Deux voitures qui partent en fumée en pleine nuit. Des incendies d’origine criminelle ont catégoriquement conclu policiers et pompiers dépêchés sur les lieux, chemin de Morgiou, à Marseille (9e). Une intervention réalisée dans l’urgence : déclaré vers les 3 heures, le sinistre s’était propagé sur la pinède et menaçait une habitation mitoyenne.
Certes contrariants pour les victimes, les faits n’ont rien de vraiment originaux. La profession des propriétaires des véhicules calcinés, elle, est plus évocatrice : deux surveillants des Baumettes. « Nous sommes directement visés », est convaincu Cyril Antolin, du Syndicat pénitentiaire des surveillant(e) s (SPS). Pour preuve, l’homme tient à jour une fâcheuse comptabilité : « En deux ans, cela fait dix véhicules de surveillants qui brûlent », râle-t-il. Une épidémie attribuée, sans aucun doute, à un cycle pressions-représailles qui se joue au quotidien à l’intérieur d’un centre pénitentiaire en surchauffe.
« Nous avons surpris à plusieurs reprises des familles de détenus en train de filmer les gardiens jusqu’à leurs voitures pour pouvoir leur mettre la pression », confie Cyril Antolin. « Ensuite, dans les couloirs, des prisonniers nous menacent de représailles si on ne leur accorde pas des facilités ou si l’on se montre trop stricte avec le règlement. Par exemple, si on trouve un portable pendant une fouille. » Un double incendie d’autant plus rageant pour le personnel qu’il s’inscrit dans une longue série d’incidents, plus ou moins graves, répertoriés ces derniers mois.
Dans l’ordre : deux gardiens agressés au couteau, en juin, par un détenu qui exigeait de changer de cellule, suivi, quelques jours plus tard, d’un jet d’urine en pleine face. Début juillet, une tentative d’évasion nocturne qui a échoué in extremis. Enfin, il y a une dizaine de jours, un surveillant lourdement frappé alors qu’il fermait la porte de la douche… Selon les syndicats, reçus en préfecture peu avant l’été, cette succession de faits est la conséquence directe de conditions de travail et de détention « en constante dégradation ». « C’est le bâtiment des Baumettes historique qui pose problème depuis l’ouverture de Baumettes 2″, indique Cyril Antolin. En cause, une équation génératrice de tensions : surpopulation carcérale et équipes en sous-effectif. « Au niveau de Baumettes 2, pour l’instant, ça se passe bien. Le bâtiment est neuf, les cellules sont équipées de douche…, observe le SPN. Mais dans la prison dite historique, en revanche, ça se gâte. Nos collègues sont près du burn-out. À l’appel, on se retrouve certains jours à gérer le bâtiment à deux. »
Pour tenter de régler déjà la question de voitures incendiées ou vandalisées, Cyril Antolin et ses troupes ont été reçus par le maire du 9-10, Lionel Royer-Perreaut (LR), à qui ils ont réclamé l’installation de la vidéosurveillance sur la route qui longe les Baumettes. Une revendication qui devrait être satisfaite début 2018. En attendant, les syndicats ont réitéré, hier, leur demande de « patrouilles de police municipale et nationale aux heures d’entrées et de sorties des personnels ».