La région Auvergne- Rhône- Alpes confie la bio aux agro-industriels

j ean-François Baudin, président du Réseau AMAP régional qui sera impacté de la baisse de subventions la plus importante (de 35%).

Rhône-Alpes compte 225 AMAP (l’acronyme signifie “association pour le maintien d’une agriculture paysanne”), il y en aurait une centaine en Auvergne -toutes n’étant pas nécessairement adhérentes au Réseau.

Le retrait progressif de la Région dans le fonctionnement de ces associations et organismes pourrait les étrangler peu à peu, notamment parce que les subventions régionales déclenchent d’autres moyens cette fois versés par l’Europe.

Ces petites organisations mettent en place des contrats de proximité entre producteurs locaux et consommateurs. Le nombre des AMAP a stagné ces dernières années en Rhône-Alpes, en revanche, le nombre d’agriculteurs décidés à rejoindre ces formats de distribution a, lui, augmenté.


lu sur/ reporterre.net

La politique du bio en Auvergne–Rhône-Alpes va être transformée en profondeur. L’exécutif régional, présidé par Laurent Wauquiez, va retirer aux acteurs historiques du bio leur rôle dans le développement d’une agriculture paysanne et locale au profit des promoteurs du productivisme.

Confisquer la bio à ses défenseurs historiques pour mieux la confier aux industriels de la FNSEA : voilà ce que s’apprête à voter demain, jeudi 17 novembre 2016, le Conseil régional d’Auvergne–Rhône-Alpes présidé par Laurent Wauquiez, lors de son assemblée plénière. Il doit adopter un « plan régional de développement de l’agriculture biologique », que Reporterre a pu se procurer :

  • Télécharger le rapport « Agri bio » :
    PDF - 157.4 ko
    Le plan régional de développement de l’agriculture biologique.

Le texte se donne pour objectif de fixer les orientations politiques en matière de bio sur le reste du mandat, de 2017 à 2021. Un plan-cadre qui s’élèverait, selon nos informations, à un peu plus de 2,7 millions d’euros, soit un budget à peu près constant. À première vue, ce n’est donc pas une délibération défavorable à l’agriculture biologique qui s’annonce.

 

« Une purge »

Le réseau des Amap, Terre de liens, la Frapna, le rés’OGM Info, etc. : la liste est longue des associations promouvant le bio qui perdent des financements. À l’image de la Fédération régionale d’agriculture biologique (Frab), pivot dans le domaine, qui va perdre 500.000 euros, passant de 720.000 à 220.000 euros de subventions par an. « On va se battre et chercher d’autres financeurs, mais on ne peut pas se leurrer : une baisse d’une telle ampleur aura forcément des conséquences en termes d’emplois », concède Antoine Couturier, délégué régional de Corabio, membre de la Frab.

D’autres pourraient tout simplement disparaître, comme Appui Bio, une structure de concertation interprofessionnelle qui réfléchissait au développement de la filière. Leur subvention de 30.000 euros de la région est supprimée : « Sans elle, nous perdons aussi le cofinancement de l’État, regrette Véronique Rousselle, membre du bureau. C’est la fin de notre activité. » Idem pour L’Atelier paysan, coopérative d’intérêt collectif qui travaille sur la souveraineté technologique du monde paysan : « Nous étions financés par la région à hauteur de 75.000 euros par an depuis 2014, rapporte Fabrice Clerc, cogérant. À compter de 2017, ce sera 0 euro. »

Pressenti depuis plusieurs mois, le démantèlement des aides régionales au réseau paysan se confirme donc. « Une purge », selon Antoine Couturier, qui pourrait bien profiter aux chambres d’agriculture : la chambre régionale aurait déjà reçu 25.000 euros pour rédiger la stratégie de développement du bio en Auvergne–Rhône-Alpes. « C’est un véritable transfert de fonds des réseaux associatifs vers les chambres d’agriculture », dénonce Corinne Morel-Darleux.

« On veut désormais faire une bio intensive et industrielle, destinée à l’export »

Heureux hasard, on retrouve, à la tête des chambres, la FNSEA, le syndicat agricole français ultramajoritaire, également bien représenté dans l’organigramme de l’exécutif régional. Ainsi Dominique Despras, ancien président de la FDSEA du Rhône, est devenu conseiller régional délégué à l’agriculture bio, tandis qu’ Eric Thébault, ancien directeur de la FRSEA Rhône-Alpes, a été nommé chargé de mission auprès de la vice-présidente à l’agriculture. Mais « la FNSEA porte un projet politique qui entre frontalement en contradiction avec notre vision de l’agriculture », résume Fabrice Clerc.

Autre acteur qui fait son entrée dans la gouvernance du plan Bio, l’Aria, l’Association régionale des industries agroalimentaires. Un nom qui parle de lui-même, avec à sa tête Jean-Claude Guillon, président, et ancien directeur de communication de… Limagrain, grande coopérative spécialisée dans les semences — et les OGM.

Autrement dit, « ce sont les mêmes personnes qui ont freiné pendant tant d’années le développement de la bio en France qui s’en retrouvent aujourd’hui les dépositaires », dit Antoine Couturier. Un basculement qui risque de transformer en profondeur la politique du bio en Auvergne–Rhône-Alpes : « C’est probablement la fin d’une bio paysanne, locale et de saison, craint Véronique Rousselle. On veut désormais faire une bio intensive et industrielle, destinée à l’export. » Une mutation que confirme Antoine Couturier : « Il n’y a pas la volonté de sabrer la bio en tant que telle, il y a l’intention de la recycler dans le logiciel productiviste qui anime l’agriculture conventionnelle depuis 50 ans. »