Archives de catégorie : General

Nouvelles de la vengeance d’État contre le mouvement de révolte en cours – Juin 2019

Besançon, 22 juin : les blocages continuent, les amendes tombent

« Ils n’ont pas attendu leur rendez-vous hebdomadaire du samedi à 14 h 30, pour manifester et débuter ce 32e acte. Ce samedi matin, à 9 h 30, une trentaine de Gilets jaunes ont pris possession du principal rond-point d’accès à la zone commerciale de Châteaufarine. À l’aide de palettes en bois et de pneus, ils parvenaient à rapidement perturber la circulation mais également empêchaient la sortie de la station-service Casino. Devant l’entrave manifeste à la circulation, devant leur refus d’obtempérer et outragés à plusieurs reprises, les policiers faisaient usage de gaz lacrymogène pour disperser les plus véhéments et interpellaient deux individus. Rebelote ce samedi après-midi. On reprenait les mêmes ou presque. Cette fois, une cinquantaine de manifestants est venue assurer les revendications courantes, Place de la Révolution. Et faute de pouvoir défilé comme d’habitude, par petits groupes et à plusieurs reprises les Gilets jaunes s’installaient sur les voies du Tram, perturbant ponctuellement le trafic. La police nationale intervenait alors pour permettre aux rames de circuler. Et à l’aide du réseau de caméras de vidéoprotection après identification verbalisait six d’entre-eux. À 16 h tout était rentré dans l’ordre. »
(Source: l’est républicain, 22.06.2019)

Nantes, 19 juin : perquiz et gav pour une street medic

Extrait : « ce mercredi matin, alors qu’elle s’apprêtait à quitter son domicile pour se rendre au travail, une membre du collectif Street Medic Nantes a subi une perquisition de son appartement par quatre policiers. Après avoir minutieusement fouillé dans son intimité, retourné ses affaires, photographié des éléments et saisi du matériel, ces derniers l’ont finalement emmenée jusqu’au commissariat central pour y être auditionnée. Elle y a alors été placée en garde à vue, après avoir découvert être ciblée par une enquête préliminaire pour des faits d’exercice illégal de la médecine, ainsi que de participation à un groupement en vue de commettre des violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique ou des dégradations.
Après une dizaine d’heures de garde à vue, elle a finalement été libérée en fin de journée. Dans l’attente d’une éventuelle date de procès, elle s’est toutefois vu signifier une interdiction de quitter le territoire français.
[La suite ici]


Saint-Etienne, 14 juin : un des accusés (en cavale) d’avoir saccagé le Mc Do se rend

A la suite du saccage-éclair du MacDonalds de Saint-Priest du samedi 30 mars, une dizaine de personnes avaient été interpellées début juin, toutes inculpées de « dégradations en réunion ». Ayant reconnu les faites en GAV, elles seont reconvoquées ultérieurement devant la justice.

Mais le principal suspect dans cette attaque, accusé d’avoir commis le plus de dégâts matériels (notamment d’avoir détruit les bornes tactiles à coup de marteau), était toujours activement recherché par les gendarmes. Vendredi 14 juin, il s’est rendu de lui-même à la gendarmerie d’Andrézieux-Bouthéon.

« L’homme en question, qui aurait entre 35 et 40 ans et réside à Andrézieux-Bouthéon a été remis à la police. Il a été placé en garde à vue dans les locaux du commissariat de police du cours Fauriel à Saint-Etienne ». Il a été incarcéré à la suite de sa garde à vue en raison du fait qu’il avait été condamné dans une autre affaire il y a peu.
(Sources: Leprogres.fr et France bleu)


Var, 15 juin : jetés en prison à l’issue de leur garde à vue, soupçonnés d’avoir saboté par le feu antennes relais, radars et supermarché

« Interpellés le 13 mai, deux « gilets jaunes » ont été incarcérés pour destruction par incendie en bande organisée deux jours plus tard.
La justice les soupçonne d’avoir détruit des radars et antennes relais au Cannet-des-Maures et au Muy, et incendié la station-service de l’Hyper U aux Arcs-sur-Argens.
L’affaire avait fait les gros titres dans la presse mi-mai en raison de la décision du juge d’instruction de saisir le patrimoine de l’un d’eux (en réalité, des apparts qu’il achetait à crédit, qu’il rénovait et revendait après). Un mois après, alors que l’enquête suit son cours, les deux suspects sont toujours en détention provisoire. » (Source: Var Matin, 15.06.2019)

Marmande (Gironde), 18 juin : 8 mois dont 3 ferme pour le gilet jaune SDF qui a insulté le maire

« Lundi 17 juin à 19h, c’était séance de conseil municipal à Marmande. Quelques Gilets Jaunes sont installés pacifiquement devant la mairie.

L’un d’eux a cependant cru bon de prendre place dans la salle et au bout d’un moment, de demander à prendre la parole. Refus catégorique du maire, la loi obligeant le public à ne pas intervenir. Le gilet jaune s’est alors levé, à commencer à parler de sa condition de SDF mais n’aura pas le temps d’en dire plus. Il sera évacué de la salle, la police municipale ayant été appelée à la rescousse pour gérer la situation devenue houleuse sur le parvis de la mairie.

Placé en garde à vue pour avoir proféré des menances de mort au maire, il a ensuite écopé de 8 mois de prison en comparution immédiate au tribunal d’Agen.
(Source: Le Républicain (Lot-et-Garonne), 18.06.2019)


Toulouse, 12 juin : du ferme pour l’ingénieur qui avait trouvé et diffusé l’adresse de la commissaire

« Un ingénieur toulousain a été condamné ce mardi 12 juin à 10 mois de prison, dont un ferme, pour avoir diffusé l’adresse d’une commissaire de police. L’homme, âgé de 30 ans, avait été arrêté et placé en garde à vue la semaine dernière par le groupe d’enquêteurs spécialisés dans les «gilets jaunes», mais les faits qui lui sont reprochés remontent au 30 mars.

Ce samedi-là, en pleine mobilisation, une « gilet jaune » handicapée a une altercation avec la policière. La militante prend la fonctionnaire en photo et diffuse un appel sur les réseaux sociaux demandant des informations à son sujet. L’ingénieur prend le message au pied de la lettre et retrouve son adresse et la partage sur les réseaux sociaux.

Selon une source policière jointe par l’AFP, ce trentenaire n’est que le premier d’une longue liste puisque « toutes les personnes ayant émis des commentaires outrageants et menaçants » à l’encontre de la commissaire « ont été identifiées et seront poursuivies ».
La militante handicapée à l’origine de l’appel doit être jugée à l’automne par le tribunal correctionnel de Toulouse, notamment pour avoir bousculé la policière avec son fauteuil ».
(Source: 20minutes, 12.06.2019)

Pour écrire aux prisonniers « gilets jaunes » toulousains:


Rouen, 5 juin : 6 mois ferme pour l’attaque des journaflics de LCI

« Les faits s’étaient déroulés en marge d’une manifestation des Gilets jaunes à Rouen, le 12 janvier dernier. Durant ces événements, deux journalistes de LCI et leurs deux agents de protection avaient été violemment agressés. L’un des agents, notamment, s’était vu prescrire une incapacité totale de travail de 20 jours, souffrant d’une fracture du nez et d’un enfoncement de la pommette.
Mercredi 5 juin, le tribunal correctionnel a condamné cinq personnes à six mois de prison ferme dans cette affaire, pour violences aggravées commises en réunion. Les cinq agresseurs devront également verser, solidairement, 3.000 euros à l’un des agents de sécurité, pour préjudice moral. Si tous ont été condamnés pour des faits de violence contre cet agent, ils ont en revanche été relaxés pour certains faits, faute de charges suffisantes, sur les trois autres victimes ». (Source: lci, 05.06.2019)


Partout, 12 juin : De Guadeloupe en Bretagne, les souscripteurs à la cagnotte Leetchi (Crédit Mutuel) pour Dettinger convoqués par les flics

«Sur réquisition, Leetchi a fourni son fichier donateurs à la cagnotte Dettinger à la police judiciaire de Paris saisie par le parquet pour abus de confiance. Les donateurs sont actuellement convoqués un à un.» (message d’un journaliste du Point qui a obtenu l’info)

Lors de l’acte VIII du mouvement des gilets jaunes, au mois de janvier, à Paris, l’ancien boxeur Christophe Dettinger avait frappé deux gendarmes. Il s’était ensuite rendu à la police, et avait écopé en février d’un an de prison ferme et de dix-huit mois de sursis avec mise à l’épreuve. Entre-temps, une cagnotte en ligne, sur la plateforme Leetchi, avait été ouverte par un proche, avant d’être rapidement fermée par la filiale du Crédit mutuel.

De source judiciaire, CheckNews (Libé) a appris que le parquet de Paris a ouvert une enquête – confiée à la Brigade de répression de la délinquance astucieuse – le 9 mai pour abus de confiance, sur le fondement d’une plainte déposée par 55 souscripteurs qui voulaient «montrer la solidarité du peuple des gilets jaunes» en aidant financièrement la famille Dettinger. Dans leur plainte consultée par l’AFP, ces participants à la cagnotte estiment que la société Leetchi, «se comporte comme un véritable censeur moral» en retenant «abusivement» l’argent. De sources concordantes, de nombreux participants n’ont en effet pour l’heure pas récupéré la somme cotisée.

Le 11 juin, des souscripteurs ont été convoqués par les enquêteurs afin d’être auditionnés. Selon une source judiciaire, certains le sont en tant que plaignants, d’autres en tant que témoins. […]

Les convocations, selon Laurence Léger, font écho aux propos de la secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, qui estimait en janvier que Leetchi devait suspendre la cagnotte, accusant les participants d’«être complice de cet acte et [d’]encourager [les violences]». Le soir même, la collecte était suspendue.

L’affaire du «boxeur gilet jaune», après sa condamnation de février, était revenue sur la scène judiciaire le 3 juin, concernant la cagnotte, mais dans un autre volet que celui de la plainte pour abus de confiance. Le juge des référés du TGI de Paris était chargé de statuer sur deux procédures intentées par les parties. D’un côté, la plateforme Leetchi, qui a demandé à la justice de l’autoriser à bloquer le versement des fonds, au motif que le bénéficiaire aurait changé – l’argent n’étant plus destiné au compte commun de Christophe et Karine Dettinger, mais uniquement à cette dernière – et que l’objet de la cagnotte n’était pas clairement précisé. De l’autre, le couple Dettinger et l’organisateur de la cagnotte (un ami des Dettinger), qui souhaitent le versement d’une provision en attendant le jugement au fond de cette affaire. Le délibéré des deux procédures en référé est attendu le 19 juin. «Les quelques remboursements réalisés ont été effectués avant l’ouverture de toutes les procédures de référé, précise à ce sujet Leetchi. La grande majorité des contributions est actuellement toujours sur la cagnotte et c’est bien sur la destination de cette somme que le juge des référés doit statuer le 19 juin.»
(Source: Libération, 12.06.2019)


Caen, 27 février : 3 ans et 3 mois ferme pour le passionné de lance-pierre

« Serge, chômeur de 43 ans, a comparu ce mercredi devant le tribunal correctionnel de Caen, pour son implication dans des violences commises lors de trois manifestations de « gilets jaunes ». Le 8 décembre à Mondeville puis les deux premiers samedis de janvier à Caen. L’accusation s’est appuyée sur des images de vidéo-protection montrant à chaque fois le même homme équipé d’un masque, de chaussures rouges et blanches très reconnaissables, et… d’un lance-pierre.

« J’ai bugué quand j’ai vu à la télé les violences policières contre les ‘gilets jaunes’ » explique-t-il devant le tribunal. « J’ai pris mon lance-pierre pour aller dans les manifs. Pour viser les forces de l’ordre, les faire reculer pour permettre d’évacuer les manifestants blessés » dit-il. Une participation organisée : il était équipé d’un casque, d’un masque chirurgical et, sur Facebook, il lançait des appels aux autres manifestants pour qu’ils le fournissent en projectiles. « Venez avec de petites billes et des boulons, rendez-vous à 13 heures, j’ai un casque gris » disait-il sur le réseau social. Au total il reconnait avoir lancé des centaines de billes et d’écrous sur les forces de l’ordre. Quand la présidente lui fait remarquer que ces projectiles étaient dangereux il répond « mais non, les CRS et les gendarmes mobiles ont des casques et des boucliers, ils ne risquaient rien !’ Mais un policier, blessé à un pouce, s’est vu prescrire dix jours d’ITT. Le prévenu ne retient pas un soupir d’agacement… avant de se faire sèchement reprendre par la présidente du
tribunal.
(Source: France Bleu, 27.02.2019)


Dijon, 12 juin : deux manifestants se prennent du ferme, l’un avait tenté de cramer la porte de la prison

« Suite à l’Acte 30, ce samedi à Dijon, deux « gilets jaunes » ont été interpellés puis condamnés ce mercredi 12 juin à de la prison ferme.
Aucun des deux n’est jugé pour avoir commis directement des dégradations, mais du matériel a été retrouvé dans leur sac à dos lors de l’interpellation (des explosifs pour l’un, un marteau pour l’autre). Si le premier affirme être pacifiste, le second, la vingtaine à peine, admet s’être rendu dans le centre-ville de Dijon déterminé à « tout casser ».

Les deux écopent de peines de prison ferme. Le plus jeune est condamné à neuf mois de prison, dont sept avec sursis. Il venait d’être condamné à quatre mois de prison ferme pour avoir tenté d’incendier la porte de la maison d’arrêt de Dijon, lors d’une précédente manifestation, quelques semaines auparavant.

L’autre manifestant, sans emploi à la suite d’un accident du travail, est condamné à trois mois de prison, dont deux avec sursis. Son casier judiciaire était jusqu’ici vierge, malgré une participation à tous les samedi de manifestation depuis le début du mouvement. Les deux militants sont interdits de manifestation à Dijon et Paris, pendant deux ans ».
(Source: France Bleu, 12.06.2019)

Cruas (Ardèche), France : En deux temps contre La Poste – 22 juin 2019

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Dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 juin, des véhicules de La Poste, garés sur le parking du gymnase de Cruas, ont été incendiés.

Les voitures avaient été stationnées là pour faciliter l’organisation de la Fête de la musique dans le centre du village, à l’endroit où elles sont habituellement. Un peu avant une heure du matin, un employé municipal a signalé qu’elles avaient fait l’objet d’actes de vandalisme, notamment des pneus crevés.

Avant que les forces de l’ordre n’arrivent sur place, deux d’entre elles ont été incendiées, et une troisième, garée à côté, a été très endommagée, en raison de la propagation de l’incendie. Le courrier qui se trouvait à l’intérieur a été brûlé. Les forces de l’ordre ont sauvé ce qui pouvait l’être dans le troisième véhicule. La Poste a déposé plainte à la gendarmerie du Teil. Une enquête est en cours afin de déterminer qui est à l’origine de l’incendie.

[Repris du Dauphiné, 23.06.2019]

Pouvoir de détruire, pouvoir de créer,L’écologie sociale et libertaire de Bookchin

Lorsque l’on pense aux grandes figures de l’anarchisme, on pense habituellement à des penseurs du XIXème siècle ou du début du XXème siècle, Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Malatesta, Goldman,Renzo Novatore, etc, . On pense moins en revanche – même si cela tend à changer heureusement – à Murray Bookchin, décédé en 2006, qui fut à la fois attentif à la théorie et à la pratique anarchiste, en rupture avec les mouvements marxistes avec lesquels il a milité dans sa jeunesse. Je voudrais ici insister sur son écologie sociale et libertaire, à l’occasion de la parution récente d’un recueil de textes importants à l’Echappée. Bookchin a en effet développé une conception écologiste, fondée sur des connaissances précises – ce que montre l’entretien « la crise de l’énergie, mythe et réalité » – qui constitue un point d’entrée dans un renouvellement de l’anarchisme au XXème siècle. Le problème écologique devient, par son importance, dès les années 1960, un moyen de réinterroger la structure sociale existante, mais aussi les conditions de cet état de fait, à savoir les relations de pouvoir et de domination qui permettent celui-ci.

En quoi la pensée de Bookchin est-elle actuelle ?

A l’heure où le thème du « réchauffement climatique » est omniprésent, où les marches pour le Climat revendiquent la reconnaissance de l’urgence climatique et où l’environnementalisme tend parfois à la leçon de morale collective – remplaçant le discours politique par le discours moralisant pour tous, niant ainsi la dimension politique de la critique de l’écologie, au profit de « gestes citoyens » aussi nombreux qu’inutiles – Bookchin est rafraîchissant. Écologiste il l’est pourtant. Dès 1969, il annonçait « qu’il ne nous reste guère plus d’une génération avant que la destruction de l’environnement devienne irréversible » (p. 23), mais il se refuse aux alternatives nombreuses qu’on nous glisse aujourd’hui : liberté du marché et responsabilité individuelle, progrès technologique ou primitivisme, statu quo ou contrôle des naissances. Il pointe inlassablement au contraire le fait que la véritable cause du problème écologique réside dans les « racines sociales » de la crise.
Pourtant Bookchin se situe radicalement contre le catastrophisme écologiste. Si la destruction de l’environnement produit des résultats irréversibles, on n’assiste pas à une apocalypse, vendue notamment par la collapsologie aujourd’hui. Certes la domination de l’humain sur la nature est grave et provoque des dégâts importants, mais ceux qui prédisent la fin prochaine et brutale de toute la civilisation le font généralement d’une part en niant le fait que « la dégradation régulière » (p. 53) de l’environnement est bien plus probable qu’une apocalypse, mais surtout pour défendre un agenda politique et idéologique particulier (prise de pouvoir technocratique et autoritaire, imposition de mesures aux citoyens). Tout cela a par ailleurs un effet pervers pour Bookchin : « Paniquer face à cette crise, décrire en termes apocalyptiques l’inévitable ‘effondrement’ de l’environnement d’ici quelques dix ans, cela revient à encourager la passivité, un fatalisme mortel, qui favorisent le pouvoir en place. » (p. 56). Il faut donc tout autant critiquer le mode de production qui engendre la dégradation de l’environnement que les « alternatives » réactionnaires se cachant derrière un discours révolutionnaire.
L’auteur donne quelques illustrations concrètes de ces pensées réactionnaires. La technologie est un bouc émissaire aisé (bien que Bookchin soit conscient du fait que la technologie a aussi un potentiel aliénant, voir « Les ambiguïtés de la science », p. 91), puisqu’il n’y a pas une technologie unique qui existerait indépendamment des conditions et des relations sociales ; le discours néo-malthusien qui se cache derrière l’écologisme est potentiellement totalitaire en ce qu’il impose un contrôle social des naissances ; la responsabilité individuelle est factice lorsque la ville entière est pensée pour la voiture, que l’accès à des technologies est vu comme un moyen d’ascension sociale, qu’il est impossible d’aller travailler sans consommer du carburant ; la « régression mystique » (p. 145) de certains courants comme l’écologie profonde, qui ne mènent qu’à des discours vagues et imprécis sur « l’écospiritualité », revient à nier les conditions sociales du problème écologique.
Bref, Bookchin est un véritable remède contre ceux aujourd’hui qui veulent imposer un contrôle social technocratique à partir du diagnostic de la crise écologique, contre le citoyennisme qui en appelle à la responsabilité individuelle pour ne pas oser une critique structurale, contre les fausses réponses du « capitalisme vert », contre les appels aux « chefs d’État ou aux institutions bureaucratiques nationales et internationales, c’est-à-dire à des criminels qui contribuent matériellement à la crise écologique actuelle » (p. 35), contre ceux qui fondent l’écologie avec une spiritualité New-Age, poreuse aux récupérations publicitaires du capitalisme.

« Le conflit entre l’humanité et la nature est un prolongement du conflit entre l’homme et l’homme »

Tous ces faux diagnostics manquent le cœur du problème : le pouvoir et la domination. C’est ici que la pensée de Bookchin est profondément anarchiste. En refusant les alternatives figées qu’on nous présente comme faussement évidentes, Bookchin montre que la véritable cause de l’exploitation de la nature – qui n’est pas uniquement un « environnement » qui nous entoure, passivement, mais un milieu avec lequel nous sommes en constante interaction, de ce fait Bookchin oppose constamment « environnementalisme » à « écologie sociale » (p. 80-81) – c’est avant tout le pouvoir, le pouvoir de subordination d’autrui à sa volonté propre.
Il y a donc une origine profonde à l’exploitation de la nature, qui n’est pour l’auteur qu’une forme spécifique d’exploitation : « la conception selon laquelle l’humanité doit dominer et exploiter la nature découle de la domination et de l’exploitation de l’homme par l’homme, et même, plus loin encore dans le temps, de l’assujettissement de la femme à l’homme au sein de la famille patriarcale. » (p. 28). C’est à partir du moment où l’humain se trouve être une ressource pour autrui, un moyen pour une fin, qu’il s’est également placé comme « maître et possesseur de la nature », selon l’expression de Descartes. Bookchin vise ici une même origine à la domination : la hiérarchisation entre des individus exploitants et d’autres exploités, qui a produit l’idéologie productiviste et, finalement, capitaliste.
En effet, Bookchin trace une ligne conceptuelle entre d’un côté la domination de l’humain par l’humain dans le « marché bourgeois » (p. 68) et l’utilisation de la nature comme « ressource » (p. 69), permettant une plus grande productivité et un gain sur le marché, dominé par la concurrence et l’antagonisme entre individus. Cette intuition centrale d’une cause de l’exploitation de la nature dans le développement d’une forme de rationalité instrumentale est le cœur du diagnostic philosophique de l’auteur. Il faudra ainsi substituer l’écologie sociale à l’économie politique.
De ce fait, Bookchin est sceptique de toute solution qui ne passerait pas par une remise en cause radicale du pouvoir, de la domination et de la hiérarchie. Toute solution qui fait l’économie de ce questionnement est condamnée à un combat d’arrière-garde, un combat visant au ralentissement des logiques en place plutôt qu’à leur subversion. La radicalité de l’écologisme libertaire est, au sens propre du mot, radicale, à savoir qu’elle prend les choses à leur racine. Il faut ainsi lutter contre tout un univers en place : « Depuis la naissance, nous sommes conditionnés par la famille, la religion, l’école et le travail à accepter la hiérarchie, le renoncement et le pouvoir d’État comme les prémices fondamentales de toutes pensées. S’il ne se situe pas sur des bases entièrement différentes, tout projet de restauration d’un équilibre écologique ne sera qu’un palliatif voué à l’échec. » (p. 30).

L’écologie comme fondement politique stratégique

L’écologisme de Bookchin n’est pas un combat local, axé uniquement sur la défense de « l’environnement », mais une porte d’entrée vers une refonte globale de la société. En cela, le combat écologique étant stratégiquement le plus pressant, doit devenir le cœur de la réflexion pour la rénovation sociale. Du diagnostic bookchinien sur la cause de la dégradation écologique, on peut par exemple tirer un argument fort contre le capitalisme : la rationalité capitaliste de la concurrence sur le marché, utilisant des « ressources » pour une fin de production et d’enrichissement, est antagoniste avec le respect de la nature, elle participe au contraire – puisqu’elle en descend directement – du type de rationalité qui est la cause du problème écologique. L’écologie sociale de Bookchin est un anticapitalisme radical. En effet, il oppose à l’économie de marché ce qu’il appelle une « économie morale », à savoir une économie qui réalise la sortie des modes de domination de la rationalité instrumentale : « l’économie de marché et l’économie morale présentent des conceptions fondamentalement opposées de l’accomplissement de l’humanité et des buts qu’elle peut se fixer, conceptions qui définissent le sens même des fondements matériels dont dépend en fin de compte notre épanouissement. » (p. 141).
L’auteur anarchiste appelle donc, plus positivement, à des réformes majeures de nos modes de vies, non pas pour revenir à une communauté primitive, ou à la « cueillette paléolithique » (p. 73), mais pour aboutir à des « écocommunautés ». Celles-ci ne sont pas un retour aux « communautés de contre-culture », telles qu’il y en avait beaucoup dans les années 1970-1980, mais des communautés d’humains à grande échelle, un « réseau de communautés libres » (p. 83), avec des individus capables de s’autogérer. Bookchin est ainsi parfaitement conscient des limites du discours du retour à la communauté : « toute communauté autogérée s’efforçant de vivre isolément et de développer son autosuffisance court le risque d’être gagnée par l’esprit de clocher, ou même le racisme. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire d’étendre la politique écologique des démocraties directes à des confédérations d’écocommunautés, et d’encourager de saines relations d’interdépendance au lieu d’une indépendance repliée sur soi et abêtissante. » (p. 175). Le « municipalisme libertaire » (p. 179) qu’on accole au nom de Bookchin découle de cette théorie positive de l’organisation sociale, n’abolissant pas les relations d’interdépendances, constitutives de toute vie humaine, qui se forme dans la relation à autrui, mais qui modifie ces relations pour recouvrer un contrôle humain sur son milieu. En cela, la multinationale et l’entreprise d’État sont des monstres au même titre, fonctionnant toutes les deux sur le modèle de la hiérarchie et du pouvoir bureaucratique. Le municipalisme libertaire, n’est pas alors le retour aux petites communautés fondées par des individus aux tendances autarciques mais un changement radical de projet de société, fondé plutôt sur la volonté collective d’une abolition, autant que faire se peut, de la hiérarchie et du pouvoir. Le nouveau mode de vie et de pensée que Bookchin appelle de ses vœux n’est donc pas un retour à la petite communauté, un primitivisme ou un retour à une spiritualité empreinte de mysticisme, mais avant tout un projet de renouvellement de nos catégories politiques et sociales, visant une reviviscence de la politique comme auto-organisation de citoyens libres dans les communes.
De son diagnostic à ses conclusions, Bookchin propose donc une théorie absolument soluble dans l’anarchisme. Les causes des problèmes écologiques sont le pouvoir et la domination, qui s’incarnent aussi bien dans le patriarcat que dans le capitalisme et dans l’exploitation de la nature ; les solutions consistent dans le fait de replacer les individus au cœur du système politique, en modifiant les milieux dans lesquels ils évoluent, de façon à permettre un véritable contrôle collectif du politique. On retrouve ici le mot d’ordre central de l’anarchisme, l’autogestion, qu’il faut relier avec un autre concept présent chez Bookchin (p. 177), bien qu’il n’en traite pas nommément dans ce recueil d’articles, celui de fédéralisme, qui constitue la mise en réseau des communautés, distinguant précisément le projet anarchiste d’un repli sur soi isolationniste de happy few privilégiés.
On aurait tort, alors que l’écologie est plus que jamais un thème central et pressant, de se priver d’une référence aussi importante sur le sujet. Le travail de Bookchin permet à la fois de poser le problème écologique de façon libertaire, mais aussi d’éviter les écueils de l’écologisme contemporain.

Vous reprendrez bien un peu de tritium..

Bonjour,

Plusieurs associations ont communiqué des mesures récentes des eaux de
la Loire et de la Vienne, mais aussi des eaux du robinet de la région,
montrant une teneur anormale en tritium.

Le trtium, élément réactif produit en grande quantité dans le coeur
des réacteurs nucléaires, est rejeté par voie liquide dans l’eau à
proximité des centrales. Lorsque les eaux destinés à la production
d’eau potable sont puisées dans des cours d’eau en aval des
installations nucléaires, elles peuvent être contaminées par le
tritium, car il n’est pas éliminé par les filtres des stations de
distribution.
Les autorités ont fixé pour l’industrie nucléaire des autorisations
de rejets liquides (fleuves, rivières, milieu marin) mais aussi
athmosphériques extrêment élevées, constituant des permis de polluer
> et amenant une contamination de l’air, des eaux, des milieux aquatiques
et terrestres et de la chaîne alimentaire.
Cela conduit à une contamination diffuse chronique, liée à l’eau de
boisson et à l’ingestion de denrées issues du milieu terrestre ou
aquatique.

Sur le long terme le tritium peut avoir des effets sur l’ADN, induisant
un risque de cancérisation et de mutations génétiques.
Plusieurs laboratoires dans le monde ont montré les effets d’une
contamination à faible dose, notamment sur des mutations sur les
plantes et des effets sur des cellules de mammifères (destruction,
mutation, cancers).

Les seuils en Béquerels par litre d’eau de consommation :
Recommandations du laboratoire indépendant CRIIRAD :
seuil d’investigation : 10 Bq/l (quelques Bq/l traduisent déjà une
pollution avérée)
seuil limite : 50 Bq/l
Normes européennes
seuil d’investigation : 100 Bq/l
seuil limite : 10 000 Bq/l : l’Europe s’aligne ainsi sur les
recommandations de l’OMS (Organisation mondiale de la santé).
Rappelons qu’e l’OMS avait accepté sa sujétion à l’establishment
nucléaire en signant un accord en mai 1959 avec l’AIEA (Association
internationale de l’énergie atomique).
Les conséquences sont apparues clairement après les catastrophes de
>Tchernobyl et Fukushima, où l’OMS a démontré une absence totale
d’initiative et d’autonomie :
« _Lorsqu’il s’agit de Tchernobyl ou Fukushima et de la menace de
contamination radioactive, on n’a peut être pas dit toute la
vérité.

Malgré les niveaux relevés (de 55 à 310 Bq/l), l’ASN (Autorité de
sûreté nucléaire) se veut rassurante (elle est là pour ça…) :
« _Il n’y a pas de risque pour l’environnement et le public_ »…

[reçu par mail]

information juin 2019 contre le sommetG7 de Biarritz: Les flicailles et les États s’organisent dans la traque des futurs manifestant-e-s

Cette année, du 24 au 26 août, la ville de Biarritz sera le théâtre d’un rendez-vous des plus sinistres : celui du G7, sommet mondial des pays les plus riches, symbole de la domination des puissances occidentales.
Un sommet organisé par un Président français qui a été fortement secoué par un mouvement de contestation populaire qu’il n’a pas réussi à mater malgré ses bataillons de flics.L’ambition du président français  c’est de relancer son offensive  communicante en distillant sa propagande
Un sommet qui a pour fil directeur « la lutte contre les inégalités » (!), alors que les gouvernants servent les intérêts d’un système capitaliste et impérialiste basé sur l’exploitation, la répression, la destruction des humains et de l’environnement.
Un sommet qui aura lieu au Pays Basque, territoire où sont nombreuses et bien ancrées les résistances à l’exploitation capitaliste et à la domination étatique, les solidarités et la volonté de construire un autre monde.

Un point sera fait au mois de juillet sur les diverses mobilisations prévues, du 19 au 26 août, à Hendaye/Irun ou à Urrugne, auxquelles sont conviés les collectifs en lutte venus d’ici et d’ailleurs.

G7 à Biarritz: À événement exceptionnel, mesures exceptionnelles

G7 Biarritz: Michel Veunac, Gilbert Payet, Hervé Jonathan

3000 à 4000 journalistes attendus, 3 000 membres des délégations des États et chefs d’États qui se rendront au G7 de Biarritz du samedi 24 jusqu’au lundi 26 août, Biarritz sera l’épicentre de la planète en cette fin d’été. Une première conférence de presse du préfet des Pyrénées Atlantiques Gilbert Payet, avec le sous-préfet de Bayonne Hervé Jonathan et le maire de Biarritz Michel Veunac, a dévoilé les premières mesures de cet événement mondial où chacun a largement sa place: l’État pour la sécurité, le maire de Biarritz qui souhaite l’accompagner d’un vaste plan promotionnel pour la Côte basque

Certes, il reste 2 mois avant ce fameux G7, mais en ce mercredi soir, en la salle de réunion du Conseil municipal, la presse a déjà pu mesurer une partie du (vaste) chantier et les limites géographiques et franchissables – ou non — du périmètre de ce G7 du samedi 24 au lundi 26 août, présentées par le préfet Gilbert Payet, le sous-préfet de Bayonne, Hervé Jonathan et évidemment le maire de Biarritz. Dans un premier but: avant tout informer les Biarrots qui se trouveront dans l’épicentre du phénomène des zones sécurisées dans la nuit du 23 août.

Nous l’avons écrit, lors d’un entretien avec son directeur Didier Riché l’aéroport sera dédié, pour ne pas dire exclusivement réservé aux rotations des hommes d’Etat, journalistes, diplomates et chargés de sécurité.  Car cette ville de 25 000 habitants en hiver et qui approximativement triple sa population en pleine saison va recevoir entre 3000 et 4000 journalistes, autant de diplomates et on peut presque en faire l’addition pour obtenir le nombre de policiers, gendarmes qui seront dévolus à ce sommet auxquels il faut ajouter services de secours et sapeurs-pompiers.

Les mesures préconisées s’appuient sur les expériences antérieures de  la France des G8 à Deauville et G20 en 2011. Biarritz qui a servi de cadre au sommet Franco africain des 7 et 8 novembre 1994 sous la présidence de François Mitterrand. Comme le rappelait le maire Michel Veunac, la station balnéaire fait partie des six villes de France listées pour l’événementiel.

Mais il est vrai que le contexte de menaces terroristes, et la situation d’actualité un peu tendue exigent de veiller à un juste équilibre entre les indispensables contraintes de sécurité, dont le maintien à distance de ce que le préfet appelle « les groupes » hostiles » afin d’assurer l’intégrité de la ville de Biarritz et de son environnement. Avec un
leitmotiv: « Un maximum de sécurité et un minimum de désagrément ». Compliqué quand même d’autant que cette période se situe en fin de saison touristique.

Deux zones aux accès limités et sous haute surveillance

Dès l’officialisation de ce G7 ont été soigneusement établis ces périmètres de sécurité du centre-ville et déterminés de deux zones. Les touristes et habitués du feu d’artifice du 15 août connaissent la première. Elle est quasiment similaire à cet évènement qui attire plus de cent mille spectateurs. Cette zone 1, dite de « protection renforcée s’étend sur une distance qui part du plateau du Phare au nord jusqu’au Rocher du Basta à l’extrémité du boulevard du Général-de-Gaulle avec emprise

G7 de Biarritz: Michel Veunac, Gilbert Payet, Hervé Jonathan

sur le boulevard Leclerc. Qui implique la fermeture de toutes les zones de baignade de la plage du Miramar au nord, à la Grande plage au Sud et au Port des pêcheurs et en outre inaccessibles pour les personnes non-détentrices d’un badge correspondant à cette zone 1. Le littoral sera en outre surveillé par des bâtiments de la Marine nationale. Car ces lieux sont cernés ou surplombés par quatre endroits stratégiques pour le sommet: l’Hôtel du Palais, le casino , le Centre des Congrès du Bellevue et la mairie. En profondeur une ligne parallèle à l’avenue de l’Impératrice et l’avenue Édouard VII. Temporaires ou sédentaires, ainsi que les ayants droit (commerçants, salariés, professionnels de l’hôtellerie et de santé) seront autorisés à franchir cette zone munis d’un badge et pourront y pénétrer mais à pied, car à l’exception des délégations et de la sécurité, la circulation y sera interdite du vendredi 23 au soir au lundi 26 août. Comme les voitures stationnées sur la voie publique ou dans les parkings devront être déplacées.

La zone 2, en bleu sur la carte, dite zone de protection sera également activée dès le vendredi 23 août. Un vaste haricot qui englobe tout le cœur de la ville. dans ce périmètre, depuis le golf,, boulevard Sainte Madeleine, jusqu’à l’avenue de Lahouze et au sud en remontant au nord des halles, rue Jean-Jaurès et l’avenue de Londres, au-dessus de la côte des Basques, il sera toujours possible de circuler pied à condition d’être détenteur d’un badge dédié. Si la voie menant de l’aéroport aux trois centres névralgiques du G7 pourrait être temporairement rendue prioritaires aux délégations, elle sera ouverte, comme les autres aux voitures des résidents, commerçants, ayants droit à condition qu’ils soient détenteurs d’un macaron délivré par les services de l’État. Leur véhicule sera à chaque passage déminé et contrôlé.

D’ici un mois, les personnes concernées par ces dispositions recevront un courrier et à partir du 4 février, la Ville proposera un numéro vert et ouvrira un bureau d’information dédié au G7 afin de guider les Biarrots dans leurs démarches. Comme elle organisera plusieurs réunions, notamment avec les hôteliers qui font partie évidemment des acteurs de l’événement.

Le casse-tête de l’hébergement des délégations et les locations estivales

L’hébergement des délégations, des journalistes, des services d’ordre  et les locations estivales font partie des problèmes à résoudre pour ces trois journées. Le préfet n’a pas caché que l’État avait été proposé à une centaine de propriétaires biarrots de louer leur appartement car leur situation constitue un véritable problème de sécurité. « Leurs fenêtres ou balcons donnent directement sur les sites du sommet ». Comme c’est le cas par exemple place Bellevue qui plonge sur le centre de congrès. Leurs propriétaires seront, s’ils restent, soumis à des règles de sécurité extrêmement strictes. « C’est pour cela que nous leur avons proposé de louer leur habitation pendant ces trois journées sur la base de leur prix.

Beaucoup d’hôteliers biarrots – et des environs — ont été approchés de la même manière par les services de l’État et leurs établissements proposés par le ministère des Affaires étrangères aux délégations qui choisiront le gite. Mais, comme le soulignait le sous-préfet Jonathan, un manque de précision pour certains d’entre eux contactés par l’agence du G7 laisse planer des incertitudes et laissent des hôteliers dans le doute. Certains auraient reçu informations contradictoires de la part des ministères.

Michel Veunac: « le G7 est un produit consommable »

Le maire, Michel Veunac a lancé lors de cette première présentation une jolie formule: « Ce G7 doit être un produit consommable! » C’est-à-dire qu’il souhaite aussi que Biarritz en matière de notoriété, de renom et d’attraction tire tout bénéfice de l’opération. Mais au-delà l’ensemble du Pays basque, du département, et de la Nouvelle Aquitaine. Et il va s’y employer en amont, c’est  dire pendant les mois qui précèdent le sommet: voyages de presse, opérations commerciales, dont autour de l’Océan – et on peut s’en douter du vin de Bordeaux — seront organisés.

Pour la petite histoire de ce début de feuilleton, la ville voisine d’Anglet participera à ce G7 à sa manière. Le préfet a annoncé que practice du golf de Chiberta, fera office pendant ces trois jours de zone d’atterrissage d’hélicoptères. « Et vous vous doutez bien qu’il ne s’agira pas d’Alouettes » a précisé le sous-préfet..Beaucoup d’hôteliers biarrots – et des environs — ont été approchés de la même manière par les services de l’État et leurs établissements proposés par le ministère des Affaires étrangères aux délégations qui choisiront le gite. Mais, comme le soulignait le sous-préfet Jonathan, un manque de précision pour certains d’entre eux contactés par l’agence du G7 laisse planer des incertitudes et laissent des hôteliers dans le doute.Jusqu’à Capbreton les réservations des locations pour les dernières semaines d’août sont complètes  Certains auraient reçu informations contradictoires de la part des ministères.

il est clair que de la Frontière aux Landes voisines, des contrôles de sécurités renforcés auront lieu. Mais la circulation ferroviaire sera maintenue et les gares sous étroite surveillance resteront ouvertes.

SOURCEhttp://www.aqui.fr/politiques/ils-preparent-le-g7-de-biarritz,17934.html

SUR LE PAYS BASQUE ET LES ANARCHISTES

 

Ce qui suit est le résumé fidèle d’un article écrit par un militant de Bayonne pour CNT (publication de la CNT­AIT d’Espagne), il date du 16 avril 2001.

Depuis longtemps déjà, on parle du « problème basque» à un niveau général (…).

Pour nous situer, je pense que nous devrions d’abord c1airement faire la différence entre État et peuple. Il me semble qu’il y a dans le monde 10 à 15 fois plus de peuples que d’États nations (sans parler des peuples exterminés). Je pense également que nous devons admettre le fait que la majorité des États ont été créés à coup de feu et de sang, suivant la loi des plus fort(e)s, s’appelle-t-elle Église, religion, noblesse, caste, bourgeoisie, capital. .. Etc. Troisièmement, nous devons admettre que le concept de peuple; et en plus grande mesure, le peuple sans État, est lié à des unions ou à des échanges naturels entre les personnes; étant données leur proximité, leur langue, leurs coutumes, leurs formes de vie, géographie, leur culture en général etc… Et admettons finalement que la véritable richesse de ces modes de vie réside dans ces relations naturelles; non imposées, qui se donnent ou se sont données dans différents peuples de l’univers. C’est pour cela que je pense qu’il faut donner One importance primordiale aux peuples ainsi qu’à leurs cultures, et que les anarcho-syndicalistes, nous devons être les premier(e)s, à les défendre contre vents et marées. Les exemples ne manquent pas: de l’Alaska jusqu’en Terre de Feu, il y a le sang des peuples massacrés afin de changer de couleur le Pacifique et l’Atlantique.

Il en est de même en Afrique, Australie et sur tous les autres continents. D’où, il me semble qu’en tant que libertaire ma place est avec les peuples. Et suivant sur la bas de ces rét1exions, je pense qu’aucun État nation du continent américain ne pourra résoudre ses problèmes avec des schémas traditionnels de répartition des richesses, etc. tout cela doit être suivi de la reconnaissance des peuples indigènes. (…) Ce que je sais également, c’est que la gauche classique a historiquement oublié les peuples, car bien au dessus de la répartition des richesses, de l’égalité etc. se trouve pour elle la prise du pouvoir. Et face à cette situation, les dirigeants politiques ont toujours trouvé bon d’adopter le système mis en placé jusqu’alors: c.à.d. L’État nation. Ainsi, ils/elles ont d’avantage tendu à uniformiser qu’à respecter et faire revivre les cultures et identités des peuples qui ont survécu au massacre antérieur.

Prenons la Révolution Russe. Les différences entre Makhno (libertaire) face à Lénine, Trotsky, etc. (marxistes [bolcheviques]) n’ont pas été uniquement des différences dans la conception des soviets, de la délégation du pouvoir, du centralisme démocratique, de la prise du pouvoir, du parti unique, etc. Beaucoup de différences qui les séparaient, résidaient à mon avis dans la conception du respect des peuples. Ainsi Lénine, se basant sur l’idée que le prolétariat n’a pas de patrie (ce avec quoi l’on peut être d’accord, si l’on entend par patrie le culte de l’État nation) créa l’URSS avec tous les territoires qu’il y annexa avec le temps

Et Makhno, lorsqu’il lui fut proposé un poste à Moscou; mis à part les différences classiques entre marxisme et anarchisme, exposa à Lénine ses différences en ce qui concerne le respect mutuel des peuples. Car Makhno faisait la Révolution-en respectant la différence, et en instaurant la libre fédération, non pas en uniformisant tout depuis les instances du pouvoir central et en créant une union fictive de soit disant «Républiques Socialistes}). De l’union de ces « RS », construite dans le feu et le sang comme les vieux États, les résultats sont visibles. Et il ne semble pas que tout soit dû au totalitarisme soviétique. Je crois qu’il faut également en voir la cause dans le centralisme et l’uniformisation de tout ce qui émanait de Moscou, càd dans l’oubli des spécificités des différents groupes sociaux, en un mot, des peuples.

Je pense qu’il est normal de concevoir un prolétariat sans patrie. Mais il faut laisser au prolétariat, de la même façon qu’il a une mère et un père, avoir un« peuple », càd un entourage, une mémoire historique, le droit à avoir des racines et à les faire pousser à l’endroit qui lui plaît, en respectant l’identité de chacun(e).

Actuellement au sein de la CNT « espagnole », il me semble voir 2 positions (…). D’un côté, nous avons les personnes qui fustigent le nationalisme et la « gauche abertzale» (GA) en général. Et de l’autre, celles qui s’engager aient dans le « char fédéraliste» avec les trotskystes, les CCOO (Commissions Ouvrières, proche du ,PCe),et bien d’autre. Il semble que nous serions bien plus intelligent(e)s, si nous fustigions plus prudemment la GA et nous nous engagions moins facilement à la suite de soit disant « fédéralistes », et que nous éclaircissions nos idées et le chemin à suivre.

Je ne suis pas d’accord avec tout ce qui se dit au Pays Basque, il y a un affrontement entre deux types de nationalismes: l’espagnol et le basque (‘H) cela nous ne concerne pas, il/elle n’ont qu’à s’entretuer et point. (H’) il faut nous positionner là-dessus. La 1 ère chose à dire ni avec les uns, ni avec les autres (les États, aussi bien que les pseudo-fédéralistes), ni avec les autres: les abertzale. Mais là encore, cette position mérite des explications, car nous risquons de renforcer le plus fort (…) : le nationalisme d’État (…). Nous devons dénoncer et nous compromettre dans la dénonciation des abus de l’État, sous forme d’attaque à la culture, tentative de satanisation de l’Euskara, attaque à la liberté d’expression, torture et mauvais traitement sur les détenu(e)s et prisonnier(e)s, application des FIES (régime carcéral instaurant une classification de la «dangerosité» des prisonniers, traité(e)s en fonction de la qualification), éloignement des prisonnier(e)s de leur province ou lieu de vie à plusieurs milliers de km… Et en même temps, la lutte contre l’État ne doit pas nous faire soutenir sans réserve le nationalisme basque, sous prétexte qu’il soit plus faible.

Que pouvons-nous en tirer en clair ?Qu’État et révolution sont antagoniques, et où commence l’Etat, finit la révolution. Lorsqu ‘on parlait tout à l’heure des fédéralistes qui voudraient apporter une solution au Pays Basque par le biais du fédéralisme, c’est à eux/elles qu’est dirigée cette critique. En ce qui concerne les abertzale qui se _disent de« gauche », peut-on être nationaliste et de gauche?

-Le problème n’est pas dans le fait que ces personnes se sentent partie prenante d’une expression culturelle, d’une langue qui a son sens de l’universel et le droit d’affirmer; de s’autodéterminer. Le problème commence dès que cette gauche se met à définir (…) un État basque. Dans le meilleur des cas, quel type d’État admettra l’Europe? Tout au plus, le même que soutient CCOO en Espagne, càd que celui que auquel pensent les PC (…) européens. Càd un État centraliste, avec ses frontières inamovibles, ses parlements de pacotille, ses prisons, ses juges, ses armées afin de défendre la patrie-état-nation. Donc les abertzale seront des gens de « gauche» comme les « pseudo fédéralistes ». Jamais ils/elles ne seront révolutionnaires, car la révolution apporte autre chose: la Liberté (…).

Perdons la peur des mots et positionnons-nous chacun/e à notre place, donnons de la force à notre expression culturelle, à notre sentiment d’appartenance à un « peuple» (communauté, groupe d’hommes et de femmes partageant une langue, un passé historique, une géographie,.. particulières) en nous sentant proches des autres peuples (.. .), de ceux du monde entier.

Dans le cas hypothétique dans lequel il se produirait un référendum sur l’autodétermination, il me semble que nous devrions y être favorable. (…) [Reste une] question primordiale: qui aura droit de vote?

Je lis dans différents «CNT », des opinions affirmant que tant qu’il ne s’agira pas de mouvement révolutionnaires, nous n’avons rien à faire et qu’il vaut mieux fomenter la fédération avec les États déjà existants, plutôt que de contribuer à la création d’un nouvel État classique.

N’est-il pas grand temps de perdre toutes nos peurs et d’affronter s’i le faut, les nouveaux pouvoirs qui surgiront d’un processus d’autodétermination, en créant des centres de contre-pouvoir, avec l’appui des autres peuples, des autres groupes sociaux des États existants, afin de démontrer aux deux sources de pourvoir, celle classique et établie de l’État ainsi que la plus fraîchement démarrée, qu’avec le binôme État-pouvoir, la paix n’existe pas?

(…) Tant qu’il y aura un État, des classes sociales ou bien une culture qui s’imposer sur d’autres, il n’y aura pas de paix.

Compatibilité entre principes anars et sentiments d’appartenance à une culture minorisée : quelques idées épurées

 

Historiquement, face au nationalisme, le dogmatisme théorique anarchiste tire la sonnette d’alarme et se prépare à la défense des principes fondateurs. [L’inverse est vrai aussi.]

Il est cependant possible de rendre compatibles les deux idéologies, et même si les théoriciens anars qui ont approfondi cette idée ne sont pas nombreux, on peut se référer à un certain nombre d’eux.

Dans la réalité, des individus qui ont des sensibilités politiques et sociales semblables mais dans un environnement culturel différent [ont du mal à mettre] en pratique des moyens de lutte qui conjuguent ces deux sensibilités, trouvent des difficultés à mettre en pratique la théorie qui prône l’entente entre les deux et à réaliser des travaux concrets. Si elles s’entendent sur certains principes, elles pourront travailler en commun, sur des bases claires et surtout innovantes.

 

Voyons maintenant quels en sont les principes :

 

1 Sensibilité culturelle et pensée libertaire ne sont pas antagoniques, Ceci est le point de départ. On peut appartenir à une culture qui se cherche et revendique ses droits, et militer pour une organisation libertaire de la société.

  1. L’appartenance culturelle est le fruit du hasard et nul ne peut l’imposer à autrui. Cependant toute culture est une richesse, qui peut être mise en commun et partagée. On peut penser à un fonctionnement qui donne à chacun(e) les moyens de s’exprimer dans sa culture, de la faire vivre, tout en cautionnant l’échange avec les autres cultures. Dans ce fonctionnement, on donne priorité à l’autodétermination de la personne et on instaure un système de relations sociales basées sur le fédéralisme entre individus (voir n09).

3, Les relations entre les différentes cultures doivent se faire de manière naturelle et non par l’imposition. Cette théorie devrait établir l’égalité entre toutes les cultures, or on sait bien que certaines d’entre elles luttent pour s’imposer sur d’autres et les homogénéiser n’existe clairement des cultures dominantes et des dominées. Dans ce cas, il faut combattre l’imposition et l’abus de pouvoir, ainsi que lutter afin d’instaurer les bases qui feront disparaître le mercantilisme, un des principaux responsables de l’annihilation des expressions minoritaires,

  1. Ne pas confondre culture et politique. Lorsqu’une culture est opprimée, elle se défend et met en place des systèmes de résistances fortement empreints de contenu politique. Elle tend à se mesurer à la culture majoritaire et dominante qu’elle a face à elle, et se prépare à la contrer par ses propres armes: la véhémence (…) d’abord et l’imposition parfois ensuite. Ceci est condamnable (.. .).
  2. Lorsque culture et politique sont nouées, on peut affirmer que derrière les deux planent le concept de l’État. On peut ainsi opposer deux modes d’expression culturelle. Le premier, basé sur la libre circulation des langues, cultures, sur le respect de l’individu et de sa provenance, sur l’interchange équitable et respectueux de l’égalité dans la différence. Le second, lié à la lutte entre les différentes expressions culturelles, le repli sur elles-mêmes par méfiance et la cohabitation houleuse. Dans le 1er schéma, on a une relation exempte de pouvoir entre les individus et les richesses culturelles qu’elles comportent. Dans le 2nd, une détermination pour en acquérir un maximum, afin de faire face à« l’autre» culture.
  3. La politisation de la culture apparaît de manière pernicieuse, et est particulièrement difficile à repérer de l’intérieur de contextes culturellement opprimées ou minorisés, par les personnes qui y vivent. Paradoxalement, c’est dans ces conditions là que se développent naturellement (et non« politiquement ») des moyens de travails de véritables réseaux qui arrivent à mobiliser nombre de personnes, pour mettre en place la sauvegarde de la culture,
  4. Les outils mis en place par n’importe quelle culture pour s’affirmer et perdurer ne sont pas à rejeter d’office, sous prétexte qu’ils sont nés d’une volonté politique distante des principes libertaires, Ils sont souvent basés sur le bénévolat, et peuvent contribuer à instaurer des liens sociaux riches. Ils ne sont donc pas déniables en soit, il faut seulement les accepter tels quels: des instruments de travail, au service d’individus. Par conséquent, ils sont nécessaires afin de mettre en pratique les principes que nous alignons ici [si l’on veut concrétiser avec succès] la sauvegarde d’une culture.
  5. (…) il faut doter celle-ci de moyens concrets: ne serait-ce que pour l’enseignement de la langue: enseignant( e )s, locaux etc. Sans tenir compte des besoins financiers nécessités par les autres moyens culturels (…)
  6. Autodétermination et fédéralisme prennent d’avantage de sens après avoir précisé ces quelques notions. La culture doit se penser à partir de l’individu et non à partir de la communauté ou de la société qui l’entoure ou à laquelle il est censé appartenir. L’autodétermination représente la liberté et l’autonomie de choix de chacun(e) ; et s’oppose à l’imposition. Le fédéralisme est le système qui régit toutes les individualités autodéterminées dans l’égalité et le respect mutuels. .

10, Prenons maintenant la notion de « peuple», (…) on peut dire que le point de vue libertaire qui reconnaît le « peuple}) comme une communauté de personne qui ont leur propre identité, sans le déterminer dans une zone géographique figée; ce point de vue là est conséquemment respectueux d’une personnalité culturelle (…). A partir de là, les libertaires n’ont pas à s’inquiéter de prononcer le mot « peuple». Car ils ont leur définition bien à eux, adaptée à leur idéologie. Cette définition tient en même temps compte des revendications culturelles (.. .).

11. Se mettre d’accord sur la base de ces principes sera un véritable point de départ pour s’atteler à la tâche militante, notamment dans les régions culturellement « minorisées » (…).

Italie : Des nouvelles depuis la prison de L’Aquila

Anarhija.info / jeudi 20 juin 2019

Anna et Silvia (en grève de la faim depuis le 29 mai) vont bien, à niveau santé.
Aujourd’hui, la directrice de la prison est venue les voir à nouveau, leur disant qu’elle a fait pression sur l’Administration Pénitentiaire pour que leur situation change.

Malheureusement, aujourd’hui même Natascia a été transférée elle aussi à L’Aquila.

Les compagnonnes disent qu’aujourd’hui aussi elle ont entendu les autres détenu.e.s cogner sur les barreaux de leurs cellules. Le battage a commencé lundi, après que la nouvelle de leur grève de la faim a été transmise par le JT régional. Du coup hier, à l’heure du déjeuner, il y a eu du bruit, et aujourd’hui aussi. On pourra en savoir un peu plus de ce qui se passe à l’intérieur de la prison seulement après les prochains parloirs.
Bientôt d’autres nouvelles.

Entre-temps, le rendez-vous est pour le rassemblement devant la prison de L’Aquila, dimanche 23 juin à 15h.

*****

Pour écrire aux trois compagnonnes :

Anna Beniamino
Silvia Ruggeri
Natascia Savio

Via Amiternina, 3
Località Costarelle di Preturo
67100 – L’Aquila (Italie)

Valence, Drome:Réservons un accueil à l’envoyé du ministère du travail

Face aux attaques de l’État(versus Pénicaud ) qui les  concernent  toutes et tous Comment s’organiser sans se trahir ?

[reçu par mail]

Bonjour, je vous transmet ce message important lors que le ministère du travail tente  encore démanteler l’inspection du travail. Ce long travail de sape commencé sous Sarkozy et continué par Hollande et …
Sous le titre Appel à la grève  le 21 juin les agents de l’inspection du travail se mobilisent article du Dauphiné libéré du 20 /06/19.
La grève commencera à 10h 30 et rassemblement prévu par l’intersyndicale de la région AURA( c’est à dire Auvergne-Rhône-Alpes) à 12h  jusqu’à 14hau même endroit que le départ de la manif antinucléaire  du 4 juin ( 70 avenue de la Marne à valence) Un accueil particulier est prévu  pour l’envoyé du ministère  du travailJe mets un lien explicatif de ce mouvement  car  ce démantèlement est lourd de conséquence, jhttps://www.cnt-tas.org/

 j

Espagne : Communiqué de la compagnonne Lisa en solidarité avec les compas en grève de la faim en Italie

Anarquia.info / dimanche 16 juin 2019

Barcelone, fin 2018 – début 2019

Cher.e.s compas,
Je tiens à envoyer un grand salut solidaire et rebelle aux compas anarchistes emprisonné.e.s qui sont actuellement en grève de la faim dans les prisons italiennes, ainsi qu’à tou.te.s celles/ceux qui sont poursuivi.e.s et aux solidaires dehors.

Il est évidemment nécessaire de lutter contre la prison, l’isolement et toutes les mesures de sécurité de plus en plus dures qui sont appliquées à tou.te.s les détenu.e.s supposé.e.s conflictuel.le.s, dangereux.ses ou socialement inadapté.e.s, particulièrement ceux/celles qui se battent.

Le contrôle (social, physique et psychologique), la punition et l’isolement sont les piliers fondamentaux du système carcéral, ici et dans le monde entier. Les règles du pouvoir sont très simples et quiconque les enfreint, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de la prison, sera puni.e et isolé.e dans un environnement plus socialisé et plus calme….c’est à dire enfermé.e en prison, y compris dans des sections d’isolement, qui ne sont rien d’autre qu’une prison dans la prison. Parfois ce sont des sections à part, qui n’ont aucun contact avec les sections normales ; dans d’autres endroits il s’agit de cellules de punition qui se trouvent dans la section normale, et où les les prisonnier.e.s peuvent interagir, montrer leur solidarité, communiquer mais aussi menacer, ignorer ou stigmatiser les puni.e.s.

Dans l’État espagnol, il y a le système FIES (fichier interne de suivi spécial), un système qui contrôle, enregistre et conditionne l’enfermement des prisonnier.e.s politiques ou conflictuel.le.s. Le FIES III est conçu pour les prisonnier.e.s appartenant.e.s à des groupes armés, il e été pensé à l’origine pour ETA et d’autres groupes organisés, mais on y enferme aussi les anarchistes condamné.e.s, accusé.e.s ou sous enquête pour terrorisme.

Évidemment, l’application des normes du FIES, ainsi que la prison où on est envoyé.e, dépend beaucoup du degré de dangerosité que l’État nous attribue… cela peut être un isolement assez léger et similaire au régime fermé normal ou au contraire un isolement très dur et très strict.

En principe, on passe d’abord par le module d’isolement de Soto del Real (Madrid). Il y a 4 sections – 3 pour les hommes et une pour les femmes. La section des femmes a dix cellules et selon la classification de chacune des prisonnières, on va à la promenade ensemble ou séparément. La cour est minuscule, avec du filet métallique au-dessus. Il n’y a absolument rien d’autre qu’un évier de merde et des déchets.

Dans les cellules, le lit, l’armoire, la table et la douche sont fixés au sol. Seuls quelques effets personnels sont autorisés dans la cellule, notamment 2 livres maximum, qu’on ne peut changer qu’une fois par semaine.

On ne peut avoir d’objets « dangereux », comme des rasoirs, des coupe-ongles ou des pinces à épiler, que pendant une demi-heure au maximum (après ils sont repris). On peut cantiner une fois par jour, mais il a très peu de produits. Les formulaires et les lettres sont collectés une fois par jour, du coup si on veut consulter ou modifier quelque chose, on doit attendre le lendemain. La lumière peut être allumée ou éteinte de l’intérieur de la cellule, mais seulement si les maton.ne.s sont d’accord, autrement ils/elles l’allument ou l’éteignent de l’extérieur.

Le nombre de fouilles dépend des maton.ne.s : l’heure et la raison sont à leur discrétion, mais il y en a beaucoup, comme le sont les contrôles avec détecteur de métaux ou scanners à métaux, de fait chaque fois que l’on quitte la cellule.

La « chose positive », ici – surtout par rapport à l’isolement dans d’autres pays – est qu’ils ont tendance à être plus permissifs avec la communication, tant avec l’extérieur (appels quotidiens, parloirs, cabines téléphoniques aussi dans les sections FIES) qu’entre prisonnier.e.s (on peut parler des heures durant à travers les fenêtres, faire passer des lettres entre prisonnier.e.s…), du coup on ne vit pas son isolement de façon si strict que cela peut être le cas par exemple dans les pays nord-européens.

Mais s’ils veulent punir quelqu’un, ils peuvent le garder dans des modules d’isolement beaucoup plus durs, aménager des sections d’isolement total….

La nourriture passe par un trou à la hauteur de la taille et c’est seulement de là qu’on peut communiquer avec les maton.ne.s – ce qui n’est rien d’autre qu’une humiliation de plus, pour essayer de briser la force de la personne emprisonnée.

Après une période d’observation pendant lequel on est provisoirement isolé.e.s durant quelques mois, généralement on passe à des modules de premier degré, qui sont conçus pour y « vivre » pendant des années. Mais ils peuvent aussi maintenir les prisonnier.e.s particulièrement puni.e.s – généralement ceux accusé.e.s de terrorisme – dans un isolement total, sans aucun contact avec les autres prisonnier.e.s, ou appliquer des articles de sécurité maximale, dans le cas de personnes supposées être particulièrement dangereuses… comme toujours : punir ou prévenir…..

En Allemagne aussi il y a des sections d’isolement. À Cologne par exemple, mais seulement pour les hommes… cependant les femmes aussi peuvent se retrouver isolées dans ces sections ou isolées dans des sections de régime normal. Ensuite, il y a des cellules de punition extrêmes, appelées « bunker », où il est permis d’avoir seulement un vêtement fourni par la prison, où l’on passe 24 heures seul.e, sans fenêtres et sans le moindre contact avec l’extérieur… mais normalement on ne reste pas là plus de quelques jours ou au maximum quelques semaines. Malgré cela, la sensation d’injustice et d’impuissance qui y est vécue est énorme.

L’isolement laisse toujours de fortes séquelles, c’est quelque chose que celle/celui qui l’a vécu n’oubliera jamais, et la folie et la rage de l’avoir vécu ne font qu’augmenter. Il y a beaucoup de gens qui n’y survivent pas. Tout dépend de la force mentale (et physique) de chacun.e mais aussi beaucoup du soutien et de la solidarité de l’extérieur.

Sur le plan politique, il est plus qu’évident qu’on essaye de nous isoler, non seulement de la société extérieure, mais aussi des autres prisonnier.e.s avec lesquel.le.s on pourrait créer des complicités et de la conscience de lutte contre ce système de punition, de prison et d’autorité. Cependant, chaque geste de camaraderie et de solidarité vécu à l’intérieur ou venant de l’extérieur, toute détermination à s’opposer à leur isolement, ainsi qu’à l’ensemble de leur système d’oppression et de misère, prouvent qu’ils ne pourront jamais en finir avec nous, notre combat et notre passion pour la liberté totale.

FORCE, CHALEUR, AFFECTION ET SOLIDARITÉ POUR LES COMPAS EN GRÈVE DE LA FAIM EN ITALIE !
VOUS N’ÊTES PAS SEUL.E.S ! LA LUTTE CONTINUE !
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LISA
C.P Brians 1
juin 2019

Publication: Ricardo Flors Magon, une utopie libertaire dans les révolutions du Mexique

■ Américo NUNES

RICARDO FLORES MAGÓN
Une utopie libertaire dans les Révolutions du Mexique

Paris, Ab irato Éditions, 2019, 274 p., illustrations.

Ce livre, nous prévient d’entrée Américo Nunes, n’est pas une « biographie historique » de Ricardo Flores Magón (1873-1922), mais un « essai politique » sur un acteur emblématique d’un moment inaugural « proprement communiste » qui, de 1900 à 1912 et traversant diverses phases, travailla, sur le front d’un peuple du Mexique fait de divers peuples, à réaliser, dans l’imaginaire et dans la pratique, la « confluence entre révolution paysanne et révolution ouvrière ». Et c’est bien de cela dont il s’agit : une impressionnante plongée historico-critique dans l’imaginaire politique et sensible d’un des personnages les plus profonds et les plus ignorés d’une époque où, en terre mexicaine, la guerre des pauvres accoucha de géants.

Une histoire faite de plusieurs histoires

Fin connaisseur de cette histoire du Mexique insurgé, l’auteur avait, dans un précédent ouvrage [1], brillamment défendu la thèse que ladite révolution mexicaine n’était saisissable que dans sa multiplicité, dans cette constellation d’imbrications des origines qui, sur le temps long et dans un espace historique, géographique et sensible donné, favorisa ou empêcha la convergence de poussées émancipatrices, complémentaires ou contradictoires selon les cas. La grande originalité de son approche, notions-nous alors, pouvait se résumer à deux points : d’une part, la perspective qu’il adoptait, celle des vaincus, si chère à Walter Benjamin ; d’autre part, une lecture du temps et de l’espace de ces « révolutions » mexicaines désencombrée de toute simplification abusive et postulant, plus largement, la pluralité et la complexité des phénomènes révolutionnaires. C’est ainsi que l’auteur affirmait, en marxien conséquent, que ces phénomènes avaient mis en branle des groupes sociaux très différents et porteurs d’intérêts radicalement antagonistes. Au fil du temps, ces groupes conjuguèrent leurs efforts – contre Porfirio Díaz (1830-1915), d’abord, puis contre Victoriano Huerta (1850-1916) – avant de s’affronter au très contrasté mouvement révolutionnaire mexicain dans une guerre civile interne s’achevant, le 1er mai 1917, par la victoire – provisoire – de Venustiano Carranza (1859-1920). Cette approche d’Américo Nunes, qu’il assumait au passage comme gramscienne, avait pour principal mérite de dépasser les clivages interprétatifs traditionnels. Cette révolution, nous disait-il, fut surtout paradoxale, tout à la fois libérale et socialiste, populaire et petite-bourgeoise, agraire et urbaine, restauratrice et moderniste. Elle libéra des forces authentiquement révolutionnaires – zapatistes, villistes, magonistes – qui, elles-mêmes, furent incapables de surmonter leurs propres différences sociales entre paysans-prolétaires, ouvriers de métier et prolétaires industriels. Au terme d’une lutte acharnée, concluait Américo Nunes, anarchiste de cœur pour le coup, la révolution, devenue « une », se militarisa, s’étatisa, mettant un terme, de manière violente, au processus révolutionnaire. En face restèrent les vaincus, ceux qui avaient rêvé de terre et de liberté, avec Emiliano Zapata et Ricardo Flores Magón, ces vaincus dont l’histoire, faite toujours de plusieurs histoires, est infiniment susceptible de « venir trouer la trame linéaire du Temps ». Car, comme l’écrivit Gustav Landauer, « lorsqu’une révolution éclate à nouveau, elle se souvient généralement de tous ses ancêtres » (La Révolution, 1907) qu’elle convoque, sans même le savoir le plus souvent, au nouveau banquet de l’histoire.

Du libéralisme politique à la révolution comme totalité

C’est dans cette même discontinuité historique du surgissement toujours possible que se situe, par sa continuité interprétative, ce nouvel opus d’Américo Nunes, qui est en fait l’œuvre d’une vie, entièrement construit autour de la noble figure de Flores Magón. En précisant que le prisme qu’il adopte est vaste et que sa méthode, encore et toujours dialectique, restitue, de détours en retours, toute l’importance de l’apport de Flores Magón, fils de la Sierra Mazateca (État d’Oaxaca), à la cause de l’émancipation politique, sociale et humaine.

Il est vrai que, dans cette révolution à divers visages, celui de Flores Magón apparaît souvent brouillé ou réduit à l’une de ses expressions, la première surtout, que récupéra la révolution constitutionnaliste de 1917, celle du précurseur libéral-social des origines, fondateur en 1900 du Parti libéral mexicain (PLM) et de son organe Regeneración, celle d’avant son adhésion, donc, pourtant assez rapide, à l’idée de la révolution comme totalité. L’un des principaux mérites de ce livre réside précisément dans l’évaluation du parcours politique de Flores Magón – et plus largement du « magonisme » [2] – saisi dans sa continuité méthodiquement dissensuelle jusque dans son adossement tactique au PLM comme socle d’un mouvement révolutionnaire devant se constituer par en bas sur les bases d’un anarchisme communiste de lutte de classe. Flores Magón fut, en fait, un anarchiste qui ne s’interdit pas la politique, au sens de pensée stratégique. Et ce faisant, il ne choisit pas « la plus mauvaise », comme le dira cruellement Victor Serge des anarchistes qui, par principe, la dédaignaient en la laissant aux autres. L’Espagne de 1936, celui que contemplait Serge quand il lâcha cette saillie, demeure, sur ce plan, un bon exemple. Quand, en recul, les anarchistes acceptèrent le jeu politique, ils ne firent pas leur politique, mais celle que l’État républicain reconstruit attendait qu’ils fissent. Flores Magón, lui, se situe dans une autre manière. S’il faut masquer son appartenance à l’anarchie pour avoir quelque chance de l’atteindre, il le fait. Non par opportunisme, mais par conviction anarchiste, par intelligence tactique du moment historique traversé.

Le libéralisme politique auquel, un temps, il semble sincèrement croire, s’érode, dès 1904, lors de son exil aux États-Unis. Est-il déjà anarcho-communiste ? On ne sait, même si Américo Nunes nous indique qu’il a précocement lu La Conquête du pain, de Kropotkine, et que sa découverte, in vivo, du sort de la classe ouvrière mexicaine immigrée des braceros va substantiellement radicaliser sa conception de la révolution. Changeant souvent de lieu de résidence pour échapper aux persécutions policières, c’est aux États-Unis que Ricardo Flores Magón et ses compagnons du premier cercle [3] vont découvrir, enthousiastes, cette forme spécifique de syndicalisme révolutionnaire offensif que pratiquent les Industrial Workers of the World (IWW), mais aussi fréquenter, désireux d’apprendre, des socialistes nord-américains et des anarchistes espagnols de passage. Ce brassage a son importance dans l’élargissement de l’horizon magoniste qui passe, dès l’automne 1905, par d’évidents « glissements programmatiques », puis par la création de la Junte pour l’organisation du Parti libéral mexicain, d’inspiration assez nettement bakouniniste et dont la visée, nous dit Américo Nunes, est de prendre « définitivement le contrôle du mouvement libéral » contre les libéraux politiques que sont Camilo Arriaga et Francisco I. Madero. Dès lors, Flores Magón s’engage, étape après étape, sur la voie ouverte à divers apports et influences d’une révolution sociale assumée.

Cananea comme point d’orgue

Ce tournant magoniste de 1905-1906, nous dit Américo Nunes, adopte deux voies simultanées, mais non contradictoires : celle du soutien actif à « la première tentative de guérilla insurrectionnelle à l’intérieur du Mexique », expérience dans laquelle les Indiens Yaquis jouèrent, dans l’État de Sonora, un rôle déterminant ; celle d’une participation « éclatante » du PLM, dans le même État de Sonora, à la grève des mineurs de Cananea de 1906, qui intervint comme point d’orgue du travail « de propagande (magoniste) adressée aux “classes ouvrières” naissantes ». Si Cananea fut l’étincelle qui mit le feu à la plaine, c’est que cette grève ouvrière « spontanée » et « totale » pour les huit heures et un salaire minimal digne de ce nom entra en coïncidence historique, en convergence temporelle objective pourrait-on dire, avec la « guerre atroce » que l’armée fédérale mexicaine menait alors contre la communauté Yaqui. Et que, de ce fait, elle révélait combien les « pauvres » avaient de raisons profondes de se coaliser contre le Porfiriat [4] en s’émancipant de leurs propres différences, infiniment ressassées, pour faire « être-en-commun ». C’est ce moment, nous dit Américo Nunes, que choisit le PLM pour publier son nouveau programme social et politique, qu’il adresse « essentiellement à la “classe la plus nombreuse” – et la plus pauvre – du pays (prolétaires, ouvriers, paysans, péones et classe moyenne pauvre ».

Réprimée dans le sang, la grève de Cananea marque également un point de rupture dans le processus de pacification sociale que le Porfiriat prétendait instaurer par la capitalisation de la société mexicaine et l’extension progressive du domaine du salariat. Elle révèle la vraie nature répressive d’un système proto-industriel en formation sous contrôle étranger, principalement nord-américain. L’année suivante – 1907 – verra les ouvriers de Río Blanco entrer en action en bloquant les manufactures textiles locales, sous capitaux français, dans la zone comprise entre Puebla et Veracruz. Avec le même résultat : une levée en masse suivie d’une répression provoquant la mort de centaines de grévistes. Du côté du « magonisme » militant, l’évolution s’accentue « vers un approfondissement des idées anarchistes et communautaires sous l’influence de Pierre Kropotkine, surtout par son idée centrale d’un anarcho-communisme centré sur les idées essentielles d’ “appui mutuel”, d’insurrection et de commune libertaire ».

Désir d’utopie et dialectique du dépassement

Si le « magonisme » relève d’un anarchisme dynamique, hétérodoxe, libre de toute fixité idéologique, c’est que, de 1906 à 1911, le temps d’élaboration de l’idée de révolution comme totalité, il s’articule à une dialectique du dépassement permanent, ouverte au vaste champ des possibles émancipateurs, intégrant sans chercher le point de synthèse des traditions aussi anciennes au Mexique que celle du communalisme indien et aussi modernes que celle de l’action directe ouvrière, de forme syndicaliste ou pas. C’est sans doute là ce qui fait la singularité du « magonisme » et, d’une certaine manière, son actualité intempestive. Car il faut bien admettre que cette curiosité pratique qui le caractérisa et cette aptitude qui fut la sienne à capter, dans le tréfonds des consciences parcellaires et séparées, ce qui pouvait faire imaginaire commun d’une utopie en construction n’étaient pas, c’est le moins qu’on puisse dire, les qualités les plus partagées dans le vaste monde idéologisée du progressisme révolutionnaire de son temps. La leçon vaut toujours pour aujourd’hui, et peut-être davantage même que pour hier, en ces temps d’effondrement. Comme vaut l’approche de Flores Magón et de ses amis, qui ne préjuge de rien mais décèle, dans le monde des exploités et des dominés tel qu’il va, les points de convergence nécessaires pour le subvertir. L’actualité de notre époque est encore fertile en dépassements que la Théorie ignore, mais que la praxis conjugue sans savoir le plus souvent qu’elle renoue, ce faisant, avec un très ancien projet d’émancipation.

Cette tentative d’articulation entre l’ « utopie communiste primitive » directement liée au mythe communautaire indien, à son rapport à la Terre Mère, et le socialisme libertaire des temps nouveaux s’élaborant dans les pratiques d’organisation et d’action des « classes ouvrières » naissantes, bien des progressistes de l’époque, anarchistes compris, la jugèrent à tort contradictoire. À tort parce qu’elle contenait, dans sa méthodologie même, une promesse inédite de conciliation entre l’ancienne cosmogonie indienne et la nouvelle puissance d’un prolétariat en formation, et que, poétisée, cette convergence d’imaginaires apparemment antithétiques pouvait agir, révolutionnairement et de facto, comme une « réserve utopique » en devenir où s’accorderaient, enfin, la nostalgie d’un âge d’or et la dynamique d’un temps historique à venir, celui de « l’arrêt messianique du présent », pour reprendre la belle référence benjaminienne.

Sur cette thématique d’exception, Américo Nunes apporte des lumières indispensables pour saisir en quoi le « désir de révolution » si pleinement incarné par Flores Magón n’est pas séparable d’une dialectique de réélaboration, ouverte à l’ancien et au nouveau, du projet communiste libertaire d’émancipation défini comme « retour à la communauté » humaine et au « travail social en commun ». C’est en ce sens, nous dit l’auteur, « que ce qui le taraudait, c’était la possibilité, ou non, d’articuler une histoire sociale passée-présente, où le passé et le présent s’entrecroiseraient, afin de changer et transformer une réalité insupportable pour les masses ».

Entre « passé passé » et « passé futur », la révolution

Dans un article paru le 2 septembre 1911 dans Regeneración, Ricardo Flores Magón affirmait que « le peuple mexicain [était] apte pour le communisme ». Il s’agissait alors, pour lui, de laisser ouverte, désirable et possible la perspective d’un dépassement nécessaire de la révolution politique qui avait provoqué la démission de Porfirio Diaz le 25 mai 1911 et allait permettre l’élection du libéral Francisco I. Madero le 15 octobre. Plus que de circonstance, ce texte, subtilement analysé par Américo Nunes, fait surtout preuve de l’intime conviction de Flores Magón que la révolution sociale constitue la seule issue possible à la révolution politique, le seul chemin vers l’émancipation collective. Intimement, il sent que, dans son être profond, dans son étrangeté, dans sa quête d’un sens commun à son existence, la multitude des déshérités et des humiliés doit désormais chercher dans le communisme – perçu comme abolition des anciennes formes de possession capitaliste de la terre – la forme réelle de son émancipation. Le « passé futur » est là, précisément là, dans cette réappropriation imaginaire du « passé passé » inabouti et dans son prolongement possible. La révolution sociale, c’est en somme ce temps où la radicalité se nourrit des mythes anciens et y puise l’essentiel de sa force d’impulsion.

« Presque toujours, écrivit Octavio Paz, l’utopie suppose l’existence préalable, dans un passé lointain, d’un âge d’or qui justifie et rend possible son action révolutionnaire. [5] » Au long cours des « révolutions mexicaines », le zapatisme représenta sans doute, mieux que tout autre, la quintessence de cette aspiration du retour au « passé passé » d’un âge d’or qui, du reste, n’exista jamais que comme idée qu’il n’y avait de réalité mexicaine possible que mythique. Le « magonisme », lui, se situait dans un autre devenir, une perspective anarcho-communiste de rupture soucieuse d’emprunter au passé du rêve d’émancipation les raisons de construire un autre futur pour les pauvres, tous les pauvres – qu’ils fussent paysans, prolétaires, sous-prolétaires ou un peu les trois à la fois. C’est en cela que la vision de Flores Magón relève d’une cosmogonie où tout fermente d’une radicalité – plébéienne plus que prolétarienne –, constamment soucieuse d’imaginer, de susciter, de tisser des convergences d’imaginaires social et combattant entre pauvres, ces pauvres qui sont pour lui, et à l’évidence, le sel de la terre. Cette aptitude à chercher en permanence, en l’inventant si nécessaire – et au risque de se tromper parfois –, cette voie non tracée de l’émancipation des pauvres, c’est ce qui fait sans doute du « magonisme », hors cadre historique précis et quelques que soient les idées de l’époque, une manière toujours actuelle d’imaginer la révolution comme un devenir qui se nourrit d’un passé à rejouer infiniment.

Une vie comme œuvre

On reprendra, pour finir, par le début, car toujours le début est à reprendre. Si ce livre est bien un « essai politique », puissant et de grande ampleur, il atteste aussi qu’il faut voir la vie de Flores Magón comme œuvre, œuvre de vie précisément où le présent et l’absolu de l’idée de révolution empruntèrent des chemins difficiles qui engagèrent l’existence sensible, intime de ce rêveur éveillé que fut ce fils de la Sierra Mazateca. C’est même en ce sens que cette existence fait histoire inspirante. Ici, il n’est pas vain de rappeler que cet homme vécut quarante-six ans, dont un tiers aux États-Unis, avec de fréquentes périodes d’incarcération, et mourut, le 21 novembre 1922, dans des conditions qui demeurent suspectes au pénitencier de Leavenworth (Kansas) où il purgeait, depuis 1918, une peine de vingt ans de bagne pour « défaitisme » et « sabotage de l’effort de guerre » étatsunien.

Au vu de cette condition de déplacé, recevable est l’hypothèse d’un certain décentrement magonien par rapport au réel mexicain, d’autant plus recevable, pourrions-nous dire, qu’elle fait sienne deux données inséparables de la vie et de l’œuvre des révolutionnaires de ces temps où l’adhésion au « principe espérance » se payait souvent au prix du destierro. On a beaucoup reproché, en effet, à Flores Magón d’avoir vu le Mexique de loin et de l’avoir pensé, à partir de 1906, en exilé. On a beaucoup glosé, de même, sur ses penchants internationalistes, sur son refus de rallier Madero au début du processus révolutionnaire, sur ses contacts infructueux avec Villa, sur sa rencontre sans prolongements avec Zapata et surtout sur sa tentative « flibustière », un peu aventureuse il est vrai, d’instaurer, en janvier 1911, et pour cinq mois sur quelques kilomètres carrés, la Commune libre de Basse-Californie, avec le soutien actif d’anarchistes de diverses nationalités et de militants des IWW. Si toute critique est recevable, il n’en demeure pas moins que le projet de Flores Magón se décentra également pour le meilleur, comme pressentiment, comme anticipation dialectique, comme possibilité effective d’un ici et maintenant d’une utopie libertaire refusant tout verrouillage conceptuel, dégagée de toute nécessité objective et produite comme mouvement ascendant d’un imaginaire d’émancipation.

En cela, Flores Magón incarna plus que tout autre, et jusque dans ses limites, l’esprit même de l’utopie active nécessairement méfiante envers tout pouvoir institué ou en voie d’institution. Malgré les avanies, les déceptions, les doutes, ce révolutionnaire d’exception paya de sa vie ce que Ernst Bloch, que cite souvent et à juste titre Américo Nunes, définissait comme « l’espérance scrutatrice », à savoir « l’attente active du rêve éveillé », de « l’espoir concret », du « non-encore-conscient », du « non-encore-advenu », du « rêve vers l’avant » [6]. Ce fut précisément sa grandeur, et cela demeure sa force.

Car rien ne doit se perdre de ce qui, dans le passé du désir-révolution, a fait quintessence. Ce livre, qui fera date, nous le rappelle page après page.

Freddy GOMEZ

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