Archives mensuelles : juin 2018

Besançon : Entre musée à ciel ouvert et ville de riches

Cela fait maintenant huit ans que Bien Urbain participe à l’aseptisation de cette ville. Ce festival vient mettre sa pierre à l’édifice de la ville des riches et du contrôle, accompagne le pouvoir dans ses multiples projets de vidéo-surveillance, de tramway et de transports « fluides », d’écoquartiers et autres complexes de logement de luxe qui fleurissent un peu partout…

 

Ce recueil de textes a pour but, en partant d’un exemple concret de la gentrification par l’art, d’élargir la critique à l’ensemble des politiques urbanistes. Il ne cherche pas uniquement à rappeler quelques signes d’opposition a ce rendez-vous annuel du gratin de designers hipsters qui se sont produits dans le passé, mais de faire en sorte que ses traces d’hostilité se multiplient et se répandent a travers la ville, et ce dès ce mois de juin, en ciblant les fresques du festival qui seront l’objet de visites guidées pendant un mois a partir du 8.

Pour cette année 2018, le festival a établi son QG a l’Arsenal, dans les anciens bâtiments de la fac de Médecine, a deux pas de la mairie. Se faisant appeler « Hop hop hop », il bénéficie désormais de centaines de mètres carrés supplémentaires.

Que tous les vandales s’y mettent, tagueurs et graffeurs irrécupérables, marginaux et opposants a cette ville aseptisée qui pue le fric, enrages contre cette société de misère et d’exploitation… Notre créativité est grande : a la bombe, a l’extincteur ou aux œufs de peinture, huile de vidange, saccage de leurs locaux et leurs installations sonores, etc…

S’attaquer a Bien Urbain, c’est s’en prendre aux riches, au tourisme, à l’embourgeoisement, à la mairie et sa guerre aux pauvres et aux étrangers, aux multiples mécènes et institutions qui lui remplissent les poches pour réaliser leur sale besogne.

PDF - 2.7 Mo
Fichier pdf/brochurebu2018.pdf

[Repris de Sans attendre demain.]

 

talie – Opération Scripta Manent : La demande de mise en liberté de deux compagnons rejetée

Anarhija.info / vendredi 8 juin 2018

Le 5 juin, le tribunal a rejeté la demande de mise en liberté pour les compagnons anarchistes Alessandro Mercogliano et Marco Bisesti, en détention préventive depuis septembre 2016 pour l’opération Scripta Manent.

Solidarité affine avec Alessandro et Marco et avec les autres compas prisonnier.

Pour écrire aux compas actuellement en prison suite à cette affaire :

ANNA BENIAMINO
Casa circondariale Rebibbia Femminile
Via Bartolo Longo, 92
00156 – Roma

MARCO BISESTI
Casa circondariale
Strada Statale per Casale, 50/A
15121 – Alessandria

NICOLA GAI
ALFREDO COSPITO
DANILO CREMONESE
ALESSANDRO MERCOGLIANO

Casa circondariale
Via Arginone, 327
44122 – Ferrara

traduit par attaque.noblogs..org

Paroles claires – La « bonne guerre » des anarchistes italiens immigrés aux Etats-Unis (1914-1920)

  a lire la page intégralement  et les passages surlignés.  annonce le vendredi15 juin on se voit et on écrit aux prisonniers( prison CRA HP) de la guerre de classe .

« Et dites, dites ! Que seriez-vous sans dieu, sans roi, sans patrons, sans bûches, sans larmes ? – Il finimondo [1] ! »“MATRICOLATI !”
Cronaca Sovversiva, 26 mai 1917.

 

Si les anarchistes ne font pas leur histoire, ce sont leurs ennemis qui la feront.
Cette observation – par ailleurs valable au-delà du seul cadre historiographique –, formulée par un célèbre historien italien vers la moitié du siècle passé, précède et accompagne tout le débat autour de ce que l’on appelle l’histoire d’en bas. Le fait concret, matériel, a une vie courte en soi. Ce qu’il en reste, c’est l’interprétation, qui ne peut qu’être partisane, selon des critères et des intérêts précis. Parce que faire l’histoire ne signifie pas uniquement prendre part aux grandes entreprises qui changent le cours des événements, cela signifie aussi, et parfois surtout, participer à leur reconstruction dans le but de les transmettre.
Ce que nous connaissons sous le nom d’Histoire n’est jamais – et il ne peut en être autrement – un ensemble de faits objectifs, neutres, clairs et sans équivoque. C’est avant tout le fruit de leur sélection, de leur interprétation, de leur ordonnancement et enfin de leur présentation. Ce processus est élaboré en haut, par une académie au service du pouvoir qui la façonne. L’Histoire devient ainsi histoire de ce qui est Etat  [2] : ce qui confirme Sa raison, ce qui est fonctionnel à Ses intérêts, ce qui correspond à Ses exigences.
D’où ce franc conseil adressé aux anarchistes de rédiger leurs mémoires, si l’on ne souhaite pas que son histoire tombe entre les mains de ceux qui ne peuvent l’écrire qu’à leur façon et pour leur propre profit. Mais combien de révolutionnaires ont-ils prévu de laisser des traces écrites de leur passage sur cette terre ? Ceux qui veulent agir ici et maintenant n’ont pas le temps de s’arrêter pour enlever la poussière des jours passés , et puis, tous n’ont pas la vanité nécessaire pour justifier une autobiographie.
Toutefois, le risque signalé dans cet avertissement existe et il faudrait le déjouer dès que l’occasion s’en présente. Ne laisser parler que l’académie, en se limitant à la maudire et à la contredire de temps en temps, ne revient qu’à en léguer le servilisme aux générations futures. L’alternative ne peut pas être entre l’ignorance du passé (qui oblige à toujours tout recommencer à zéro, en se privant de précieuses leçons et expériences), ou son apprentissage à travers les seuls manuels scolaires. Si la mémoire de la révolte – quand elle ne s’est pas entièrement perdue – est devenue l’otage du savoir institutionnel, séquestrée dans des archives que tous n’ont pas la possibilité de consulter, dans des lieux fréquentés par des historiens qui, quoique mus par les meilleures intentions, ne peuvent que réduire à une matière pour spécialiste ce qui est source d’énergie rebelle à répandre … alors il ne nous reste qu’une seule chose à faire. Attendre ces historiens au tournant pour les alléger de leur précieux butin. Piller les trésors qu’ils emportent avec eux en vue d’un simple catalogage et les délivrer des lieux communs qui les dénaturent. Arracher du passé le plus incandescent l’uniforme institutionnel dont l’a revêtu l’académie historiographique, pour enfin donner vie à une histoire qui ne connaisse ni autorité ni obéissance.
Parce qu’à l’Histoire d’en-haut, on ne peut opposer que l’histoire surgissant d’en bas.

Aux Etats-Unis, entre 1914 et 1920, s’est déchaînée la plus grande offensive révolutionnaire armée jamais advenue au 20ème siècle contre les institutions gouvernementales, judiciaires, religieuses, industrielles et financières du plus important pays capitaliste de la planète. Ces actions directes ne furent pas accomplies par les organisations combattantes d’un quelconque parti politique ou de quelque mouvement de masse plus ou moins radical, mais par une poignée d’anarchistes italiens émigrés là-bas au début du 20ème siècle. Et c’est justement de leurs rangs que provenaient Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, devenus malheureusement célèbres pour avoir été exécutés sur la chaise électrique en 1927, au terme d’une affaire judiciaire qui eut un fort retentissement dans le monde entier.
Ces anarchistes italiens avaient une ville, Boston, pour épicentre et un hebdomadaire comme voix publique. Ce journal était la Cronaca Sovversiva, et il avait pour principal animateur Luigi Galleani.
Si le nom de Galleani était connu chez les anarchistes en Italie, les faits dans lesquels il fut impliqué l’étaient moins. La biographie de plus d’une centaine de pages, publiée en 1956 et réimprimée en 1984, qu’Ugo Fedeli lui a consacrée ne retient de son séjour en Amérique et de la Cronaca Sovversiva que les polémiques théoriques : le litige furibond avec Giacinto Menotti Serrati, la discussion sereine avec Francesco Saverio Merlino sur la prétendue « fin de l’anarchisme », l’affrontement général au sujet de la révolution mexicaine, la critique de l’interventionnisme pendant la première guerre mondiale. Comme si Galleani s’était limité à la parole et à brandir exclusivement l’arme de la critique. A l’intérieur de cette édifiante reconstruction (bien évidemment due à la discrétion de Fedeli vis-à-vis de certains protagonistes de ces faits lointains, encore vivants à l’époque de la rédaction de son livre), les figures de Salsedo et de Sacco et Vanzetti apparaissaient dans les costumes de martyrs innocents. Nous savons aujourd’hui que cela ne s’est pas déroulé exactement ainsi.
Pendant de nombreuses décennies, la mémoire de Galleani n’est restée imprimée que chez celles et ceux qui en partageaient les aspirations à la liberté, au moins dans les intentions si ce n’est dans les méthodes, transmise aux nouvelles générations rebelles afin que celles-ci en chérissent les enseignements. Un legs assez partiel, plus symbolique qu’autre chose, étant donné que sa volumineuse œuvre écrite est, elle aussi, restée inconnue (laissée à jaunir dans les bibliothèques, son langage archaïque, fleuri et plein de rhétorique la rendant bien souvent peu attractive).
Mais par la suite, les historiens professionnels ont ravagé cet héritage. L’embarras que l’on peut ressentir devant certaines hagiographies du mouvement devient insignifiant face à la gêne que provoquent les reconstructions de l’académie. Les premières peuvent être aussi aveugles que des actes d’amour, mais les secondes sont renseignées comme des procès-verbaux de police !
Les premiers à s’être penchés sur ces lointains événements ont été des historiens plus ou moins sympathisants des idées libertaires, qui d’un côté ont permis de découvrir un peu d’histoire là où ne régnaient que le silence ou la légende, mais de l’autre en ont réduit la portée à des critères plus médiocres.
Paul Avrich a abordé l’arrière-plan de l’affaire Sacco et Vanzetti, Nunzio Pernicone a reparcouru la vie de Carlo Tresca, mais aucun des deux n’a pu éviter de se heurter à la figure de Galleani (« mentor » des premiers, « rival » du second), ayant trop d’importance dans ces faits lointains pour être passée sous silence. Sauf que, ce qui pour Galleani et ses compagnons était une raison d’être, ce qui donnait un sens à leur existence, une immense idée pour laquelle vivre et mourir, devient pour les historiens un sujet de recherche bibliothécaire, un thème de conférences, une matière originale sur laquelle écrire un beau volume. Ce n’est pas une tension libératrice à incarner, mais une opportunité éditoriale à exploiter. Comment des personnages habitués à chauffer une chaire universitaire dans l’unique souci d’empocher le salaire de l’Etat, pourraient-ils ne serait-ce que pressentir ce qui tourmentait ceux qui ont combattu l’Etat toute leur vie durant, et ont été persécutés ou tués pour cela ? Comment peuvent-ils en comprendre les nécessités, les problèmes à résoudre, les difficultés à surmonter, les tentatives à réaliser ? Comment peuvent-ils en supporter la force débordante ?
Ils ne le peuvent pas. Voilà pourquoi ils tendent à lire la vie aventureuse d’autrui (pensant, par ailleurs, pouvoir l’extraire des documents judiciaires qu’ils prennent pour des révélations authentiques) avec les lunettes opaques de leur paisible survie. Ne comprenant rien de la substance de l’anarchisme, les historiens font la grimace face à la manière dont il s’incarne parfois dans ses partisans en chair et en os. De ces « chevaliers errants de l’Idée », ils ne voient que la merde que leurs chevaux ont laissée ici et là. Le résultat est atroce. L’inflexibilité de ces anarchistes est terrifiante pour ceux qui n’arrivent pas à se soustraire entièrement à la pratique de la génuflexion. Leur passion pour leurs idées est abominable pour ceux qui expriment des opinions indifférentes. Leur recours à la violence est exagéré pour ceux qui ne visent qu’ à une bonne retraite.
Il est stupéfiant de constater à quel point ces historiens qui pâlissent face aux polémiques de Galleani, dans lesquelles ils ne voient qu’une rustre intolérance, ignorent que la bataille des idées a préparé et accompagné toutes les révolutions de l’histoire (affrontements entre girondins, cordeliers et enragés dans la révolution française ; entre socialistes républicains, communistes blanquistes et fédéralistes proudhoniens dans la Commune de Paris ; entre bolcheviques, mencheviques, socialistes révolutionnaires et anarchistes dans la révolution russe, entre anarchistes, staliniens et républicains dans la révolution espagnole).
Le vieux monde est assailli de toutes parts, de nouvelles idées du bonheur se fraient un chemin, se heurtant les unes aux autres, s’affrontant parfois âprement, dégageant des étincelles : pour s’affiner, pour croître, pour émerger. Il en a toujours été ainsi, il n’y a rien de monstrueux dans tout ça.
C’est ainsi qu’Avrich, bien que désireux de reconnaître la dimension anarchiste de l’histoire de Sacco et Vanzetti, finit par l’enterrer sous une montagne de détails inutiles – de l’énumération des métiers pratiqués pour survivre à celle des déménagements, en passant par les histoires de cœur – qui, à force d’être accumulés, risquent d’occuper tout l’horizon (quant à l’anarchisme, il se borne à en fournir un puéril catalogage scolaire).
Du côté de Pernicone, enchanté par l’ « éclectisme » funambuliste de quelqu’un comme Tresca, il ne comprend pas que l’on puisse mettre en pratique ce que l’on théorise, et son incapacité à saisir le sens de certaines décisions revêt parfois des traits humoristiques. Non seulement il se moque de l’ « autosacrifice » de Galleani, qui comme beaucoup d’autres anarchistes préféra le confino  [3] à une liberté obtenue par l’élection au Parlement, mais il juge prétentieux le choix des « galleanistes » (terme dépréciatif utilisé habituellement par ceux qui leur étaient hostiles) d’éloigner l’avocat Moore… du seul fait qu’il voulait disculper Sacco et Vanzetti en livrant quelqu’un d’autre au bourreau.
Mais si ces anarchistes italiens – à peine l’absence d’innocence découverte – ont été catalogués comme des sectaires, des intolérants, des fanatiques, par les historiens les mieux prédisposés à leurs idées de liberté, il n’est pas difficile d’imaginer comment ils ont été décrits par les chercheurs plus réactionnaires, qui se sont intéressés à eux suite à l’onde de choc du 11 septembre 2001. La panique semée jusque chez les puissants et leurs serviteurs ce jour-là ayant pour unique précédent celle provoquée le 16 septembre 1920 par l’attentat de Wall Street d’origine anarchiste, le terrorisme djihadiste a involontairement fait ressurgir de la mémoire publique celui qui avait osé défier le pouvoir états-unien quatre-vingt ans auparavant, au point de pousser certains journalistes et « experts » à affirmer qu’en 1919 le Oussama Ben Laden italien de l’anarchisme avait vécu à Boston (« c’est profond ! », commenta Galleani lorsqu’il entendit un procureur soutenir que l’on fait des journaux subversifs simplement parce qu’on n’a pas envie de travailler).
La lecture de ce genre de considérations nous laisse à la bouche l’amère impression que ce que nous voudrions le plus connaître de ces faits lointains n’est qu’à peine effleuré, au mieux laissé de côté car jugé peu significatif, au pire mystifié car considéré comme trop significatif. Mais comment renverser cette histoire d’Etat, la seule que l’académie sache raconter, pour aussi en changer la saveur ?

Voilà comment est née l’idée de ce livre. Pour le réaliser, nous sommes partis d’une présupposition. Les historiens états-uniens se sont surtout basés sur des rapports de police, ne consultant et ne rapportant qu’une infime partie des articles parus à l’époque dans la Cronaca Sovversiva – la différence de langue y a probablement contribué en bonne partie, constituant dans de nombreux cas un obstacle insurmontable –, alors que ce journal accorda souvent de l’espace à ces événements, exprimant les raisons qui motivaient ces anarchistes italiens. A l’inverse, il est plus facile pour nous d’entreprendre le parcours opposé, en corrigeant les documents officiels des uns avec les mots des premiers intéressés.
Pillant les recherches d’Avrich et d’autres historiens qui l’ont suivi, nous avons donc écrit une contre-histoire de cette offensive armée, en cherchant à la regarder avec les yeux des anarchistes qui la menèrent. Dans les limites de nos capacités et possibilités, nous avons effectué des recherches ultérieures. Elles n’ont pas été vaines, puisque certains faits et détails, selon nous d’une grande importance, que nous rapportons ici pour la première fois, avaient été négligés.
Ce que vous vous apprêtez à lire est donc une histoire partisane, subdivisée chronologiquement en chapitres, tous accompagnés par une iconographie plus ou moins riche.
Le premier, qui dans un certain sens introduit et annonce les événements qui suivent, est consacré à la publication de La Salute è in voi ! [Le Salut est en vous !], manuel pratique édité par Galleani en 1906, dont l’importance se fera ressentir à plusieurs reprises par la suite, alors que le dernier chapitre qui précède l’épilogue aborde ce qui (n’) arriva (pas) avant et après l’exécution de Sacco et Vanzetti. Entre les deux, de nombreux épisodes de la « bonne guerre » contre toute autorité que les anarchistes italiens menèrent aux Etats-Unis entre 1914 et 1920. Une guerre parfois féroce, pleine de tragédies, car ces immigrés sans Dieu ni patrie ne léchèrent pas la main de ceux qui les avaient accueillis dans le Nouveau Monde avec le fouet de l’exploitation et la matraque de la répression, en exigeant qu’ils abaissent leur drapeau noir – ils la mordirent jusqu’au sang. Et ils en affrontèrent toutes les conséquences.
Ce n’étaient ni des héros surhumains ni des fous criminels. C’étaient des hommes et des femmes en chair et en os, de muscles et de nerfs. Mais dans leur tête, mais dans leur cœur, brûlait un feu inextinguible, ce qu’ils appelaient l’Idée. Au-delà des faits relatés, au-delà des noms rappelés, cette idée, qui caractérise l’anarchisme autonome, est la véritable protagoniste des pages qui suivent. La révolte contre la société n’est pas simplement le résultat de rapports sociaux objectifs, elle est en même temps l’expression directe de l’individualité, qui n’accepte aucune muselière collective.
Pour certains, l’anarchie pourrait aussi être la promesse d’un lointain lendemain à vendre, mais l’anarchisme est un principe (dans son double sens de valeur et de commencement) à vivre, à mettre en œuvre, dès maintenant. Pensée et action. En effet, s’il ne s’agissait que de pallier l’urgence de la nécessité économique, de sécher la sueur sur le front ou de soulager un estomac trop souvent vide, le réformisme serait une solution plus que suffisante, capable de trouver une réponse tactique à n’importe quel problème. Mais une transformation radicale de la condition humaine a besoin de bien d’autres choses : d’une révolution sociale animée par une aspiration éternelle que le désespoir quotidien ne parvient pas à anéantir. Une vision, un désir, l’Idée, ce qui incite jour et nuit à briser les inhibitions matérielles et idéologiques qui enseignent à l’être humain de se soumettre aux puissants de ce monde.
Existe-t-il un exemple plus hostile et scandaleux que celui offert il y a un siècle par ces anarchistes ? Contre tout réalisme politique, ils attaquèrent l’autorité sous toutes ses formes malgré leur nombre relativement réduit. Voulant croître, ils cherchèrent inlassablement des complices parmi les pauvres et les exploités, sans jamais se renfermer dans le mépris rancunier de l’autre, mais sans jamais subordonner leur lutte à des critères quantitatifs. Une grande armée organisée n’est pas invincible, ce qui l’est c’est un ordre dispersé de forte volonté et de grande détermination.
Contre toute impuissance désespérée, ils ne se résignèrent pas à leur manque de moyens, mais s’efforcèrent de le dépasser. Si leur boîte à outils était presque vide, leur arsenal mental était inépuisable. Après avoir pris acte de la situation dramatique à affronter, ils ne se laissèrent pas submerger. D’abord ils l’étudièrent, puis ils firent ce que personne avant eux n’avait jamais pensé faire.
Contre tout idéalisme illusoire, ils n’hésitèrent pas à verser le sang. La parole est un mensonge, l’éthique une lâcheté, quand elles ne poussent pas et n’accompagnent pas l’action téméraire, et la remplacent par la vertu candide. La guerre sociale ne se contente pas de déclarations fracassantes, elle a aussi besoin de faits matériels qui cherchent à frapper l’ennemi, y compris durement.
Contre tout compromis stratégique, ils ne vendirent pas leurs rêves. Leur amour pour leurs idées, leur orgueil, leur dignité, ne connurent ni transactions ni transitions sur le marché du consensus. Ne devant signer de pactes avec personne, leurs mains restèrent libres pour prendre les armes. Et après 1927, certains d’eux regrettèrent amèrement d’avoir négligé l’idée pour conclure une alliance.
Contre tout lieu commun, ils n’opposèrent jamais la liberté de l’individu et les nécessités de l’association, la soif de savoir et l’envie de faire, la joie de vivre et le risque de la mort, les mots à porter et l’action à réaliser.
Ils donnèrent corps aux idées et les idées au corps. C’est là que l’amour de la liberté et la haine du pouvoir se fondent en une véritable éthique de vie – jamais dans une idéologie politique –, que surgit cette correspondance entre rêve et réalité, entre amour et révolte, entre baisers et dynamite, entre roses et barricades, telle que l’a décrite Vanzetti dans une de ses lettres : « Oh mon amie, pour moi l’anarchisme est beau comme une femme, peut-être même plus car il comprend tout le reste, et moi et elle. Calme, serein, honnête, naturel, viril, boueux et céleste en même temps, austère, héroïque, téméraire, fatal, généreux et implacable – c’est tout cela et bien d’autres choses encore ».
Oui, bien d’autres encore. Allez, commençons.

[Introduction au livre Paroles claires – La « bonne guerre » des anarchistes italiens immigrés aux Etats-Unis (1914-1920), 303 pages, format A5, L’assoiffé.]

Suggestions de lecture :

titre documents joints

Notes

[1Terme difficilement traduisible en français sans l’amputer de sa polysémie. Finimondo désigne à la fois le bouleversement, le tumulte, le chaos, le cataclysme, la fin-du-monde et un désordre qui échappe à l’imagination.

[2Jeu de mots avec stato qui signifie à la fois « Etat » et « a été » tous deux par le même mot.

[3Le confino est une mesure de police, qui contraignait les personnes visées à demeurer dans un lieu isolé, loin de leur résidence, et sous surveillance policière.

 

La belle vie c’est fini…

article 13

Pour les clandestins, la belle vie c’est fini» – M. Salvini, ministre de l’intérieur (Ligue du nord)

S. a été tué d’une balle dans la tête la nuit du 3 mai 2018, il vivait en Calabre dans un camp près de Gioia Tauro et travaillait dans les champs du sud de l’Italie. Une manifestation spontanée a eu lieu le jour même vers la mairie de San Ferdinando. Comme lui plus d’un demi-million d’ouvriers travaillent dans les camps en Italie, à 50 centimes la caisse (agrumes, kiwis, tomates principalement) pour environ 20 à 35 € par jour. L’État projette l’évacuation du campement de San Ferdinando et la multiplication des contrôles.

 « La main-d’œuvre extra-européenne légale est une ressource essentielle.

Sans elle,  l’activité agricole ne grossirait pas ainsi ».

Pietro Sianni, syndicat agricole Coldirettià

Après Florence, Macerata et tant d’autres, le ministre de l’intérieur justifie la violence à l’égard des personnes étranger.es comme légitime défense.

Pour Soumayla et pour tous.tes les morts du racisme et de l’exploitation.

 

https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/en-italie-un-drame-en-trop-endeuille-les-migrants-africains-pourtant-ressource-essentielle-en-calabre_2791935.html 

https://intellivoire.net/des-travailleurs-migrants-du-sud-de-litalie-en-greve-apres-la-mort-du-malien-soumaila-sacko/

Villeurbanne(69100) : action et communiqué du groupe ECRAN TOTAL

[[reçu par mail]

COMPTE RENDU DE L’ACTION DU GROUPE ECRAN TOTAL

Le collectif a affiché des slogans écrits sur des cartons à l’entrée de l’agence . Photo Yves Billy

le lundi 4 juin

 

à l’agence Pôle emploi de Villeurbanne

 

Rendez-vous était donné à 10h où un groupe d’une quinzaine de personnes composé de membres du collectif Ecran total et leurs soutiens ont investi l’agence. La volonté était de discuter avec les chômeu.rs.ses et les salarié.e.s en distribuant un texte de 4 pages et un tract d’une page (en pièces jointes) ; fruits d’une enquête de plusieurs mois sur la « dématérialisation » made in Pôle emploi.

 

L’occupation a été mise en scène autour de 3 personnes jouant le rôle (ou pas) de chômeu.r.se.s. ne souhaitant pas utiliser l’outil informatique et un autre trio se faisant passer (ou pas) pour des chercheurs d’universités envoyés par l’Observatoire national du Numérique pour mener une enquête sur l’impact de la numérisation.

 

Pendant ce temps-là, les autres membres du groupe discutaient avec les chômeu.r.se.s, et ont entendu ceci : « Toutes les personnes qui sont là ont un problème avec Pôle emploi sinon elles ne seraient pas là »,

 

« C’est pas l’équipement informatique qui manque aux gens, c’est de comprendre comment ça marche ».

 

À une dame à qu’il était demandé si l’action l’avait dérangée : « Non, ce qui me dérange c’est le calcul des allocations chômage où je me retrouve avec 169€/mois. »

 

De la part d’une manager qui explique que les normes informatiques changent toutes les semaines : « On court après le progrès ». « Ce n’est pas le lieu pour discuter et informer les chômeu.r.se.s, vous pouvez le faire à l’extérieur de l’agence, dans la rue » unanimement relayé par les managers-vigiles.

 

Cette action s’est clôt par la chanson Ya Basta entonnée dans l’agence et qui a fait surgir un essaim de managers énervés que l’action se soit déroulée à leur insu et nous poussant vers la sortie. En sortant nous avons crié : « Travaille, cotise (ou consomme) et ferme ta gueule ».

 

La distribution des textes et les discussions ont continué à l’extérieur.

 

Nous avons été surpri.se.s par l’importance de l’équipement informatique répartis dans deux salles. Par contre, aucun stylo n’était mis à disposition.

 

Les informations contenues dans nos textes ont été confirmées par un manager en chef.

 

Par contre, pour les chômeu.r.se.s, comprendre qui traitait leurs justificatifs et comment étaient calculées leurs allocations chômage a été une découverte. Nous serons vigilant.e.s à mieux nous faire comprendre à l’oral par des personnes qui ne maitrisent pas la lecture, voire à traduire les textes dans des langues étrangères.

 

 

Le rendez-vous de la prochaine réunion Ecran total à Lyon a été transmis à des chômeu.r.se.s.

2 pièces jointes

précarité 2. 0 version courte

un 4 pages Précarité 2.0

Opération de la gendarmerie à Roybon

note: comme à l’accoutumé les médias locaux relaient la version de la préfecture  et  la même sur les médias la région Rhône Alpes Auvergne..


(reçu par mail)

Bonjour,

La réactivité des gendarmes face aux agressions qu’auraient infligées des occupants de la Zad à deux Roybonnais apparaît exceptionnellement importante et rapide. Seules quelques heures auront suffi aux gendarmes pour réunir 200 intervenants (et un hélicoptère) et préparer une opération d’envergure sur la ZAD de Roybon pour arrêter une seule personne que l’une des deux victimes aurait reconnue sous les cagoule que portait ses agresseurs.

Jusque-là aucun autre délit ou crime n’aura suscité à Roybon un tel déploiement de gendarmes. Depuis plus de 3 ans et demi d’occupation du chantier de construction du Center Parcs — chantier qui n’a plus les autorisations préfectorales —  les occupants de la Zad ont essuyé 5 incendies criminels dont le dernier a coûté  la vie à un chien qui a brûlé vif dans le véhicule que les agresseurs — quelques nervis débiles et fascisants des environs — ont incendié volontairement, le propriétaire ayant échappé miraculeusement à leur assaut. Une lettre ouverte écrite par des habitants de Roybon devait être distribuée prochainement aux Roybonnais pour les interpeller sur les violences et les incendies que les opposants au Center Parcs occupant le bois des Avenières ont subis depuis plusieurs années.

L’importante opération de gendarmerie de mercredi 6 juin qui a duré plus de trois heures, n’avait pas pour seul but d’arrêter le présumé agresseur. Il s’agissait bien plus de criminaliser l’ensemble des occupants et de formater à nouveau l’opinion publique en vue probablement de la prochaine évacuation. Les gendarmes sont intervenus dans la forêt et la maison forestière occupées, sous couvert de ces agressions, pour la première fois depuis le début de l’occupation. Ils ont perquisitionné tous les lieux habités et contrôlé toutes les identités des occupants. Ils ont également photographié la zone… L’évacuation parait être la prochaine étape ; une évacuation désormais légitime aux yeux d’une opinion publique qu’on vient de préparer.

Collectif grenoblois de soutien à la ZAD des Chambarans » <soutienchamba@riseup.net>

N’hésitez pas à aller  sur place dans les semaines qui viennent, apporter un peu de soutien.

on souhaite à bientôt dans les bois…


De tout bois #9, revue de lutte contre le Center Parcs de Roybon

Les éditions Le monde à l’envers publient le neuvième numéro de « De tout bois », une revue de lutte contre le Center Parcs de Roybon.

Publication régulière, neuf numéros parus, 2 euros, cette revue se donne pour but de faire vivre la lutte contre le Center Parcs de Roybon (Isère) et d’en laisser des traces.
Au-delà du cas particulier de cette lutte, la revue De tout bois tâche de tisser des liens avec les grands enjeux actuels (écologie, crise du capitalisme, nouvelles formes de luttes).

Au sommaire du numéro 9 :

« L’encrage des luttes »,
« Chronologie de la lutte »
« Zones humides : quand le Conseil d’État satisfait les bétonneurs au détriment de l’environnement » par le comité de rédaction
« Débat public, État de droit et cha-cha-cha » par Henri Mora
« Le monde en toc de Center Parcs » par Julien Dumalet
« Notre-Dame-des-Landes : tout le monde en parle, alors pourquoi pas nous ? » par Quelques bois ronds de Roybon
« Quand les fachos brûlent notre pote » par un habitant de la forêt occupée de Roybon
« La Nina crève la bulle ! » par Roger Cassandriasis
« La théorie du bout-de-viande » par Max et Pierrette Rigaux
« Orion nous guidait » par Un du groupe des sans-groupes
fiche pratique
reportage photographique par Cobro et Frank Hausen.

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Nantes, France : Un zadiste prend un an de taule

note : Le 8 juin au laboratoire anarchiste  de 17h30 à 19h30 atelier d’écriture aux prisonniers de la guerre de classe: tag  liberté et solidarité


attaque

Jibé a été arrêté sur la zad le 15/05, a été mis en prison en attente de son procès, il était poursuivi pour violence sur des flics et refus d’adn. Et le 17 mai il a été jugé à Nantes et condamné à 1 an de prison ferme.

Si vous voulez lui écrire directement :

Jean Baptiste Grondein
n° d’écrou : 66771
Centre pénitentiaire de nantes
rue de la Mainguais
44300 Nantes

Les-paradis-artificiels

non fides

L’expression de paradis artificiels proposée par Charles Baudelaire dans son essai du même nom est largement redondante : tout paradis est artificiel. Mais cela n’enlève rien – au contraire – à la charge poétique de la locution qui, à son origine, désignait les stupéfiants. Nous l’entendrons ici dans un sens plus large, quoi que non figé, qui pourrait être résumé par : ce qui donne l’impression de pouvoir – pour un moment – s’échapper de ce monde. De fait, fumer des joints régulièrement tout autant que courir 10 km en sortant du boulot peuvent s’avérer être des paradis artificiels en tant qu’ils contribuent à mieux nous faire accepter la merde quotidienne.

 

Il ne s’agira donc pas dans cette discussion de se limiter aux stupéfiants ni de tomber dans une condamnation morale, culpabilisatrice et simpliste de la place que chacun donne à ses paradis artificiels mais de penser leur rôle central dans la pacification sociale et la résignation généralisée, comme un rapport détaché avec l’existant qui prend le pas sur le réel. Respirer, penser à autre chose, se couper des autres (ou s’y relier dans l’isolement), prendre du recul sur sa propre existence et sur les problèmes qui l’accompagne : on pourrait sans trop se tromper dire que tout le monde peut avoir besoin de béquilles ou de prothèses pour tenir le coup. Mais, de la même manière que la récré et les loisirs servent à nous rendre bien dociles au cours de l’année scolaire ou de travail, ces moments de désertion illusoire du monde ne devraient pas servir à nous faire mieux supporter la réalité de ce dernier. Accepter les pires conditions de travail pour être « libre » cinq semaines par an, n’est-ce pas précisément ce sur quoi repose notre propre asservissement ?

L’alcool, la drogue (qu’elles soient dites « dures » ou « douces »), l’amour, la littérature, la télévision, la religion, le sexe, la politique, le divertissement, la chimie sur ordonnance, le travail, l’idéologie et la théorie, la technologie, le virtuel, la philosophie, l’art, la culture, le jeu, l’hygiène, etc. Mais aussi, peut-être, l’enfermement dans la normalité parallèle de l’alternative. Toutes ces choses sont-elles bien des paradis artificiels ? Il serait bien triste de le penser si cela implique de refuser tout plaisir ou toute aide pour supporter ce monde. Plutôt que d’interroger ce qui serait l’essence de chacune de ces pratiques, il peut être plus intéressant de questionner notre rapport à ces dernières.

Il s’agira donc de discuter, dans une perspective révolutionnaire et en réfractaires à ce monde, des limites des paradis artificiels, de la notion de réel et de notre rapport à ce dernier.

A l’époque de la post-modernité, les paradis artificiels affinent leur rôle plus que jamais et prospèrent de la chute des grandes hypothèses révolutionnaires. Poser la question des paradis artificiels, c’est ainsi poser la question du refus de ce monde et des perspectives que ce refus propose : la fuite dans un ailleurs illusoire ou la confrontation ici et maintenant.

Tout ceci ce questionne, bien évidemment, et se discute, se réfléchit, en s’évitant à tout pris la forme groupe de parole.

Tout texte, extrait vidéo ou audio, musique ou autre qui puissent nourrir la discussion sont bienvenus et pourront être partagés le soir de la discussion.

Vendredi 8 Juin à 19h
Aux Fleurs Arctiques
45 Rue du Pré Saint-Gervais, 75019 Paris
Métro Place des Fêtes (lignes 7bis et 11 du métro).

 

Montreuil, France : Temps d’Encre – Rencontres autour de publications anarchistes (23 et 24 juin 2018)

TEMPS D’ENCRE

Rencontres autour de publications anarchistes

23 et 24 juin 2018

La Parole errante
9 rue François Debergue
Montreuil (Paris)
(Métro 9 Croix de Chavaux)

Pour que l’idée ne flétrisse pas, il faut l’action pour la revigorer. Pour que l’action ne tourne pas en rond, il faut l’idée pour l’enchanter. C’est peut-être là que se tisse le véritable fil noir de l’histoire tumultueuse de l’anarchisme, qui est en même temps sa proposition de lutte : auto-organisation, action directe, conflictualité permanente avec l’autorité sous toutes ses formes. Ces Rencontres autour de publications anarchistes sont une occasion sous forme d’invitation pour celles et ceux qui sont à la recherche d’idées critiques, qui cherchent à agir, qui se révoltent contre ce monde mortifère d’oppression, d’exploitation et d’autorité. Une occasion, et un défi en même temps, pour mettre en relief ce foisonnement anarchiste qui se diffuse au travers de publications, d’agitation, de locaux, d’interventions, d’actions et de luttes – et qui exprime, en proposant la destruction du pouvoir plutôt que son aménagement, le bouleversement total plutôt que la réforme, la concordance entre moyens et fins plutôt que la stratégie politique, l’éthique plutôt que le calcul, une perspective révolutionnaire à approfondir et à défendre.

Le flyer au format PDF

Pus d’infos sur tempsdencre2018.noblogs.org