Le débat national sur la gestion des déchets radioactifs a débuté le 17 avril et durera jusqu’au 25 septembre. Refusant d’être les « garants démocratiques validant la poursuite du nucléaire en France », les auteurs et les autrices de cette tribune proposent, avec l’Atomik Tour, une autre façon de débattre de cette question.
Parti de Bure, dans la Meuse, en janvier 2019, l’Atomik Tour organise pendant six mois des conférences, des débats et des projections autour du nucléaire et des déchets radioactifs dans 50 villes-étapes. Les participantes et participants à ce tour de France antinucléaire souhaitent être une alternative au débat public sur les déchets radioactifs lancé mercredi 17 avril. Vous pouvez retrouver le parcours et les informations de l’Atomik Tour sur leur site.
La France nucléaire, vous y tenez ? Nous, non. C’est pourquoi nous refusons de nous asseoir autour de la table du débat sur la gestion des déchets radioactifs. Nous refusons d’être les élèves raisonnables acceptant le dialogue, cherchant le compromis lorsque l’on sait que ni nous (opposant.e.s) ni eux (l’État) ne souhaitons changer de position. Nous préférons donc l’école buissonnière plutôt qu’accepter l’invitation à ce « dîner de cons ».
En d’autres mots, nous ne serons pas les garants démocratiques validant la poursuite du nucléaire en France. Nous ne souhaitons pas leur présenter nos arguments ni entendre les leurs. Il n’y a pas de compromis à nos yeux, nous demandons l’arrêt immédiat du nucléaire, avec comme premières mesures le non-démarrage de l’EPR de Flamanville et l’annulation de l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure.
Est-il si déraisonnable de refuser une mascarade lorsque l’on en voit une ? Nous retenons les leçons de notre collaboration avec les institutions nationales. Les débats publics de 2006 sur l’EPR de Flamanville et ceux de 2005 et 2013, déjà sur cette question des déchets, ont épuisé notre stock de naïveté. Nous avons parlé, suivi les règles de leur jeu mais l’État n’a pas écouté.
À Bure, nous apprenons quotidiennement que l’on ne peut accorder aucune confiance aux dirigeant.e.s, à leur police et à leur justice. Sur place, les opposants et opposantes sont surveillées, étouffées, envoyées en taule, interdites de territoire, mises sous contrôle judiciaire. D’un côté l’État humilie et emprisonne la revendication et de l’autre, il nous invite à partager des langues de chat. Non merci, j’ai piscine.
Les Françaises et Français ne sont pas dupes sur cette énergie
Ce que nous souhaitons, c’est discuter avec les non-dirigeant.e.s, avec celles et ceux qui pensent ne pas avoir leur mot à dire sur le nucléaire, avec les travailleurs et travailleuses du nucléaire, avec les voisins des centrales, avec les victimes présentes et futures.
C’est de cette envie qu’est né l’Atomik Tour. Nous sommes partis de Bure en janvier pour y revenir en août. Durant ces sept mois, nous nous arrêtons dans une cinquantaine de villes réparties sur tout le territoire pour rencontrer, discuter et questionner : « La France nucléaire, vous y tenez ? » À cette question, la réponse majoritaire est le non, car « c’est dangereux » ou « ça pollue ». Les Françaises et Français ne sont pas dupes sur cette énergie, mais cinquante ans de propagande ont empêché d’accepter l’idée que des alternatives sont viables. On remarque que le oui est en tête aux abords des centrales atomiques, des arsenaux militaires et des centres de traitement nucléaire, qui ont un pied dans chaque foyer en contrôlant l’emploi et la culture.
Il existe d’autres initiatives d’information populaires et indépendantes que l’Atomik Tour, tel que le « grand cycle de conférences », qui a lieu dans le Grand Est depuis quatre mois : il propose une cinquantaine de débats sur la thématique du nucléaire et de l’enfouissement de déchets.
L’Atomik Tour 2019 n’est que le début d’une nouvelle façon pour nous de militer contre le nucléaire. La répression locale, l’association de malfaiteurs et les interdictions de territoires rendent la lutte à Bure très difficile. En faisant naître cet aspect nomade de la lutte contre Cigéo, nous faisons coup double. Un, nous contournons les interdictions qui nous isolent, et ensuite nous contribuons à tisser la toile des initiatives antinucléaires. Nous rêvons d’une multitude de caravanes itinérantes à échelle départementale qui ouvrirait les portes de chaque salle des fêtes pour se rencontrer, discuter et agir contre l’État et la finance qui « contrôlent » ce Léviathan radioactif qu’est l’industrie nucléaire.
Rédigé par Des antinucléaires de l’Atomik Tour, publié le 24 avril 2019