sage, docile et soumise aux décisions gouvernementales. La participation civile n’est plus envisageable que voguant dans le sens du vent. Il s’agit plus d’une manœuvre communicationnelle qui produit l’illusion d’une ouverture au processus décisionnel en vue d’une acceptation civile des choix établis, que d’un véritable mode participatif qui prendrait en considération les voix citoyennes. En ces temps instables, la sécurité imposerait de faire taire toute voix d’opposition en vue de protéger, contre leur gré, ceux-là même qui souhaiteraient afficher leur désaccord. La belle aubaine…

Michel Galy coordinateur de l’ouvrage La guerre au Mali nous rappelait, il y a à peine deux années :

«(…) la reprise par un gouvernement socialiste de la rhétorique de la «guerre au terrorisme» initiée par Georges W.Bush après le 11 septembre (mais rejetée par Barak Obama qui déclarait avec pertinence qu’on ne fait pas la guerre à un mode opératoire) sonne comme une capitulation idéologique et témoigne d’une incapacité à prendre en considération la base sociale des mouvements militaro-religieux et, par conséquent, à envisager des alternatives possibles à l’action armée.»

Faire croire à une nécessité de protection pour mieux soumettre est un mécanisme-clef de nos démocraties dont il ne reste plus qu’une image aux couleurs fondues qui coulent telles des larmes dans l’aven.

Cécile Asanuma-Brice,

Yokohama, le 30 novembre 2015

Le texte qui suit, en décryptant les politiques de communication sur le risque, apporte des outils de réflexion dont aucun de nous ne devrait se priver, … à l’heure où l’on est.

De la vulnérabilité à la résilience, réflexions sur la protection en cas de désastre extrême – Le cas de la gestion des conséquences de l’explosion d’une centrale nucléaire à Fukushima, Cécile Asanuma-Brice

http://www.raison-publique.fr/auteur1932.html

[1] Bastamag, 26 nov. 2015 Etat d’urgence : Perquisition administrative chez des maraîchers bio : « ils s’attendaient à quoi, des légumes piégés ? »

http://www.bastamag.net/Perquisition-administrative-chez-des-maraichers-bio-Ils-s-attendaient-a-quoi

De la vulnérabilité à la résilience, réflexions sur la protection en cas de désastre extrême – Le cas de la gestion des conséquences de l’explosion d’une centrale nucléaire à Fukushima

L’explosion de la centrale nucléaire de Tepco Dai ichi à Fukushima en mars 2011 a été l’occasion de mettre en avant de l’actualité scientifique quelques concepts longtemps négligés, dont celui de résilience. Si l’utilisation psychanalytique de cette notion, qu’il s’agisse de la résilience neuronale, affective, psychologique ou sociale, s’attache à la faculté d’un individu à surmonter un trop grand isolement momentané ou un traumatisme quelqu’en soit la nature, recouvrant par là-même une intention positive de reconstruction du moi en dépit des aléas qu’il aurait subit, elle est l’objet d’un abus épistémologique dans l’utilisation qu’en ont fait les autres domaines de la recherche. En 2013, suite à la publication du Livre blanc du ministère de l’enseignement et de la recherche japonais « Toward a robust and resilient society », les budgets de recherche se sont de nouveau orientés vers l’étude et la mise en œuvre politique de ce concept dans les domaines les plus variés.

Anglicisme provenant du terme resiliency, cette notion, dans le domaine des sciences est d’abord utilisée en physique des matériaux pour décrire l’élasticité d’un corps qui aurait la capacité de retrouver sa forme initiale après avoir accusé un choc. Emmy Wermer [1] [2] a introduit cette notion en psychologie, via l’identification de facteurs qui auraient aidé certains enfants à surmonter leurs traumatismes. Boris Cyrulnick a répandu ce concept en France. Les cindyniques, sciences qui traitent des catastrophes, utilisent aujourd’hui cette notion afin de déterminer des modèles qui permettraient à nos villes de résister aux périls. Reconnaissant sa vulnérabilité face aux aléas, la ville serait dans la nécessité d’adopter un caractère résilient afin de pouvoir di-gérer les multiples risques naturels ou humains [3], considérant la ville comme une entité autonome alors qu’elle n’est qu’objet produit de l’humain.

Dans le cas présent, soit la gestion des conséquences humaines et environnementales de l’explosion de la centrale nucléaire de Fukushima, tous les outils sont mobilisés et c’est un doux mélange des approches développées concernant la résilience psychologique, écologique, urbaine [4] et tant d’autres encore, qui sont bravées afin de suggérer l’abandon de la fuite à ceux qui obéiraient encore à leur instinct primaire d’angoisse face aux dangers.

La notion originelle est ainsi appauvrie de son sens premier, pour ne devenir qu’un symbole auquel l’on attribue des qualités qui ne lui appartiennent pas. Autrement dit, et cela relève de la mise en place de la pensée fasciste qui tend à se répandre comme une flambée de poudre aujourd’hui dans de nombreux pays, les chercheurs se soumettent trop fréquemment à un slogan, à une doxa, s’empêchant eux-mêmes de raisonner pour se livrer à ce que Boris Cyrulnick appelle « la pensée paresseuse » [5].
COMMENT ASSIGNER A DEMEURE VIA LA RESILIENCE ? EN COMMUNIQUANT SUR LE RISQUE

La communication sur le risque remplit un rôle important dans l’instauration, à des fins politiques, de la résilience. Car c’est bien le potentiel politique de la catastrophe qui est en jeu dans un contexte où, malgré une opposition citoyenne massive, le marché du nucléaire, qu’il soit civil ou militaire, est imposé aux populations. Comme le note Ulrich BECK dans La société du risque [6] :

Les risques générés au stade le plus avancé du développement des forces productives (….radioactivité) (…) provoquent systématiquement des dommages, souvent irréversibles, restent la plupart du temps invisibles, requièrent des interprétations causales, se situent donc seulement et exclusivement dans le domaine de la connaissance (scientifique ou plutôt anti-scientifique) qu’on a d’eux, peuvent être transformés, réduits ou augmentés, dramatisés ou banalisés par la connaissance, et se prêtent donc tout particulièrement aux processus de définition sociale. [7]

Selon Beck, la société du risque est celle de la catastrophe, soit une société où l’état d’exception menace de devenir un état normal. Ce processus est particulièrement flagrant dans la gestion de la catastrophe de Fukushima.

L’explosion de la centrale de Tepco à Fukushima a engendré une contamination irrégulière au sein et au-delà du département de Fukushima. Le taux de radioactivité dans l’air, comme au sol, excède par endroit 10 à 20 fois le taux de contamination internationalement admis comme acceptable pour la population civile, soit 1 mSv/an. Face à une telle situation, dès avril 2011, les autorités ont relevé les normes de protection à 20 mSv/an dans la région la plus polluée, afin de limiter la surface de la zone d’évacuation. Il est aujourd’hui question de la relever à 100 mSv/an. Cette remise en cause de la norme de sécurité a été observée dans divers domaines. Le taux d’acceptabilité maximal de la radioactivité a également varié dans le secteur de l’alimentation, passant tour à tour d’une limite de 100Bq/kg à 500Bq/Kg, pour redescendre à 300 Bq/Kg.

Les discours justifiant la variabilité des normes de sécurité et leur acceptabilité dépendent de la position de ceux qui les expriment, de ceux qui s’expriment « en tant que ». Ainsi, la présentation des discours met à jour une manipulation de tout ordre. Kyô Kageura, dans son ouvrage intitulé Les conditions de la confiance, les paroles de l’accident nucléaire [8], nous donne à ce titre un exemple intéressant. Après l’explosion de la centrale de Fukushima, un chercheur d’un centre de recherche atomique s’exprime ainsi : « il semblerait qu’un grand nombre de concitoyens soit inquiet de la situation et croit que l’accident serait du niveau de celui de Tchernobyl (… ) ». Or, de fait, l’Agence Internationale de l’Energie Atomique a déclaré l’accident niveau 7, donc du même niveau que celui de Tchernobyl. Ce chercheur continue ainsi :

« Nous qui sommes payés pour faire des recherches par les impôts des citoyens », soulignant ainsi la responsabilité qui lui incombe, « devons mettre nos savoirs à leur service afin de les rassurer ». Kyô Kageura s’interroge alors sur le rôle de la science dans de telles circonstances. Quand bien même ceux-ci sont payés par les impôts des concitoyens, leur rôle est-il de rassurer à tort ces mêmes concitoyens ?

Ainsi, le scientifique, le politique et le citoyen se trouvent dans une nécessité de communication à flux tendus, s’appuyant sur de nombreuses expertises qui nourrissent la controverse au sein de laquelle on distingue grossièrement les « partisans de la sécurité » (anzenha) et les autres.

Contrairement à leur appellation, les partisans dits « de la sécurité » ne sont pas les partisans du risque zéro, mais ceux qui prônent l’institution de normes de sécurité en fonction desquelles la protection de la population est organisée. Aujourd’hui, le débat porte essentiellement sur les risques liés à l’exposition à de faibles doses de radiation, car aucun résultat épidémiologique ne permet la fixation d’un seuil fiable en deçà duquel le risque sanitaire serait réduit à néant. La difficulté en la matière réside notamment dans la multiplicité des facteurs à prendre en compte pour le calcul de la contamination interne et externe du corps humain, permettant de déterminer le risque encouru. Néanmoins, normes et seuils sont fixés et permettent la mise en œuvre d’une politique qui tend à assigner la population à demeure, voire à l’inciter au retour à la vie dans des zones pourtant contaminées aux vues des normes internationales. Ainsi, l’individu se voit contraint d’assumer financièrement (l’Etat ne lui délivre pas de subvention pour élaborer sa protection) et physiquement (l’individu est amené à prendre la responsabilité du refuge ou de la gestion du quotidien dans un environnement sali) la responsabilité de sa protection sanitaire même s’il n’a aucune prise, aucun rôle dans le processus décisionnel qui a engendré la situation de risque dont il devient captif.

Afin de remédier à cela, au moins en apparence, et de continuer à faire passer le message auprès des premiers concernés tout en regagnant la confiance des citoyens en leur laissant croire que leurs recommandations sont prises en compte, une véritable stratégie de communication est adoptée, soutenue par un budget spécifique pour l’année 2014 de plus de deux millions d’euros [9].

Cette politique d’empowerment vise à « éduquer » aux risques sanitaires pour mieux rassurer, notamment via l’organisation d’ateliers sur la radioactivité et le cancer destinés aux élèves des classes primaires du département de Fukushima [10], par la distribution de manuels apprenant à gérer la vie dans un environnement contaminé [11] [12], ou encore par l’organisation d’évènements culturels destinés aux enfants sur l’ensemble du territoire, ventant l’efficacité de la décontamination (qui n’a toujours pas été prouvée) par la vente des produits « frais » en provenance de la zone contaminée.
LA RESILIENCE, UNE ARME CONTRE LA SOCIETE DU RISQUE ?

Avant toute chose, nous souhaiterions revenir sur l’importance qu’accorde U. Beck à différencier la société du risque de celle de la menace. Ainsi, il distingue la prise de conscience de l’existence des risques dans l’ordre culturel et politique, de leur diffusion réelle. Il met en garde contre la disparition des évidences du tangible dans la société du risque. Par exemple, cela correspond dans le cas du désastre nucléaire japonais, à l’accroissement du nombre d’enfants atteints d’un cancer de la thyroïde qui devient un phénomène rendu invisible par la mise en doute des données épidémiologiques. Il s’agit de rendre invisible le véritable danger par le déplacement de l’attention sur un autre danger. Dans le cas de la gestion d’un accident nucléaire, ce processus est mis en place par un discours spécifique, qui consiste à dire aux habitants des zones contaminées qu’ils prennent un plus grand risque à se protéger au quotidien (en mettant des masques, en réduisant leur activité et celles de leurs enfants à l’extérieur, etc.), les contraintes engendrées par cette gestion journalière étant génératrices de stress à l’origine de dépressions nerveuses… [13].

Ulrich Beck, quant à lui, évoque principalement la menace sociale, brandie afin de permettre la continuité d’actions productrices de risques réels. À titre d’illustration, la menace de la perte d’emploi est sans cesse mise en avant afin de permettre la continuation de productions industrielles extrêmement polluantes. Il dénonce, par là-même, la contradiction que représente la production d’emplois stables pour la lutte contre les risques écologiques. Autre exemple, la menace de la radiophobie, terme créé après Tchernobyl en 1986, soit une psychopathologie relevant « d’une peur irraisonnée du nucléaire qui (non seulement) conduirait à une opposition antinucléaire pathologique » [14], mais également à des dépressions chroniques qui seraient le risque sanitaire le plus imminent, si l’on en croit le discours des administrateurs tant nationaux (commission d’enquête sanitaire) qu’internationaux (AIEA, OMS, CIPR) du désastre nucléaire de 2011. Il est à noter que les acteurs impliqués dans la gestion de la crise nucléaire de Tchernobyl sont les mêmes que ceux du désastre nucléaire japonais.

Cela explique certainement la redondance des discours.

Selon les propos que nous avons recueilli en novembre 2013 auprès de Jacques Lochard, directeur du CEPN (Centre d’étude sur l’évaluation de la protection dans le domaine nucléaire), membre permanent du CIPR (Commission Internationale de Protection Radiologique), et instigateur du programme ETHOS, certains membres japonais de la commission d’enquête sanitaire pour la gestion du pos-Fukushima, se sont rendus à Tchernobyl dans le cadre du programme ETHOS (qui débute en 1994). C’est le cas du Dr YAMASHITA Shunichi, sinistrement célèbre pour avoir été l’un des premiers à prôner le relèvement de la norme de sécurité à 100 msv/an, ou encore le Professeur NIWA Otsura, par ailleurs membre permanent du CIPR. Le programme Ethos, fondé sur le calcul du coût-bénéfice en matière de radioprotection (cela signifie, et ça n’est pas sans poser problème, que l’on attribue une valeur économique à la vie humaine), vise à apprendre aux habitants à gérer leur quotidien dans un environnement contaminé, évaluant la migration comme trop coûteuse. Afin de mettre en œuvre la résilience, ce programme, qui place l’économie au-dessus de l’homme comme l’on poserait la charrue avant les bœufs, a également pour but de relancer l’économie des régions touchées en incitant à la consommation des produits, notamment alimentaires, en provenance des zones contaminées. Ces sollicitations se matérialisent de façon pragmatique par des méthodes particulièrement astreignantes pour les habitants. Des accords sont passés avec des chaînes de supermarché [15] présentes sur l’ensemble du territoire qui orientent leurs marchandises vers la vente d’articles provenant presqu’exclusivement des territoires touchés [16]. Instauré pour la gestion de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, Ethos est également présent à Fukushima.

Le problème d’une telle société est donc qu’elle nie ce dont elle produit l’existence, en l’occurrence le risque nucléaire ou tout autre pollution industrielle.

Pourtant, les démarches résilientes, comme celles appliquées par le programme ETHOS, se disent participer de l’empowerment de la population, estimant le bien-être comme une notion commensurable dont ces experts détiendraient le secret. D’où provient cette notion d’empowerment ? Par qui est-elle produite et à qui est-elle destinée ?
EMPOWERMENT ET RESILIENCE

L’approche par la notion de capabilité (soit, un « ensemble de possibilités (le plus souvent interdépendantes) de choisir et d’agir [17] ») a été introduite par Amartya Sen [18] en vue de pallier les insuffisances qu’il décèle dans les approches utilitaristes et rawlsienne de l’égalité. Apparue au début du vingtième siècle aux États-Unis, en vogue dans les années 60, ce terme qui désigne la faculté de se « renforcer ou la capacité d’acquérir du pouvoir » (qui peut être le pouvoir associé à la liberté de choix), était principalement utilisé dans les milieux des services sociaux [19]. Mais là aussi, l’emploi du concept est multiple. Cette notion a été utilisée dans un premier temps dans les travaux concernant les Noirs américains [20], puis par les mouvements féministes et autres communautés vulnérables. Des méthodes sont mises en œuvres pour permettre aux individus composant ces communautés de pouvoir acquérir le savoir nécessaire leur permettant une participation active à la transformation de l’environnement qui les tient en situation de soumission. Afin d’échapper à ce rapport dominant-dominé, Paulo Freire met en évidence la nécessité du processus de « conscientisation » (autre néologisme grinçant), soit l’entendement par le dominé de son environnement afin de pouvoir être acteur de son changement. L’éducation de l’individu pour l’éveil de sa conscience citoyenne sera assurée par des éducateurs [21].

Estelle Ferrarese [22] nous rappelle que :

Certaines théories néo-républicaines (…) témoignent d’une résurgence du thème de la vulnérabilité, corporelle et morale, comme problème politique et moral en soi. Tous évoquent la vulnérabilité non pas pour ce qu’elle prévient, empêche, ou gêne d’accès à d’autres biens ou fins, mais en tant qu’elle est constitutive. En ce sens, elles répondent à l’urgence politique de contrer la figure du sujet autoengendré et autosuffisant, jusque dans ses nouvelles incarnations. Idée protéiforme d’empowerment, théories de l’identité pariant sur une fière assertion du sujet, paradigme, désormais prégnant dans les sciences sociales, de la négociation des parcours de vie et des préférences : la décomposition de la subjectivité politique marxiste et les paradoxes des structures postmodernes ont laissé le champ libre à l’évidence d’un sujet qui ne peut certes se choisir librement, mais qui est capable de se constituer en manager de lui-même (…) .

Les travaux d’Amartya Sen concernant l’intégration des capacités individuelles dans l’élaboration de nouveaux indicateurs de richesse, nommées « capabilités » sont venus compléter cet empowerment, le concept évoluant vers « la manière dont les relations sociales au sens large (institutionnelles ou non) conditionnent la capacité des individus ou des groupes à transformer des choix en action » [23].

L’échelle de la personne sera dépassée pour généraliser la méthode de l’empowerment à tous les rapports dominants/dominés. Ainsi, les ONG reprendront ces notions à leur compte afin de privilégier une approche bottom up dans l’accès à l’information. Cela se transcrit en un rapport géopolitique dans lequel les pays du sud seront amenés à regagner une autonomie décisionnelle dans le processus d’élaboration des politiques d’aide au développement. Le discours qui s’instaure est donc une dichotomie entre l’empowerment des pauvres et des communautés vulnérables –et- la domination de l’État et du marché.

En outre, les concepts comme ceux de l’empowerment et de la résilience agissent également sur les dominants, les contraignant, dans le cas de l’empowerment, à reconnaître la dimension politique du pouvoir notamment par la Banque Mondiale dans le cas des relations nord/sud – pays riches/pays pauvres [24] », pour reprendre les termes de Sandra Laugier, et c’est cette dimension qu’il faut accepter, en rupture avec les impératifs ou idéaux moraux classiques : l’autonomie, la liberté, la puissance…

Le problème que pose la commensurabilité de telles notions, que ce soit le bien être ou la vulnérabilité, qui s’impose si l’on souhaite en avoir une appréhension économique, est qu’elle devient par là-même manipulable au même titre que la dichotomie que nous avons évoquée entre société du risque et société de la menace.

Ainsi, comme le souligne A.-E. Calvès « l’empowerment fait partie de ces termes vagues, résolument optimistes et ‘‘justes’’ qui, à l’image de l’objectif d’éradication de la pauvreté, ne peuvent que susciter le consensus. (…) [25]. » Repris par la politique de la ville en France [26], ou lors de la campagne du président Obama en 2008, cette notion ne sera finalement qu’un outil de communication supplémentaire, qui n’aura pas pour effet de générer le lien inclusif escompté. Bien au contraire, de l’empowerment libérateur à l’empowerment libéral il n’y a qu’un pas qui sera rapidement franchi, valorisant l’intérêt individuel au point d’engendrer une déresponsabilisation des services publics, de l’État, à l’égard de la population concernée, l’origine du terme responsabilité, comme nous le rappelle Joan Tronto, renvoyant à l’idée de réponse, « c’est-à-dire à une attitude manifestement relationnelle [27] ». Autrement dit : « de faire des conséquences de l’action, aussi imprévisibles et éloignées des intentions de l’acteur soient-elles, l’ “unique critère” [28] » d’une responsabilité qui sort ainsi du régime juridique de l’imputation pour entrer dans celui de l’ascription. C’est bien l’idée d’autonomie, ou plutôt une certaine idée d’autonomie, qui sert dans ce déplacement conceptuel de repoussoir à celle de responsabilité. Privé des propriétés de la souveraineté et de l’indépendance, l’acteur responsable est en effet ici tout autant patient qu’agent, et les conséquences de ses actes ne s’appréhendent pas tant sous la catégorie de la causalité que sous celle de la relation [29]. Comme nous le rappelle Sandra Laugier : « la vulnérabilité et l’interdépendance sont opposées à l’abstraction d’êtres humains isolés, indépendants, dont la confrontation raisonnée (de Hobbes à Rawls) serait à l’origine du lien social [30]. » L’acceptation libérale du concept aura néanmoins raison du lien nécessaire à l’existence de la responsabilité, et le décalage entre la théorie et l’application est tel que l’on aboutit à des situations totalement ubuesques. Un habitant interrogé sur l’efficacité de la méthode dans son quartier en France s’exclame : « On n’en peut plus de cette pseudoconcertation organisée toujours selon le même schéma – trois réunions, un PowerPoint et toujours les dix mêmes habitants à qui on demande un avis sur un projet déjà ficelé [31] ».

Car dans la pratique, l’objectif visé semble moins de permettre la participation et la prise en compte des besoins des habitants afin de créer un environnement leur permettant une liberté de choix possible, que de leur faire accepter les nouvelles réformes. Des structures pilotes sont mises en place afin de faire passer la doctrine. Pour la politique de la ville, les Quartiers en Contrat Urbains de Cohésion Sociale (2500 quartiers CUCS en France) ont rempli cette fonction. Dans la sphère du nucléaire, cela s’est traduit par l’instauration des CLI (Commission Locale d’Information) en France. Dans le cas de la gestion du désastre nucléaire de Fukushima, c’est encore une fois le programme Ethos, via l’organisation des « Dialogues », soit des ateliers organisés par ses responsables qui remplit ce rôle. Tout comme le décrit l’habitant de la cité de Grenoble pré-cité, les « dialogues » du programme Ethos consistent en un atelier durant lesquels les décideurs de la gestion de la catastrophe nucléaire exposent devant une dizaine d’habitants pré-sélectionnés qui sont amenés à s’exprimer. Plus qu’un dialogue démocratique, il s’agit de jouer la Démocratie via une mise en scène prérèglée. Ainsi, si tel n’est pas, originellement, l’objectif de l’empowerment que d’être réduit à l’illusion des méthodes participatives, cela s’avère être un fait dont les conséquences sont parfois dramatiquement pragmatiques. Le problème posé par de telles logiques est qu’elles donnent le sentiment aux habitants d’une certaine maîtrise du processus décisionnel par la prise en considération de ses requêtes alors qu’il n’en est rien.

Pour conclure notre démonstration par un exemple concret et afin de mettre en évidence la manière dont l’application de ces notions troublent notre perception de la menace pour parfois aboutir à la mise en danger des populations qu’elles étaient censées protéger, nous reprendrons le témoignage du journaliste Ugaya Hiromichi, qui dans le journal Business Media Makoto du 22 janvier 2015 relate :

(juste après les évènements – l’explosion de la centrale de Fukushima) je me souviens que lorsque l’on approchait le dosimètre à la frontière de la zone d’évacuation, on mesurait 0.2 à 0. 3 microsievert/h, néanmoins, si l’on franchissait la délimitation et que l’on pénétrait dans la zone, on faisait l’objet d’une arrestation par les forces de l’ordre. Maintenant, on est en moyenne à 3.8 microsievert/h, le chiffre le plus élevé est de 17,3 microsievert/h, et l’on peut y circuler librement. Les règlementations de l’État ainsi que ses contradictions sont tellement stupides sur ce point qu’elles ne peuvent prêter qu’à rire [32].

Afin d’éviter le stress de la protection évoqué par les experts de la gestion du désastre nucléaire japonais, ces zones sont aujourd’hui réouvertes à la résidence. Voilà ce à quoi aboutissent les politiques qui visent à l’application de la résilience dans le cas d’une catastrophe nucléaire. En d’autres termes, l’utilisation politique des concepts développés en sciences humaines et sociales, réduits à de simples objets de communication, et l’application pragmatique qui en découle peut totalement les vider de leur sens, voir même en inverser leur signification première, pour aboutir à la mise en péril de la population qu’ils étaient censés protéger, augmentant par là-même leur vulnérabilité.
par Cécile Asanuma-Brice
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Pour citer cet article :
Notes

[1] Marco Stathopoulos, « Qu’est ce que la résilience urbaine ? », dans Urbanisme n°381, nov.-déc. 2011.

[2] Emmy E. Werner et Ruth S. Smith, Vulnerable but Invincible : A Longitudinal Study of Resilient Children and Youth, Broché, 1989.

[3] G. Djament-Tran, M. Reghezza-Zitt, Résiliences urbaines Les villes face aux catastrophes, ed. Le Manuscrit, 2012.

[4] Nous avons préalablement évoqué les biais de la résilience urbaine dans : Cécile Asanuma-Brice, Beyond reality : The management of migratory flows in a nuclear catastrophe by a pro-nuclear State, Japan Focus, nov. 2014.

[5] Boris Cyrulnick, Les âmes blessées, Paris, Odile Jacob, 2014.

[6] Ulrich BECK, La société du risque, Paris, Flammarion, 2003.

[7] Ibid., p. 41.

[8] 影浦峡, 信頼の条件 : 原発事故をめぐることば, 岩波書店, 2013.

[9] 平成26年度 原子力関係経費既算要求額、第34回原子力委員会資料第6号。

[10] The 52nd Annual Meeting of Japan Society of clinical Ontology : Kids cancer seminar – Because you live in Fukushima there is a necessity of education on cancer !

[11] NHK, 10 juin 2014, un manuel apprenant à « vivre avec la radioactivité »“放射能と暮らす”ガイド est désormais distribué dans les collectivités.

[12] Cette partie de notre recherche a été développée dans le cadre du PEPS Mission interdisciplinarité du CNRS Expertise, controverse et communication entre Science et société, au sein duquel nous avons dirigé une étude sur Les controverses scientifiques face à la responsabilité civique.

[13] Voir Cécile Asanuma-Brice, Beyond reality, Japan Focus, nov. 2014 « Le Pr Hirofumi MASHIKO, neuropsychiatre au département de médecine de l’université de Fukushima, explique ainsi que le port du masque, les restrictions diverses liées à l’utilisation des cours d’écoles, des piscines, à la consommation de la nourriture, etc. seraient autant de mesures stressantes à l’origine de désordres psychiques. »

[14] Annie Thébaud – Monny, La science asservie, Paris, La Découverte, 2014.

[15] Dans le cas du Japon, M. Yasuhide CHIKAZAWA, vice président de la chaîne de supermarché Aeon et ancien directeur de DAIEI, soit les deux plus importantes chaînes de supermarchés japonaises, a participé au 3e « dialogue » Ethos qui s’est déroulé les 7 et 8 juillet 2013 dans la ville de Date.

[16] http://www.icrp.org/docs/dialogue-3E.pdf

[17] Martha Nussbaum, Capabilités. Comment créer les conditions d’un monde plus juste ?, Paris, Climats, 2012.

[18] Sen Amartya K., “Equality of what ? », in Choice, welfare, and Measurement, Oxford, Basil Blackwell, 1979.

[19] B. SIMON, The Empowerment Tradition in American Social Work, a history, New York, Columbia University Press, 1994.

[20] Barbara SALOMON, Black Empowerment : social work in oppressed community, Columbia University Press, 1976.

[21] P. Freire, Pédagogie des opprimés – conscientisation et révolution, Paris, François Maspero, 1974.

[22] Estelle Ferrarese, Vivre à la merci, Le care et les trois figures de la vulnérabilité dans les théories politiques contemporaines, Multitudes, 2009.

[23] A.-E. CALVES, « Empowerment » : généalogie d’un concept clé du discours contemporain sur le développement, Revue Tiers Monde, Armand Colin, 2009.

[24] K. F. WONG, « Empowerment as a Panacea for Poverty. Pld wine in new Bottles ? Reflections on the Wolrd’s Bank’s Conception of Power, Progress in Development Studies, n°3, 2003.], et dans celui de la résilience, d’admettre la vulnérabilité des êtres et de leur environnement, anéantissant de fait le discours du risque zéro. La vulnérabilité est une notion qui a connu un développement important ces dernières années, dans le champ de la réflexion en sciences humaines et sociales. « Elle a d’abord été employée dans une perspective normative : il y aurait une catégorie de « vulnérables » – des humains à qui nous devrions une attention spécifique et que nous négligeons habituellement : handicapés, grand âge…. Mais elle a désormais acquis un sens descriptif, celui d’une condition humaine à « reconnaître » : nous sommes tous vulnérables[[ S. LAUGIER, Tous vulnérables ? Le care, les animaux et l’environnement, Petite bibliothèque Payot, 2012.

[25] Ibid.

[26] Carole Biezener et Marie-Hélène Bacqué, L’Empowerment, une pratique émancipatrice, La Découverte, 2013.

[27] Joan TRONTO, « Particularisme et responsabilité relationnelle en morale : une autre approche de l’éthique globale » (p. 103), dans Contre l’indifférence des privilégiés, à quoi sert le care ?, Carol Gilligan, Arlie Hochschild et Joan Tronto, Payot, 2013.

[28] Ibid., p. 23

[29] Gérôme TRUC, Assumer l’humanité. Hannah Arendt : la responsabilité face à la pluralité, Editions de l’université de Bruxelles, 2010.

[30] Ibid

[31] David Bodinier, de l’Alliance citoyenne à Grenoble, cité dans Sylvia Zappi, « L’empowerment, nouvel horizon de la politique de la ville », Le Monde, 07/02/2013.

[32] 烏賀陽弘道,Business Media 誠] , ”かつて封鎖ラインで線量計をかざすと、毎時0.2~0.3マイクロシーベルトだったのを覚えている。それでも中に入ると逮捕された。今は平均毎時3.8マイクロシーベルト、最大値は毎時17.3マイクロシーベルトを自由に通れる。このへんの政府の規制の無意味さは、あまりにバカバカしい矛盾の積み重ねで、もう笑う気すら起きない。” 22.01.2015
L’auteur
Cécile Asanuma-Brice
Cécile Asanuma-Brice est chercheure en sociologie urbaine, associée au laboratoire CLERSE de Lille et au centre de (…)

http://www.raison-publique.fr/article771.html

Vernissage d’une antiquité : le « défaitisme révolutionnaire »

note du laboratoire,une explication pour les lectrices et lecteurs du blog le laboratoire : une discussion et peut être un débat ici dans la Drôme pour que la discussion continue face au discours de la bande complotiste( soral and co) et à un autre niveau en approfondissant nos divergences face à la lecture des crises contenues dans le livre » à nos amis » (édition la fabrique)et avec aussi « crises » de Léon de Matis ( édition entremonde) .Face à la situation de l’état d’urgence qui continuera jusqu’en février2016 et les attaques contre les précaires,chômeuses chômeurs,…. .

voici ce texte de la revue temps critique reçu par mail bien avant les débats au laboratoire du 4/12 ou du 11/12 2015.

1 À propos des atta­ques isla­mis­tes de Paris, nous avons reçu un tract1 qui passe une couche de vernis sur une ancienne posi­tion de la gauche com­mu­niste deve­nue aujourd’hui une anti­quité : le défai­tisme révolu­tion­naire.

Premièrement, le tract est marqué par son inca­pa­cité à reconnaître ce qui est nou­veau

2 D’après lui, nous serions dans un système capi­ta­liste mon­dia­lisé. On peut donc sup­po­ser, sans pour cela perdre du temps à s’inter­ro­ger sur la vali­dité de la notion (kauts­kienne je crois) de « super-impéria­lisme », que les sou­ve­rai­netés natio­na­les ont aujourd’hui peu de poids face à l’imbri­ca­tion des différentes frac­tions du capi­tal dans ce que nous appe­lons, à Temps cri­ti­ques, le « capi­ta­lisme du sommet » (cf. no 15). Le tract devrait donc en tirer toutes les conclu­sions pos­si­bles. Au lieu de cela, le texte nous dit qu’en fait la situa­tion de guerre est engendrée par des puis­san­ces visant à la défense de leur pré carré ! Cela sup­pose de main­te­nir une vision tra­di­tion­nelle des luttes anti-impéria­lis­tes comme si on en était encore à l’époque colo­niale ou même post­co­lo­niale des années 1960-1980. Or le mou­ve­ment mon­dial de glo­ba­li­sa­tion a déplacé la ques­tion ancienne de la pos­ses­sion colo­niale ou de la domi­na­tion néoco­lo­niale avec maîtrise des ter­ri­toi­res vers celle du contrôle des flux par le biais de poli­ti­ques financières et de mises en réseaux clientélistes. Pour ne pren­dre qu’un exem­ple, il ne s’agit pas tant de s’appro­prier le gaz ou le pétrole moyen orien­tal que de garder les robi­nets de dis­tri­bu­tion ouverts afin qu’il n’y ait pas de risque de rup­ture d’appro­vi­sion­ne­ment pour l’ensem­ble des pays consom­ma­teurs de la com­mu­nauté inter­na­tio­nale. Seuls les quel­ques pays soumis à embargo sont tenus à l’écart de ce consen­sus.

3 Cet objec­tif inter­na­tio­na­lisé même s’il est cha­peauté par la puis­sance domi­nante, c’est-à-dire les États-Unis, change tout du point de vue stratégique. La sta­bi­lité d’un ordre mon­dial est pri­mor­diale pour garan­tir cette flui­dité du capi­tal et la cir­cu­la­tion des res­sour­ces énergétiques ou des matières premières. Les stratégies ne sont donc plus dictées essen­tiel­le­ment par des efforts de désta­bi­li­sa­tion de « l’autre camp » comme dans les sou­bre­sauts de l’après-guerre froide ; ou pour s’appro­prier des parts de gâteau dans une situa­tion de guerre écono­mi­que sau­vage2. Si on ne tient pas compte de ce nouvel ordre mon­dial, forcément ins­ta­ble dans cer­tai­nes zones, alors pour­quoi parler en termes de mon­dia­li­sa­tion comme le fait le tract ? Il n’y aurait rien de nou­veau alors depuis 1945 !? C’est faire fi de toutes les réunions inter­na­tio­na­les inces­san­tes, qu’elles soient de type com­mer­cia­les, cli­ma­ti­ques ou poli­ti­ques.

4 Qui peut penser, comme le sou­tient par exem­ple le tract, qu’El Assad veut dévelop­per son « capi­tal natio­nal » ? que Daech dont les anten­nes s’éten­dent, paraît-il, dans trente pays vise­rait à dévelop­per son capi­tal natio­nal ? Et les tali­bans aussi, c’était ça aussi leur objec­tif en trans­for­mant Kaboul en un vil­lage du Moyen Âge ?

5 Cette incohérence ne permet pas de com­pren­dre une double contra­dic­tion du capi­tal. L’une au niveau stratégique de l’hyper-capi­ta­lisme du sommet entre d’un côté la ten­dance domi­nante à la mon­dia­li­sa­tion et donc à la crise des États sous leur forme d’État-nation et de l’autre la résur­gence de poli­ti­ques de puis­sance aussi diver­ses que celles menées récem­ment par le Japon, la Russie et l’Iran. L’autre au niveau de la ges­tion encore en grande partie natio­nale d’une situa­tion où coexis­tent de façon conflic­tuelle, d’un côté une crois­sance de flux humains (migrants et réfugiés) parallèle à celle des flux finan­ciers ou de mar­chan­di­ses et de l’autre une ten­dance pro­tec­tion­niste et sou­ve­rai­niste-iden­ti­taire.

Deuxièmement, la guerre est conçue dans des termes anciens

6 Cela découle de ce qui précède. Pour l’auteur du tract, la guerre ne peut être qu’une guerre entre États dans laquelle les gros man­ge­ront les petits puis­que les luttes de libération natio­nale qui avaient semblé inver­ser cette ten­dance ne sont plus vrai­ment d’actua­lité lais­sant place à une désagrégation des différents blocs issus de la Seconde Guerre mon­diale puis de la Guerre froide. Pourtant ce qui caractérise les actions mili­tai­res depuis 2001, pour nous donc des opérations de police (cf. note 1) c’est ce qui a été théorisé par les experts en stratégie mili­taire, comme des guer­res asymétri­ques ou dissymétri­ques, ce qui change la donne et pour tout le monde. Du côté des puis­san­ces et du pou­voir la désigna­tion des enne­mis n’est plus claire ; l’ennemi est-il encore extérieur ou en partie intérieur ? Le poli­ti­que3 retrouve ici sa dimen­sion incontour­na­ble par rap­port à la dimen­sion mili­taire et au rap­port de force brut. C’est aussi pour cela que la posi­tion de faci­lité à court terme pour l’État apparaît comme celle du tout sécuri­taire.

7 Mais de « notre côté » les choses ne sont pas plus clai­res. S’oppo­ser direc­te­ment à la guerre comme ce fut le cas encore pour le Vietnam alors que la cons­crip­tion exis­tait tou­jours n’était déjà plus qu’une pos­si­bi­lité indi­recte au moment de l’inter­ven­tion en Irak de forces opération­nel­les spéciales. Cette pos­si­bi­lité est main­te­nant deve­nue très problémati­que dans une confi­gu­ra­tion où s’affron­tent pro­fes­sion­nels tech­no­lo­gisés et dronés d’une part, com­bat­tants fana­tisés (et bien armés aussi), d’autre part. Les « lois de la guerre » ne sont d’ailleurs plus res­pectées ni par les uns ni par les autres. En conséquence, pra­ti­quer le « défai­tisme révolu­tion­naire » s’avère sans objet ; et se réfugier dans un refus de l’unité natio­nale comme si c’était l’objet du problème et par ailleurs comme si cela pou­vait avoir un quel­conque effet pra­ti­que, relève du slogan qui devient gran­di­lo­quent et même ridi­cule quand il nous promet, dans le cas contraire, une mort pro­grammée (le catas­tro­phisme encore et tou­jours).

Troisièmement, il est marqué par sa confu­sion entre capi­tal et capi­ta­lisme

8 Pour l’auteur tout est capi­ta­liste et donc les États et même le « proto-État » Daech4 sont des États capi­ta­lis­tes. Il s’ensuit, entre autres, qu’aucune ana­lyse fine des par­ti­cu­la­rités de Daech ou d’Al-Qaïda n’est pos­si­ble puis­que le tract néglige complètement le fait que ces orga­ni­sa­tions prospèrent sur le tri­ba­lisme et non pas sur le capi­ta­lisme (ça n’empêche certes pas la valeur de cir­cu­ler) et qui plus est sur un tri­ba­lisme reli­gieux, le tri­ba­lisme sun­nite en conflit ouvert avec un chiisme plus cen­tra­lisé et ins­ti­tu­tion­na­lisé sur le modèle ira­nien. Le même phénomène se retrouve en Libye où la mort de Kadhafi a libéré la lutte cla­ni­que. Cet écla­te­ment des guérillas peut même être l’objet d’une vérita­ble stratégie comme celle des « fran­chi­ses » d’Al-Qaïda, réplique mili­taire des fran­chisés com­mer­ciaux occi­den­taux. Cette orga­ni­sa­tion à l’hori­zon­tale se rap­pro­chant aussi de cer­tai­nes orga­ni­sa­tions mafieu­ses comme à Naples, ce qui rend « la traque » plus dif­fi­cile.

9 Si elle revêt par­fois des formes anti-capi­ta­lis­tes ou anti-impéria­lis­tes, cette guerre de guérilla est avant tout appuyée sur trois axes, le pre­mier reli­gieux qui oppose révélation à raison est très éloigné des formes reli­gieu­ses de l’islam intégré des pays occi­den­taux, le second fami­lial et patriar­cal en concor­dance plus étroite avec les piliers de l’Islam et enfin le troisième de type mafieux repo­sant sur l’acca­pa­re­ment de la rente, le pillage et le com­merce illégal y com­pris l’escla­vage. Il est donc inap­pro­prié de trai­ter de capi­ta­lis­tes des orga­ni­sa­tions comme Daech et Al-Qaïda alors que leur orga­ni­sa­tion et leurs pers­pec­ti­ves sont toutes autres. Il est aussi erroné de les trai­ter de fas­cis­tes comme le font sou­vent les liber­tai­res et les gau­chis­tes parce que le fas­cisme est un sous-pro­duit du socia­lisme et du natio­na­lisme alors que ces orga­ni­sa­tions n’ont jus­te­ment pas de visées natio­na­les ; elles sont même direc­te­ment mon­dia­les et s’adres­sent à une com­mu­nauté des croyants poten­tiel­le­ment sans limi­tes. Ce sont donc bien ces orga­ni­sa­tions et pas celles de la gauche radi­cale qui ont dépassé en pra­ti­que le cadre de référence de la nation même si ce n’est pas dans la pers­pec­tive de la com­mu­nauté humaine, mais dans celle aliénée de la com­mu­nauté reli­gieuse. C’est par­ti­culièrement vrai pour Al-Qaïda et si Daech présente au départ une option plus ter­ri­to­ria­lisée avec le projet de Califat5, il semble que son orien­ta­tion récente rejoi­gne celle de l’orga­ni­sa­tion concur­rente. Au rebours de ce que prétend le tract, on peut même dire que ces orga­ni­sa­tions sont le fruit de la défaite des pou­voirs natio­naux-socia­lis­tes nassériens, baa­sis­tes et kadha­fis­tes dans la région.

Quatrièmement, sa pers­pec­tive est d’ori­gine his­to­ri­que décaden­tiste (mais dra­peau dans la poche en quel­que sorte).

10 Une phrase en est emblémati­que : « la guerre rode par­tout sur l’ensem­ble de cette planète vivant une vérita­ble agonie ». À la limite, on peut dire que les dji­ha­dis­tes sont plus clair­voyants qui s’atta­quent au capi­ta­lisme et par­ti­culièrement à une société capi­ta­liste pour­voyeuse de plai­sirs et fonc­tion­nant sur un modèle hédoniste adopté par toutes les cou­ches de la popu­la­tion y com­pris les plus défavo­risées. En effet, les lieux choi­sis ne tien­nent pas du hasard. Les lieux de diver­tis­se­ment spor­tifs, musi­caux, bars ou res­tau­rants à la mode ont été taxés de lieux « d’abo­mi­na­tions et de per­ver­sion » par le com­mu­niqué de reven­di­ca­tion des atten­tats par l’EI du 14/11/2015. La crise avec un grand C n’est donc pas encore là quoiqu’en pense ou sou­haite le tract. Les dif­fi­cultés actuel­les à repro­duire les rap­ports sociaux dans leur ensem­ble, n’empêchent pas la pour­suite d’une dyna­mi­que de capi­ta­li­sa­tion dont l’un des axes est cons­titué par le consumérisme, festif de préférence.

11 C’est mal­heu­reu­se­ment une tra­di­tion, dans l’ultra-gauche, que de réacti­ver cette ten­dance décaden­tiste qui voit du mortifère et de la misère par­tout, mais aujourd’hui cela s’effec­tue sous une forme radi­ca­lisée catas­tro­phiste bien rendue par la phrase : « ces atten­tats dont ceux de Paris ne sont qu’un hors d’œuvre ». Qui écrit cela frôle le cynisme et sur­tout pra­ti­que la poli­ti­que du pire parce qu’il n’a pas de solu­tion de rechange. Noircir le tableau est le signe d’une désespérance du cou­rant com­mu­niste radi­cal.

Cinquièmement, le spec­tre du prolétariat rem­place la lutte des clas­ses

12 Tout d’abord la classe ouvrière est définie comme la classe « anti­na­tio­nale par défini­tion ». On se demande bien qui a pu établir cette défini­tion. Le Larousse ? Non. Marx ? Oui, mais avec plu­sieurs bémols. Tout d’abord Marx n’est qu’un théori­cien-mili­tant à l’épreuve de la pra­ti­que et on connaît aujourd’hui la pra­ti­que qui a mis à mal ce qui devait être l’inter­na­tio­na­lisme prolétarien resté tou­jours très mino­ri­taire au sein de la classe ouvrière. Ensuite la phrase du Manifeste adorée comme une Bible pour croyant est une phrase tronquée dont le contenu com­plet est moins clair ou uni­vo­que. Je cite : « Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut leur ôter ce qu’ils n’ont pas… Comme le prolétariat de chaque pays doit d’abord conquérir le pou­voir poli­ti­que, s’ériger en classe diri­geante de la nation, deve­nir lui-même la nation [c’est nous qui sou­li­gnons], il est encore par là natio­nal ; mais ce n’est pas au sens bour­geois du mot6 ». Certes, Marx est encore à l’époque, imprégné de démocra­tisme révolu­tion­naire (deuxième partie de la cita­tion) et sa pers­pec­tive com­mu­niste reste loin­taine même si elle est affirmée en tête de cita­tion. C’est bien pour cela qu’il ne s’avance pas trop sur le caractère « anti­na­tio­nal » du prolétariat. Il se lais­sera même par­fois aller à un cer­tain pan­ger­ma­nisme comme, par exem­ple, dans son oppo­si­tion au sla­visme de Bakounine ou dans ses prises de posi­tion au début de la guerre franco-alle­mande avant de com­pren­dre l’impor­tance de la Commune de Paris. En tout cas, s’il cède par­fois à un essen­tia­lisme du prolétariat parce qu’il le pense déposi­taire final de l’uni­ver­sa­lisme bour­geois (c’est sa posi­tion dans les œuvres de jeu­nesse7), il sait aussi com­bien la classe ouvrière est une classe déterminée par ses condi­tions (c’est sa posi­tion à partir des Grundrisse). Alors pour­quoi repren­dre cela dans un tract répon­dant à un événement actuel ? La situa­tion serait-elle plus favo­ra­ble à l’expres­sion de ce côté uni­ver­sel qu’au côté par­ti­cu­la­riste ? On aime­rait bien mais on en doute. Le tract lui-même en doute quand il espère « le réveil du prolétariat inter­na­tio­nal » sans se poser la ques­tion du pour­quoi de son grand som­meil et sans se deman­der com­ment les tirs de kalach­ni­kovs au Bataclan son­ne­raient ce réveil.

13 Ce qui est patent, mais bien évidem­ment dur à reconnaître pour les cou­rants com­mu­nis­tes radi­caux, c’est que ce genre d’événements nous met tout sim­ple­ment hors-jeu et on peut dire celui de novem­bre bien plus encore que ceux de jan­vier. Dans cette situa­tion que nous subis­sons au plus haut point, toute posi­tion « pro­gram­ma­ti­que », sous condi­tion même qu’elle puisse être fondée en prin­cipe, s’avère arti­fi­cielle et velléitaire. Pour éviter qu’elle appa­raisse trop décalée il faut alors se replier sur une posi­tion du type de celle prise par Erri de Luca8.

14 Cette inter­ven­tion d’Erri de Luca est en effet cohérente avec son actuelle posi­tion démocrate et « antifa ». Il pro­pose l’orga­ni­sa­tion d’une défense citoyenne sur le modèle de ce qui se fai­sait dans les quar­tiers de l’Italie des années 1970 pour neu­tra­li­ser les fas­cis­tes, même s’il s’agit cette fois de neu­tra­li­ser les ter­ro­ris­tes et ainsi d’éviter ce qu’il nomme un risque de « mili­ta­ri­sa­tion » exces­sive de l’État et donc sa droi­ti­sa­tion extrême. Les dis­po­si­tifs stratégiques imaginés par l’ancien diri­geant du ser­vice d’ordre de Lotta conti­nua refont sur­face mais conver­tis pour un usage citoyen dans l’État de Droit de façon à nous sauver de l’État d’excep­tion expérimenté un temps par l’État ita­lien au cours des « années de plomb9 ». Sans par­ta­ger ce propos, le réduire à un appel à la délation auprès de la police, comme le font déjà cer­tains, est un réflexe révolu­tio­na­riste qui pense que la dénon­cia­tion est bien supérieure à la délation mais sans rien pro­po­ser d’autre qu’un mot d’ordre abs­trait qui présup­pose une guerre (de classe ?) entre deux enne­mis, d’une part un État-poli­cier et d’autre part des « révolu­tion­nai­res » qui le com­bat­tent. Où trou­ve­rait-on un collégien, même intoxiqué par le NPA, pour croire à cette fic­tion ?

15 Pour conclure et répondre indi­rec­te­ment à une inter­ven­tion d’un cama­rade à propos de Jaurès et du patrio­tisme, nous joi­gnons ci-des­sous des extraits d’une lettre adressée à quel­ques cama­ra­des dans le cadre des dis­cus­sions préparant notre texte10 sur les événements de jan­vier.

La phrase de Renan (« L’oubli, et je dirai même l’erreur his­to­ri­que, sont un fac­teur essen­tiel de la création de la nation ») date d’une conférence de 1882 et ton énoncé n’est d’ailleurs pas com­plet. Il convient pour­tant de lire toute la phrase puis­que Renan ajoute à l’oubli, l’erreur his­to­ri­que (c’est-à-dire fina­le­ment la nécessité d’une réécri­ture qui fasse une « his­toire »). Une cita­tion donc très Troisième Républi­que et une défini­tion fort éloignée de celle de Sieyès (« la nation c’est l’asso­cia­tion ») et autres révolu­tion­nai­res de 1789. Une défini­tion qui s’expli­que par la volonté de fonder en théorie une concep­tion de la nation qui puisse être reconnue par tous, du bour­geois jusqu’à l’ouvrier, du républi­cain jusqu’au roya­liste. Le patrio­tisme ori­gi­nel, par exem­ple de « l’armée révolu­tion­naire », se trans­for­mera alors pro­gres­si­ve­ment en reli­gion de la patrie.

Les propos a-his­to­ri­ques que profèrent les « anti-nation » de prin­cipe et par­ti­culièrement ceux venus de l’ultra-gauche ou de l’anar­chie, méconnais­sent et c’est un peu éton­nant, le fait qu’au moins jusqu’à la Commune de Paris, nation et patrie étaient des notions révolu­tion­nai­res puis inter­na­tio­na­lis­tes jusque dans la Première Internationale et que l’Église, la noblesse, les fran­ges conser­va­tri­ces de la bour­geoi­sie ne s’en reven­di­quaient pas, bien au contraire. On sait que la Révolu­tion française a com­battu « le parti de l’étran­ger », mais qu’elle a accueilli comme français tous les volon­tai­res étran­gers dans ses légions, ancêtres des bri­ga­des inter­na­tio­na­les de 1936, les sta­li­niens en moins.

Plutôt que de résumer ici des posi­tions his­to­ri­ques de marxis­tes sur la nation pour en mon­trer les limi­tes ou les ambiguïtés (Marx et sa cita­tion tronquée du Manifeste, Bauer et la nation comme com­mu­nauté de destin que le socia­lisme ne « dépas­sera » pas plus d’un cla­que­ment de doigts qu’il ne « dépas­sera » la reli­gion, Strasser, Pannekoek et leur déter­mi­nisme mécaniste, etc.) nous ren­voyons aux 100 premières pages du no 33-34-35 de la revue Ni patrie ni frontières d’Yves Coleman sur « Les pièges de l’iden­tité natio­nale ». On doit pou­voir le com­man­der ou le lire direc­te­ment sur le site de NPNF et « mon­dia­lisme.org11 ».▪

Temps cri­ti­ques, le 19 novem­bre 2015

Notes avant de lire les notes de bas de page se reporter au texte paru de temps critique

1 – http://matie­re­vo­lu­tion.org/IMG/pdf/-58.pdf

2 – Des sta­tis­ti­ques mon­tre­raient que les États-Unis sont inter­ve­nus en Irak et la France en Libye alors que ces deux pays ne sont pas leurs four­nis­seurs essen­tiels. Ce n’est pas pour rien que dans notre no 3 de Temps cri­ti­ques nous avons désigné la première inter­ven­tion en Irak comme étant une opération de police inter­na­tio­nale et non pas une nou­velle offen­sive de l’impéria­lisme américain. Pour plus de dévelop­pe­ments on peut se repor­ter aussi à nos deux textes : « L’unité guerre-paix dans le pro­ces­sus de tota­li­sa­tion du capi­tal » in Anthologie de Temps cri­ti­ques, vol. III : Violences et glo­ba­li­sa­tion, p. 9-50 et « Soubresauts », ibid., p. 304-332. Ces deux textes sont dis­po­ni­bles sur notre site.

3 – D’où au niveau théorique, le retour en grâce des théories de Carl Schmitt sur l’état d’excep­tion per­ma­nent et leur mise en pra­ti­que par exem­ple dans le Patriot act de 2001 et peut être dans les pro­jets de réforme cons­ti­tu­tion­nelle du gou­ver­ne­ment français en cette fin 2015.

4 – Cf. L’arti­cle de J. Guigou : « Al-Qaïda, un proto-État ? Confusions et méprises », Anthologie des textes de Temps cri­ti­ques, vol. III, p. 332-336. Texte dis­po­ni­ble ici :http://tempscritiques.free.fr/spip.php?article334

5 – Projet de Califat qui n’a pas de limi­tes ter­ri­to­ria­les puisqu’il existe par­tout où un groupe se récla­mant de lui mène ses acti­vités à visée des­po­ti­que (Sinaï, Libye, Nigeria, etc.)

6 – Karl Marx, Manifeste du Parti Communiste, Bourgois, 10/18, p. 43.

7 – C’est dans L’Idéologie alle­mande que Marx reprend, de Hegel, le concept de classe uni­ver­selle en essayant de dépasser l’anti­no­mie entre le fait qu’une classe est forcément une par­ti­cu­la­ri­sa­tion de la tota­lité, mais qu’en même temps cette classe n’a pas d’intérêt par­ti­cu­lier à faire valoir, d’où sa dimen­sion uni­ver­selle et dirions-nous, sa pers­pec­tive de révolu­tion à titre humain.

8 – cf. « Il faut lancer l’alerte au niveau zéro de la société » : www.libe­ra­tion.fr/france/2015/11/15/erri-de-luca-il-faut-lancer-l-alerte-au-niveau-zero-de-la-societe_1413478.

9 – Sur cette expérience de l’État d’urgence ita­lien des années 1970-1980, on peut se repor­ter au livre de Paolo Persichetti et Oreste Scalzone, La révolu­tion et l’État, Dagorno, 2000.

10 – http://temps­cri­ti­ques.free.fr/spip.php?arti­cle328

11 – http://www.mon­dia­lisme.org/spip.php?rubri­que117

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Documents joints

Vernissage d’une antiquité : le « défaitisme révolutionnaire »(3 feuilles A4 – 12 pages, PDF – 88 ko)

Ne laissons pas le FN faire école…

reçu par mail:
Élus ou battus, ils sont déjà au pouvoir parce que depuis longtemps les idées réactionnaires et autoritaires irriguent notre société et sont reprises, voire mises en œuvre, par des dirigeants de droite ou de gauche. L’arsenal répressif, l’état d’urgence, la mise au pas de et à l’école (retour de la morale, célébration du « roman national », sanctuarisation et « sécurisation » des établissements scolaires, renforcement des hiérarchies, résignation face aux inégalités sociales, etc.) ne sont plus de lointains horizons mais s’installent dans notre quotidien, non pas à la cadence du bruit des bottes (encore que, je les vois chaque matin en arrivant au collège…) mais dans le silence des pantoufles.

On a beau s’agiter, se questionner, s’émouvoir et se mobiliser quelques heures avant les scrutins, la bataille des idées est depuis longtemps perdue.
Sur ce site, nous avions pointé au lendemain du 1er tour, la responsabilité de l’institution scolaire et de nos pratiques en reprenant une citation de Philippe Pernoud :

« Si un jeune sort de l’école obligatoire persuadé que les filles, les noirs ou les musulmans sont des catégories inférieures, peu importe qu’il sache la grammaire, l’algèbre ou une langue étrangère. L’école aura raté son coup dramatiquement, parce qu’aucun des enseignants qui auraient pu intervenir à divers stades du cursus n’aura considéré que c’était prioritaire. »

(Philippe Perrenoud, Dix nouvelles compétences pour enseigner)

Celle-ci a fait le tour des réseaux sociaux. Avertissement salutaire pour certains, odieuse et fallacieuse « remise en cause » pour d’autres : « Cette citation est fausse et pernicieuse. Fausse parce qu’elle met des choses très différentes sur le même plan : les opinions d’un côté et les connaissances de l’autre. Pernicieuse parce qu’elle fait l’hypothèse d’une école qui n’enseignerait ni l’algèbre, ni la grammaire, ni langues étrangères. L’école actuelle n’a franchement pas besoin de ça. » a-ton ainsi pu lire…
La rhétorique d’extrême-droite fait son œuvre quand l’inégalité entre les races ou les sexes relèvent de « l’opinion » et que l’école n’a pas à s’y intéresser. Le savoir serait lui-même « émancipateur » ou, en l’occurrence, « pacificateur ». Toutes les critiques n’ont pas été aussi virulentes et c’est souvent le sentiment d’impuissance qui domine… Une impuissance que, justement, le libéralisme comme l’école tentent de fabriquer (lire et relire à ce sujet l’ouvrage de Charlotte Nordmann, La fabrique de l’impuissance 2. l’École, entre domination et émancipation ,Amsterdam, 2007).

On peut ainsi exiger que les politiques, les journalistes, les « élites » se remettent en question mais interdire tout questionnement sur le rôle de l’école… Refuser de « tout lui mettre sur le dos » quand Ivan Illich nous rappelle que « L’école est l’agence de publicité qui nous fait croire que nous avons besoin de la société telle qu’elle est. »
En face, l’école est depuis longtemps dans la ligne de mire du FN, c’est le programme de son officine « d’enseignants patriotes », le Collectif Racine : « redresser l’école, redresser les corps pour redresser la Nation. » À l’échelle locale, dans les municipalités qu’elle dirige, son programme préfigure ce qu’il sera au niveau national : fin de la gratuité de la cantine (et/ou des transports scolaires [1]) pour les familles démunies [2], exclusion des enfants de chômeurs des activités péri-scolaires [3], stigmatisation des élèves musulmans [4], remise en cause de la scolarisation des enfants étrangers « primo-arrivants » [5], fichage ethnique des élèves [6], menaces et intimidations vis-à-vis des personnels de l’Éducation nationale [7], propos méprisants contre les familles des milieux populaires [8], etc.
Défendre l’égalité, la démocratie, la justice sociale, c’est le seul programme qui vaille d’être mené jusqu’à son terme. Il ne se « boucle » pas dans une école de l’obéissance, de la résignation, de l’impuissance…

Ici ou là, mille petites pousses donnent une idée de ce qui pourrait être la contre-offensive par en bas : la multiplication des conseils coopératifs, des classes sans notes, des ateliers-philo, du travail commun entre élémentaire et collège, la défense systématique des élèves étranger, l’importance reconnue au débat dans les classes ou à la place à faire aux parents des classes populaires, tout cela fait aussi partie de la réalité. De « n’autre » réalité, de celle que nous aurons à opposer à ceux qui aboient très fort, surfant sur une conjoncture… qui passera. Que nous contribuerons à faire passer.

Notre pédagogie est une pédagogie de combat (social) parce qu’elle considère, à l’instar de Noëlle de Smet, que « La pédagogie n’étant jamais neutre, je sais que ma pratique sera ce qu’elle est en fonction de choix : préparer les jeunes à occuper leur place dans la société ou les préparer à la transformer en transformant déjà le plus petit et le plus proche. […] Ce choix se fait tous les jours ; parfois, à propos de détails. […] Mon choix d’une éducation libératrice des classes dominées s’inscrit, bien sûr, dans une histoire collective : ce choix ne peut émerger que parce que je développe avec d’autres, et pas seulement des enseignants, l’analyse critique des projets d’éducation et des enjeux de société qu’ils contiennent. Le tout en restant à la fois consciente de ma position sociale et le plus proche possible des actions et des points de vue des dominés. 9 » Nul doute que ce choix fera à nouveau réagir…

Grégory Chambat
repris de ce site

[Hambourg, Allemagne] Le siège de ‘Facebook’ attaqué – 13 décembre 2015

[S’en prendre à facebook, c’est s’attaquer à ce monde de merde fait de balances, de racistes, de fichage, de surveillance (entre autre: collaboration avec la NSA), de fric, etc… Les raisons de cette attaque sont multiples et elles sont détaillées dans un communiqué en allemand ici. La multinationale a été critiquée par plusieurs journaux et artistes (notamment en Allemagne) pour  ne pas censurer les commentaires racistes et néonazis. Mieux, elle s’est justifiée en disant que c’était pour “favoriser le débat” (alors que dans le même temps, elle censure le moindre téton qui dépasse d’une photo…]

Le siège allemand de Facebook vandalisé

L’édifice abritant le siège allemand du réseau social a été la cible d’un groupe d’inconnus qui ont endommagé le bâtiment samedi soir, avant de prendre la fuite.

Ils “n’aiment pas” Facebook. Plusieurs inconnus ont barré à la peinture rouge la façade du siège allemand du réseau social du slogan “Facebook Dislike”, allusion à sa fonctionnalité “J’aime” ou “Je n’aime plus”. Le même groupe de personnes a endommagé samedi soir les vitres et les murs du bâtiment situé à Hambourg, a annoncé la police dimanche.

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Peinture, pierres et fumigènes

facebook-anschlagVers 20 heures, quinze à vingt personnes masquées et habillées en noir a lancé sur le bâtiment des récipients remplis de peinture ainsi que des pierres et des fumigènes, endommageant également la porte d’entrée, selon la même source. Les auteurs, dont les motivations précises sont inconnues, ont ensuite pris la fuite, a ajouté la police. […]

An Allemagne, des critiques récurrentes contre Facebook

Régulièrement critiqué par les groupes de défense de la vie privée, Facebook a aussi été pointé du doigt en Allemagne pour les nombreux commentaires hostiles aux réfugiés postés sur le réseau social, alors que le pays s’attend à accueillir un million de demandeurs d’asile en 2015. Le ministre de la Justice, Heiko Maas, avait enjoint le réseau social à ne pas “devenir une scène pour l’extrême-droite”.

L’AFP via lexpress.fr, 13/12/2015 à 17h25

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L’Emission de radio « Haine des Chaînes »

Depuis maintenant quelques années, sévit sur les ondes hertziennes une émission qui propage la haine de toutes les chaînes, de tout ce qui enferme… Une émission qui cherche à donner de l’écho à l’analyse critique, aux coups de gueule et aux luttes. Haine des Chaînes c’est à 20h tous les lundis (sauf le quatrième du mois) sur radio Galère 88.4 (rediffusion les vendredi matin à 6h30).
On essaye de mettre les émissions en ligne régulièrement sur notre site Internet… Et, pour ce qui est des derniers mois, on est à jour ! On en profite donc pour vous présenter nos dernières émissions, regroupées ici en fonction des thématiques qu’on a abordé ces derniers temps…

Cliquez sur les liens pour accéder à l’écoute !
A propos de ce monde de frontières et des solidarité avec les migrants :

* Solidarités avec les sans-papiers – 31 août 2015
Une émission qui revient sur ce que les hordes de crocodiles s’accordent à appeler une vague de migrants sans précédent. Mais qui sont ces crocodiles ? Entre ceux qui ferment les yeux, ceux qui s’indignent sans agir, ceux qui bossent pour frontex, ceux qui ordonnent la construction de murs – histoire de fortifier une Europe déjà forteresse-, ceux qui renforcent la coopération internationale pour mieux traquer les sans-papiers, ceux qui voudraient les foutre dehors, ceux qui se font de la maille sur le dos des travailleurs immigrés… une émission qui dépiaute toutes ces peaux de crocos, en attendant d’en faire des souliers pour les migrants.

* Des vagues de larmes au tri des migrants – 14 septembre 2015
Réflexions autour de la question des migrants et de « la fabrique de l’opinion » : les incantations face aux « catastrophes » ; les chiffres de 2014 des refus de demandes d’asile et des expulsions en Europe et en France métropolitaine et d’Outremer ; le choc des images et les utilisations des émotions qu’elles suscitent ; le poids des mots qui désignent la population « étrangère » et leurs définitions officielles ; le tri sélectif des personnes qui fuient leurs pays d’origine ; les réformes qui durcissent encore le droit d’asile et le droit des étrangers…

* Migrations, renversement et oisiveté – 5 octobre 2015
Quelques actus et réflexions sur les migrants, une réécriture dédicace aux « damnés de la terre » et un texte d’Arthur sur les méfaits du travail.
* Témoignages de migrants soudanais – 16 novembre 2015
On diffuse deux témoignages de migrants soudanais rencontrés à Marseille où ils nous parlent de leur voyage jusqu’en Europe et de leur vies, ici et là-bas. On présente aussi le Manba, un lieu qui s’est ouvert à Marseille autour du Collectif SoutienMigrants13.

A propos de l’univers carcéral et de ce monde de prisons :

* L’Envolée n°41 – Hafed Benotman (1) – 12 octobre 2015
Diffusion de la première partie (de A comme Affranchi à S comme Stigmates) de la version sonore du numéro 41 de l’Envolée avec des entretiens et des écrits d’Hafed Benotman, voleur, écrivain et cofondateur de l’Envolée. Pour en finir avec toutes les prisons !

* L’Envolée n°41 – Hafed Benotman (2) – 19 octobre 2015
Après quelques réflexions sur ce monde de prisons en guise d’introduction, diffusion de la deuxième partie (de D comme Désobéir à N comme Non merci) de la version sonore de l’Envolée n°41.

* Le 23 novembre, et désormais tous les quatrième lundi du mois à 20h, c’est l’émission Passe-Muraille qui diffuse la parole des personnes incarcérées.

A propos du nucléaire… et de son monde !

* Uranium – 21 septembre 2015
On diffuse l’épisode 9 de La Fabrique de l’oubli qui revient sur l’extraction de l’uranium au Niger, au Mali et en Australie… Et on vous livre également nos propres reflexions sur le sujet.

* Nucléaire, « Douce France » – 26 octobre 2015
Diffusion du dixième épisode du montage radiophonique « Nucléaire, la fabrique de l’oubli » intitulé « Douce France ».

A propos de l’ordre policier et de la violence d’État

* Surveiller les flics – 9 novembre 2015
Diffusion d’une interview réalisée par l’équipe de l’émission Papillon (diffusée sur Radio Dio à Saint Etienne) sur le Copwaching aux USA puis lecture d’un texte de Lorenzo Kom’Boa Ervin sur le racisme systémique à travers l’exemple de la violence de la police aux US et on finit par quelques conseils avant d’aller en manif…

* Autour de l’état d’urgence – 30 novembre 2015
Retour sur l’état d’urgence en vigueur en France en ce moment avec des notes de lectures sur « La domination policière » de Matthieu Rigouste, quelques conseils avant d’aller en manif, le témoignage d’un assigné à résidence et on finit par un texte de Giono sur la guerre.
Retrouvez également multitudes d’autres émissions et montages sur les mêmes thèmes et bien d’autres sur le site de l’émission !

N’hésitez pas à nous faire part de vos réactions, retours critiques, contributions et autre propositions ! On a changé d’adresse e-mail c’est donc désormais sur hainedeschaines@riseup.net qu’il faut écrire, ou par courrier à l’ancienne, »HDC chez Radio Galère – 41, rue jobin – 13003 Marseille ».
relevé sur marseille information autonome

Gênes ( 2001) n’est pas finie, liberté pour Gimmy !

le chat noir émeutier

« Au moment de la révolte, on n’est plus seuls dans la ville »
Furio Jesi

2011-10-15-rome-clashesLe 14 juillet 2012, la Cour de Cassation a condamné de façon définitive 5 compagnons pour les faits du G8 de Gênes, en 2001, avec des peines allant de 10 à 15 ans de prison. Le 13 novembre 2013, la Cour d’appel de Gênes condamne d’autres 4 compagnons à des peines allant de 6 à 8 ans.

Après le jugement de 2012 de la Cassation, deux compagnons, Gimmy et Vincenzo, décident de s’enfuir et continuer à vivre libres. Aujourd’hui, heureusement, Vincenzo est encore libre, tandis que Gimmy a été arrêté avec sa compagne en juin 2013 à Barcelone, où il s’était réfugié.
Depuis, il est dans la section G9 de la prison de Rebibbia [Rome ; NdT], où il doit purger sa peine jusqu’en 2024.
Sa condamnation a été possible aussi grâce aux délations d’un « pacifiste » de Ravenna, présent ces jours-là à Gênes.

Le 12 janvier 2016 il y a aura, à la Cour d’appel de Gênes, une audience pour statuer de la « continuité » entre une arrestation de 2000 et celle des jours de la révolte contre le G8. Une audience à laquelle Gimmy sera présent et pendant laquelle il sera important de lui faire sentir la solidarité des compagnons. En vue de ce jour, il est important de lui écrire et de le soutenir, des façons que chacun trouvera les plus opportunes. Un aide économique est nécessaire aussi, au vu des dépenses qu’il aura à soutenir, entre autre les frais de justice.

En plus de sa situation difficile à cause de sa détention, il y a quelques jours Paola, la compagne de vie et de lutte de Gimmy a décidé de s’ôter la vie. Aujourd’hui plus que jamais il est nécessaire de rester à ses côtés.

Une autre vie brisée par les sentences des juges de l’État, prêts à enterrer en prison pour des décennies des compagnons accusés d’avoir attaqué un DAB ou des vitrines, tandis que policiers, Carabinieri et matons qui ont tué et torturé systématiquement lors du G8 de Gênes ainsi que dans les commissariats et les prisons pendant les dernières années, eux vivent tranquilles dans leurs maisons.
Tout cela ne sert à rien d’autre qu’à montrer encore plus que l’apparat de la justice est un apparat de classe, au service de ceux qui détiennent le pouvoir politique et économique de ce pays.

Seulement la solidarité d’en bas peut faire la différence ; elle peut marquer la frontière entre notre idée de la société et la leur, entre notre idée de la liberté et la leur.

Faisons en sorte que la solidarité redevienne une arme encore plus tranchante.

[Tract diffé à Trento, traduit de l’italien par non-fides d’Informa-azione.]
P.-S.
Gimmy ci ha fatto sapere che i genitori di Paola sono in difficoltà economiche e che hanno bisogno di un aiuto per sostenere le spese del funerale.
_ _ _ _ _ _ _ _
Gimmy nous a fait savoir que les parents de Paola sont en difficulté économique et qu’ ils ont besoin d’une aide pour participer aux frais des funérailles
pour donner une contribution économique:
Pace Giuditta
Via Zurria 37
95100 Catania

Écrivons nombreux (et envoyons de l’argent) à :

Francesco Puglisi
Casa Circondariale “Nuovo Complesso”
Via Raffaele Majetti 70
00156 Roma Rebibbia

Du saké aux Côtes du Rhône (deuxième version)

tract distribué à valence le12/12/2015
Après la catastrophe cauchemardesque de Fukushima, dont la poursuite irrépressible est « oubliée » par les médias de masse, la question de la gestion post-accidentelle se fait de plus en plus pressante. Mais nous n’avons pas besoin de spécialistes pour savoir que cette puissance est incontrôlable.
Attentifs dans la lutte contre le train à grande vitesse Lyon-Turin, nous avons constaté que le développement des transports, réseaux ferrés, routiers, aériens, fluviaux et maritimes, a permis aux marchandises de gagner des marchés. Sans eux, l’expansion capitaliste n’aurait pas pu se faire.
Chaque jour, ce système prédateur implique de découvrir de nouveaux débouchés, non pas pour le bien des populations, mais pour sa propre survie. La création de technologies qui se démodent le plus vite possible, l’obligation faite de consommer des choses de plus en plus inutiles le prouve avec une obsolescence souvent programmée. Bien sûr, pour cela, il est essentiel de développer les énergies qui servent à l’abreuver. La raréfaction du pétrole, le pseudo développement des énergies renouvelables comme palliatif, la recherche sur les gaz de schiste, montrent le besoin continuel de ce système politique et économique et ses nuisances pour la planète.
Le capitalisme a besoin d’espace policés, encadrés, fliqués pour s’épanouir. La religion du fric impose que les populations soient contraintes à ses principes et soumises. Le nucléaire est l’énergie qui lui ressemble le plus. Avec son fonctionnement extrêmement délicat, il suppose une mainmise de type militaire. Cette technologie est la vitrine de ceux qui ont la volonté de dominer le monde. Faire la différence entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire est un leurre, l’un est le prolongement idéologique de l’autre. D’ailleurs, le Mox utilisé dans certaines centrales nucléaires au Tricastin, par exemple, combustible peu stable, est composé, notamment, de plutonium militaire recyclé et aussi après l’échec industriel monumental de Superphénix, la Hague recycle le plutonium des centrales nucléaires sous forme de Mox. Sa haute technicité impose des spécialistes en organisation sociale.
À Tchernobyl dans un premier temps, ce sont des mensonges d’État sur les conséquences immédiates de l’accident impossible devenu possible et la mise en scène soviétique d’une guerre contre la radioactivité. Ensuite, la gestion internationale de populations crevant sur les territoires contaminés constitue très vite un vaste laboratoire scientifique et social pour l’ensemble des pays nucléarisés : des programmes internationaux sont mis en place pour envoyer des experts étudier l’évolution sanitaire des populations et leur imposer une « vie sous contrainte radiologique » (Core,Ethos, Sage). Avec la catastrophe de Tchernobyl s’est développée, en particulier en France, une « culture du risque » qui correspond à une phase historique de la gestion sociale du nucléaire dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Loin de nier la menace de la catastrophe, il s’agit de lafaire accepter comme un phénomène naturel. Ce type de danger devient inévitable, mis en évidence dans l’article de Bernard Laponche (physicien nucléaire) « Accident nucléaire : une certitude statistique » dans le journal Libération du 3 juin 2011. De même la carriériste citoyenniste,l’écologiste révélée après Tchernobyl Michèle Rivasi dans un article du Dauphiné (du 13 mars 2012) et aussi dans Drôme Hebdo (du 6 septembre 2012) pour le site du Tricastin suscite l’angoisse.
Faut-il donc apprendre à vivre avec, à y faire face de manière responsable et disciplinée tout en réclamant protection aux États.
Avec Fukushima, forts de cette expérience de gestion de catastrophe globale, les communicants du pouvoir nucléariste, c’est-à-dire aussi ceux de l’État français doivent s’engager à poursuivre un travail de Sisyphe de « reconquête de l’opinion ».L’ASN a confié une mission au cabinet Triesse basé à Lyon. Celui-ci muni de cette mission,dès juillet 2012 dans la région Rhône-Alpes, a rendu ses conclusions. Il préconise, sur la base du constat fait par Ted Laso -expert en radioprotection pour l’Agence pour l’Energie Nucléaire- que la principale faiblesse du CODIRPA (COmité DIRecteur pour la gestion Post Accidentelle d’un accident nucléaire ou d’une situation radiologique) est de ne pas assez s’appuyer sur la sociétécivile : « Pour trouver des solutions durables dans une zone contaminée, il faut avant tout la participation directe des populations ». Le cabinet propose de faire participer à la CODIRPA les acteurs économiques et des acteurs territoriaux. L’objectif est de contrôler le niveau d’adhésion des populations à leur gestion post-accidentelle, avec l’appui des CLI et de l’ANCCLI. Le cabinet
Triesse participe ainsi à la catastrophe programmée par les nucléocrates. « Le désastre de Fukushima nous a brusquement rappelé que le nucléaire est d’abord terrible en ce qu’il nous
dépossède durablement de nos conditions d’existence et étouffe toute aspiration à la liberté. Quelle vie reste-t-il à mener un dosimètre autour du cou ? »
Aujourd’hui on ne nous vend plus un nucléaire
sûr, mais la fatalité de l’avenir nucléarisé et avec lui sa vie en zone contaminée.Nous refusons le rôle de cobayes dans leur spectacle merveilleux, lassés de la pantomime dépressive et pseudo radicale des écologistes d’État. Ceux-ci enrichissent l’abjection dominante pour une meilleure gestion de ce monde et permettre l’encadrement capitaliste, et la logique de l’État nucléaire qui a déclaré en 1978 : « il est vrai qu’un problème n’est pas réglé, c’est celui des déchets ».
La capacité des États à récupérer des mots, des concepts, voire des dispositifs, pour servir d’alibi et se parer de modernité sans transformer la nature profonde du système en place est récurrente. Il y a donc la nécessité impérative et constante de ne pas isoler la lutte contre lenucléaire de la perspective d’ensemble de rupture avec le capitalisme.
Nous ne voulons pas négocier d’éventuels aménagements de notre liberté, de nos désirs, de nos vies. Rejoignons en discutant ceux qui s’opposent aux projets dévoreurs d’énergie et à la société
marchande qui les développe.

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