Lyon, Rhône:« Gilets jaunes » manifestation du samedi 11 mai

Compte-rendu de la manifestation Gilets jaunes à Lyon le 11.05.2019

14 h Place Bellecour

Départ 14 h 45 avec les motards en tête suivis d’une foule enthousiaste et joyeusement bordélique à 2000 (comptage fiable). Passage place Antonin-Poncet sans encombre et avec de nombreux jeunes qui ont pris la tête du cortège sans former pour cela un cortège de tête structuré. Remontée de la banderole de tête juste après le pont de la Guillotière alors que le camion sono reste à la traîne. La manifestation longe le quai Jules-Courmont sans incident, avec la police qui bloque toutes les rues adjacentes menant vers l’hyper-centre, sauf le passage Ampère, peu favorable à une percée. Elle ouvre aussi le cortège à l’avant comme dans toutes les manifestations cadenassées, mais avec discrétion : pas de contact serré ni sur les côtés ni devant, mais un train de sénateur qui oblige les motards jaunes à ranger leurs motos sur le côté pour cause de surchauffe à petite vitesse. Flottement juste avant de traverser le pont Morand, car une partie de la manifestation s’arrête un moment, avec des velléités de partir vers la place Louis-Pradel, donc l’hyper-centre, comme si elle pressentait déjà le passage du pont et l’autre rive comme quelque chose d’irréversible entérinant la soumission au trajet officiel. Mais finalement, passage du pont en bon ordre.

Engagement sur le quai Augagneur de 4000 à 5000 avec un énervement progressif de l’avant du cortège (le camion sono, toujours derrière, a été débordé par de nombreux manifestants déterminés) face à la stratégie policière qui fixe le rythme de marche. Premiers incidents véritables à hauteur de la rue Chaponnay et un tir de LBD dans le cœur de la manif avec comme résultat un blessé au front. Pluie de projectiles en réponse avec en riposte des lacrymos et grenades de désencerclement. Malgré tout cela va repartir, avec un petit temps de flottement au pont de la Guillotière, mais avec du monde pour coller au cordon de policiers autant que possible. La police recule sans que cela puisse être considéré comme une défaite de sa part, puisqu’on ne fait qu’accélérer le rythme pour les mettre physiquement en difficulté, car ils le font à reculons et qu’en plus elle recule… dans la direction où elle veut nous emmener, c’est-à-dire vers Gerland.

À la hauteur du chantier de l’université Lyon 3, investi par des manifestants, charge des CRS venue de très loin et qui se solde par de bons matraquages (dont un blessé au nez, qui a été de toutes les manifestations depuis des années…) et la prise de deux banderoles, dont au moins une servait aux manifestants à avancer et à se protéger de la furie policière.

Ça repart avec une attaque de la BAC qui part d’une rue perpendiculaire avant même l’Hôpital Saint-Luc/Saint-Joseph où le gros de la manif stagne, pendant que d’autres manifestants avancent vers l’avenue Berthelot. Des frustrés d’une manifestation sans alternative claire, détruisent les vitres de l’arrêt de tram et on a l’impression que la manif se vide.

La Préfecture informe les organisateurs de la manifestation que celle-ci n’est plus considérée comme déclarée et annonce aussi sur twitter, contre ce qui serait prétendument une fakenews : le préfet n’interdit pas la manifestation des #Giletsjaunes de se tenir, mais a demandé à @PoliceNat69 & à @Gendarmerie_69 de bloquer l’accès aux rues commerçantes de #Lyon pour éviter d’autres dégradations [comme si les rues de ce coin là du 7ème arrondissement étaient des rues « commerçantes »]. La #manifestation pourra toutefois continuer vers Gerland.

Les manifestants restants veulent quand même continuer la manifestation, sûrs de leur bon droit, refusant d’aller s’enterrer à Gerland, mais le piège est là. Devant Berthelot, 2 canons à eau, l’un sur l’avenue, l’autre sur le pont et grosse nasse. Une partie des manifestants, prête à enlever les gilets, rejoint les berges, les uns coté nord des berges, vont finir par se faire attaquer par les bacqueux tandis que dans l’autre sens ils sont poussés direction Gerland sans pouvoir sortir du « tunnel » mis en place. Les plus téméraires rentreront dans le dispositif habituel, étant poussés sans ménagement jusqu’à Gerland. Quelques-uns ayant eu connaissance, par tract, des points de repli intermédiaires en cas de dispersion, échouent à reformer un cortège sur ces lieux.
Pendant ce temps, sur les berges, à la hauteur de l’avenue Berthelot, les CRS se retrouvent débordés par la détermination des manifestants présents et se voient contraints de laisser passer une bonne cinquantaine de Gilets jaunes, sans heurts (tout cela se passant au moment de l’accostage impromptu d’un bateau de croisière juste au niveau du cordon policier, accostage applaudi par les GJ, pour sa précision). Mais les bacqueux, qui rappliquent rapidement, vont ramener tout le monde à la case départ à coups de matraque et de lacrymos.

Belle opération de la part des autorités et se pose la question simple de comment continuer à manifester à Lyon : 4 zones interdites et dispersion violente des manifestations autorisées, sous le premier prétexte venu (un quelconque projectile lancé que la police sait être un fait inévitable pourtant), avant même la moitié de son parcours. Sans initiatives avant le pont Morand la manifestation était condamnée à ne plus jamais revenir sur la Presqu’île.

De plus,  l’organisation, totalement opaque, qui a conduit à fixer ce parcours et à terminer la manif à partir de 18 h pour un barbecue à Gerland, a été d’une part un outil de démobilisation de la manif et d’autre part, du pain béni pour les flics qui avaient une forme de légitimité à orienter les manifestants nassés, vers Gerland : le réconfort était au bout du chemin et de la matraque !

En comparaison, la manifestation des femmes GJ de ce dimanche a pu parcourir tranquillement un hyper-centre et une rue de la République déserts avec juste une ou deux voitures de police pour escorte. La préfecture n’est donc pas contre toutes les manifs et la zone interdite est fonction des jours (le samedi commercial, mais pas le dimanche touristique et culturel) et des manifestants (les fonctionnaires de jeudi oui, les GJ de samedi non).

Les GJ sont-ils les derniers ennemis intérieurs pour l’État ?

Au final plusieurs blessés GJ et, selon la presse, 9 interpellés

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