ASTRID les années 2015-20 sont décisives, ne laissons plus continuer la construction ! (mise à jour juillet 2015)

Note: Après le déqastre en cours de la centrale Fukushima Daiichi , attentif à ce projet des nucléocrates le laboratoire anarchiste avec sa bibliothéque et aussi avec ces nombreux textes dont certain abordent la gestion etatique du post-accident ,avec les cogestions de certaines officines, de la population peuvent permettre un lieu de discussion de laboratoire de pratiques

En janvier 2006, le Président de la République a fixé l’échéance de 2020 pour la mise en service d’un prototype de réacteur de quatrième générationstrong>Le président s’est appuyé sur la loi Bataille
. Après avoir initialement retenu, pour les besoins français, l’utilisation de réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium ou au gaz, les travaux de l’ensemble des acteurs français se sont recentrés en 2009 sur le concept refroidi au sodium (RNR-Na), seul réacteur à neutrons rapides jugé suffisamment mature en regard de l’échéance indiquée dans la loi de 2006.
En 2010, le CEA a été chargé par l’Etat de la conduite des études de conception d’un réacteur prototype nommé ASTRID pour « Advanced Sodium Technological Reactor for Industrial Demonstration ». Le CEA s’est associé à AREVA et à EDF pour constituer une structure de projet dénommée « Projet ASTRID » . Le projet ASTRID a pourobjectif l’étude et la réalisation d’un « démonstrateur technologique de 600 MWe dont les options sont extrapolables à un réacteur commercial ». Le programme ASTRID comporte également les études de faisabilité et de conception des installations du cycle associé, ainsi que la remise à niveau d’installations d’essais et de qualification. La réussite de ce programme conditionnera le développement éventuel d’une filière industrielle de réacteurs
de puissance, à l’horizon 2040.
la suite copié sur le blog de la coordination anti nucléaire sud est
La construction à Marcoule (vallée du Rhône-Gard) du réacteur Astrid se prépare discrètement, même s’il prend du retard. Pour l’instant le budget pour l’étude préliminaire est assuré jusqu’en 2015, l’Avant Projet Détaillé (APD) est programmé de 2016 à 2019 pour aboutir à une décision de construction, mais pour l’instant sans financement pour cette étude. Gageons que les nucléocrates du CEA saurons imposer la décision de poursuivre dans cette voie si nous n’y prenons pas garde.

Ils ne peuvent en effet renoncer à plus d’un demi-siècle d’efforts et de dépenses considérables pour aboutir au graal, « le nucléaire durable »…
Il s’agit d’un réacteur destiné à relancer la filière plutonium,de la taille de près d’un demi Superphénix, refroidi au sodium métallique liquide, c’est le summum de dangerosité de ce qu’a construit l’humain !
C’est très grave, il ne faut pas laisser faire.
Six semaines après son élection, le président François Hollande aurait signé l’autorisation de poursuivre l’étude préliminaire à la construction du réacteur ASTRID, décision passée pratiquement inaperçue, mais d’importance considérable.
Quel est l’enjeu pour le CEA?
Il s’agit de la relance de la filière plutonium-sodium, suite de Phénix et Superphénix, par la construction d’un réacteur dit de IVème génération ou surgénérateur, ou encore réacteur à neutrons rapides (RNR), avec comme combustible du plutonium associé à l’uranium “appauvri”, et comme fluide caloporteur le sodium liquide qui explose au contact de l’eau et s’enflamme à l’air.
Ce réacteur d’une puissance de 600MW, soit quasiment un demi Superphénix, représenterait l’aboutissement de l’acharnement du CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique) à développer une filière “française”, relativement autonome vis à vis des ressources en uranium, s’appuyant sur les stocks disponibles en plutonium et uranium appauvri, avec la possibilité théorique de régénérer du plutonium.
Il faut bloquer ce projet mais la bataille sera dure. Et c’est actuellement que cela se joue.
L’enjeu pour le CEA est considérable, les nucléocrates du Corps des Mines ne reculeront devant rien pour défendre « leur » filière qui implique la poursuite à la Hague du “retraitement” des combustibles usés pour en extraire le plutonium, et la construction de réacteurs utilisant ce combustible de la plus haute dangerosité. Le CEA avait perdu la bataille contre EDF avec l’abandon de la filière graphite-gaz au profit de la filière Westinghouse à eau pressurisée (réacteurs PWR de la 2ème génération, et EPR de la 3ème, tournant au fiasco). Cela s’était joué en 1969 et avait donné lieu à des grèves de protestation dans les centres et même à une grève de la faim. Depuis, le CEA a obtenu (arbitrage Rocard) d’imposer le combustible au plutonium (MOX) dans une partie des réacteurs à eau (les 900MW), mais surtout son influence reste suffisamment puissante pour imposer à l’État des investissements considérables pour le développement de la 4ème génération (Iter à Cadarache pour la fusion nucléaire, et Astrid).
La stratégie du CEA

Après les difficultés de fonctionnement, les nombreuses pannes de Phénix à Marcoule, et le fiasco de Superphénix à Malville, il n’était plus possible de présenter officiellement cette filière comme celle qui assurerait l’avenir du nucléaire français. Les nucléocrates, s’entêtant, s’appuient sur la Loi de programme n° 2006-739 du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Ils prétendent développer le 3ème volet de la loi “Bataille”, c’est à dire celui de la “transmutation” des déchets radioactifs les plus encombrants à gérer. Ils obtiennent ainsi de l’État 650 millions d’€ dans le cadre de l’Emprunt National de 2010 (Sarkosy-Rocard), pour l’étude d’un avant projet de construction à Marcoule du réacteur Astrid. En effet, officiellement, Astrid est destiné à montrer la capacité à “incinérer”, les actinides dits mineurs, atomes d’extrême radiotoxicité et de très longue vie (millénaires), voisins du plutonium. On voit là la subtilité rassurante du langage, car on n’incinère pas des atomes comme des ordures, ils ne brûlent pas. Par contre on peut les briser sous bombardement neutronique, c’est la “transmutation”, générant de ce fait de nouveaux éléments radioactifs de durée de vie moins longue (siècles), avec inévitablement de nouvelles nuisances.
Où en est le projet?
Tout laisse penser qu’un accord tacite existe pour progresser subrepticement. Le calendrier prévoyait avant fin 2012 un avant projet phase 1, permettant à l’État de décider de la poursuite du projet, ce qui semble bien avoir été fait discrètement: Des terrains sont retenus jouxtant Marcoule (sur la commune de Chusclan); un Institut de Chimie Séparative est créé pour trier les fameux atomes actinides à briser, et annonçant œuvrer à la préparation d’un “nucléaire durable”.
Le pilotage du projet est assuré par Cadarache, il est découpé en lots d’études qui sont confiés à différents partenaires industriels, et une dizaine d’accords ont déjà été signés avec Alsthom, Bouygues, Toshiba, EDF, etc. Le planning prévoyait que fin 2014 l’avant projet soit finalisé et que l’État donnerait son accord. Des retards comme toujours repoussent les échéances, et le financement de la pré étude n’est pour l’instant budgétisé que pour la 2ème phase de l’avant projet sommaire en 2015, ce qui engendre une inquiétude des personnels. L’Avant Projet Détaillé (APD) est programmé de 2015 à 2019 pour aboutir à une décision de construction, mais pour l’instant sans financement pour cette étude.
Mais cela avance
Ainsi le 30 octobre dernier, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a annoncé préparer l’examen des options de sûreté du projet de réacteur Astrid au cours de l’année 2015. Des équipes bénéficiant d’un large financement travaillent donc à Saclay, Lyon, Cadarache et bien sûr Marcoule. Elles nous préparent cet avenir ir-radieux dont on ne veut pas, avec ses dangers décuplés par rapport aux centrales actuelles. Rappelons de plus que Marcoule repose sur une zone de risque sismique encadrée de deux failles actives supportant la poussée de la plaque Afrique, celle de Nîmes et d’Alès-Cévennes.
L’ « arnaque »
Un rapport scientifique du Sénat avait déjà exprimé à la fin des années 90 que cette voie n’était pas crédible. La multiplicité des isotopes créés par les réactions nucléaires, et leurs difficultés à capter des neutrons pour être brisés, rendent très aléatoire cette technique (tout physicien sait que la section efficace de capture d’un neutron par un noyau instable de produit de fission est dérisoire).
La transmutation est, certes, une réalité physique, mais son utilisation à échelle industrielle se heurte à un obstacle économique rédhibitoire. Seule une partie des déchets serait ainsi transmutée à un coût exorbitant, et impliquerait d’accompagner les réacteurs à eau de la construction en France de 7 ou 8 RNR pour briser une toute petite partie des déchets…
Cette « arnaque » destinée aux politiques permet de justifier le projet et un financement public. En effet au delà du prétexte officiel, le but inavoué est de relancer cette filière à laquelle travaille le CEA depuis plus de 50 ans, avant que tous ses acteurs ne partent à la retraite, et ainsi de la sauver. Il s’agit bien d’une duperie, duperie lourde de conséquences.
Mais l’ « arnaque » est dénoncée par l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire).
L’Avis n° 2013-AV-0187 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 4 juillet 2013 sur la transmutation des éléments radioactifs à vie longue, nous en extrayons le texte ci-dessous :
“Ainsi, l’ASN considère que les gains espérés de la transmutation des actinides mineurs en termes de sûreté, de radioprotection et de gestion des déchets n’apparaissent pas déterminants au vu notamment des contraintes induites sur les installations du cycle du combustible, les réacteurs et les transports, qui devraient mettre en oeuvre des matières fortement radioactives à toutes les étapes. Ceci serait tout particulièrement le cas en ce qui concerne la transmutation du curium2.” (…)
“En conséquence, l’ASN considère que les possibilités de séparation et de transmutation des éléments radioactifs à vie longue ne devraient pas constituer un critère déterminant pour le choix des technologies examinées dans le cadre de la quatrième génération.”
Un rapport de la Commission Nationale d’Evaluation
Le récent rapport de la Commission Nationale d’Evaluation de l’application de la loi sur la gestion des déchets radioactifs (rapport d’évaluation N°8, juin 14), permet d’avoir quelques informations, et … quelques soucis sur l’obstination du lobby :
– La Commission s’inquiète : « Si la France renonce à la filière RNR, le plutonium devra être considéré comme un déchet… » , en fait c’est surtout pour inquiéter les décideurs, et préparer le changement d’objectif d’Astrid.
– La Commission soutient toujours la « capacité » pour les RNR de transmuter l’Americium ( « actinide mineur » ) qui pollue dangereusement nos déchets, mais reconnaît que ce n’est pas gagné, depuis que l’Autorité de Sûreté Nucléaire a émis des doutes sur la fiabilité de cette opération. Aussi ce n’est plus cela qui justifierait la construction d’une « flotte » de RNR, il a fallu trouver une parade.
– La Commission a trouvé comment sauver Astrid et la filière, il suffit de faire fonctionner les RNR en sous-génération, pour que leur mission soit de consommer le plutonium, d’en faire diminuer les stocks. De cette façon le projet reste éligible à la loi sur les déchets, au chapitre «Transmutation ».…
La seule solution fiable techniquement et économique : ne plus produire de plutonium
Mais une solution plus simple ne consisterait-elle pas à ne plus produire de plutonium, donc de cesser de retraiter à la Hague ? Les doutes exprimés au Sénat et la réfutation par l’ASN de justifier la construction du réacteur de 4ème génération par la transmutation des déchets les plus difficiles à gérer, enlèvent donc au projet Astrid toute légitimité !
Et que dire de cet immense gâchis financier
La filière plutonium a déjà englouti des dizaines de milliards d’€. Superphénix par exemple a, selon la Cour des Comptes, coûté 12 milliards d’euros jusqu’à 1997, donc avant le début du démantèlement. On dépassera facilement les 15 milliards d’€. Si les énormes crédits consacrés au nucléaire par l’État avaient été utilisés dans l’économie et la maîtrise de l’énergie, l’isolation thermique des logements, le développement des renouvelables, tout cela entraînant la création de nombreux emplois, le pays ne s’en porterait-il pas mieux ? .
Le pouvoir du CEA
Au delà du rôle que peut jouer EDF dans les débats sur la loi de la transition énergétique pour veiller à la sauvegarde du nucléaire, le vrai pouvoir dans ce domaine est assuré par le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique, affublé maintenant « d’Energies renouvelables »). Sous la direction du Corps des Mines, la tradition polytechnicienne de Napoléon à de Gaulle d’asseoir la grandeur de la France sur des réalisations Technologiques perdure. Et nos politiques s’en remettent à ces experts pour voter et décider en ce domaine.
Pour le CEA, le rêve continue

(source les échos « Le sodium, clé de voûte des réacteurs nucléaires du futur » 13/10/14, http://bourse.lesechos.fr/infos-conseils-boursiers/infos-conseils-valeurs/infos/le-sodium-cle-de-voute-des-reacteurs-nucleaires-du-futur-1005516.php).
Le réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium (RNR-Na), développé en France, en Russie et en Chine] est de loin le modèle le plus avancé. Sa principale qualité consiste à pouvoir « brûler » de l’uranium usagé et du plutonium issus de réacteurs refroidis à l’eau, qui s’accumulent depuis des années.
« Nous pourrions produire de l’électricité pendant plusieurs centaines d’années sans nouvelles ressources d’uranium naturel » prétend Christophe Béhar, vice-président du Forum International Génération IV, également directeur au CEA. Il persiste dans l’illusion de la transmutation en prétendant que le RNR-Na peut consommer la majeure partie des déchets radioactifs à vie longue issus de l’uranium, ce qui simplifie la question de leur stockage souterrain.
Le défi pour le CEA consiste à convaincre les parlementaires de l’autoriser à bâtir Astrid, au nom de « l’avance » de la France dans ce domaine. Le coût a été estimé à plus de 5 milliards d’€, mais le coût réel serait bien plus élevé. Une décision est attendue autour de 2019.
Dans le même temps, des partenariats avec l’étranger permettent de justifier le projet et de progresser. Un programme de recherche sur la prochaine génération de centrales, lancé en 2010 par les Etats-Unis, le Forum International Génération IV compte 13 pays membres – dont la Chine, la Russie, la France, le Japon et le Royaume-Uni. Par ailleurs la France soutient les efforts du Japon pour y relancer le nucléaire, client potentiel à nouveau d’Areva en perte de crédibilité.
Pour cela elle soutient les mensonges abominables sur les conséquences sanitaires de la catastrophe de Fukushima !
Pierre Péguin juillet 2015.
__
Annexes
Origine des réacteurs à neutrons rapides. Ils sont conçus sur la base d’un prototype réalisé par les Etats-Unis dans les années 1950. Commençons par Rapsodie. Le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) a pu dès 1957 concevoir un prototype, Rapsodie, à Cadarache, démarré en 1967, et arrêté en 1983. Ce petit réacteur nucléaire est le premier de la filière à neutrons rapides au plutonium et au fluide caloporteur sodium. Les ingénieurs du CEA ont cherché à développer avec Rapsodie une utilisation civile du plutonium. De plus, les réacteurs à neutrons rapides peuvent, sous certaines conditions, être surgénérateurs, c’est à dire produire du plutonium en même temps qu’ils en consomment. C’est donc un eldorado qui paraît s’ouvrir, l’énergie surabondante pour des siècles, un des plus anciens fantasmes de l’humanité, l’équivalent du moteur à eau !
Mais le 31 mars 1994, alors qu’une équipe effectue un travail de nettoyage dans un réservoir de sodium, celui-ci explose causant la mort de l’ingénieur René Allègre et blessant quatre techniciens. Il s’agit d’une réaction chimique violente due à la dangerosité des conditions d’utilisation du sodium. En effet cette filière utilise comme fluide caloporteur le sodium fondu qui présente l’avantage de permettre un fonctionnement à haute température et donc un bon rendement de la transformation de la chaleur du réacteur en électricité. Mais il y a un énorme inconvénient : le sodium explose au contact de l’eau, et brûle au contact de l’air. De plus, en cas de fuite, cela peut provoquer un emballement des réactions nucléaires du cœur, pouvant conduire au scénario catastrophe de fusion.
Quant au plutonium, matière première, c’est la pire substance jamais élaborée par l’industrie, d’une très grande toxicité chimique comme tous les métaux lourds (rappelons-nous les assassinats au polonium). Émetteur alpha en se désagrégeant, il est d’une très grande radiotoxicité en cas d’inhalation de microparticules aériennes, ou par ingestion. Pour disparaître naturellement il lui faut au moins 250000 ans, pendant lesquels les générations futures auront à le gérer….
L’étape suivante a été Phénix à Marcoule : Construit en 1968, et fonctionnant à partir de 1973, arrêté en 2009, il était alors le plus vieux des réacteurs français en fonctionnement. D’une puissance électrique de 250 MW, Phénix a été exploité pendant 36 ans conjointement par le CEA pour recherche de destruction « incinération » – ou transmutation – de déchets radioactifs à vie longue, et par EDF pour la production d’électricité. Son démantèlement est prévu pour une durée de 15 ans, mais dans ce domaine et compte tenu des difficultés rencontrées à Brennilis et Superphénix, c’est évidemment l’incertitude. Le coût en est estimé à près d’un milliard d’euros, assuré par le CEA, c’est à dire par l’État, il ne pèsera pas dans le prix du kwh nucléaire… Démantèlement particulièrement délicat du fait que contrairement aux autres réacteurs il ne baigne pas dans l’eau mais dans du sodium liquide.
En fait ce réacteur a souvent été à l’arrêt, marqué par nombre de difficultés dont des fuites et des « petits » feux de sodium. Entre autre, en 2002, une explosion a lieu dans un réservoir raccordé à une cheminée qui débouche en toiture de bâtiment. Il s’agirait d’une réaction entre le sodium résiduel présent dans ce réservoir et de l’eau qui y aurait pénétré accidentellement suite à des pluies abondantes.
Superphénix, enfin, qui devait devenir le fleuron de l’industrie nucléaire française, et dont l’histoire fut émaillée d’incidents techniques et de manifestations écologistes, sera finalement arrêté en 1997 par le Premier ministre Lionel Jospin après 20 ans de polémique. Construit sur la commune de Creys-Malville près de Morestel dans l’Isère, en une dizaine d’années, son histoire commence par la répression violente de la manifestation de juillet 1977, organisée par les comités Malville, réunissant des dizaines de milliers d’opposants, et qui vit la mort de Vital Michalon et trois mutilations.
Ce gigantesque projet, qui devait être une vitrine, a subi une contestation très forte des écologistes ; contestation également des milieux techniques et scientifiques du fait de son sur dimensionnement : 1200MW d’électricité. Souvent à l’arrêt, opérationnel de 1986 à 1996, il n’a produit de l’électricité que quelques années en raison d’incidents à répétition. et n’aura sans doute produit que tout juste l’énergie dépensée pour sa construction. Le gigantisme pharaonique est illustré par quelques chiffres : 5.500 tonnes de sodium inutilisable parce que contaminé, et qu’il faut, avec des précautions infinies enfermer dans du béton ; 5 tonnes de plutonium sachant qu’avec 5Kg on a une bombe ; mais aussi 20.000 tonnes d’acier, pour l’essentiel contaminé, ainsi que 200.000 m3 de béton.
Les difficultés rencontrées par cette filière sont liées aux conditions extrêmes auxquelles sont soumis les matériaux : corrosion sous tension, fluage et modifications des structures cristallines sous l’effet du rayonnement et de la température. Superphenix a consommé bien plus d’électricité qu’il n’en a produit. A l’arrêt il avait besoin d’une puissance électrique d’environ 150 Mégawatt. Entre le 14 janvier 1986 date de son couplage au réseau et la fin de 1996, il a produit environ 5 térawatts/heures. Pendant ces 11 ans il a été à l’arrêt environ 10 ans. Il a donc consommé 13 térawatts/heures. Depuis il a fallu par chauffage électrique garder à 180°C quelques milliers tonnes de sodium métal pendant 15 ans. Coût de Superphenix selon la cours des comptes : 12 milliards d’euros jusqu’à 1997 donc avant le début du démantèlement. On dépassera facilement les 15 milliards d’€.
Quelques données scientifiques
:
Et des définitions : L’uranium naturel existe sous deux formes principales (on dit « isotopes »), le « U 235 » à 0,7%, forme pouvant se désintégrer naturellement (dite « fissile »), et donc être le « combustible » de la filière nucléaire actuelle, et le « U 238 » qui a la propriété de pouvoir muter en plutonium (« Pu 239 ») s’il capte un neutron émis justement par l’uranium 235.
C’est ainsi qu’a été conçu logiquement au Tricastin l’usine Georges Besse 1, destinée à « enrichir » l’uranium en isotope 235, de façon à disposer d’un combustible plus efficace pour les réacteurs à eau, et de façon aussi à fournir l’armée en uranium très enrichi pour la bombe.
L’uranium résiduel est dit « appauvri » (car il contient moins de 235, et plus de 238), il est tout aussi radiotoxique, et son utilisation en tête d’obus contamine à très long terme les zones de combat en Irak ou ailleurs. Cette usine a consommé énormément d’électricité, celle fournie par 3 réacteurs. Elle s’arrête pour laisser la place à Georges Besse 2, équipée en centrifugeuses (comme en Iran…), moins gourmande. Il a fallu ensuite concevoir le « retraitement », destiné à extraire le plutonium qui s’est formé dans le combustible usé dans les réacteurs. Après avoir été expérimenté à Marcoule, c’est l’usine de la Hague qui assure cette tâche pour fournir le militaire, et le civil.
Pourquoi le nom de « réacteur à neutrons rapides » ?
Dans les réacteurs à eau, celle-ci joue le rôle de modérateur à neutrons, tout en refroidissant le cœur. Dans les RNR tels Phénix, Superphénix ou Astrid, n’y a pas de ralentisseur de neutrons. La puissance et la chaleur dégagées par un tel réacteur peuvent être extraite par un métal liquide. Le sodium a été sélectionné pour ses capacités neutroniques (transparence aux neutrons), ses propriétés thermiques (capacité calorifique, plage de températures d’utilisation) et son faible coût : il est obtenu par électrolyse du sel (NaCl). En outre, à 400°C, sa viscosité est voisine de celle de l’eau, ce qui facilite l’interprétation des essais hydrauliques réalisés sur maquettes en eau. Enfin, il fond à 98°C, et bout à 880°C, ce qui offre une grande plage de fonctionnement. Le sodium liquide assure une meilleure évacuation de la chaleur du cœur des réacteurs que l’eau et son ébullition a lieu à haute température, autour de 900 degrés, permettant ainsi au RNR-Na d’opérer à un niveau proche de la pression atmosphérique et réduisant ainsi le besoin de confinement des réacteurs à eau pressurisée.
Mais le sodium a aussi de graves défauts : il brûle au contact de l’air et explose au contact de l’eau…..
Pourquoi le Mox pose-t-il problème?

La France dispose du plutonium retraité à la Hague dont elle ne sait que faire. Elle se tourne alors vers la fabrication du Mox à partir des années 90, à Cadarache et à Marcoule. Elle l’impose à EDF qui n’est pas enthousiaste, par un arbitrage gouvernemental (Rocard), afin de justifier la poursuite du retraitement des combustibles irradiés à La Hague.
Actuellement, seule au monde, l’usine Melox de Marcoule en produit. Le Mox est constitué d’un mélange d’oxydes de plutonium et d’uranium appauvri contenant 5 à 8% de plutonium. Il est utilisé actuellement dans 21 réacteurs des centrales 900MW, les plus anciennes, pour un tiers de leur combustible, et l’EPR pourrait fonctionner à 100% de Mox (la Finlande a choisi de continuer avec le combustible classique pour le sien). Il n’est donc pas indispensable.
L’avantage pour Areva d’imposer à EDF d’alimenter en Mox les réacteurs est, dans l’immédiat, de faire diminuer le stock de plutonium. l’EPR moxé à 100% serait susceptible de consommer 3 tonnes de plutonium par an, et cela justifie ainsi de poursuivre le retraitement à la Hague. Cela permet d’utiliser aussi les stocks d’uranium appauvri issu de l’usine d’enrichissement de Tricastin.
Mais cette technologie présente d’énormes inconvénients, risques, difficultés et augmentation des coûts. Outre son extrême dangerosité, la qualité du plutonium se dégrade dans le temps, formant d’autres isotopes moins fissiles qui rendent la conduite du réacteur plus délicate.

Les pastilles de Mox sont plusieurs milliers de fois plus radioactives que celles d’uranium, rendant la fabrication, les manipulations et les transports plus dangereux.

A la sortie du réacteur, il émet plus de radioactivité et de chaleur que le combustible classique, et il faudra attendre 60 à 100 ans avant de le conditionner comme déchet ! Enfin, le Mox entre en fusion beaucoup plus rapidement ( ce qui est arrivé au réacteur N°3 de Fukushima, et du plutonium a été dispersé aux alentours !).
L’arrêt de la filière du plutonium est une exigence absolue. Superphenix avait 20% de plutonium. On nous parle de 25 % pour le projet Astrid (les réacteurs REP actuels ont moins de 5% d’uranium fissile). La bombe au plutonium de Nagasaki était de 5 kg de plutonium métallique. Phénix en fonctionnement, c’était 1800 kg d’oxyde de plutonium, Superphenix 5780 kilos (dont 4000 kg d’oxyde de Pu239). Pour Astrid ce serait plus que la moitié de Superphenix (les 25%) probablement de l’ordre de 3500 kilos d’oxyde de plutonium dans un cœur.
Une usine de retraitement en « fonctionnement normal » rejette massivement de la radioactivité dans la mer (le fleuve Rhône pour Marcoule : affaire du plutonium dans les rizières lorsque la digue de Figares a cédé en octobre 1993) et dans l’air. Toute la Manche, contre les cotes françaises, belges et néerlandaise, porte une radioactivité artificielle de La Hague (tritium, iode-129, ruthenium-106, américium 241, carbone-14, antimoine 125…;
Les réacteurs à neutrons thermiques n’étaient envisagés que comme une étape transitoire destinée à constituer un stock initial de plutonium; le développement industriel de l’énergie nucléaire reposerait sur des réacteurs à neutrons rapides produisant eux mêmes leur combustibles par surgénération. »
Le plutonium est transporté à partir de La Hague par 15 kg dans des containers FS47 cylindriques qui contiennent 5 boites métalliques empilées pouvant contenir chacune jusqu’à 3 kg de plutonium sous forme de poudre d’oxyde. Ils sont par dix FS47 sur des camions blindés pouvant contenir jusqu’à 150 kg de pur oxyde de plutonium en poudre en boites scellées.
Les containers FS47 sont conçus pour être manipulés à distance ainsi que le vissage et dévissage de leur couvercle. Il y a eu 89 transports de ce type en 2001 (Coeynaux 2003, p. 22-23) avec des trajets moyens de 1000 km (Hague-Cadarache ou Marcoule). Ces conteneurs doivent supporter une chute de 9 m. Cela est équivalent à une vitesse de 46,8 km/h. Dans les statistiques routières, 5% des accidents dépassent cette vitesse Les transports de MOX vont dans toute la France et en Allemagne (et vers le Japon). Ils sont mis, par deux assemblages, dans des conteneurs (FS69) de 5 mètres de long pesant 5 tonnes avec blindage neutronique. Il peuvent être mis par 4 dans des camions blindés : 8 assemblages = 225 kg de Pu pour du Mox à 6,1% . L’énergie calorifique de chaque assemblage est 600 W (Pavageau et al. 1995, p.12).
« La construction du réacteur Astrid doit s’accompagner… d’un atelier de fabrication (Alfa) d’aiguilles chargées en actinides mineurs adossé à l’installation Atalante à Marcoule. », p. 36 : « Le projet Alfa…la fabrication dans un ensemble d’atelier accolés ou faisant partie d’Atalante à Marcoule, d’aiguilles à irradier, par exemple dans Astrid. ». Intégré dans le combustible, l’américium,, déjà « sur papier », rendrait un RNR encore d’avantage dangereux
Actinides mineurs « qu’es aquo? »
L’uranium existe à l’état naturel car sa période de désintégration est tellement longue, qu’il en reste depuis la création de la terre. Par contre les actinides dont il est question sont des éléments lourds artificiels générés par les réactions nucléaires dans un réacteur, à partir de la captation par l’uranium 238, d’un neutron. Ils n’existent pas à l’état naturel. Le plus important est le plutonium 239 qu’on extrait à la Hague pour l’armement nucléaire d’abord, et dont on cherche à utiliser les excédents dans le nucléaire civil. On l’utilise dans le MOX, combustible mélange d’uranium et de quelques pour cent de plutonium dans les réacteurs à eau, et combustible des réacteurs de la filière plutonium tels que Superphénix, et… Astrid.
Par sa dangerosité le plutonium est une horreur, probablement ce qu’il y a de pire dans ce que l’industrie génère. Les actinides dits « mineurs », car en plus petite quantité, sont des éléments de la fin de la classification périodique des éléments, tels que le curium, l’américium. Ils sont extrêmement radiotoxiques (émetteurs alpha) et à vie très longue. Leur disparition spontanée par désintégration se compte en centaines de milliers d’années. Ils posent d’énormes problèmes non résolus. Ils ne sont donc pas si « mineurs » que ça !
Et c’est pour cela que le CEA cherche à relancer la filière plutonium en la faisant passer comme susceptible de briser, ou transmuter, ou encore « incinérer » (comme si on pouvait brûler des atomes!) ces atomes, en radionucléides plus faciles à gérer. C’est là où est l’ « arnaque » car l’efficacité de cette technologie est limitée par son faible rendement, son coût, son extrême dangerosité, et la formation inévitable de nouveaux déchets nucléaires à gérer!
La transmutation est, certes, une réalité physique, mais son utilisation à échelle industrielle est un leurre, elle se heurte à trop d’obstacles rédhibitoires. Prendre ce prétexte pour justifier la construction d’Astrid relève de la malhonnêteté. Pour cette filière retraitement/RNR, il faut des usines dont on parle peu du type MELOX, qui manient de la poudre ultra-fine d’oxyde de plutonium et d’uranium pour le mettre sous forme de combustible. C’est une autre cause de catastrophe potentielle pas vraiment gérable si le confinement venait à être rompu et une cible intéressante avec quelques moyens dérisoires pour Al Qaîda.
Comment se structure pour l’instant le projet ?
C’est le CEA qui a réussi à imposer à EDF le retraitement coûteux à la Hague, le combustible MOX (combustible comprenant du plutonium) pour alimenter une partie des réacteurs, et qui pilote la recherche de réacteurs dits de 4ème génération. L’essentiel des ressources du CEA est consacré aux réacteurs à neutrons rapides (RNR) refroidis au sodium, considérés par l’établissement comme la filière de référence.
Les équipes de CEA de Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône, tentent d’apprivoiser le sodium, sixième élément le plus abondant sur terre mais seulement en tant que composant d’autres minéraux, comme le sel. Pour prévenir le principal danger – l’entrée en contact du sodium et de l’eau -, de nouvelles turbines alimentées au gaz sont en cours de conception. Et contre les risques de fuites, les nouveaux réacteurs compteront moins de pompes.
Par la loi du 28 juin 2006, le CEA s’est vu confier la maîtrise d’ouvrage du projet. Il en a également reçu le financement de l’avant-projet par le programme d’investissements d’avenir. Le pilotage opérationnel du projet est assuré par la cellule projet ASTRID, rattachée au Département d’Étude des Réacteurs de Cadarache. Le projet est découpé en lots d’études qui sont confiés à différents partenaires industriels, et, en juin 2013, les accords signés étaient avec :
• EDF/SEPTEN
(signé le 22 décembre 2010) assistance à l’équipe CEA de maîtrise d’ouvrage par une présence directe dans celle-ci et par une équipe basée à Lyon pour la partie sûreté et technologie,
AREVA NP (signé le 5 novembre 2010), qui assure l’ingénierie de la chaudière nucléaire, des auxiliaires nucléaires et du contrôle/commande,
ALSTOM POWER SYSTEMS (signé le 26 mai 2011), concepteur et constructeur de systèmes de conversion d’énergie
COMEX Nucléaire (signé le 4 juillet 2011) conception mécanique pour l’étude de différents systèmes, en particulier de robotique pour l’inspection en service du circuit primaire, conception diversifiée de mécanismes de barres ;
TOSHIBA (signé le 13 avril 2012) pour le développement et la qualification de grosses pompes électromagnétiques pour les circuits secondaires de sodium,
BOUYGUES (signé le 27 avril 2012) conception du génie civil de l’ensemble des bâtiments de l’îlot nucléaire (dont le bâtiment réacteur, les bâtiments auxiliaires nucléaires, les bâtiments de manutention du combustible) mais également de la salle des machines, abritant le groupe turbo alternateur ;
EDF (signé le 25 avril 2012) qui étend l’accord signé avec le SEPTEN aux activités de R&D et à l’expertise technique,
JACOBS France (signé le 21juin 2012) sur l’ingénierie des infrastructures et des moyens communs du site ;
ROLLS-ROYCE (signé le 24 septembre 2012) pour des recherches d’innovation sur les échangeurs sodium-gaz et la manutention du combustible ;
ASTRIUM (signé le 19 octobre 2012) méthodologies destinées à augmenter la disponibilité du réacteur, méthodologies issues de l’expérience des lanceurs de la fusée ARIANE et des missiles.
• D’autres accords sont en cours de discussion.
Et à l’étranger ? : notamment le Japon !
Ainsi un accord a été signé avec le Japon (!) pour la remise en route du réacteur de même type de Monju…..
Le Comité franco-japonais de Coopération Nucléaire a tenu sa quatrième réunion le lundi 1er septembre 2014 à Paris, sous la présidence conjointe de Bernard Bigot, administrateur général du CEA, et Takeshi Hikihara, ambassadeur, directeur-général du département Désarmement, Non-Prolifération et Science du ministère des Affaires étrangères japonais.
Mais le Japon a omis de déclarer environ 640 kilogrammes de plutonium dans son rapport annuel à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) en 2012 et 2013, La quantité non déclarée pourrait suffire à fabriquer jusqu’à 80 bombes nucléaires.
Les participants au Comité ont fait le point sur le renforcement de la coopération franco-japonaise, en particulier quant aux réacteurs à neutrons rapides, au démantèlement, à la décontamination et au suivi environnemental lié à l’accident de la centrale de Fukushima Daiichi, et à la coopération industrielle pour la fourniture de réacteurs aux meilleurs niveaux de sûreté dans les pays tiers. Ils ont également abordé leurs politiques nucléaires respectives, et les coopérations dans le domaine de la sûreté nucléaire. Coopération nucléaire et en particulier la coopération autour du surgénérateur ASTRID pour parachever le surgénérateur japonais MONJU
Les deux Parties ont remercié les équipes françaises et japonaises pour la conclusion de l’Accord de collaboration sur les réacteurs de quatrième génération à neutrons rapides refroidi au sodium, qui a été signé le 5 mai 2014. Les deux Parties ont confirmé leur intention de promouvoir la collaboration sur la recherche et la conception d’ASTRID dans le cadre de cet accord.
Le Japon a fait part de ses plans pour redémarrer les réacteurs de Monju et Joyo, et la France a exprimé son intérêt pour utiliser ces installations quand elles seront disponibles. La Russie et la Japon ont fait des essais de réacteurs de type RNR-Na mais ont connu des problèmes (corrosion, des fuites de sodium, accidents, etc.). Le réacteur prototype japonais Monju a pour sa part connu en 1995 un important incendie consécutif à une fuite de sodium. Quand à la Russie elle exploite un réacteur du même type depuis 1980 malgré une série de problèmes.
Premiers pas de Guinevere, réacteur expérimental franco-belge. Ce prototype n’est encore qu’une maquette, d’un coût total de 10 millions d’euros, mais il préfigure Myrrha, un pilote préindustriel à un milliard d’euros, qui pourrait être opérationnel en 2023. Construit à Mol en Belgique dans le cadre d’une coopération avec le CNRS et le CEA.
Et la Suède envisage aussi un réacteur nucléaire expérimental de 4ème génération. Aucun de ces réacteurs ne correspond aux standards de la génération 4 et le défi technologique ne sera toutefois peut-être pas le principal obstacle au développement des réacteurs du futur. Car le ralentissement du nucléaire dans le monde, consécutif à l’accident de Fukushima, a rendu moins sensible le risque de raréfaction des ressources en uranium. Et l’essor du gaz de schiste aux Etats-Unis et des énergies renouvelables en Europe ont douché l’enthousiasme de certains membres du Forum International Génération IV. « Entre les ambitions de départ et le contexte actuel, la recherche sur la génération 4 n’est pas exactement dans les temps ». Et la Suède envisage aussi un réacteur nucléaire expérimental de 4ème génération.