Trois lignes en espagnol (à propos du sabotage du TGV Madrid-Barcelone-Paris/Lyon)

lu sur brèves du désordre
[Granada del Penedès (Espagne) : sabotage contre la fibre optique du réseau ferroviaire à grande vitesse

Le jeudi 8 octobre et les jours suivants, les médias français se sont bien gardés de parler de ce sabotage qui a interrompu le trafic TGV Espagne-France, des fois que ça donnerait de mauvaises idées, ou l’ont fait passer pour un banal vol de cuivre (à l’exception de ceux du coin qui évoquent le sabotage en se pinçant le nez, voir ci-dessous). Ce ne fut par contre pas le cas de l’autre côté des Pyrénées. La presse espagnole parle ainsi de 13 000 voyageurs de 40 trains à grande vitesse (AVE) touchés sur la principale ligne du pays, Barcelone-Madrid,

Et les détails abondent même sur la question. En voici un extrait officiel, tiré d’un journal de droite (¿Por qué es tan vital la fibra óptica en la alta velocidad ?, La Vanguardia, 09/10/2015 – 06:33h ) :  » Non seulement ce sont les câbles de la voie principale qui ont été coupés (pour les nommer de manière intelligible), mais également ceux de la voie secondaire, ceux qui entrent en fonction lorsque les premiers rencontrent un problème. De plus, les saboteurs connaissaient leur emplacement. Le câble en fibre optique n’est pas visible : les câbles sont insérés dans un petit canal situé au ras du sol et parallèle aux voies. Si on parvient à accéder aux câbles –ce que les auteurs de l’action ont fait en brisant les dalles qui protègent la rigole– il n’est pas très difficile de les endommager. La fibre est très délicate, c’est pour cela qu’elle est recouverte de nombreuses gaines. « Ce qu’ont voit c’est un gros câble de plus de deux centimètres de diamètre, à l’intérieur duquel se trouve la fibre. Elle est même parfois recouverte de métal pour ne pas être abîmée », affirme un ingénieur en télécommunications. « Mais endommager un câble reste simple. Avec un outil minimalement grand, comme celui qu’on peut utiliser pour couper une chaîne, il peut facilement être sectionné », ajoute-t-il. »

L’enquête a été confiée à l’Audiencia Nacional de Madrid (parquet national anti-terroriste), mais des enquêteurs ont aussi précisé aux journaflics pouquoi ils écartaient l’hypothèse des voleurs de cuivre mise en avant sans sourciller dans l’Hexagone :  » Les délinquants ont effectué deux coupes propres dans la fibre optique, et des deux côtés des voies pour impacter tout le trafic. S’ils s’étaient trompés d’un côté et avaient découvert que ce n’était pas du cuivre, ils n’auraient pas effectué une coupe de l’autre côté. De plus, il n’y a eut aucun vol. Enfin, un autre élément écarte pour les enquêteurs l’hypothèse de délinquants communs. Il serait inhabituel que des voleurs de cuivre agissent à 6h30 du matin, quand il commence à faire jour et que les patrouilles de la police des chemins de fer augmentent. Les voleurs de cuivre travaillent toujours de nuit. A cette heure-là, 6h30 [après même le passage du premier train de reconnaissance qui inspecte les voies], il y avait la volonté de paralyser tout le trafic » (Un sabotaje paraliza la red ferroviaria en Catalunya, La Vanguardia, 08/10/2015 – 21:19h).

Mettre en avant des sabotages anonymes ou à l’inverse les passer sous silence est une vieille technique du pouvoir. Les minimiser (c’est le fait de voleurs de cuivre), les calomnier (c’est le fait de fachos), les isoler (c’est le fait de fous, de terroristes) ou les récupérer (au pire) est un autre truc bien connu des gestionnaires de l’ordre. Certes, mais là c’était tout de même un peu grossier pour qui prenait la peine de lire… au moins trois lignes en espagnol ! ]
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La ligne TGV Perpignan Barcelone Madrid paralysée pendant 3 heures

France 3 Languedoc-Roussillon, 08/10/2015 | 15:27

La circulation des trains à grande vitesse entre Madrid, Barcelone et Perpignan est restée paralysée plusieurs heures, jeudi matin, après une coupure de la fibre optique sur le réseau, qui a affecté 10.000 passagers, selon RENFE. La piste d’un sabotage est sérieusement envisagée.

L’interruption s’est produite vers 7H00, sur la partie de la LGV qui traverse la Catalogne, empêchant la circulation des trains à grande vitesse entre Madrid et la seconde ville du pays, Barcelone, mais également la connexion avec le réseau ferré français vers Perpignan, Montpellier, Marseille et Paris. 30 trains à grande vitesse se sont retrouvés bloqués.

Le service a été rétabli à 10H15, trois heures après l’interruption, mais il a fallu attendre encore plusieurs heures pour un retour à la normale de la circulation des trains.

Selon Adif, l’établissement public espagnol chargé de gérer le réseau ferroviaire, l’incident a été provoqué par une coupure des lignes de fibre optique sur les voies qui font fonctionner le système de signalisation. Une porte-parole d’Adif a expliqué qu’il pouvait s’agir d’un sabotage ou d’une tentative ratée de vol de cuivre, sur les câbles de lignes de chemin de fer, très prisé des groupes de voleurs qui le revendent au marché noir.

Du temps de son boom économique, l’Espagne a beaucoup misé sur les lignes de trains à grande vitesse et a maintenu ces investissements en dépit de la sévère crise économique à partir de 2008 et des coupes budgétaires appliquées par le gouvernement.
C’est actuellement le numéro deux dans le monde, dans ce secteur, après la Chine, avec 3.100 kilomètres de lignes à haute vitesse et 3.000 autres kilomètres en projet ou en construction.