article paru dans courant alternatif N°266
Le dimanche 27 novembre, une mutinerie a eu lieu dans la nouvelle prison de Valence. Les détenus ont foutu le feu en réponse à à une situation de plus en plus intenable. Enfin un peu de chaleur dans cette période morne et froide !
Bravant les gros risques que comporte les révolte derrière les barreaux -passages à tabac, brimades à répétition, lourdes peines qui se rallongent, etc-, des prisonniers de la maison centrale de Valence se sont mutinés pour protester contre leurs conditions de détention. Et il y avait de quoi, comme on va le voir.
Le centre pénitentiaire de Valence, ouvert il y a un an et qui compte aujourd’hui environ 470 embastillés, est double. Il comporte une maison d’arrêt, pour les courtes peines, et une maison centrale, pour les longues peines. Déjà cette organisation ne simplifie pas la vie quotidienne. La prison est équipée de 520 caméras (soit plus d’une par détenu !) et d’un brouilleur d’ondes pour les téléphones portables. Celui-ci est tellement fort que des avocats éprouvent parfois des malaises dans la taule et que des surveillants demandent leur mutation dans d’autres prisons. Pour ce qui est de la santé des détenus, on sait que l’administration pénitentiaire s’en fout. Et les taulards servent en quelque sorte de cobayes dans ce genre de situations, comme les prisonniers de Saint-Quentin Fallavier qui vivent 24 heures sur 24 sous les lignes à haute tension (THT). En outre, il n’y a pas de « parloirs sexuels » à Valence alors que cela se fait dans d’autres prisons, et c’est souvent une revendication importante pour ceux qui sont enfermés pour de nombreuses années. Enfin, et c’est important, les détenus réclament la fin du régime des portes fermées, c’est à dire qu’ils sont tout le temps enfermés dans leur cellule et ne rencontrent que très rarement autres détenus. Quel foutage de gueule quand on se rappelle que cette taule était censée être la première prison française à réinsertion active, avec de « meilleures » condition de détention et plus d’activités collectives !!
A tout cela s’ajoutent les brimades et harcèlements commis par les matons de la prison. Ainsi, l’intimité des Unités de Vie Familiale n’est pas toujours respectée par les gardiens, qui se permettent des intrusions dans le but de provoquer des incidents. Il faut dire qu’une bonne partie de ces matons est très ancrée à l’extrême-droite, et donc on imagine sans peine leur comportement vis-à-vis de prisonniers qui sont majoritairement d’origines immigrées. Il semblerait aussi que les gardiens, dans leur volonté de « contrôler » eux-même la prison, soient rentrés dans un bras-de-fer avec la direction de l’établissement ; ils entretiennent pour cela un climat de tension avec les détenus afin de faire pression sur le directeur. Bien sûr ce sont les prisonniers qui sont les premiers à pâtir de ces manigances…
Ainsi donc le dimanche 27 novembre, quelques prisonniers parviennent à s’emparer d’un trousseau de clefs et ouvrent les cellules des différents étages de la maison centrale. Ils parviennent ensuite à mettre le feu par endroits et à détruire quelques éléments de cet ensemble carcéral qui leur détruit la vie au quotidien. Plus tard, les ERIS débarquent brutalement pour mettre fin à la mutinerie, en blessant des prisonniers au passage. Dénommés « le GIGN de la Pénitentiaire », les ERIS sont les brutes épaisses du ministère des prisons, souvent très violents. Mais surtout ils sont cagoulés, ce qui leur permet de commettre leurs exactions sans risque d’être identifiés par leurs victimes. Rappelons au passage que même Pétain pendant la collaboration refusait que les bourreaux effectuent leurs basses œuvres avec le visage dissimulé ; et c’est Dominique Perben qui a contribué à la mise en place de ces équipes de tortionnaires masqués. A cette époque, il était ministre de la justice sous la Présidence de Chirac, le ministre de l’intérieur était Sarkozy et le ministre du travail un certain Fillon…
Pour finir, on notera que si la gauche fait preuve d’un silence assourdissant après cette mutinerie, plusieurs hommes politiques de droite se sont rendus à la prison. D’abord bien sûr pour appuyer les matons et promettre toujours plus de sécuritaire -rappelons que le programme de la droite prévoit 30 000 places de prison supplémentaires dans les années à venir ! Mais aussi, disent certaines mauvaises langues, pour rendre visites aux copains mafieux qui n’ont pas réussi à échapper aux tribunaux. A moins que ce ne soit pour récupérer les voix des familles de prisonniers, en leur donnant l’impression de vouloir améliorer les conditions de détention ?
Pour le moment, les cravatés discutent entre eux de la suite à donner à cette révolte. On en attend rien de bon, puisqu’ils parlent déjà de rajouter des caméras, de faire des patrouilles de police à l’extérieur de la taule, bref renforcer encore le dispositif répressif. De leur côté, les prisonniers identifiés comme « meneurs » sont en attente d’un procès qui rallongera leur peine déjà trop longue.
Solidarité avec les prisonniers, et détruisons le monde carcéral !
OCL Auvergne Rhône-Alpes