Le dimanche 27 octobre 2013 à l’aube, un engin artisanal a explosé devant le bâtiment du bureau de recrutement de l’armée de la ville russe de Nijni Novgorod [Nizhny Novgorod, en translittération anglaise du russe], sectionnant le poignet gauche du compagnon Ilya Romanov, qui tentait de mener cette attaque. En sang, il est parti seul à l’hôpital le plus proche, où la police l’a arrêté peu de temps après. Dans un texte distribué pour une initiative solidaire au Centre Social Occupé VOX à Exarchia (Athènes), le 15 novembre 2013, on trouvera plus d’infos sur le parcours d’Ilya .
Russie : actualisation sur le compagnon Ilya Romanov
Le compagnon Ilya Romanov, qui va avoir 47 ans, est encore sous enquête et en préventive dans la prison de FKU SIZO-1. Son avocat dit, que comme en octobre prochain un an aura passé depuis son arrestation, il pourra demander sa remise en liberté jusqu’au jugement et au verdict.
Cependant, il est probable que, dans le meilleur des cas, Ilya ne sera libéré qu’en janvier 2015. En effet, un jury doit se réunir pour prendre une décision quant à la remise en liberté, et cela prend généralement trois mois.
En Russie, les détentions préventives longues sont plutôt communes, et il est fréquent que les prisonnier-es polítiques [sic] fassent un an ou deux prison avant d’être libéré-es lorsque l’accusation ne peut prouver leur culpabilité.
Nous rappelons que le compagnon est accusé d ’une tentative d’attaque explosive. Nous rappelons qu’Ilya a été blessé suite à l’explosion de l’engin explosif qu’il avait dans les mains, aux abords d’une base militaire au petit matin du 27 octobre dernier. Quelques heures plus tard, des images morbides du compagnon blessé ont commencé à circuler sur internet.
Il va bien maintenant, même si il a définitivement perdu ses doigts.
En décembre 2013, le compagnon a été accusé selon les articles 205 et 30 du Code Pénal de la Fédération de Russie : « tentative d’attaque terroriste » (…)*.
Des compagnon-nes estiment qu’il pourrait être condamné à 5 ou 6 ans de prison, et même s’il ne s’agit que d’une hypothèse, cela aide quelque peu à se faire une idée de la suite.
En Russie, la situation des prisonniers est réellement difficile. Dans le cas d’Ilya, il y a besoin d’argent pour payer l’avocat et pour les frais du procès lui-même A titre d’exemple, les démarches que doit faire l’avocat en octobre (demande de remise en liberté), reviennent à 2.000 dollars (€1.450), et il n’y a pour l’instant que 600. Il faut ajouter à cela les frais de sa famille (épouse, fille etc).
Il est possible d’aider le compagnon en versant de l’argent à la Croix Noire Anarchiste (ABC) de Moscou. Précisez toujours (par courrier électronique) comment vous avez fait le transfert [toute une procédure est détaillée en espagnol dans l’article original, et de quel montant : abc-msk@riseup.net
On peut écrire au compagnon :
Ilya Eduardovich Romanov
1967 g.r., FKU SIZO-1
ul. Gagarina, d.26-a
603098 – Nizhnii Novrogod
Russia
(Il ne peut recevoir de lettres qu’en russe. Elles peuvent être envoyées en d’autres langues -anglais de préférence- au courrier électronique de l’ABC Moscou qui lui les traduira).
Suit le texte distribué dans l’initiative réalisée dans le Centre Social Occupé VOX, à Exarchia (Athènes), le 15 novembre 2013 sur le compagnon Ilya Romanov :
Russie : Liberté pour l’anarchiste Ilya Romanov
Le dimanche 27 octobre 2013 à l’aube, un engin artisanal a explosé devant le bâtiment du bureau de recrutement de la ville russe Nizhni Novgorod, sectionnant le poignet gauche du compagnon qui tentait de réaliser cette action. En sang, il est parti seul à l’hôpital le plus proche, ou la police l’arrêté peu de temps après.
Juste après son arrestation, la police est rentée de force chez lui, confisquant divers livres, des appareils électroniques toutes les lettres datant des années qu’il a passé en prison, ainsi que “des résidus de produits chimiques inconnus”. Les blessures du compagnon au visage et à l’œil gauche se sont heureusement avérées légères, mais malgré les tentatives des médecins il a été impossible de sauver ne serait-ce qu’un doigt de sa main qu’ il a finalement fallu amputer entièrement. Des jours après sortant des soins intensifs, il est entré dans un autre service de la même clinique sous surveillance policière jusqu’à aujourd’hui. Pour le moment ne pèse sur lui que la charge “fourniture, trafic et possession illégale d’armes ou d’explosifs” , bien qu’il semble qu’ils veulent lui coller en plus la “fabrication d’engins explosifs”.
Voilà le cas de l’anarchiste âgé de 46 ans, Ilya Romanov, qui pour les journalistes est “une figure tragique qui semble sortie de Dostoievski” et pour les autorités n’est rien de plus qu’un“suspect habituel”, mais pour nous anarchistes, c’est un Compagnon. Notre histoire s’écrit avec la sueur froide de l’action et souvent avec le sang, mais jamais avec la puanteur moisie de l’ajournement continuel. Et, puisque rien ne surgit du rien et que nos vies se développent dans des circonstances spécifiques et reposent sur des choix concrets, nous ne pouvons omettre une brève chronique du parcours du compagnon.
Ilya Romanov a participé à l’espace anarchiste dès la fin des années 80, organisant les premiers cercles et groupes anarchistes (de ces derniers temps) dans sa ville (qui s’appelait alors Gori). Il était aussi actif dans le mouvement squat. En 1998, il est devenu membre de la Confédération Anarcosyndicaliste, donnant des conférences sur l’anarchisme et sortant une revue, en plus de participer activement aux mouvements de protestation contre les centrales nucléaires. Entre 1991 et 1992, il a pris part à la campagne de solidarité avec deux anarchistes emprisonnés pour avoir attaqué des policiers des services secrets, puis à d’autres initiatives solidaires pour les prisonnier-es politiques. En même temps il se dédiait à la diffusion des idées anarchistes à Moscou et a aussi été représentant du syndicat de base de jeunes chômeurs. En décembre 1998, il a été arrêté, accusé de “possession de drogues” et selon les méthodes connues qu’employait la pas si vieille ère soviétique contre ses adversaires politiques il a été envoyé dans une clinique psychiatrique qui l’a diagnostiqué “fou” puis en prison ou il est resté deux ans et demi.
En juillet 2002, de nouveau été arrêté à Moscou pour être envoyé à Penza (Russie centrale), il est cette fois accusé de “possession et transport d’explosifs”, faits qui, selon les flics, auraient eu lieu en 1997. Il faut aussi dire que la compagne de Ilya, Larisa, avec qui il a deux filles, a aussi été emprisonnée avec d’autres personnes début 2000 et qu’elle a passé cinq ans et demi en taule, accusée de faire partie de Nouvelle Alternative Révolutionnaire, une organisation gauchiste libertaire qui a réalisé plusieurs attaques explosives entre 1996 et 1999, dont principalement l’attaque à la bombe contre le mur des bureaux centraux du FSB (Service Fédéral de Sécurité de la Fédération Russe, ancien KGB). Ilya Romanov n’a alors reconnu aucune des charges dont il était accusé et a refusé de déposer, il s’est coupé les veines et la police locale l’a laissé en liberté. Une fois de retour à Moscou, il a de nouveau été sous le coup d’un mandat d’arrêt, mais cette fois en vain puisqu’Ilya a réussi à partir pour l’Ukraine.
Le 7 décembre 2002, dans une petite ville du sud de l’Ukraine, il est arrêté en possession d’un pistolet, de quelques balles, d’une cartouche de dynamite avec détonateur électrique. S’en suit une série de tortures et de tabassages dans le commissariat de police local et en prison. Au début, il était accusé d’une explosion ayant eu lieu au siège des services secrets de Kiev deux mois auparavant. Cette action avait été revendiquée par l’Armée Populaire de Vengeurs, une organisation de gauche qui décida de cette manière de « commencer une lutte de guérilla contre le système capitaliste régnant en Ukraine”. 10 autres personnes furent arrêtées en même temps, parmi lesquelles la plupart avaient appartenu aux jeunesses du Parti Communiste ukrainien. Les 11 étaient accusés non seulement de l’explosion, mais aussi d’une série de braquages à main armée de bijouteries et de possession d’un grand nombre d’armes. Ils ont tou-tes eu à subir des tortures méthodiques et l’un d’entre eux mort lors d’un interrogatoire. Romanov a déclaré qu’il ne connaissait pas la moitié de ses co-inculpé-es, mais il a refusé catégoriquement de coopérer avec les Autorités.Participant avec les autres à des grèves de la faim, il est aussi entré en conflit avec les matons ce qui lui a valu de se retrouver fréquemment à l’isolement. Quand en juillet 2004 le procès a finalement commencé, il s’est tailladé les veines au milieu de la salle d’audience, non pas pour se suicider, mais en geste de protestation. Il a en outre révélé que toutes les déclarations inscrites dans les interrogatoires étaient fausses, puisqu’elles avaient été obtenues sous la torture et par l’usage forcé de substances psychotropes. Romanov a été condamné à 10 ans de prison, emplis de batailles au cours desquelles il a toujours conservé son attitude intègre, il a ainsi purgé sa peine jusqu’au dernier jour. Il a été libéré le 7 décembre 2012 et est retourné dans son village, ou il travaillait comme ouvrier d’une usine de pâtisseries.
Nous nous solidarisons avec le compagnon Ilya, qui a donné vie à la projectualité de la lutte polymorphe en participant à divers activités politiques. Des syndicats de base et de la publication de matériel, jusqu’aux assemblées en solidarité avec les prisonnier-es politiques en passant par les attaques incendiaires et explosives. Utilisant tous ces moyens pour un objectif : la REVOLUTION.
“Si dans l’histoire de l’humanité, les gens avaient gardé le silence, nous continuerions à vivre dans un système féodal, à travailler pour les propriétaires terriens et même à leur faire des révérences. C’est beau qu’il y ait des personnes qui ne veulent pas vivre en se taisant”
(d’écrits anciens du compagnon)
Celles et ceux qui veulent soutenir financièrement le compagnon peuvent le faire à travers de pay pal au e-mail suivant : abc-msk[arroba]riseup.net, il y a aussi une caisse de soutien financier pour le même cas au CSO VOX (Arachovis / Themistokleous, place de Exarchia, Athènes).
Initiative de compagnons, CSO Vox