repas gâché

on n’oublie pas non plus . les fanfaronnades des  citoyens vigilants qui ont manifesté avec les flics le 25 octobre à Valence ( le grand village)

 


 

aubanar.lautre.net

C’est vrai qu’ils sont plaisants, tous ces petits villages,
Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités
Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages […] »

Monsieur Lambda laisse Madame conduire, les yeux sur la carte.
Bientôt midi et toujours pas trouvé le petit restau spécialisé dans les spécialités locales. Monsieur Lambda ne connaît pas la liste des départements, préfectures et sous-préfectures mais pour ce qui est de la bouffe, c’est un Kador, un Môssieur !

Voilà, prendre la route à droite après le lavoir, faire un kilomètre et hop, arrivés.

Le restaurant est là, le parking est rempli de gros 4×4, pas le jour pour espérer un repas tranquille dans une salle quasi déserte. Monsieur Lambda est déçu : sur la carte, le village paraissait isolé.

« […] Ils n’ont qu’un seul point faible et c’est d’être habités. […] »

Monsieur Lambda pousse la porte de l’estaminet. Aussitôt les discussions s’étouffent ; le silence se fait, les têtes se tournent.

« […] Et c’est d’être habités par des gens qui regardent
Le reste avec mépris du haut de leurs remparts… […] »

Un mec en costume gris, debout, les poings sur la nappe, semble pétrifié, bouche ouverte.
Monsieur et Madame Lambda hésitent puis acceptent de suivre un serveur qui les guide jusqu’à une table au fond de la salle, dernier arrêt avant les toilettes.

Là-bas, pas dans les chiottes où serait sa place légitime mais dans la salle principale, le mec en gris reprend son discours :
« Il n’est pas question que la région accueille tous ces étrangers pas français, et blablabla et blablabla… On est chez nous… et blablabla… invasion cosmopolite… et blablabla Ouink ! Ouink » frontiere

A Allex, à une vingtaine de kilomètres de Valence (Drôme), ça se déchire et ça se voit. Sur la départementale le FN a bombé « Non aux réfugiés » accompagnés de la flamme tricolore En réponse, des dizaines de « Welcome ». Un centre d’accueil et d’orientation (CAO) pour migrants a ouvert ses portes le 19 septembre et héberge depuis quelques jours onze adultes et enfants originaires du Soudan, d’Afghanistan et d’Irak.
Le FN n’en attendait pas moins pour « faire d’Allex un laboratoire pour tester leur influence ». « Jusqu’à présent, les électeurs du FN étaient discrets mais depuis cette affaire, ils s’expriment à visage découvert », constate ainsi Christophe Bürling un élu de l’opposition. Et comme ça commence à parler des prochaines élections, l’arrivée des migrants à Allex est récupérée par le Front national pour faire entendre sa voix dans un village où le vote FN a remporté 26,78 % des suffrages lors des dernières élections régionales.
« Maintenant, les voleurs vont venir ici pour mettre ça sur le dos des migrants et je ne vous parle pas des viols » dixit un un habitant.

« […] La race des chauvins, des porteurs de cocardes,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part. […] »

Monsieur et Madame Lambda ont leur repas entre les mains, là sur un simili parchemin…
Monsieur Lambda contemple la somme de toutes ses gourmandises. La région est riche en spécialités culinaires.
Mais là-bas, y a le mec en gris qui postillonne :
« Si nous ne résistons pas… blablabla… des minarets… Ouink ! Ouink !… notre race blanche… et blablabla… le travail des Français… Groin ! Groin !… hallal… »
Monsieur Lambda sans se déplacer interpelle le serveur posé près du bar :
« Votre poulet aux écrevisses… il est hallal ? »
Of course, histoire de couvrir la voix du nazillon en gris, il a dû forcer un peu sur ses cordes vocales…

Là-bas, pas dans les chiottes où serait sa place légitime mais dans la salle principale, le mec en gris s’est figé. L’assistance ne le regarde plus, toute occupée à fusiller du regard celui qui a osé interrompre le discours du tribun.
« Et pour attendre je prendrais volontiers un cocktail orange miel bien frais… choukran ! »
Surement un boucher, le gars couperosé qui serre les poings n’attendant qu’un signe pour foncer sur l’envahisseur. Et que dire du troupeau de crânes rasés sirotant des bières au bar et proposant à Monsieur Lambda une forêt de doigts d’honneur…

« […] Quand sonne le tocsin sur leur bonheur précaire,
Contre les étrangers tous plus ou moins barbares,
Ils sortent de leur trou pour mourir à la guerre,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part. {…] »

Le mec en gris se rappelle les consignes :
« Ne pas allumer la mèche mais fournir l’allumette… Dédiaboliser la façade… »
Il fait un signe pour calmer ses troupes genre « Pas tout de suite, les gars… » avant de reprendre son prêche :
« Pas question de laisser ce gouvernement socialo-maçonnique nous dicter sa loi… Raoust les violeurs levantins ! Raoust les étrangers !…. Groin ! Groin !… Nous les Gaulois, nous défendrons notre sol, nos traditions… Cocorico – car Monsieur est polyglotte – Cocorico !!!»

Dernier jour de septembre, le mouvement « citoyen, patriote / Sauvons notre pays » rassemblait une quarantaine de fachos décomplexés devant la préfecture à Privas (Ardèche), avec un slogan : « non aux clandestins ». Dans le même temps un rassemblement spontané d’une centaine de contre-manifestants était également sur place.
Alors que Alain Barnier, chef de file en Ardèche du rassemblement « Sauvons notre pays » entamait son discours de haine devant la préfecture, les contre-manifestants étaient repoussés par la police vers la place de l’hôtel de ville pour éviter tout affrontement direct.

Monsieur et Madame Lambda, ni une ni deux, lancent un long « Youyou » de colère et de dépit.

« […] Mon dieu, qu’il ferait bon sur la terre des hommes
Si on n’y rencontrait cette race incongrue,
Cette race importune et qui partout foisonne :
La race des gens du terroir, des gens du cru.
Que la vie serait belle en toutes circonstances
Si vous n’aviez tiré du néant tous ces jobards,
Preuve, peut-être bien, de votre inexistence :
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part.»

(Brassens « La ballade des gens qui sont nés quelque part »)

Et c’est sous les insultes, les menaces que Monsieur et Madame Lambda quittent ce petit coin paisible de la campagne française. Adieu spécialités locales, juste l’envie de vomir.
Encore un pas, la porte… Se retourner… Même pas peur… Affronter une dernière fois la pensée crasse…
« […] Maudits soient ces enfants de leur mère patrie
Empalés une fois pour toutes sur leur clocher. […] »

« Ouvrez les frontières, c’est irrespirable ! »