Archives de catégorie : General

Grèce : Attaque incendiaire contre le magasin d’un membre d’Aube Doré

post imageLe magasin de Tryfon Bougas, à Kallithéa, dans la banlieue d’Athène s’est embrasé début mai, suite à une attaque au molotov.

Tryfon Bougas, qui se présente comme un « collectionneur d’œuvres d’art » est en fait un fasciste bien connu. Ancien homme d’affaires du monde de la nuit, il fut aussi propriétaire d’une société de sécurité, et propose des services de « protection » aux « retraités sans défense » qui craignent d’aller retirer leur retraite.

Son magasin à Kallithea déclaré en tant que plateforme d’achat de voitures d’occasion et de pièces détachées reprend aussi aussi montres, bijoux, livres, or et Rolex.

Résultat de recherche d'images pour "Τρύφων Μπουγάς"Membre actif d’Aube Dorée (à droite sur la photo, avec Michaloliakos, le leader du groupe). Il a été élu conseiller municipal à Palaio Faliro (près d’Athènes) pour la première fois en 1994 et a également exercé les fonctions d’adjoint au maire. En 2015, il est élu conseiller municipal.

En 2019, il se présente comme candidat à la mairie de Kallithea, avec le soutien d’Aube Dorée.

résumé depuis athens.indymedia.org/post/1597572/

La Haye, Pays-Bas : Action de solidarité avec les anarchistes poursuivis par l’Etat belge – 18 avril 2019

Le jeudi 18 avril 2019 à La Haye (Pays-Bas), des anarchistes ont tenu à montrer leur solidarité dans les rues avec les compagnon.ne.s poursuivi.e.s par l’Etat belge, qui passaient en procès fin avril. Tou.te.s étaient accusé.e.s d’avoir pris part à des luttes directes contre les frontières et leurs prisons, et plus largement contre ce monde d’autorité et d’exploitation.

Lors de cette action, quatre banderoles ont été suspendues à divers endroits de la ville et des tracts ont été jetés dans les airs, dont voici un aperçu:

[Publié sur Act for Freedom Now, 04.05.2019]

Re-ven-di-ca-ti-ons

Garcia Calvo

« Que voulez-vous, mes enfants ? Des emplois ? L’autonomie régionale ? Une augmentation de salaire ? Le vote à quinze ans ? La retraite à quarante-cinq ? L’égalité des sexes ? Continuez à demander dans l’ordre et toutes vos réclamations seront bien traitées en bonne et due forme ».
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Toute faveur que le Seigneur accorde le consolide, puisqu’il est le Seigneur. Mais le fait est que les sujets obtiennent également ce qu’ils veulent. Ce qu’ils veulent? Oui, et chemin faisant, ils apprennent à vouloir ce qui leur est demandé.
Est-ce que je demande la permission au Seigneur de tomber amoureux de ma tante?
Mon vieux, quelles idées tu as! Cela ne se demande pas au Seigneur.
Pouquoi? C’est un peu tôt : le ministère des relations érotiques n’a pas encore été créé. Mais est-ce qu’on va le créer? Sans aucun doute, et tu pourras alors revendiquer le droit de tomber amoureux de qui tu voudras. Pour le moment, sois patient; et dis-moi, entre temps, pourquoi ne revendiques-tu pas le droit d’importer librement des automobiles australiennes? Ce n’est pas une honte de vouloir une voiture australienne (puisque c’est ton droit d’en avoir envie. N’est-on pas maître de sa propre volonté? Pourquoi alors veut-on gagner de l’argent, si on ne peux pas le dépenser pour ce que l’on veux?). N’est-il pas insupportable que le ministère des Finances et le ministère des Affaires étrangères te mettent tellement de bâtons dans roues [de façon à ce] que tu ne puisse pas en faire qu’à ta tête? Allons! Unissons-nous – Tous les partisans de la libre importation de voitures – et revendiquons. Pétition! Grèves! Manifestations sur la voie publique! Présentation d’amendements de la part de nos représentants Parlementaires! Revendiquons!
Bien, mais il faut reconnaître que le cas des emplois, des autonomies, des votes, des salaires et des retraites, ou de l’égalité des droits entre les sexes* est plus important et sérieux que les voitures australiennes.
Tu veux dire que ces revendications sont plus proches des désirs des gens que le sont les voitures australiennes ou bien la relation amoureuse avec ma tante? Il faudra y réfléchir.
Quelle est le rapport entre la création d’emplois et le désir de ne pas travailler? Quelle est le rapport entre l’avancement de [l’âge de] la retraite, la semaine de quatre jours, les trente-trois jours de vacances par an et le désir de ne pas avoir d’horaires ni le samedi ni le lundi et de pouvoir passer une nuit blanche quand la lune nous chante ou d’aller cueillir des mûres quand tes amis et les mûres te le demandent? Quelle rapport y a-t-il entre les autonomies régionales (ou, pardon, nationales ou de quelque manière que l’on veut appeler) et le désir des personnes de ne pas devoir obéir aux décisions qui viennent d’en haut ou de ne pas tolérer des taxes dont ils ne connaissent pas la destination? et les organisations dont ils ne comprennent pas l’utilité? En quoi les autonomies, accordées ou à accorder, s’approchent-elles du désir des individus de parvenir à se mettre d’accord entre ceux du village et ceux de la ville et de ses environs dans toutes les circonstances courantes? Quelle est le rapport entre le vote d’un adolescent et le désir de ne jamais devenir adulte? Entre le droit des femmes d’occuper des postes d’hommes et le désir que cesse la domination des hommes? Entre le droit d’une femme d’avoir les enfants qu’elle veut, avec qui et quand elle le veut, et le désir urgent que ne naissent pas d’autres futurs acheteurs de voiture chaque année?
Enfin, il se peut que ceci n’ait rien à voir avec cela; mais il faut être réaliste, mon ami, et il est certain que ces revendications sont un pas en avant, vers des objectifs plus avancés à savoir que ces derniers désirs dont tu parles si naïvement : les autonomies, ainsi que le nationalisme des entreprises, vont vers l’aboutissement d’une véritable libération du Capital et de l’Etat. Le vote des adolescents est un moyen d’imposer des lois de moins en moins dictées par les critères des adultes, des lois plus jeunes; l’augmentation des salaires sert les ouvriers et les employés, au moins jusqu’à ce que les prix augmentent et jusqu’à ce qu’une nouvelle revendication soit formulée, pour que ceux-ci se sentent plus maîtres d’eux-mêmes et se trouvent dans de meilleures conditions pour imposer leurs propres intérêts de classe aux instances qui les exploitent; la semaine de quatre jours ou la journée de six heures représentent un pas en avant vers la libération progressive du travail forcé et pour profiter de son temps libre; l’égalité des femmes dans la société et au travail est un pas … bah, pour ce qu’elles voudront.
Oui … Si, aujourd’hui encore, nous continuons à croire que les choses fonctionnent de cette manière, si l’on ne perçoit pas la qualité du résultat positif des revendications, si nous ne comprenons pas un peu comment fonctionne de la machine, et que les revendications qui triomphent se révèlent toujours une supercherie, ainsi qu’un renouvellement et un renforcement des pouvoirs, alors cela signifie que l’on a étudié le réalisme à l’École polytechnique du Rêve-en-couleurs.
Oh, revendications! Les mots ont leur destin. Ce vocabulaire juridique bien connu est déjà de mauvaise augure, du mauvais latin d’avvocatucolo [avocat de seconde zone, dnt] : rei vindicatio : réclamation de quelque chose que l’on considère comme sa propriété; c’est la dessus, je suppose, que l’arnaque a été fondée. Il semble qu’initialement, l’opération consistait en ceci : celui qui réclamait le droit à une chose en même temps que l’autre qui le contreréclamait – un bout de terrain, par exemple – se présentaient devant le magistrat ou le juge et mettaient la main sur la chose en question – une parcelle de terre [qu’ils se] disputaient, par exemple – de telle sorte que, sachant ainsi que les deux prétendaient avoir le droit sur la chose, le magistrat décidait et accordait à l’un ou à l’autre la chose revendiquée. On voit que, avec le temps, dans ce triangle formé par les deux rivaux et le représentant de la loi, avec la pauvre chose au milieu, les relations entre les termes ont changé de manière significative. En effet, si, dans ce schéma initial, les mains de qui revendiquait se dirigaient toujours d’une partie et d’une autre vers la chose, et si l’autorité semblait rester en dehors et au-dessus du conflit – en tant que témoin impartial et surtout entre les mains du juge pour disposer la chose au bon endroit (à côté de l’un ou bien à côté de l’autre ou enfin, comme Salomon au milieu de la chose), aujourd’hui, à force de revendications entre autre le scénario a progressé à tel point que les mains, toutes les deux, se dirigent vers le haut, vers le sommet sur lequel se tient le magistrat, tandis que d’en bas on lui demande la concession ou la distribution gratuite de la chose revendiquée; qui, par conséquent – et cela est évident – est devenue principalement la propriété du magistrat, qui peut ainsi, en cédant aux demandes et aux pressions, le restituer à ceux dont il retient les prétentions justes.
Que ce processus ait constitué et constitue toujours un moyen de conserver et de renforcer le Pouvoir, il n’est pas nécessaire d’insister là-dessus. Mais en même temps, ce processus ne peut être achevé sans une transformation concomitante de ce dernier. Dans le schéma initial, cela pouvait aussi être un peu de terre, voir même une esclave, une chose, en bref, dont l’utilité et la valeur d’usage étaient évidentes pour ceux qui le réclamaient. Mais quand les choses sont devenues des concessions du Seigneur, elles sont devenues quelque chose d’autre, des droits dans l’abstrait, des chiffres en temps et en argent, des dispositions pour l’amélioration future des conditions de travail ou de la situation juridique du plaignant et, à la limite du progrès bureaucratique de l’État et de l’entreprise, un changement dans la rédaction d’un article d’un réglement, la création d’un nouveau bureau pour l’administration des revendications [qui ont été] satisfaites, l’apparition de certains sigles du type « Smug 3-m-25 », dont même les demandeurs ne comprennent pas la portée, et leurs représentants officiels ou techniques en la matière sont là pour faire croire que eux, oui, ils peuvent comprendre.
Et une autre transformation accompagne celle de qui revendique. Dans la mesure où ceux-ci s’habituent à moduler leurs cris en fonction des sigles et des chiffres que l’ordre leur impose, ils réclament dans le langage de l’ordre, afin que l’ordre puisse comprendre leurs demandes et agir en conséquence; en même temps, ils ne peuvent s’empêcher de peu à peu se convaincre seuls que ce qu’ils désiraient, c’était exactement cela – des voitures à la portée de tous, trente-trois jours de vacances par an, la retraite à quarante-cinq ans, la télévision couleur, l’approvation d’un salaire minimum, une niche propre dans un bloc d’appartements protégés, l’égalité des droits, une Constitution démocratique, des syndicats horizontaux et deux cents kilomètres d’autoroutes -; de sorte que, finalement, leurs volontés coïncident avec les projets de développement de l’État et de l’entreprise. Et ces braves personnes, dont on suppose que provient ce désir pour ces choses et celui de pouvoir en jouir, constituent seulement un petit moteur domestique qui, tout en continuant à produire du travail, produit les pétitions dont le pouvoir et l’argent ont besoin pour changer et continuer de se perpétuer.
Mais, oh! mon cœur, arrête de raisonner et limite-toi à proposer à tes compagnons d’infortune le cri suivant: « Citoyens, ne revendiquez pas! » Ne revendiquons plus. Laissons-les se débrouiller seuls pour s’organiser et nous organiser (dans la mesure où nous les laissons faire) et progresser vers la fin qui remplit toutes leurs fonctions, vers la mort. Sans doute qu’ils continueront à faire beaucoup de mal aux gens, mais toujours moins que nous ferions nous, ceux d’en bas, si nous collaborions davantage avec eux dans le cadre de nos revendications.
Bien sûr! et, en attendant, chacun tient compte des droits qui lui semblent bons et, pour ne pas revendiquer et réclamer au Seigneur ce qu’est la justice, que chacun mette directement  la main à la pâte. Mais, mon vieux, où veux-tu aller? Vers l’anarchie? Le chaos?
Ne t’étouffe pas,compagnon. Un autre jour, je te parlerais du chaos.
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[Il diavolo in corpo , n. 1 décembre 1999]
Traduit de l’Italien depuis : https://finimondo.org/node/730
* genres

Vienne, Autriche : Deux DAB incendiés en solidarité avec Lisa– 28 et 29 avril 2019

Lors du week end des 28 et 29 avril, deux distributeurs de billets de banque ont été incendiés en signe de solidarité avec la compagnonne Lisa qui est actuellement incarcérée à Barcelone.

Elle est accusée d’avoir dévalisé une banque en Allemagne. Nous n’avons aucune envie de vivre dans un monde capitaliste où la consommation et la propriété sont au centre de l’existence. Une action pour nous inciter à ne jamais arrêter d’attaquer ces relations sociales , partout.

Contre la domination du capitalisme et de l’Etat, contre la taule et toute forme d’enfermement et d’oppression. Pour l’affinité et la liberté !

 

[Traduit d’Indymedia Deutschland, 04.05.2019]

 

Russie: compte rendu du procès contre les anarchistes (19/04/2019)

Le 19 avril, l’anarchiste Evgueni Karakašev d’Eupatoria a été condamné par le tribunal militaire de première instance de Ciscaucasia à Rostov-sur-le-Don pour avoir incité au terrorisme par le biais du réseau social russe « Vkontakte ».

Le tribunal l’a condamné à 6 ans de prison. Il est également interdit d’exploiter des sites Web depuis 2 ans. Yevgeny Karakasev a réagi calmement au verdict. Le procureur russe a demandé à Karakašev neuf ans de prison. Son avocat interjettera appel de la décision du tribunal militaire.

Il s’agit du seul épisode d’une série d’épisodes au cours desquels le FSB [Service de sécurité fédéral, ntd] a systématiquement recours à la torture pour obliger les personnes arrêtées à signer de faux aveux afin de fabriquer des « complots terroristes » impliquant des militants.

Le 1er février 2019, des agents du FSB, l’appareil de sécurité de l’État russe, issu du KGB, ont arrêté une douzaine de personnes à travers le pays lors de la dernière campagne de répression contre les anarchistes accusés. Après les avoir brutalement torturés au cours des prochaines 24 heures, pour les forcer à accepter les déclarations incriminantes, ils en ont libéré 11. Le 12e arrêté, Azat Miftakhov, avait temporairement disparu au sein du système judiciaire, tandis que le FSB continuait de le torturer et d’empêcher accès à son avocat.

[NdT: pour plus d’informations et / ou pour toute assistance, écrivez à Croce Nera Anarchica Mosca abc-msk@riseup.net]

avtonom.org

https://anarhija

Italie : De nouvelles attaques contre la Lega

À Gênes, le 27 avril, la permanence de la Lega rue Macaggi, a été attaquée dans la matinée. La porte d’entrée ainsi que la façade de l’édifice au premier étage ont été repeintes. La plaque funéraire d’Ugo Venturini*, a également été endommagée après une manifestation organisée le 4, pour l’anniversaire de sa mort, le pare-brise arrière de la voiture d’un des manifestants (côté facho) a également volé en éclat.

Le 25 Avril, à Rome dans le quartier de  Prati, le local de la Lega rue Alessandro Farnese, a été attaqué à coup de Molotov (qui n’a pas explosé à cause de la pluie).

À Averse et Casoria (en Campanie, dans le sud de l’Italie), les permanences éléctorales, de la Lega ont également été détériorées, les jours suivants le 25 Avril (1).

À Modène, (Émilie-Romagne, dans le Nord de l’Italie), les flics qui protégent les lieux pour la venue de Salvini, ont été accueillis à coup de jet de pierres.

* Membre du MSI (Movimento sociale italiano : parti politique néofasciste italien, né en 1946 suite à l’interdiction du Parti national fasciste) mort le 1er mai, après avoir reçu une bouteille sur la tête lors des affrontements dans la ville, pendant un rassemblement du MSI

(1) Fête de la « LIbération » en Italie, qui correspond à la commémoration de la fin de la Seconde Guerre mondiale, et de la fin de l’occupation nazie.

Reformulé depuis la presse

information reprise  dans cracher dans la soupe

Paris : Agression au sein de la librairie Publico


Note d’Attaque : au delà des critiques qu’on peut porter à la Fédération Anarchiste (et il y en a un paquet), on veut souhaiter ici un prompt et complet rétablissement au camarade blessé à Publico.

www.federation-anarchiste.org / vendredi 3 mai 2019

Un compagnon anarchiste a été violemment attaqué à coups de couteau dans la librairie Publico hier après-midi. A priori, rien ne montre qu’il s’agisse de le viser spécifiquement mais plutôt l’organisation dans laquelle il milite : la Fédération Anarchiste.

Nous ne nous laisserons pas impunément menacer, intimider ou violenter.
Nous continuerons à lutter et à porter, même en ces temps d’obscurantisme, haut et clair, nos messages politiques, qui sans doute dérangent en ces temps de lutte. Nous continuons le combat contre cette société qu’on nous impose.

Solidarité avec notre compagnon, Solidarité avec Publico,

Vive l’anarchie

Posted on by Attaque

Brochure: Gilets jaunes : une résistance à la révolution du capital

Quels rapports ?


Dès l’ins­tant où l’on s’accorde pour reconnaî­tre un rap­port entre le mou­ve­ment des Gilets jaunes et les pro­ces­sus contem­po­rains de tota­li­sa­tion et de glo­ba­li­sa­tion du capi­tal — pro­ces­sus que nous avons nommé « la révo­lu­tion du capi­tal » — il importe de carac­té­ri­ser ce rap­port et de le faire autre­ment qu’en termes de simple rap­port immé­diat cause/ consé­quence. Des flots de dis­cours et d’écrits ont été pro­duits qui relè­vent de cette déter­mi­na­tion cau­sale : les Gilets jaunes sont en révolte contre les dégâts de tous ordres que la « mon­dia­li­sa­tion » exerce sur eux ; les Gilets jaunes sont les vic­ti­mes de « La Finance », des firmes mul­ti­na­tio­na­les et de l’État ran­çon­neur.


Cette affir­ma­tion n’est pas fausse, mais elle est som­maire au point de friser la tau­to­lo­gie puisqu’on pour­rait en dire autant de n’importe quelle mani­fes­ta­tion sociale ou de n’importe quelle reven­di­ca­tion caté­go­rielle. De plus elle ne rend abso­lu­ment pas compte du carac­tère inat­tendu et imprévu du sou­lè­ve­ment des Gilets jaunes ; de ce qui en fait un évènement his­to­ri­que sin­gu­lier.


Il nous semble donc plus appro­prié d’avan­cer que les Gilets jaunes ont opéré comme un révé­la­teur, un ana­ly­seur de la révo­lu­tion du capi­tal. C’est d’un effet de dévoi­le­ment, d’élucidation, de révé­la­tion et d’inter­ven­tion dont il nous semble plus juste de parler à propos du moment-Gilets-jaunes en France et dans le monde.

Quelques effets Gilets jaunes sur la révolution du capital


Inversons le rai­son­ne­ment. Plutôt que d’ana­ly­ser l’évènement Gilets jaunes comme une simple consé­quence de la révo­lu­tion du capi­tal, énonçons quel­ques effets-Gilets-jaunes sur celle-ci.

Retenons-en quelques-uns :


– Ce que les acti­vis­tes gau­chis­tes, et d’autres, ont nommé — pour le déni­grer — « l’inter­clas­sisme » du mou­ve­ment des Gilets jaunes est un effet de l’effa­ce­ment des fron­tiè­res et des « lignes » de classe pro­duit par le pro­ces­sus de moyen­ni­sa­tion enclen­ché dès la fin des années 1960. Une moyen­ni­sa­tion qui s’est d’abord effec­tuée par le haut suite au der­nier assaut pro­lé­ta­rien. Les dif­fé­ren­tes crises depuis lors, ont enrayé ce pro­ces­sus dans une confi­gu­ra­tion où cette moyen­ni­sa­tion semble per­du­rer en s’effec­tuant par le bas, avec une pau­pé­ri­sa­tion de cer­tai­nes frac­tions de la popu­la­tion, mais sans pro­lé­ta­ri­sa­tion. C’est comme si se repo­sait la ques­tion de la « com­po­si­tion de classe » au sens des opé­raïs­tes ita­liens, mais sans le para­digme de la classe qui ser­vait de point de repère théo­ri­que. C’est ce qui expli­que la dif­fi­culté à cerner la com­po­si­tion sociale très diverse et mul­ti­ple des Gilets jaunes : classe moyenne infé­rieure pour cer­tains, classe popu­laire pour d’autres, plèbe encore, etc. Elle rend compte de la dis­pa­ri­tion des iden­ti­tés de classe ; elle révèle la ten­dance démo­cra­tiste de la dyna­mi­que du capi­tal ; elle expose son utopie uni­fi­ca­trice et nor­ma­li­sa­trice. La subor­di­na­tion d’une couche sociale sur une autre en fonc­tion de sa place dans les rap­ports de pro­duc­tion — si elle n’a pas dis­paru — n’est plus le mode de domi­na­tion prin­ci­pal exercé par le capi­tal parce que les rap­ports de pou­voir se sont démul­ti­pliés.


– L’uti­li­sa­tion mas­sive des réseaux sociaux pour mobi­li­ser les Gilets jaunes quel­que soit le type d’action, révèle non seu­le­ment la puis­sance des tech­no­lo­gies de l’infor­ma­tion et de la com­mu­ni­ca­tion dans les inte­rac­tions col­lec­ti­ves, mais elle cons­ti­tue un indi­ca­teur élevé de l’indi­vi­dua­li­sa­tion des rap­ports sociaux. Processus d’indi­vi­dua­li­sa­tion et de par­ti­cu­la­ri­sa­tion qui est un opé­ra­teur cen­tral du pou­voir déso­cia­li­sant du capi­tal. Mais le mou­ve­ment des Gilets jaunes a jus­te­ment dû et su ren­ver­ser cet ordre des choses en uti­li­sant les réseaux sociaux en lieu et place des média­tions tra­di­tion­nel­les de mobi­li­sa­tion et en inven­ter de nou­vel­les qui ont pris de vitesse le pou­voir en place.


– Sur les ronds-points, dans les occu­pa­tions de pla­te­for­mes com­mer­cia­les, dans les mani­fes­ta­tions, dans les assem­blées géné­ra­les, les Gilets jaunes ne se reconnais­sent pas mutuel­le­ment selon la place de chacun dans l’économie. Ce n’est pas « où tra­vailles-tu ? » qui dans la ren­contre des autres est la pre­mière ques­tion posée. Si une ques­tion de ce type est for­mu­lée, elle s’appa­rente à ceci : « Comment vis-tu ? ». Car c’est d’abord les condi­tions de vie et les dif­fi­cultés ren­contrées pour faire face à la baisse du niveau de vie qui ont contri­bué à former ce que nous avons nommé « une tenue jaune qui fait com­mu­nauté1 ».


On assiste ici à un chan­ge­ment fon­da­men­tal : alors qu’avec la classe ouvrière les condi­tions géné­ra­les de vie étaient comme inté­grées et seconda­ri­sées dans les condi­tions de tra­vail, ce sont main­te­nant ces der­niè­res qui ne for­ment plus qu’un élément parmi d’autres des condi­tions de vie. L’accrois­se­ment des impôts et des taxes, l’injus­tice fis­cale, la fixa­tion d’un prix admi­nis­tré décidé par l’État sur des pro­duits de pre­mière néces­sité, la baisse des allo­ca­tions (chô­mage, loge­ment), voilà autant de dis­po­si­tifs économiques et de contrôle finan­cier que la révo­lu­tion du capi­tal pré­sen­tait comme des fata­li­tés. Or, le mou­ve­ment des Gilets jaunes, a osé décons­truire ce fata­lisme par un mou­ve­ment qui s’affirme pour le revenu sans s’illu­sion­ner sur le rap­port entre le revenu et le pou­voir d’achat réel une fois dédui­tes les dépen­ses contrain­tes.


Il a replacé tous ces dis­po­si­tifs sur le devant de la scène en en dévoi­lant le carac­tère éminemment poli­ti­que. En effet, la façon qu’a l’État, niveau II de la domi­na­tion, de se rat­ta­cher au niveau I de l’hyper­ca­pi­ta­lisme mon­dial relève de choix poli­ti­ques et reste encore du domaine d’inter­ven­tion des États-nations. Le choix euro­péen de l’Allemagne suivi par la France d’ailleurs n’est ainsi pas le choix de la Grande-Bretagne et de son Brexit. Le choix libé­ral des Pays-Bas, n’est pas celui encore diri­giste de la Belgique et de la France, etc.


– Mais il est vrai que ce choix diri­giste se res­treint à partir du moment où l’accro­chage au cycle mon­dial appa­raît bien plus aisé quand l’État adopte au niveau II une stra­té­gie qui est celle du niveau I, sché­ma­ti­que­ment par­lant, celle du modèle anglo-saxon.


La sup­pres­sion des ser­vi­ces publics d’État dans les ter­ri­toi­res ruraux et semi-ruraux, la numé­ri­sa­tion rapide et géné­rale de l’accès aux admi­nis­tra­tions publi­ques, la déser­ti­fi­ca­tion médi­cale, etc. sont autant de mesu­res de « ratio­na­li­sa­tion » des coûts sala­riaux et « d’opti­mi­sa­tion » des inves­tis­se­ments publics exi­gées par la révo­lu­tion du capi­tal. Les ins­ti­tu­tions de l’État-nation ten­dent à être résor­bées dans une ges­tion d’inter­mé­diai­res vir­tua­li­sés. Pour répon­dre aux exi­gen­ces de la glo­ba­li­sa­tion, l’État a alors ten­dance à délais­ser sa forme nation pour pri­vi­lé­gier celle des réseaux. Ce n’est donc pas un hasard si le mou­ve­ment des Gilets jaunes est parti de peti­tes villes et cam­pa­gnes, là où cette marche vers la société capi­ta­li­sée et sa décan­ta­tion post­mo­derne ont été les plus lentes. Là où les réfor­mes libé­ra­les ont apporté le moins d’avan­ta­ges par rap­port aux inconvé­nients, par oppo­si­tion au monde de la grande métro­pole qui intè­gre et oblige immé­dia­te­ment tout le monde à se mettre « au niveau ». Mais ce n’est pas pour cela qu’il faut en déduire que ces lieux sont déconnec­tés. D’ailleurs les ronds-points sont des exem­ples par­faits de connexions dans les­quels niveau local et niveau global sont immé­dia­te­ment inté­grés. Leur occu­pa­tion en début de mou­ve­ment a été l’expres­sion de cette cons­cience immé­diate.


– Nombreuses sont les inter­ven­tions des Gilets jaunes contre cette mise en réseau des média­tions de l’État. En réaf­fir­mant la fonc­tion de soli­da­rité et d’égalité atten­due de l’État, les Gilets jaunes révè­lent en creux la puis­sance du capi­ta­lisme du sommet sur les États-nations. L’action directe des Gilets jaunes contre le pou­voir d’État concen­tré sur un chef d’État pro-euro­péen et pro-glo­ba­li­sa­tion (cf. « Macron démis­sion ») révèle l’inten­sité des pro­ces­sus de mise en réseaux des ancien­nes média­tions assu­rées par l’État-nation-Providence dans un pays struc­tu­rel­le­ment et poli­ti­que­ment « en retard » de ce point de vue. Le Macron de la « start up nation » était censé rat­tra­per ce « retard » à marche forcée. C’est pour le moment l’ancienne « ques­tion sociale » qui l’a rat­trapé à tra­vers un mou­ve­ment d’insu­bor­di­na­tion rom­pant avec une appa­rente sou­mis­sion aux poli­ti­ques récen­tes de ges­tion de l’espace par le pou­voir (nou­vel­les por­tions d’auto­rou­tes, ronds-points à chaque car­re­four, nou­veaux lotis­se­ments, hyper­mar­chés). Et ce sont ces espa­ces que le mou­ve­ment va jus­te­ment uti­li­ser à son profit en les blo­quant (péages d’auto­rou­tes, blo­ca­ges de pla­te­for­mes de la grande dis­tri­bu­tion et de l’e-com­merce), ou en les détour­nant de leur usage (ronds-points). Par cette action il montre en retour la fra­gi­lité d’une économie de flux basée sur la flui­dité et la flexi­bi­lité per­ma­nente.


– Au cours des mani­fes­ta­tions ou encore dans l’expres­sion col­lec­tive de leur parole, les Gilets jaunes concen­trent leurs atta­ques contre le capi­tal à partir des figu­res concrè­tes des patrons du CAC40 ou des ban­quiers et non pas du patro­nat en géné­ral (le MEDEF). Il sait que les pre­miers ont les pou­voirs exor­bi­tants au niveau supé­rieur de la domi­na­tion qui est celui de l’hyper­ca­pi­ta­lisme et de la mon­dia­li­sa­tion. Le mot « oli­gar­chie » fré­quem­ment employé par les Gilets jaunes pour dési­gner l’ennemi est le signe du déclin conco­mi­tant des conflits de classe et d’un État-pro­vi­dence qui « socia­li­sait » les iné­ga­li­tés au moyen d’une poli­ti­que sociale et fis­cale com­pen­sa­toire et équilibrée. Cet équilibre qui se réa­li­sait au sein des ins­ti­tu­tions démo­cra­ti­ques de l’État-nation est aujourd’hui défait (cf. notre notion « d’ins­ti­tu­tion résor­bée ») et le « peuple » est ren­voyé sans média­tion aux grands de ce monde. Ils sont alors dési­gnés et per­son­na­li­sés par la vin­dicte popu­laire comme diri­geants poli­ti­ques indi­gnes, oli­gar­chie patri­mo­niale (les Arnault et Pinault) et finan­cière « que l’on va aller cher­cher ! » ou alors comme struc­ture du « Système » (les tech­no­cra­tes de Bruxelles), sous-esti­mant ainsi la forme réti­cu­laire domi­nante du redé­ploie­ment capi­ta­liste à tra­vers le pro­ces­sus de mon­dia­li­sa­tion/ glo­ba­li­sa­tion.

 


Ces remar­ques sur les Gilets jaunes comme révé­la­teurs de la révo­lu­tion du capi­tal pour­raient être pour­sui­vies, mais on voit déjà que ce mou­ve­ment est por­teur d’une puis­sance de connais­sance et d’action sus­cep­ti­ble d’ouvrir des voies vers une sortie du monde du capi­tal.


Mais soyons plus clairs et précis. Quand on lit, ou on entend, du côté des Gilets jaunes : « Fin du mois, fin du monde, même combat », nous ne l’enten­dons pas au sens catas­tro­phiste des mili­tants du climat, mais au sens de « fin de ce monde ».


Temps critiques, 23 avril 2019

 

Notes

ISBN : 978-2-906623-36-1