Paris/Nantes : manif sauvage et destructions

Brèves du désordre

Paris : quand la manif sauvage ravage le 15e arrondissement

Un récit de la manif
Paris-luttes (extrait), 2 juin 2016

… Au niveau du métro Sèvres-Babylone, la manif s’arrête. Le chemin vers le Ministère des Transports (en fait celui-ci s’appelle officiellement Ministère de l’Environnement, de l’énergie et de la Mer, mais bon, osef) est bloqué par la police… On aurait pu prendre des chemins de traverse, d’autres rues, le dispositif policier n’étant pas très impressionnant à cet endroit. Mais le mot a couru qu’un certain François Hollande était au même moment au parc des expositions de la porte de Versailles, où se tenait le congrès des maires de France. Héhé, ça donne envie, quand même !

Donc là, on aurait pu faire demi-tour et faire enfin une longue manif jusque là-bas, mais assez vite l’idée d’y aller en métro à circuler, puis des manifestant-e-s ont pris le mégaphone pour inciter tout le monde à y aller ensemble en métro. C’est ce qu’on a fait, dans la joie et la bonne humeur !

Pour éviter d’être pris-es au piège par les flics à la sortie du métro Porte de Versailles, on a décidé (assez judicieusement) de sortir à la station d’avant, métro Convention.

On était plusieurs centaines, peut-être un millier, je ne sais pas trop. Et là, c’est parti en manif sauvage sur la rue de Vaugirard (la plus longue voie de Paris intra-muros, ça aurait été marrant de la faire en entier cette vieille rue de bourges du Monopoly…), d’abord assez tranquillement (on s’attend), puis heureusement un peu plus énergiquement par la suite. Ça gueule « Grève, blocage, manif sauvage« , « Haaa, anti, anticapitalistes » et autres slogans habituels. Puis on tombe assez vite sur un chantier en libre service : des barres de fer et autres objets de mobilier urbain sont saisis, notamment pour ériger quelques petites barricades sur la route, mais pas seulement ! De premières banques sont attaquées, et jusqu’à la porte de Versailles, pratiquement toutes les cibles capitalistes y passeront ! Panneaux de pub bien sûr, mais aussi agences immobilières, agences d’intérim, magasin de location de voitures, etc. L’ambiance est super offensive mais ça avance assez sereinement en direction de la porte de Versailles. François, on arrive !

Arrivé-e-s face au parc des expositions, on se retrouve sans surprise face à des rangées de CRS. Et aussi au milieu de passant-e-s, et d’autres manifestant-e-s, car un rassemblement de cégétistes s’y tenait déjà.

Pendant quelques minutes, la situation ne bouge pas, on se demande quoi faire et on sent bien qu’on ne réussira pas à passer pour faire un coucou à François d’un peu plus près… Au moins on bloque complètement le tramway, mais bon, on a envie de plus que ça !

Alors on regarde vers le boulevard Lefebvre (ça monte) et on le sent pas trop. On tente de partir vers le boulevard Victor (ça descend) mais un gros paquet de CRS se mettent à courir pour nous empêcher de passer (et plus, si affinités). Ça ressemblerait presque à un début de nasse, et là, l’intelligence collective est immédiate : demi-tour en trottinant, on se redirige vers la rue Vaugirard, hop hop, re-manif sauvage ! On est quelques centaines, toujours le sourire aux lèvres sous les masques. Le Subway voit sa vitrine pétée, hop hop, et au lieu de reprendre le même chemin (pratiquement tout a été attaqué) la manif sauvage prend la rue de la Croix Nivert sur la gauche. En chemin, les banques, qui ne manquent pas dans le quartier, seront quasi systématiquement attaquées (vitrines et DAB). Des barricades de poubelles sont mises en place un peu partout pour ralentir les flics qui s’aventureraient derrière nous. Au croisement avec la rue Desnouettes, des flics sont caillassés et gardés à distance sur la gauche pendant que tout le monde court sur la droite (rue Desnouettes, donc). On court pas mal, mais c’est nécessaire, ça nous permet de continuer avec un ou deux temps d’avance. Sur le chemin, d’autres vitrines sont fracassées, notamment SFR et un magasin Nicolas où plusieurs bouteilles de champagne sont pillées (je bois pas d’alcool, mais ça m’a bien fait marrer quand même, t’inquiète – tant qu’elles ne sont pas bues sur place et qu’on garde tou-te-s notre lucidité émeutière). Certain-e-s trouvent quand même le temps de taguer des banques : « Brisons le capital« , « Brûle les banques« , etc.

Au bout de la rue Desnouettes, on reprend la rue de Vaugirard, et on repart sur la gauche dans je ne sais pas quelle rue (une banque est à nouveau pétée à cet endroit-là, ça n’arrête pas j’vous dis !).

À ce moment-là, on s’aperçoit qu’on est quand même moins nombreux-euses, la dispersion de fait a commencé. Et la flicaille en nombre commence à se rapprocher. Le mot circule pour que la dispersion se fasse bien collectivement, et je ne sais pas combien de temps ça a duré du côté de la rue Blomet mais il me semble que beaucoup se sont dispersé-e-s là, vers la mairie du 15e. J’espère sans arrestation ni heurts.

En tout cas c’était encore bien intense aujourd’hui.
La rage est toujours vive. La loi Travail et son monde, on n’en veut toujours pas.

Grève, blocage, sabotage, manif sauvage : la lutte a besoin de la multiplication des moyens d’action. Que la colère se répande, et nos perspectives révolutionnaires aussi !


Paris : une centaine de casseurs sème la panique dans le XVe arrondissement
Le Parisien | 03 Juin 2016, 01h18

« Une horde sauvage », « une violence incroyable ». De la Porte de Versailles à la Croix-Nivert (XVe), les riverains sont pétrifiés par les événements qui se sont déroulés hier après-midi. Une quinzaine de vitrines brisées, des tags… Il était un peu plus de 16 heures lorsqu’une centaine de casseurs cagoulés, armés de barres de fer, de barrières de chantier et de haches, ont fait irruption rue de Vaugirard et créé un véritable mouvement de panique chez les habitants et les commerçants.

Arrivé à hauteur de la mairie d’arrondissement, le groupe, poursuivi par les CRS, s’est acharné à coups de hache sur plusieurs fenêtres et portes, les endommageant sérieusement. Philippe Goujon, le député-maire (LR) du XVe, a immédiatement annoncé qu’il déposait plainte contre les casseurs. Ces derniers avaient manifestement infiltré une manifestation non autorisée de cheminots anti-loi El Khomri. Elle se déroulait devant le parc des expositions de la porte de Versailles, où se tient le congrès des maires de France qui accueillait la visite de François Hollande.

« Le groupe était déchaîné, et extrêmement mobile, brisant les vitrines les unes après les autres, au péril des commerçants qui se trouvaient à l’intérieur et des passants, détaille un témoin. Ces scènes insoutenables ont duré au moins une heure… » En fin d’après-midi, enfin, 17 personnes ont finalement été interpellées et maintenues à terre sur les marches de l’église Saint-Lambert, avant d’être placées en garde à vue… Mais la plupart d’entre elles, faute d’avoir été surpris en flagrant délit, ont été libérées.

Face à l’ampleur des dégâts, particulièrement porte de Versailles et rue de Vaugirard, Philippe Goujon, ne cache pas sa colère, ni son exaspération. « En matière d’ordre public, tonne-t-il, la préfecture de police est défaillante, alors que c’était autrefois son domaine d’excellence ! A quelques jours de l’Euro, mon inquiétude est à son comble. Quand les pouvoirs publics se décideront-ils à agir, alors que nous sommes en plein état d’urgence ? A chaque manifestation, le même scénario se reproduit. C’est un scandale. »


Rennes. 17 distributeurs de billets toujours hors-service suite aux violences

Le Télégramme, 01 juin 2016 à 19h32

Alors qu’une nouvelle manifestation contre la loi Travail doit se tenir ce jeudi à Rennes, la capitale bretonne panse toujours ses plaies suite aux violences de ces dernières semaines.

Les banques ont payé un lourd tribut avec des vitrines cassées, ainsi que des distributeurs de billets endommagés. À ce jour, 17 d’entre eux sont d’ailleurs toujours hors-service. Le 23 mai dernier, le préfet réunissait mairie, métropole et acteurs économiques pour installer la commission d’indemnisation promise par Bernard Cazeneuve. L’objectif : chiffrer les dégradations commises par les casseurs en marge des manifestations. Si les commerçants ont eu la confirmation que les franchises d’assurance liées aux sinistres seraient prises en charge par l’État, le préfet est resté campé sur ses positions quant à la non prise en compte des pertes d’exploitation dans le préjudice.

Baisse du chiffre d’affaires « à chaque manifestation »

Rappelons que certains commerçants ont eu des baisses de ventes jusqu’à 40% sur certains jours de manifestation. Argument du préfet pour refuser : même à Paris, à la suite de l’attaque du Bataclan, les pertes d’exploitation des commerces n’ont pas été prises en compte. Commerçants, banques et CCI ont rappelé au préfet que s’il était difficile de faire le lien à Paris entre perte d’exploitation et attentat, ce n’était pas le cas à Rennes. « À chaque manifestation, nous avons constaté une baisse du chiffre d’affaires », fait remarquer l’un des participants à cette réunion.


Nantes : la mairie, les flics et une permanence électorale

Loi travail : nouveaux heurts en marge de la manifestation contre à Nantes
Le Parisien, 02 Juin 2016, 14h02

De nouveaux heurts ont eu lieu jeudi entre manifestants et forces de l’ordre en marge de la manifestation contre la loi travail organisée à Nantes dans le cadre d’une nouvelle journée d’action, a constaté l’AFP. Peu après 13H00, plusieurs centaines de jeunes ont décidé de poursuivre leur défilé dans les rues, après la fin de la manifestation syndicale entamée vers 11H00 par 2.500 personnes, selon la préfecture, et 5.000 à 6.000, selon les syndicats, derrière une banderole de l’intersyndicale CGT-FO-FSU-Solidaires-Unef proclamant « Retrait du projet de loi travail », et aux cris de « Ni amendable, ni négociable, retrait, retrait de la loi travail ».

Certains des jeunes manifestants ont jeté des projectiles, dont des pavés et des bouteilles, en direction des forces de l’ordre, qui ont répliqué par de nombreux tirs de gaz lacrymogènes, alors que la manifestation se trouvait en centre-ville. Un passant a fait un malaise et a été évacué par des forces de l’ordre, a constaté l’AFP. Le cortège s’est ensuite scindé en plusieurs groupes.
Après une nouvelle charge des forces de l’ordre, un manifestant a été blessé à l’arcade sourcilière par un projectile et évacué, la tête en sang, par des équipes médicales du cortège, a constaté un photographe de l’AFP. Il souffre d’une plaie au front et a été pris en charge par les pompiers, selon la police, qui a indiqué par ailleurs qu’au moins une personne avait été interpellée.

Plusieurs incidents avaient auparavant déjà émaillé la manifestation.

Arrivés vers 11H30 devant le siège du Medef de Loire-Atlantique, certains manifestants ont lancé fumigènes, pétards et billes de peinture sur la façade.
Peu après, un face-à-face d’un quart d’heure entre plusieurs dizaines de jeunes, cagoulés et le visage dissimulé, et les forces de l’ordre, a eu lieu au niveau d’un pont menant au commissariat central, dont l’accès a été fermé par des barrières anti-émeutes.
Aux cris de « Tout le monde déteste la police« , des manifestants ont tagué l’une de ces barrières d’un « Nike la police » et jeté fumigènes et bouteilles remplies de peinture rose, vers les forces de l’ordre, qui n’ont pas répliqué.
Le cortège est ensuite reparti, en chantant notamment l’Internationale.
Vers 12H30, les forces de l’ordre ont fait usage de grenades lacrymogènes, en réponse à des jets de projectiles lancés par des manifestants, qui venaient de s’en prendre aux vitres de la façade de l’hôtel de ville. Peu avant, la façade de la permanence du député écologiste François de Rugy avait été visée par des jets de peinture.