Errico Malatesta .Umanità nova – 21 juin 1922 «Anarchistes, socialistes et communistes»

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MOSCOU ET MILAN…

Le procès des «socialistes révolutionnaires»se poursuit à Moscou, et on a une nouvelle preuve de ce qu’est la justice d’État, que le pouvoir soit aux mains de Robespierre, de Thiers, de Lénine ou de… Mussolini.

A l’ouverture du procès, le président du tribunal a déclaré que«le gouvernement des soviets rejetait la fiction d’une justice qui prétend se placer au-dessus des classes»

et comme si cela ne suffisait pas à révéler l’état d’esprit et les intentions des dirigeants bolchéviques, il a ajouté: «la seule impartialité que reconnaîtra le tribunal est celle qui s’impose dans l’intérêt du pouvoir soviétique dont il est l’organe».

Les accusés ayant protesté contre la composition du tribunal car la plupart des juges sont de ceux qui ont le plus férocement persécuté les socialistes antibolchéviques, le président ajoute:«La demande des accusés est sans objet et doit être rejetée, car personne ne nie que le tribunal doit être considéré comme un instrument politique du gouvernement des soviets».

Voilà un président qui ne pourra au moins pas être accusé d’hypocrisie!Toute l’ambiance dans laquelle se déroule le procès correspond aux intentions clairement exprimées ainsi par le président.Sentant le besoin de ne pas trop heurter les sentiments des socialistes européens, le gouvernement russe avait autorisé la présence de défenseurs étrangers pour assister les accusés. Mais quand les avocats Vandervelde, Rosenfeld et Théodore Liebknecht arrivèrent à Moscou, ils se trouvèrent en butte aux insultes et aux menaces, et c’est de justesse qu’ils furent soustrait au lynchage des communistes. Ils furent ensuite relégués dans une maison gardée par la police et mis dans l’impossibilité de communiquer avec les détenus et avec les défenseurs locaux. Il semble qu’on leur ait même refusé de voir les actes de l’instruction.La presse russe excite l’opinion publique contre les avocats en les présentant comme des ennemis de la Russie et on chante dans les rues des chansons injurieuses à leur égard.

Les noyaux communistes des organisations ouvrières font voter des motions demandant la peine de mort contre les accusés.On pousse au lynchage.On sait que nous n’avons guère de sympathie pour ceux de ces accusés qui sont pour une part des hommes de gouvernement et qui, s’ils réussissent à aller au pouvoir, seraient peut-être moins violents et moins sanguinaires que les bolchéviks mais tout aussi liberticides. Et nous avons encore moins de sympathie pour l’avocat Vandervelde qui a été ministre du Roi de Belgique et qui ne peut continuer à se dire socialiste que parce que le socialisme est devenu une tromperie pour cacher aux yeux de la masse ouvrière toutes les capitulations et toutes les trahisons.Mais nous n’en sommes pas pour autant moins indignés – indignés mais pas étonnés – par cette façon de fouler aux pieds, dans la Russie révolutionnaire», tout sens de la justice, par cet assassinat judiciaire éhonté, par cette infâme comédie par laquelle le gouvernement russe couronne dans le déshonneur la terrible tragédie née de la rivalité des fractions, peut-être sincèrement révolutionnaires, qui se disputent le pouvoir et qui, par soif du pouvoir, s’entre-tuent et tuent la révolution.

Et nous souhaitons que, là encore, l’exemple russe serve de leçon et d’avertissement pour les futures révolutions.

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