Opération Mos Maiorum, plus de 19 000 interpellations

25 janvier 2015. L’Union européenne vient de publier son bilan de lopération Mos Maiorum, gigantesque opération de rafles à travers l’Europe menée du 13 au 26 octobre par 27 pays et coordonnée par Frontex. [Le rapport du conseil de l’Europe est disponible ici (en anglais)]

Au total, 19234 personnes ont été arrêtées, contrôlées et interrogées lors de cette opération dont l’objectif était de collecter diverses informations sur les migrant.e.s et les “nouvelles routes de l’immigration”, en vue de renforcer les politiques contre l’immigration. 257 personnes considérées comme “passeurs” ont également été arrêtées.

Plus de 6002 contrôles ont eu lieu lors de ces deux semaines, dont 1538 aux frontières extérieures, amenant à l’arrestation de 9890 personnes et 4464 à l’intérieur du territoire européen lors desquels 9344 personnes ont été arrêtées. Les bons élèves de la guerre aux migrant.e.s sont l’Italie (5954 personnes contrôlées), l’Allemagne (3683 personnes contrôlées), la Hongrie (3075 personnes contrôlées), l’Autriche (1219 personnes contrôlées) et le Royaume-Uni (995 personnes contrôlées). Les pays où il y a eu le moins de contrôle sont la Lettonie, l’Estonie et la Suisse (ce qui ne veut pas dire que ces pays sont plus “accueillant” que les autres).

Le nombre de personnes contrôlées est bien plus important que lors des précédentes opérations : en 2013, lors de l’opération Perkunas (deux semaines en septembre-octobre), 10 459 personnes avaient été arrêtées et en 2012, lors de l’opération Aphrodite, 5 298 personnes.

Une grande partie des personnes arrêtées sont originaires de pays en guerre ou en conflit, pays ou régions où les puissances occidentales ont foutu la merde ces dernières années au nom du capitalisme et de la domination colonialiste : Syrie, Afghanistan, Kosovo, Érythrée, Somalie, etc. Aujourd’hui quelques milliers de réfugiés se retrouvent indésirables en Europe, pourchassés par les flics, vivant dans des conditions pourries.

En France, 958 personnes ont été contrôlées, principalement syriennes, érythréennes et albanaise (371 personnes). À Paris, beaucoup de contrôles se sont fixés sur la Gare du Nord, au départ des trains pour Calais et sa région, zone frontalière avec l’Angleterre où beaucoup de migrant.e.s se rendent dans l’espoir de passer la Manche ou vers le nord de l’Europe.

Plusieurs initiatives à travers l’Europe ont tenté d’informer sur cette opération et parfois de l’empêcher : diffusion de tracts multilingue, collages d’affiches, rassemblements, opposition aux contrôles. Une carte interactive des contrôles a été mise en place, localisant les zones de contrôle à l’échelle européenne.

L’opération Mos Maiorum prenait un caractère exceptionnel par l’ampleur du dispositif mais les rafles sont quotidiennes à travers l’Europe. Pour remplir centres de rétention et charters et empêcher chacun-e d’aller où il.elle veut, surtout lorsqu’on vient de pays pauvres. Espérons que les solidarités construites en réaction à cette opération continueront de se tisser et que nous serons capables d’entraver concrètement la machine à expulser.

reprisde sans papiers ni frontières

[TGV Lyon Turin ]Val di Susa et Little Big Horn

« Tenez-vous à votre liberté ? Commencez à l’aimer chez l’autre » Anonimo Genovese
Ainsi pourraient s’exprimer à peu près, dans un espace en dehors du temps,bon nombre d’individus intégrés, éduqués et civilisés qui auraient l’honnêteté et le courage de leurs propres opinions spectaculaires :


Quand Christophe Colomb a découvert l’Amérique et que les différents conquistadores ont pillé un continent entier, je me suis dit que l’avancée de la civilisation chrétienne valait bien quelques excès dans l’éducation nécessaire à l’assimilation des sauvages aux moeurs civilisées.
Quand on a emmené de force, pendant des siècles, les noirs d’Afrique enAmérique, en les réduisant en esclavage, j’ai pensé que la culture de la canneà sucre et du coton valait bien le sacrifice de quelques principes. D’accordpour les droits de l’homme, mais ceux de la marchandise avant tout.
Quand suite à la révolution industrielle, l’exploitation dans les usines ressemblait aussi à l’esclavage, sinon pire, ilme semblait inévitable que l’effort collectif, pourtant inégal et injustement partagé, devait amener à bonne fin le progrès de l’économie des pays les plus civilisés.
Quand deux guerres mondiales ont déboussolé les équilibres sociaux déjà précaires et que les fascismes ont transformé l’impitoyable colonialisme en une machine de prédation sans frontière ni limite tant intérieure qu’extérieure, j’ai d’abord soutenu le fascisme et sa volonté de nous donner – en tant que race supérieure – les moyens de réaliser notre destin sacré ; puis je suis devenu démocrate et antifasciste les jours ouvrables et même parfois antiraciste le dimanche, mais plus rarement. J’étais trop excité et occupé à reconstruire un monde essentiellement semblable à celui qui existait avant le conflit.
Heureusement que la guerre froide, comme tous les manichéismes, nous a donné un coup de main pour créer le consensus et brider la critique radicale qui commençait à affleurer dans une société dont seule avait changé l’intensité de l’exploitation économiste de la vie quotidienne réduite à un temps de travail absolu.
Quand, avec la société du spectacle, le PIB est devenu le seul commandement divin d’une économie descendue sur terre pour compter scrupuleusement la rentabilité des vivants et des morts, sans plus de gaspillage de temps libre ni d’élucubrations humanitaires sur la communauté humaine, je me suis dit que je pouvais être un bon compétiteur pourgagner ma guerre contre tous et être heureux au milieu d’un champ de ruines à traverser rapidement et fièrement en 4X4.
Quand des cris de protestation ont commencé à se lever partout et une résistance variée s’est exprimée comme un signe de révolte imminente contre un monde inhumain, absurde et cruel, je me suis rangé du côté de l’éternel progrès contre les utopistes obscurantistes qui veulent nous ramener à l’âge de la pierre.
Le terrorisme a pris alors la place du communisme en tant qu’ennemi dans la cosmogonie manichéenne que le système dominant m’a offert comme une école pour y éduquer ses suppôts, davantage convaincus, d’ailleurs, par leurs peurs que par les promesses. L’anticommuniste de droite ou de gauche que je suis toujours, s’est maintenant équipé aussi du kit du parfait progressiste en faisant d’une science de pacotille une nouvelle religion infâme.
Maintenant, après Fukushima, j’ai un peu peur, je l’avoue ; j’ai même fini par voter contre le nucléaire au récent référendum italien comme n’importe quel subversif dégoutant. Je fais confiance, néanmoins, à mes maîtres de surviede droite et de gauche pour recommencer à soutenir ardemment la civilisation du travail productiviste contre les diables, les sorcières, les juifs errants, les immigrés, les objecteurs de croissance économique et les fantomatiques black block qui veulent la ruine de notre civilisation et du progrès que celle-ci nous a toujours généreusement apporté.
Je suis et je serai toujours un serviteur volontaire, fier de soutenir une civilisation qui promet toujours un bonheurspectaculaire, même quand l’abîme s’approche inéluctable et on est en train de se faire engloutir par le tsunami qu’on a contribué à provoquer en altérant tous les équilibres naturels au nom de la rentabilité…et du progrès, bien sûr.
Quand le rien dont nous sommes les fils prématurés nous appellera, nous y tomberons, obéissants comme des zombis fidèlesà leur destin, et même notre dernier râle sera joyeux.
Où non ? »
Est’il possible de réfléchir sur des faits sans un esprit de tifosi ?
Les majorités, silencieuses ou pas, se créent toujours autour de certitudes répétées, mais assez peu vérifiées. Elles dépendent de dogmes forgés à partir d’affectivités prétendument rationnelles et prouvées, mais qui remontent, plutôt, àdes désirs manipulés et à beaucoup trop de peurs.Les citoyens des démocraties spectaculaires sont des sujets humiliés qui oublient systématiquement leur vie absente et leur histoire et qui s’accrochent à une histoire fictive comme à une méprisable aumône pour esclaves humiliés.Les vérités idéologiques s’appuient toujours sur la criminalisation de l’autre, de l’antagoniste, plus que sur la clarté de leurs propres raisons.

C’est arrivé avec le nucléaire – et ce n’est pas fini -, c’est en train d’arriver en Val di Susa, et ce n’est qu’un début.


Que mon parti-pris soit bien clair : là où un choix commun s’impose, compte l’avis de tous les intéressés car la décision concerne, en premier, les victimes, puis, éventuellement, les
bénéficiaires de ce choix.On ne peut pas décider à Paris ce qui concerne Marseille et réciproquement. L’intérêt général ne peut jamais se fonder sur un dommage avéré pour celui qui se trouve au coeur des conséquences d’un choix. J’ajoute que les choix dommageables sont essentiellement à éviter. Par principe et par bon sens.Pour ceux qui partagent ce point crucial, la méthode d’une démocratie directe seule peut être satisfaisante, mais il y a beaucoup de confusion sur le concept de démocratie directe et les supporters du vieux monde répètent comme un mantra leurrengaine intéressée. Ils remarquent avec gravité diabolique qu’un tel mode de gouvernement est incompatible avec le développement démographique de la population.
Du coup les petits frères contemporains de ce serviteur volontaire qui soutient toujours le pouvoir en place contre toute argumentation critique, se préoccupent du sort d’une humanité à la merci d’un gouvernement d’autogestion généralisée qui ne serait pas capable de fonctionner.
Jamais ne leur vient à l’esprit que si depuis des siècles, un système social fondé sur le sacrifice et l’injustice a réussi à s’imposer à la planète entière avec autant de réussite – si douloureuse soit-elle – n’importe quel système fondé sur une égalité et une liberté non formelles serait, de toute façon, moins compliqué à mettre en place et à gérer.
Chaque fois que des millions d’individus libres ont osé essayer – dans des situations difficiles, en plus, et avec des moyens techniques très inférieurs au potentiel d’aujourd’hui -, de la Commune de Paris aux communautés libertaires aragonaises et catalanes, des révoltés makhnovistes d’Ukraine aux Spartakistes berlinois, l’utopie a su toujours très bien fonctionner et s’est préparée, en s’affinant et en se corrigeant, à éliminer les erreurs et à parfaire la réussite d’une
société tendant au bonheur de tous et de chacun.
Ce sont toujours des armées impérialistes du vieux monde (blanches, rouges ou noires) qui ont rétabli par la forceles conditions précédentes, au nom de la civilisation et du progrès, bien sûr, quand ce n’est pas au nom de la révolution.
Au moment crucial, Versaillais ou Prussiens, nationalistes ou sociaux-démocrates, staliniens à la Lister ou phalangistes à la Franco se sont toujours montrés étonnamment homogènes, au-delà des différences idéologiques de droite ou de gauche, dans la lutte contre l’émancipation humaine, toujours au nom du progrès et de la civilisation, cela va sans dire.
Le capitalisme, comme l’homme économisé et étriqué qui l’a produit, a deux mains, la droite et la gauche, qu’il utilise depuis toujours. S’il s’est affirmé par une révolution violente, en coupant la tête du roi et du clergé, il s’est renforcé par la guerre, il a profité des extrémismes contrerévolutionnaires du bolchevisme et du fascisme, il a repris les territoires ayant échappé à son contrôle par des méthodes de bourreau et restaure systématiquement sa domination par la force.
La CIA et le KGB, avec tous leurs petits frères, ont fait de l’Etat – tous les Etats, de droite ou de gauche, sont toujours complices d’un marché qu’ils prétendent régler et dont ils exaucent, en fait, tous les desiderata – l’injustice absolue qui, au nom de l’humanité, réduit l’homme à un esclave et la démocratie à une ochlocratie où une plèbe rendue ignorante par une pédagogie de la soumission permanente, croit dur comme fer que « l’Etat c’est nous » et élit
avec un aplomb sous-prolétaire les chefs ridicules et aveugles d’une lumpenbourgeoisie spectaculaire et corrompue,fossoyeuse interclassiste de la lutte des classes.
Que, dans sa propagande, la pseudo classe dominante – en réalité ce sont des serfs débordants de privilèges vulgaires et pour cela totalement dépourvus de scrupules et de décence – se gargarise de civilisation et de progrès sans être immédiatement balayée par ceux qu’elle prétend représenter et qu’en réalité elle abuse et escroque, n’est que la conséquence logique d’une dépendance désormais intériorisée dans le caractère même des individus domestiqués.
Qui peut dire, néanmoins, combien durera un tel conditionnement et quel traumatisme imprévu pourrait effacer d’un seul coup l’effet hypnotique ?
Dans un tel tableau général, la défaite dans le référendum italien sur le nucléaire est inquiétante pour le système dominant. Il y a là un signe, symbolique et concret à la fois, qui dépasse la question électorale et met en jeu l’hypothèse de la substitution d’une démocratie parlementaire asservie au capitalisme par une démocratie conseilliste qui rendrait au peuple, en tant que communauté concrète et autonome d’individus sociaux, les contenus d’une souveraineté qui n’est aujourd’hui que formelle.
La démocratie locale, fédérée en cercles successifs jusqu’à une démocratie planétaire n’est pas compatible avec l’internationale des multinationales, mais elle peut commencer à en prévoir et en préparer le dépassement partout par l’abrogation d’une démocratie spectaculaire, au nom d’une démocratie réelle, donc directe par les sujets qui l’appliquent.
Au-delà de la pratique paternaliste du référendum, le refus du nucléaire, confirmé face à une caste qui cherchait à réintroduire cette énergie mortifère comme un business démentiel et rentable, est un acte objectif de démocratie directe.
Les citoyens d’une vraie démocratie doivent, en fait, décider de tout, en se libérant des représentants corrompus et vendus à la solde du business planétaire.
En Italie et dans le monde, chaque nation est essentiellement confrontée à ce même problème et comme il advint au moment du passage de l’ancien régime monarchique à la république bourgeoise, il s’agit de choisir partout le meilleur pour l’émancipation de l’humanité et la joie de vivre.
En analysant sous cet angle factuel et non idéologique la question sociale contemporaine, l’épisode, petit et pourtant exemplaire, de la Val di Susa, ce Chiapas alpin, cette réserve Sioux au pied des monts, (Piemonte), acquière
une signification à l’ampleur étonnante et, oserai-je dire, planétaire.
Le chef visage pâle qu’on nomme Fassino, petit employé social-démocrate au service toute une vie des institutions dont il se sert, à peine élu maire de Turin, a affiché une volonté tenace de faire passer le train de la marchandise dans la prairie habitée par d’ignares citoyens.
Remercions-le de la sollicitude avec laquelle il montre la cohérence univoque des deux mains du capitalisme.
Martine Aubry en a fait autant, de l’autre côté des Alpes, en garantissant bêtement que tous les français, socialistes ou pas, adorent la Grande Vitesse, montrant ainsi qu’elle ne connaissait rien au dossier en question, tout en se ralliant à la logique idiote du business.
La civilisation doit avancer et, comme dans les grandes prairies américaines, c’est cette civilisation là et seulement
celle là qui a droit de citoyenneté. Les indiens doivent disparaître dans les réserves et sortir uniquement pour consommer et voter, parfois, pour les Fassino ou les Aubry qui, en bons militants professionnels, s’occupent, avec une suffisance contrite, de la vie misérable des prolétaires dont la gestion garnit accessoirement leurs revenus de bureaucrates. De tels camarades aiment tellement les prolétaires qu’ils font tout pour qu’ils le restent.Peu importe, en ce qui concerne le tunnel de la Val di Susa, que l’utilité d’un tel ouvrage soit mise en question de façon irréfutable par des arguments qu’aucun patriote progressiste, blanc et civilisé n’arrive à contester dans les contenus.
Je n’ai ni lu ni entendu une seule argumentation qui démontre l’utilité du tunnel en question. On parle génériquement de ferroutage de marchandise à favoriser, mais on ne répond pas avec un seul mot concret à l’objection qu’il n’y a aucune augmentation du flux du transport à considérer comme probable. Au contraire, le chemin de fer déjà existant est sous-utilisé et risque fort de le rester. Si ce n’était pas vrai, les « progressistes » se seraient sûrement empressés de le montrer et de le faire savoir. Or, silence ! Même le coût de l’ouvrage est passé à la trappe de la manipulation, pratique déjà utilisée pour le nucléaire, vendu
comme économiquement rentable car on a systématiquement caché les coûts réels, prohibitifs, en décrivant cependant un paradis énergétique faux, grotesque et effrayant comme les enfants qui jouent et les vaches qui broutent dessinées sur les cheminées nucléaires françaises en marche, fumantes et macabres.
Hé oui, car le nucléaire a perdu au Japon et en Italie avec des coûts assez différents, mais il continue à être une terrible bombe à retardement, une roulette russe à la française de l’autre côté des Alpes.
La Val di Susa est un exemple de recomposition sociale spontanée d’êtres humains réels, au-delà de la décomposition ethnique et culturelle réalisée au niveau planétaire par la domination aliénante du capitalisme. Ce retour au local avec un regard au planétaire est une résistance à l’acculturation généralisée d’une civilisation productiviste à laquelle s’opposent désormais de façon explicite tous les damnés de la terre en augmentation vertigineuse : des campesinos sans terre du Brésil ou de l’Inde aux zapatistes du Chiapas et autres résistants d’un Mexique aux mains des mafias de la drogue et de l’Etat, aussi corrompu à Mexico City que partout ailleurs dans le monde, à Tokyo, à Washington, à Pékin, à Rome, à Londres, à Moscou, à Téhéran ou Tripoli…
Sans fin est la liste des Etats canailles !
En Val di Susa il y a eu quelques violences, c’est sûr, mais de tous les côtés et en premier de la part de ces défenseurs de l’ordre qui à Gênes, en 2001 pour le G8, chantonnaient l’ancien refrain fasciste de « Faccetta nera ».
La légitime défense est-elle donc une subversion et, en manque d’alternative, la subversion ne devient-elle pas l’unique légitime défense possible ?
Réoccuper un territoire confisqué sans raisons humaines valables est-il donc passible d’être traité comme une agression injustifiée ?
Comment évaluer la violence de celui qui défend son propre droit à l’existence avec le paramètre hypocrite de celui qui impose un sacrifice sans contrepartie et sans motif?
Parmi les droits de l’être humain il n’y a donc pas, affirmé en toutes lettres, celui de se révolter face à l’oppression ?
Il n’y a donc pas oppression et injustice dans la volonté des affairistes d’Etat à détruire un territoire pour en faire un investissement aussi rentable pour quelques uns que couteux, inutile et dommageable pour beaucoup ?
Il suffit, donc de se dire Etat pour pouvoir dénoncer toute résistance comme du terrorisme ?
C’est ce que faisaient les nazis et les collabos pendant l’occupation.
Il suffit donc du miroir aux alouettes d’une démocratie formellement représentative qui, en fait, ne représente plus personne, pour permettre à Fassino et compagnie de ne pas s’affubler des habits embarrassants d’un Laval ?
Crazy Horse, Sitting Bull et beaucoup d’autres sauvages supposés se sont opposés au « progrès » qui manifestait son droit autoproclamé à l’abus par l’avancée colonialiste de Custer. Ils ont osé se confronter aux tuniques bleues en les vainquant à Little Big Horn. Ils ont ensuite payé très cher leur résistance courageuse, éliminés par un génocide resté impuni. Aujourd’hui, néanmoins, les temps ont changé et les indiens sont désormais la majorité de la population.
Certes, la plus grand partie d’entre eux ne le sait pas encore et attend, peut-être, de vérifier qu’on ne peut pas manger ni respirer l’argent pour faire le saut de la barricade et opérer ce changement de civilisation qui, tout en clamant ses droits depuis des temps anciens, est désormais en suspens depuis un demi-siècle.
Bien avant Wounded Knee, le sort que la civilisation du travail a réservé aux rouges en tout genre n’a jamais comporté ni pitié ni respect.
L’heure est venue de conquérir le respect de soi même en réalisant pour tous la liberté et l’égalité dans la fraternité.
Sergio Ghirardi

après plus de vingt ans de lutte on publie ce texte.

Italie : Rassemblement devant la prison de Ferrara.

Contre la prison en tant qu’institution répressive et comme modèle social

 Depuis toujours, pour le pouvoir, la prison est un véritable laboratoire où créer et expérimenter des modèles de contrôle social.Écoles, usines et hôpitaux ont comme paradigme architectural et disciplinaire la prison.

Le but a toujours été d’amasser des corps, base indispensable pour amasser des capitaux.

 

Cela implique un contrôle et une répression exercés continuellement à différents niveaux, et qui ont évolué dans le temps. Parmi les dernières évolutions de la technologie coercitive, on peut rappeler la réforme pour la différenciation carcérale, dont la région Emilia-Romagna est le promoteur, et l’élargissement de l’application de l’article 41bis [1] à des prisonniers politiques. D’un côté, on crée une dangereuse « zoologie du délinquant », dans laquelle mettre cette part de la population qui ne rentre pas dans la « norme », vue comme plus importante que l’individu. De l’autre côté, il y a une intensification de la répression de toutes les réelles forces de changement social qui luttent contre l’exploitation de l’homme par l’homme et de la planète. Si la prison criminalisait la lutte politique [sic], elle la transforme maintenant en terrorisme. Se faire cataloguer terroriste n’a jamais été aussi facile.

La « Haute Sécurité » de Ferrara, où des compagnons anarchistes sont détenus dans la section AS2, est un des symboles de cette logique répressive et punitive. Nous pensons qu’il est nécessaire de souligner et de dénoncer en ce lieu, et symboliquement dans toutes les autres prisons, l’oppressante machine de normalisation de l’État. Nous pensons qu’il est tout aussi nécessaire d’exprimer toute notre solidarité aux compagnons Michele, Adriano, Graziano, Lucio et Francesco, Nicola et Alfredo. D’ailleurs, ces derniers jours justement, ils ont lutté et ont gagné contre des nouvelles restrictions décidées par les gardiens de la prison sur leurs heures de promenade et les possibilités de se voir entre eux.

Notre solidarité va aussi aux compagnonnes et aux compagnons de Bologne qui ont subi des perquisitions à cause des sabotages de décembre contre la Grande Vitesse. Luttons aussi contre toute forme de délation et de collaboration avec flics et juges, toujours complices de la répression du pouvoir.

Liberté pour les compagnon.nes en lutte.

25 janvier 2015 : rassemblement devant la prison de Ferrara

[Traduit de l’italien par nos soins de Informa-azione]

textee t illustration repris de http://www.non-fides.fr

 

[Bruxelles] : descente de flics au Passage, local de lutte contre la maxi-prison, le lendemain d’une attaque contre un cabinet d’architectes

repris de Non Fides

samedi 24 janvier 2015

Le 14 janvier, à 19h30, un combi de flics stationne à Anderlecht devant le Passage, local de lutte contre la maxi-prison. Sur la place à côté, deux bagnoles banalisées attendent. Est-ce que cela est lié à la manifestation sauvage qui s’est déroulée dans les rues du quartier un peu plus tôt ? Est-ce qu’ils veulent mettre la pression sur la discussion publique prévue ce soir-là et intitulée « Action directe contre la maxi-prison » ? Peu importe, le combi bouge au bout d’une demi-heure, la discussion débutera avec retard.Après une heure de débat, trois fourgons et deux voitures de flicaille avec leur commissaire reviennent en trombe. On se précipite alors vers la porte pour les empêcher de rentrer. Ils finissent par réussir à la défoncer au pied de biche, puis à prendre les identités et fouiller une partie des gens présents, non sans quelques résistances diverses et variées. Neuf personnes qui ont refusé de donner leur identité sont aussi embarquées, et le local est perquisitionné. Après un contrôle d’identité au poste de police de Démosthène, l’ensemble des arrêtés est plus ou moins rapidement relâché, et apprendra en passant que le prétexte des flics était la recherche d’éléments liés aux « attaques » commises le même jour contre « un bureau d’architectes ». [voir ci dessous]

Si l’intrusion soudaine d’une quinzaine de bleus dans notre environnement immédiat est toujours désagréable, plutôt que de nous lamenter, cela ne fera que renforcer notre volonté de combat contre la maxi-prison et ceux qui veulent la construire.

Des individus présents au Passage
17 janvier 2015

Pour souvenir :
Le Passage, local de lutte contre la maxi-prison
Rue Rossini 11 // 1070 Anderlecht
(près de la place du conseil)

Permanences :
tous les mercredi de 16h à 20h
tous les samedi de 16h à 20h

[Tiré de La Cavale]

***

Deux bombes incendiaires retrouvées devant le bureau d’architectes Jaspers & Eyers à Louvain

LOUVAIN – Mardi 13 janvier 2015, vers 9h30 du matin, un employé du bureau d’architectes Jaspers & Eyers, situé sur le Tervuursevest à Louvain, a averti la police de la présence de deux colis suspects devant le bâtiment, ainsi que du fait d’une de leurs caméra de surveillance avait été obscurcie avec de la peinture.

Arrivée sur place, la police fait évacuer l’immeuble des architectes. Les rues sont fermées à la circulation, tout comme le Ring et les sorties de l’autoroute. Vers midi, le Service d’Enlèvement et de Destruction d’Engins Explosifs de l’armée, ainsi que la police scientifique et les services de recherche de la police fédérale viennent sur place. Le SEDEE a scanné les colis suspects Ensuite, c’est le robot qui a tiré une cartouche d’eau sur un colis. Enfin, les deux colis ont été neutralisés.

Plus tard, le Parquet a communiqué qu’au moins un des paquet consistait de : une bouteille contenant du liquide (probablement essence), des allumes-feu, des allumettes et une petite bonbonne de gaz. L’enquête est menée par la Police Fédérale de Louvain.

Cette aimable bureau d’architectes, le plus grand de la Belgique, a offert ses services aux projets suivants : la nouvelle prison de Beveren, le nouveau quartier-général de la Police Fédérale à Bruxelles, plusieurs sièges de grandes entreprises telle que GDF Suez, Mercedes, Dexia, Proximus, KBC Banque (à Bruxelles), KBC siège régional (à Gand), Barco (à Courtrai), d’importants projets commerciaux tels que la construction toujours en cours du centre commercial au Toison d’Or (à Bruxelles), la construction prévue du U-Place Shopping Center (à Machelen),… Cette liste, non-exhaustive en ce qui concerne les horreurs réalisés par ces architectes en Belgique, pourrait encore être complété avec leurs œuvres à l’étranger. Enfin, ils ne pouvaient évidemment pas manqué à l’appel quand il s’agissait de se porter candidat pour construire la plus grande prison de l’histoire belge à Bruxelles, mais c’est un autre bureau d’architectes qui a remporté ce contrat-là.

[Source : LaCavale.be.]



[Paris – mardi 20 janvier 2015] Procès pour injure publique : contre Saïd Bouamama et Saïdou de ZEP

Il y a trois annéesle 25 aout 2012   le groupe ZEP jouait devant la mairie de Portes les valence

On a cherché si  cette association Agrif est présente à valence. La réponse c’est en effet elle est présente avec ses habituels adhérents du bloc identiaire, génération identitaire et quelques étudiants    proche du Gud

 Nous affirmons notre complicité avec le sociologue Saïd Bouamama et le rappeur Saïd, dit Saïdou, de la ZEP (Zone d’expression populaire)

Vous avez été nombreux à apporter votre soutien au rappeur Saïdou du groupe Z.E.P (Zone d’expression populaire) et au sociologue et militant Saïd Bouamama mis en examen pour « injure publique » et « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence » sur une plainte de l’Agrif (L’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (AGRIF) , un groupe d’extrême droite nostalgique de l’Algérie française.

-Comme des millions de gens à travers le globe ces dernières années, les deux auteurs ont attaqué le colonialisme et le système capitaliste et impérialiste.

-Comme beaucoup d’entre nous, ils dénoncent une idéologie toujours très en vogue : le racisme, sous ses formes les plus courantes mais aussi les plus décomplexées. Comme de nombreux habitants des quartiers populaires, ils ont crié leur colère contre les inégalités, les discriminations et la justice *

C’est pour cela qu’ils sont poursuivis en justice.

QUAND ON MUSÈLE LA VÉRITÉ, L’INSOLENCE DEVIENT UN DEVOIR

* note de la rédaction: »Tu te plains de la police, de l’armée, de la justice, des casernes, des prisons, des administrations, des lois, des ministres, du gouvernement, des financiers, des spéculateurs, des fonctionnaires, des patrons, des prêtres, des proprios, des salaires, des chômages, du parlement, des impôts, des gabelous, des rentiers, de la cherté des vivres, des fermages et des loyers, des longues journées d’atelier et d’usine, de la maigre pitance, des privations sans nombre et de la masse infinie des iniquités sociales.Tu te plains ; mais tu veux le maintien du système où tu végètes ». Albert Libertad

 

http://www.lesinrocks.com/2012/11/28/actualite/nique-la-france-un-rappeur-et-un-sociologue-poursuivis-par-une-association-dextreme-droite-11327574/

http://lmsi.net/Du-droit-de-niquer-la-France

http://lmsi.net/Soutien-aux-deux-Said

http://paris.demosphere.eu/rv/37174

[Essone] Violences policières: classement sans suite de la plainte de Raymond Gurême, 89 ans.

Ce 12 janvier dernier, la Justice a signifié à Monsieur Raymond Gurême, résistant, déporté, survivant du « Génocide des Tziganes » le classement sans suite de sa plainte pour violences policières. (cf : http://www.depechestsiganes.fr/violences-policieres-classement-sans-suite-de-la-plainte-de-raymond-gureme-89-ans/)

Pour un homme dont la vie est de bout en bout animée par l’insoumission et le souci de la justice universelle, il va de soi que la lutte continue. Une nouvelle plainte avec constitution de partie civile est en cours : Signez une pétition ! Elle sera envoyée le 27 janvier prochain, journée internationale de la mémoire de tous les génocides, à Madame Christiane Taubira, ministre de la Justice, et à Mr Jérôme Guedj, président du Conseil Général de l’Essonne !
Enregistrement d’une émission de radio
http://www.sonsenluttes.net/spip.php?article782

[Allemagne] Manifs en réponse au meurtre d’un sans-papiers à Dresde : émeute à Leipzig (15 janvier 2015)

repris du chat noir émeutier

Dans la matinée de mardi 13 janvier 2015 à Dresde, un sans-papiers originaire d’Erythrée, Khaled Idris Bahray, a été retrouvé mort assassiné dans la cour du centre pour réfugiés de Leubnitz-Neuostra, géré par l’Etat qui les oblige à y résider. Comme souvent, la police a tenté dans un premier temps de maquiller ce meurtre en une mort accidentelle ou un suicide. Une habitude des assassins en uniforme qui éliminent quotidiennement les indésirables à ce système d’exploitation et de domination, que ce soient aux frontières, dans les rues, dans un de leurs fourgons ou bien en cellule [1]. Cet assassinat survient juste après une manifestation de 25 000 fascistes de PEGIDA [2] qui s’est déroulée à travers la ville lundi soir,. Les racistes se montrent de plus en plus dans les rues ces derniers mois, en vociférant contre les migrants et l’immigration, en proférant et inscrivant des menaces de mort à leur encontre devant leurs lieux de (sur)vie…

On ne sait pas grand chose des détails de sa mort, mais assez pour dire que ce système d’oppression et de domination l’a tué. Que ce soient des fascistes ou des agents en uniformes de l’Etat, tout cela nous importe peu. Ce qui est sûr, c’est que la police a voulu maquiller ce meurtre raciste d’un indésirable dépourvu du bout de papier nécessaire pour circuler.

La riposte dans la rue s’organise, plusieurs manifs contre ce meurtre raciste se sont tenues à travers le pays,  Une est prévu ce dimanche 18 janvier 2014 à Berlin.

Vers 23h30 jeudi 15 janvier à Hambourg, le commissariat de la Lerchenstraße a été attaqué aux feux d’artifice. Cela a été une action en solidarité avec la manifestation émeutière qui s’est tenue le même jour à Leipzig, qui a été fortement réprimé par la police. Le communiqué se termine par “Saluts solidaires d’Hambourg à Leipzig”.

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Plus tôt dans la journée, plus de 1000 personnes (dont 600 déterminées) sont descendues dans les rues de Leipzig en début de soirée à la suite du meurtre non éclairci du jeune migrant érythréen Khaled Idris et contre les nationalistes de PEGIDA. Lors de cette manif, les murs ont été décorés de tags et de graffitis contre ce mouvement fasciste et la police, ainsi qu’en mémoire de Khaled Idris: “Stop PEGIDA”, “ANTIFA” (les nombreux tags racistes qui avaient été inscrits lors des marches LEGIDA ont quasiment tous été recouverts à la bombe de peinture; Du mobilier urbain est jeté à travers les rues… 23-2Lorsque la police s’est approchée un peu trop près du cortège, elle a été visée par des tirs de feux d’artifice et bombardée de pierres, ses véhicules ont été sévèrement dégradés (certains flics ont même été frappés à l’intérieur de leurs voitures). Rapidement, la police de Leipzig est surpassée par les évènements et demande des renforts de Dresde et de Sachsen-Anhalt. Vers 21h15, les vitres du tribunal n’ont pas résisté bien longtemps à l’assaut de 200 manifestants cagoulés (40 vitres pétées avant que les flics n’interviennent d’après bild.de), celles de plusieurs magasins (dont le barbier “Gentlemens Cut”) et de banques (dont une agence Santander [3]) non plus.

Le tribunal

Un commerce...

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Une partie de la façade vitrée du tribunal

Les flics ont débarqué en masse après deux heures de manif, encerclant une centaine de manifestant-es et procédant à des dizaines de contrôles d’identité. Trois personnes ont été arrêtées et placées en garde-à-vue.

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Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi 17 janvier à Dortmund (3500) et à Dresde.

Notes du CNE:

[1] Oury Jalloh, mort brûlé vif dans une cellule d’un comico le 7 janvier 2005 à Dessau.

[2] Mouvement nationaliste, anti-immigration et anti-islam, qui multiplient les manifestations de masse à travers l’Allemagne et regroupe la mouvance néonazie, les milieux hooligans ainsi que des nationalistes de tous poils…LEGIDA est sa branche implantée à Leipzig.

[3] L’enseigne bancaire ‘Santander’ est prise pour cible à travers le monde, et pour cause: elle est connue pour financer les prisons et l’aviation militaire. A titre d’exemple, elle a injecté près de 60 millions d’euros dans ‘BAE-Systems’ et ‘Rolls Royce’. Elle investit aussi dans plusieurs services du domaine militaire (communications et échanges d’informations..). Elle est également connue dans le monde hispanophone pour des expulsions locatives.

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Crémone [Italie] Agression fasciste au CSA DORDONI

Communiqué repris du site informa azione.info

http://lahorde.samizdat.net/wp-content/uploads/2015/01/antifa_19_01_015.jpeg

« Emilio, un camarade investi depuis longtemps dans de multiples luttes et batailles, est actuellement dans le coma avec une hémorragie cérébrale entendue à cause d’un assaut fasciste contre le centre social Dordoni de Cremona.
L’attaque préméditée et scientifiquement organisée par les fascistes de Casapound de Cremona, en collaboration avec d’autres militants d’extrême droite venus d’autres villes, a du faire face à une réponse déterminée de la part des camarades présents dans le centre social, mais malheureusement Emilio a été frappé à la tête par plusieurs coup de barre.
Les fascistes se sont acharnés sur Emilio jusqu’à ce qu’il soit récupéré et ramené en sécurité à l’intérieur du centre social, la gravité de son état de son état de santé est immédiatement apparue comme évidente.
Le comportement de la police a été infâme, celle-ci a simplement contrôlé les assaillants avant, pour leur permettre de s’en aller tranquillement, de charger le rassemblement spontané des antifascistes progressivement arrivés sur place.
Pour exprimer notre solidarité totale à Emilio nous appelons à :
Lundi 19 janvier : journée nationale de mobilisation diffuse dans les territoires
Contre fascistes, police et institutions complices :
Samedi 24 janvier : cortège national antifasciste, déterminé, auto-défendu et militant à Cremone avec pour mot d’ordre : fermons immédiatement tout les locaux fascistes !
Vous payerez cher ! Vous payerez tout ! »

Action Antifasciste Paris-Banlieue

Akye Bboykonsian-Première Ligne

Comité pour Clement

AVEYRON[Saint-Victor-et-Melvieu ], , samedi 24 janvier 2015 – Inauguration de l’Amassada

Samedi 24 janvier dès 14h00
Grande journée d’inauguration.
Repas et bal trad en soirée.

LE TRANSFORMATEUR DE SAINT-VICTOR-ET-MELVIEU QUESAKO ?

À la sortie du bourg de Saint-Victor-et-Melvieu, le géant du
transport électrique français RTE (Réseaux de Transport d’Électricité)
tente par tous les moyens de s’accaparer un lot d’excellentes terres
agricoles pour y implanter un gigantesque transformateur de 7 hectares.
UN TRANSFORMATEUR POUR DU BUSINESS INTERNATIONAL
Un transformateur de cette taille sert à augmenter le voltage de
l’électricité produite aux environs, pour pouvoir ainsi l’exporter loin,
très loin, sur les marchés européens et mondiaux, au moyen de lignes Très
Haute Tension (pour Saint-Victor, ce serait à destination de l’Espagne et
du Maroc). Ce que dévoile la construction de ces infrastructures, c’est
que l’énergie produite localement n’a rien à voir avec un besoin, ni même
une consommation locale. Elle est immédiatement envoyée dans un immense
réseau de distribution transnational dont le but premier est de réaliser
de substantiels profits en vendant sur les marchés les plus porteurs. Un
tel système rend immédiatement caduque toute idée d’autosuffisance
énergétique. À proximité des centrales photovoltaïques ou nucléaires, des
éoliennes ou des barrages, on consomme comme partout ailleurs l’énergie
lambda du réseau, simplement on subit gracieusement les nuisances de
production et d’acheminement.
DES NUISANCES
Il y a déjà un transformateur de 3 ha à Melvieu (qui évacue la production
des barrages du Tarn) et de nombreuses lignes THT. Faites l’expérience :
si l’on passe avec un néon sous l’une des lignes, celui-ci s’allumera tout
seul… À proximité de telles lignes, des symptômes divers apparaissent
(notamment des problèmes de fertilité), touchant parfois gravement la
santé des riverains. Sans parler du bétail dont la lactation diminue ou
s’arrête. Bref, personne ne croit plus en la soi-disant innocuité de ces
infrastructures.
L’AVEYRON, LE TARN ET L’HERAULT MENACÉS
Quel besoin d’un transformateur supplémentaire à Saint-Victor ? En
réalité, il s’agit d’une anticipation de RTE quant au projet pharaonique
d’implantation d’un millier d’aérogénérateurs* (éoliennes industrielles)
dans la région. La multiplication des mâts de 120 m de haut sur toutes les
crêtes du sud Rouergue saturerait en effet rapidement le transformateur de
Melvieu. Sans compter que, par un effet d’entraînement, la présence
d’infrastructures de desserte (transformateurs et lignes THT de 225.000 et
400.000 volts) encouragera et concentrera encore un peu plus les projets
de nouvelles productions énergétiques (aérogénérateurs, centrales
photovoltaïques) autour d’elles. C’est donc de la création d’une vaste
zone industrielle de l’énergie sur tout le sud-Aveyron qu’il s’agit.
Pour celles et ceux qui luttent là-bas,

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L’amassada, comme premier chantier, comme première incarnation physique du mouvement de lutte contre le transformateur et les aérogénérateurs, n’est pas une manifestation symbolique. Elle constitue un rempart puissant, un obstacle de bois, de tôles, de chair et de rêves face à l’avancée de leur désert. Elle nous donne un toit pour nous assembler, pour nous organiser et pour avancer ensemble. Un abri pour les palabres, les repas, les stratégies et les chants. Un espace pour esquisser une vie bien différente de celle promise par RTE. Elle est notre affirmation commune : le transformateur ne se fera pas !

L’amassada est solidement ancrée dans cette terre et cette culture, mais ses fenêtres sont grandes ouvertes sur le monde. Elle est fille de la bergerie de la Blaquière sur le Larzac et sœur du potager collectif du Sabot de Notre-Dame-des-Landes ; elle est la complice des « presidio » italiens du Val Susa, ces cabanes construites par les opposants à la ligne TGV Lyon-Turin pour défendre leurs terres convoitées par la mafia des aménageurs. Nous avons avec nous ces habitants des territoires qui un peu partout résistent, nous avons avec nous les tracteurs, les tritons et les oiseaux, les dizaines de milliers d’opposants aux projets nuisibles. L’amassada se construit au sein d’un mouvement historique de protestation, capable de s’arroger des victoires et de redonner l’espérance. Ce sera un lieu de combat et de liberté, un lieu qui sera celui de tous, sans clés ni serrures. Il nous appartient maintenant d’imaginer ensemble comment et de quoi le peupler, quelle chaleur y installer pour que la marque de notre détermination y demeure indélébile, pour qu’il abrite, dans quelques années, les souvenirs de nos victoires !
** Le 24 janvier : Lo cremalh de l’Amassada (la crémaillère, l’inauguration) **

Est prévue une grande journée de discussion, de musique et de danse, co-organisée avec l’association Plateau Survolté, pour inaugurer l’Amassada. Le programme provisoire est le suivant, toutes les bonnes volontés et les idées sont les bienvenues pour enrichir cette journée.

L’après-midi sur le site :

14h00 : Inauguration officielle, discours, pot de la lutte et de l’amitié, coupure du ruban !

14h30 : Table ronde sur le transformateur et l’éolien industriel

16h30 : Table ronde sur les luttes contre les grands projets nuisibles (ZAD, NO TAV…)

Soirée à la salle des fêtes de Saint-Victor :
8h30 : Apéritif en musique

Affiche A3def

 L’affiche en meilleure qualité est disponible ici : Affiche pour impression

 

*Info sur l’éolien industriel en Aveyron

Vous saurez tout sur les aérogénérateurs en rouergue grace à ces trois documents :

Pour-ou-contre-les-eoliennes-en-aveyron

Recensement-des-aerogenerateurs-2014

L’arnaque de l’éolien

Vous pouvez également vous rendre compte de ce que veut dire bâtir un aérogénérateur en image ici : photos

texte copié à partir de ce blog

Aux libertaires ;Appels de la prison de Ségovie

 La publication de ce texte rédigé par Guy Debord qui faisait partie du livre avec aussi  des lettres  sublimes de compagnons enfermés dans cette prison . Celui-ci « appels de la prison Ségovie » de la collection  champ libre est épuisé aujourd’hui il  est impossible à trouver même  chez les bouquinistes. L’ Appels de la prison de Ségovie n’a pas perdu son existant

rédigé par Guy Debord
Aux libertaires
Coordination des groupes autonomes d’Espagne,
Appels de la prison de Ségovie
Éditions Champ Libre, Paris, novembre 1980
Web : source égarée
ESTIMABLES CAMARADES,
Nous regrettons d’avoir à attirer votre attention sur une question grave et urgente que, normalement, vous devriez connaître beaucoup mieux que nous qui sommes au loin, et étrangers. Mais nous sommes obligés de constater que diverses circonstances vous ont jusqu’ici placés dans l’impossibilité de connaître les faits ou leur signification. Nous croyons donc devoir vous exposer clairement ces faits, comme aussi les circonstances qui ont entravé votre information à leur propos.
Plus de cinquante libertaires sont détenus en ce moment dans les prisons d’Espagne, et beaucoup d’entre eux depuis plusieurs années sans jugement. Le monde entier, qui entend parler chaque jour des luttes menées par les Basques, ignore complètement cet aspect de la réalité espagnole d’aujourd’hui. En Espagne même, l’existence et les noms de ces camarades sont parfois cités devant un secteur restreint de l’opinion, mais on garde généralement le silence sur ce qu’ils ont fait et sur leurs motifs ; et rien de concret n’est entrepris pour leur délivrance.
Aussi, quand nous nous adressons à vous tous, nous ne pensons évidemment pas à reconnaître à la C.N.T., telle qu’elle a été reconstituée, un rôle de référence centrale et de représentation des libertaires : tous ceux qui le sont n’en font pas partie, et tous ceux qui en font partie ne le sont pas.
L’heure du syndicalisme révolutionnaire est passée depuis longtemps, parce que, sous le capitalisme modernisé, tout syndicalisme tient sa place reconnue, petite ou grande, dans le spectacle de la discussion démocratique sur les aménagements du statut du salariat, c’est-à-dire en tant qu’interlocuteur et complice de la dictature du salariat : car démocratie et salariat sont incompatibles, et cette incompatibilité, qui a toujours existé essentiellement, se manifeste de nos jours visiblement sur toute la surface de la société mondiale. À partir du moment où le syndicalisme et l’organisation du travail aliéné se reconnaissent réciproquement, comme deux puissances qui établissent entre elles des relations diplomatiques, n’importe quel syndicat développe en lui-même une autre sorte de division du travail, pour conduire son activité réformiste toujours plus dérisoire. Qu’un syndicat se déclare idéologiquement hostile à tous les partis politiques, voilà ce qui ne l’empêche aucunement d’être dans les mains de sa propre bureaucratie de spécialistes de la direction, tout à fait comme un quelconque parti politique. Chaque instant de sa pratique réelle le démontre. L’affaire évoquée ici l’illustre parfaitement puisque, si en Espagne des libertaires organisés avaient dit ce qu’ils devaient dire, nous n’aurions pas eu besoin de le dire à leur place.
De cette cinquantaine de prisonniers libertaires, qui sont en majorité dans la prison de Ségovie, mais aussi ailleurs (« Prison Modèle » de Barcelone, « Carabanchel » et « Yserias » de Madrid, Burgos, Herrera de la Mancha, SoriaÉ), plusieurs sont innocents, ayant été victimes de classiques provocations policières. C’est de ceux-ci que l’on parle un peu, et c’est eux que certains paraissent en principe disposés à défendre, mais plutôt passivement. Cependant les plus nombreux parmi ces prisonniers ont effectivement dynamité des voies ferrées, des tribunaux, des édifices publics. Ils ont recouru à des expropriations à main armée contre diverses entreprises et un bon nombre de banques. Il s’agit notamment d’un groupe d’ouvriers de la SEAT de Barcelone (qui se sont un moment présentés sous le nom d’« Ejercito Revolucionario de Ayuda a los Trabajadores »), qui ont voulu apporter de la sorte une aide pécuniaire aux grévistes de leur usine, ainsi qu’à des chômeurs ; et aussi des « groupes autonomes » de Barcelone, Madrid et Valence, qui ont agi de même, plus longtemps, dans l’intention de propager la révolution par tout le pays. Ces camarades sont également ceux qui se placent sur les positions théoriques les plus avancées. Alors que le procureur demande contre certains d’entre eux des peines individuelles allant de trente à quarante années d’emprisonnement, c’est ceux-là sur lesquels on entretient partout le silence, et que tant de gens préfèrent oublier !
*
L’État espagnol, avec tous les partis qui, au gouvernement ou dans l’opposition, le reconnaissent et le soutiennent, et les autorités de tous les pays étrangers, toutes sur ce point amies de l’État espagnol, et la direction de la C.N.T. reconstituée, tous, pour différentes raisons, trouvent leur intérêt à maintenir ces camarades dans l’oubli. Et nous, qui avons un intérêt précisément contraire, nous allons dire pourquoi ils le font.
L’État espagnol héritier du franquisme, démocratisé et modernisé juste comme il le faut pour tenir sa place banale dans les conditions ordinaires du capitalisme moderne, et si empressé de se faire admettre dans le pitoyable « Marché commun » de l’Europe (et, en effet, il le mérite), se présente officiellement comme la réconciliation des vainqueurs et des vaincus de la guerre civile, c’est-à-dire des franquistes et des républicains ; et il est vrai qu’il est cela. Les nuances ont là peu d’importance : si, du côté des démocrates staliniens, Carrillo est peut-être à présent un peu plus royaliste que Berlinguer, en revanche, du côté des princes de droit divin, le roi d’Espagne est assurément tout aussi républicain que Giscard d’Estaing. Mais la vérité plus profonde et plus décisive, c’est que l’État espagnol d’aujourd’hui est en fait la réconciliation tardive de tous les vainqueurs de la contre-révolution. Ils sont enfin réunis amicalement, dans la bienveillance qu’ils se devaient réciproquement, ceux qui ont voulu gagner et ceux qui ont voulu perdre, ceux qui ont tué Lorca et ceux qui ont tué Nin. Car toutes les forces qui, en ce temps-là, étaient en guerre contre la République ou bien contrôlaient les pouvoirs de cette République – ce sont tous les partis qui siègent aujourd’hui aux Cortès – poursuivaient, de diverses manières sanglantes, et atteignirent le même but : abattre la révolution prolétarienne de 1936, la plus grande que l’histoire ait vu commencer jusqu’à ce jour, et donc aussi celle qui encore préfigure au mieux le futur. La seule force organisée qui ait eu alors la volonté et la capacité de préparer cette révolution, de la faire et – quoique avec moins de lucidité et de fermeté – de la défendre, ce fut le mouvement anarchiste (appuyé uniquement, et dans une mesure incomparablement plus faible, par le P.O.U.M.).
L’État et tous ses partisans n’oublient jamais ces terribles souvenirs, mais s’emploient continuellement à les faire oublier au peuple. Voilà pourquoi le gouvernement préfère, pour le moment, laisser dans l’ombre le péril libertaire. Il aime mieux évidemment parler du G.R.A.P.O., forme idéale d’un péril bien contrôlé, puisque ce groupe est, dès l’origine, manipulé par les Services Spéciaux, exactement comme les « Brigades Rouges » en Italie, ou comme la pseudo-organisation terroriste, au nom encore imprécisé, dont le gouvernement français fait annoncer depuis quelques mois, par une série de petits coups, l’opportune entrée en scène. Le gouvernement espagnol, satisfait de son G.R.A.P.O., serait sans doute très content de ne pas avoir en plus à parler des Basques. Il y est pourtant contraint par leurs luttes effectives. Mais, après tout, les Basques combattent pour obtenir un État indépendant, et le capitalisme espagnol pourra aisément survivre à une telle perte. Le point décisif est cependant que les Basques savent très bien défendre leurs prisonniers, qu’ils ne laissent pas oublier un instant. La solidarité avait toujours été chez elle en Espagne. Si on ne la voyait plus que chez les Basques, à quoi ressemblerait l’Espagne quand les Basques s’en seront séparés ?
Les autres États de l’Europe s’accommoderaient sans peine d’un Euskadi indépendant mais, affrontant depuis 1968 une crise sociale sans remède, ils sont aussi intéressés que le gouvernement de Madrid à ce que l’on ne voie pas reparaître un courant révolutionnaire internationaliste en Espagne. Ce qui signifie, selon les plus récentes techniques de la domination : qu’on ne le voie pas, même quand il reparaît. Ces États, eux aussi, se souviennent de ce qu’ils ont dû faire, en 1936, les totalitaires de Moscou, Berlin et Rome, aussi bien que les « démocrates » de Paris et Londres, tous en accord sur le besoin essentiel d’écraser la révolution libertaire ; et plusieurs pour cela acceptant d’un cœur léger les pertes ou l’accroissement des risques dans les conflits plus secondaires qui les opposaient entre eux. Or, aujourd’hui, toute l’information est partout étatisée, formellement ou sournoisement. Toute presse « démocratique » se trouve si passionnée, et si angoissée, pour le maintien de l’ordre social qu’il n’est même plus nécessaire que son gouvernement l’achète. Elle s’offre gracieusement pour soutenir n’importe quel gouvernement en publiant exactement l’inverse de la vérité sur chaque question, même très petite ; puisque aujourd’hui la réalité de toute question, même des plus petites, est devenue menaçante pour l’ordre établi. Il n’y a aucun sujet pourtant où la presse, bourgeoise ou bureaucratique, trouve ses délices à mentir comme lorsqu’il s’agit de cacher la réalité d’une action révolutionnaire.
Enfin, la C.N.T. reconstituée éprouve dans cette affaire un embarras réel. Ce n’est pas par indifférence ou par prudence qu’elle est portée à se taire. Les dirigeants de la C.N.T. veulent être un pôle de regroupement des libertaires sur une base syndicaliste, en fait modérée et acceptable par l’ordre établi. Les camarades qui ont recouru aux expropriations représentent, de ce seul fait, un pôle de regroupement absolument contraire. Si les uns ont raison, les autres se trompent. Chacun est fils de ses œuvres, et l’on doit choisir entre les uns ou les autres en examinant le sens, la finalité de leurs actions. Si vous aviez vu la C.N.T. mener de grandes luttes révolutionnaires durant ces dernières années que les camarades expropriateurs ont passées en prison, alors vous pourriez conclure que ceux-ci ont été un peu trop impatients et aventuristes (et d’ailleurs la C.N.T., animant de grandes luttes révolutionnaires, aurait quand même, en dépit des divergences, dignement agi pour les défendre). Mais si vous voyez plutôt que cette C.N.T. se satisfait de ramasser quelques pauvres miettes dans la modernisation de l’Espagne, dont pourtant la nouveauté n’a pas de quoi donner le vertige – encore un Bourbon ! et pourquoi pas un Bonaparte ? -, alors il faut admettre que ceux qui ont pris les armes n’avaient pas fondamentalement tort. Finalement, c’était le prolétariat révolutionnaire d’Espagne qui, autrefois, a créé la C.N.T., et non l’inverse.
Quand la dictature a jugé que le temps était venu de s’améliorer un peu, bien d’autres ont pensé cueillir, dans cette libéralisation, quelques petits avantages. Mais eux, ces camarades autonomes, ils ont tout de suite trouvé déshonorant de s’en contenter. Ils ont aussitôt ressenti le besoin d’exiger tout, parce que, véritablement, après avoir subi pendant quarante années toute la contre-révolution, rien ne sera lavé de cette injure avant d’avoir réaffirmé et fait triompher toute la révolution. Qui peut se dire libertaire, et blâmer les fils de Durruti ?
Les organisations passent, mais la subversion ne cessera pas d’être aimée : « ¿Quién te vió y no te recuerda? » Les libertaires sont aujourd’hui encore nombreux en Espagne, et ils seront bien plus nombreux demain. Et heureusement, la plupart, et notamment la plupart des ouvriers libertaires, sont maintenant des incontrôlés. De plus, beaucoup de gens, comme partout en Europe, ont engagé des luttes particulières contre quelques aspects insupportables, très anciens ou très nouveaux, de la société oppressive. Toutes ces luttes sont nécessaires : à quoi bon faire une révolution, si les femmes ou les homosexuels ne sont pas libres ? À quoi bon être un jour libérés de la marchandise et de la spécialisation autoritaire, si une dégradation irréversible de l’environnement naturel imposait de nouvelles limitations objectives à notre liberté ? En même temps, parmi ceux qui se sont sérieusement engagés dans ces luttes particulières, personne ne peut penser obtenir une réelle satisfaction de ses exigences aussi longtemps que l’État n’aura pas été dissous. Car toute cette déraison pratique est la raison de l’État.
*
Nous n’ignorons pas que beaucoup de libertaires peuvent se trouver en désaccord avec plusieurs thèses des camarades autonomes, et ne voudraient pas donner l’impression qu’ils s’y rallient complètement en prenant leur défense. Allons donc ! on ne discute pas de stratégie avec des camarades qui sont en prison. Pour que cette intéressante discussion puisse commencer, il faut d’abord les ramener dans la rue. Nous croyons que ces divergences d’opinions, qui, grossies à la lumière de scrupules excessifs, risqueraient de porter quelques-uns de ceux qui se disent finalement révolutionnaires à ne pas regarder cette défense comme leur affaire, peuvent se ramener à quatre types de considérations. Ou bien certains libertaires jugent autrement, dans une optique moins impatiente ou plus facilement apaisable, la situation actuelle de l’Espagne et ses perspectives d’avenir. Ou bien ils ne sont pas d’accord sur l’efficacité des formes de lutte que ces groupes autonomes ont choisies à ce stade. Ou bien ils voient le cas où ceux-ci se sont délibérément mis comme étant peu défendable sur le plan des principes, ou seulement sur le plan judiciaire. Ou bien ils croient manquer complètement de moyens d’intervention. Nous estimons que nous pouvons très facilement réduire à rien toutes ces objections.
Ceux qui attendent maintenant quelque nouvelle amélioration dans la situation socio-politique de l’Espagne sont évidemment ceux qui se trompent le plus. Tous les plaisirs de la démocratie permise ont déjà passé leurs plus beaux jours, et chacun a pu voir qu’ils n’étaient que cela. Désormais tout s’aggravera, en Espagne comme partout ailleurs. Les historiens s’accordent généralement pour considérer que le principal facteur qui, pendant une centaine d’années, a rendu l’Espagne révolutionnaire, ce fut l’incapacité de ses classes dirigeantes à lui faire rejoindre le niveau du développement économique du capitalisme qui, dans le même temps, assurait aux pays les plus avancés de l’Europe, et aux États-Unis, des périodes beaucoup plus longues de paix sociale. Eh bien ! maintenant l’Espagne va devoir encore être révolutionnaire pour cette nouvelle raison que, si la classe dirigeante modernisée de l’après-franquisme se montre peut-être plus habile pour rejoindre les conditions générales du capitalisme actuel, elle y arrive trop tard, précisément à l’instant où tout ceci se décompose. On constate universellement que la vie des gens et la pensée des dirigeants se dégradent chaque jour un peu plus, et notamment dans ce malheureux « Marché commun » où tous vos francisés au pouvoir vous promettent de vous amener comme si c’était une fête. La production autoritaire du mensonge y grandit jusqu’à la schizophrénie publique, le consentement des prolétaires se dissout, tout ordre social se défait. L’Espagne ne deviendra pas paisible puisque, dans le reste du monde, la paix est morte. Un autre élément décisif dans la propension de l’Espagne au désordre fut assurément l’esprit d’autonomie libertaire qui était si fort dans son prolétariat. C’est justement la tendance à laquelle l’histoire de ce siècle a donné raison, et qui se répand partout, puisque partout on a pu voir où mène le processus de totalitarisation de l’État moderne, et à quels tristes résultats est parvenu, par des moyens cannibalesques, le mouvement ouvrier dominé par des bureaucraties autoritaires et étatistes. Ainsi donc, au moment où, dans tous les pays, les révolutionnaires deviennent, sur cette question centrale, espagnols, vous, vous ne pouvez penser à devenir autres.
Nous comprenons beaucoup mieux les objections qui peuvent être faites sur un plan purement stratégique. On peut en effet se demander si, par exemple, piller des banques pour employer l’argent à acheter des machines d’imprimerie, qui ensuite devront servir à publier des écrits subversifs, constitue bien la voie la plus logique et la plus efficace. Mais en tout cas ces camarades ont incontestablement atteint l’efficacité, quoique d’une autre manière : simplement en finissant par se faire emprisonner pour avoir, longuement et sans hésitation, appliqué ce programme d’action qu’ils s’étaient tracé eux-mêmes. Ils ont rendu un très grand service à la cause de la révolution, en Espagne et dans tous les pays, précisément parce qu’ils ont créé ainsi un champ pratique évident qui permettra à tous les libertaires épars en Espagne d’apparaître et de se reconnaître dans la lutte pour leur libération. Par leur initiative, ils vous épargnent la peine de chercher, à travers de longues et difficiles discussions, quelle serait la meilleure façon de commencer à agir. Il ne peut y en avoir de meilleure que celle-ci, car elle est très juste en théorie et très bonne en pratique.
Certains libertaires auront peut-être l’impression que la gravité des faits, sur le plan judiciaire, rend plus difficile la défense de ces camarades. Nous pensons au contraire que c’est la gravité même de ces faits qui facilite toute action bien calculée en leur faveur. Des libertaires ne peuvent, par principe, accorder de valeur à aucune loi de l’État, et ceci est tout particulièrement vrai quand il s’agit de l’État espagnol : considérant la légalité de son origine, et tout son comportement ultérieur, sa justice ne peut plus décemment fonctionner que sous la forme de l’amnistie proclamée en permanence, pour n’importe qui. Par ailleurs, attaquer les banques est naturellement un crime fort grave aux yeux des capitalistes ; non aux yeux de leurs ennemis. Ce qui est blâmable, c’est de voler les pauvres, et justement toutes les lois de l’économie – lois méprisables, à abolir par la complète destruction du terrain réel où elles s’appliquent – nous garantissent que jamais un pauvre ne se fait banquier. Il est arrivé que, dans une rencontre où s’échangèrent des coups de feu, un gardien fût tué. L’indignation humanitaire de la justice à ce propos paraît suspecte dans un pays où la mort violente est si fréquente. À certaines époques, on peut y mourir comme à Casas Viejas ou comme dans les arènes de Badajoz. À d’autres époques, selon les nécessités technologiques de l’augmentation du profit, on peut aussi y mourir vite, comme deux cents campeurs pauvres brûlés à Los Alfaques ou soixante-dix bourgeois dans le luxe en plastique d’un grand hôtel de Saragosse. Dira-t-on que nos camarades « terroristes » sont responsables de telles hécatombes ? Non, ils en sont aussi peu coupables que de la pollution du golfe du Mexique, puisque toutes ces petites légèretés ont été commises depuis qu’ils sont en prison.
L’affaire n’est en rien judiciaire. C’est une simple question de rapport de forces. Puisque le gouvernement a un intérêt si évident à ce qu’on ne parle pas de ces camarades, il suffit qu’on oblige à en parler d’une manière telle que le gouvernement soit contraint de conclure que son intérêt immédiat est plutôt de les remettre en liberté que de les maintenir en prison. Que le gouvernement choisisse alors d’en venir à ce résultat par un procès où ils seraient condamnés au nombre d’années de prison qu’ils ont déjà passées, ou bien par une amnistie, ou bien en les laissant s’évader, c’est sans importance. Nous devons cependant insister sur le fait que, tant qu’il n’existe pas un mouvement d’opinion s’exprimant sur leur cas d’une manière qui soit assez forte et menaçante, une évasion qui serait favorisée par les autorités est dangereuse : vous connaissez bien la « ley de fugas », et vous en reverrez plusieurs fois l’application.
*
Camarades, nous ne nous permettrons pas de vous suggérer, à vous qui êtes sur place et qui, coup par coup, pouvez peser les possibilités et les risques, telle ou telle forme d’action pratique. Pourvu que soit partout mise en avant l’exigence explicite de libération de ces libertaires, toutes les formes d’action sont bonnes, et celles qui font le plus scandale sont les meilleures. En vous groupant par affinités, vous pourrez découvrir ou reprendre, selon vos goûts et les opportunités, n’importe lequel des moyens d’agir qui furent employés en d’autres temps ou qui restent encore à expérimenter – en refusant seulement de tomber dans la bassesse des pétitions respectueuses que pratiquent partout, et vainement, les partis de gauche électoralistes. Il est même tout d’abord inutile de coordonner de telles actions autonomes. Il suffit qu’elles convergent vers le même but spécifique, en le proclamant toujours, et en se multipliant avec le temps. Et quand ce but précis aura été atteint, il se trouvera que ce courant libertaire agissant aura reparu, se sera fait connaître et se connaîtra lui-même. Ainsi un mouvement général sera en marche, qui pourra se coordonner de mieux en mieux pour des buts toujours plus amples.
Le premier but à atteindre serait d’obséder le pays avec cette affaire, ce qui équivaudrait par la même occasion à faire savoir dans le monde l’existence présente du mouvement révolutionnaire libertaire en Espagne, en obligeant tous à savoir l’existence de ces prisonniers, en même temps que l’efficacité de ceux qui les défendent. Il faut que les noms de ces prisonniers soient connus dans tous les pays où les prolétaires se dressent contre l’État, depuis les ouvriers qui mènent les grandes grèves révolutionnaires de Pologne jusqu’à ceux qui sabotent la production des usines d’Italie, et jusqu’aux contestataires qui vivent devant les portes des asiles psychiatriques de Brejnev ou des prisons de Pinochet.
Comme il y a, malheureusement, trop de noms pour les citer tous (honte ! combien de Puig Antich sentent aujourd’hui autour du cou la pression du garrot, mais pour trente ou quarante années, selon la programmation gouvernementale !), on peut se limiter pour le moment à citer les noms des coupables contre qui la justice réclame, ou a déjà prononcé, des peines de plus de vingt ans de prison : Gabriel Botifoll Gómez, Antonio Cativiela Alfós, Vicente Domínguez Medina, Guillermo González García, Luis Guillardini Gonzalo, José Hernández Tapia, Manuel Nogales Toro. Mais il doit être bien clair que l’on exige la libération de tous les autres, et même des innocents.
Le premier point est de faire connaître largement le problème ; ensuite de ne plus le laisser oublier, en manifestant, toujours plus fortement, une impatience croissante. Les moyens grandiront dans le cours du mouvement. Q’une seule petite usine d’Espagne se mette un jour en grève pour cette revendication, et déjà elle sera un modèle pour tout le pays. Vous n’aurez qu’à faire connaître aussitôt son attitude exemplaire, et la moitié du chemin sera faite. Mais, tout de suite, il ne faudrait pas que s’ouvrît un cours à l’Université, une représentation au théâtre ou une conférence scientifique, sans que quelqu’un, par une interpellation directe ou en faisant pleuvoir des tracts, n’ait posé la question préalable de ce que deviennent nos camarades, et de la date où ils seront enfin libérés. Il ne faudrait pas que l’on pût passer dans une rue d’Espagne sans voir écrits leurs noms. Il faudrait entendre partout chanter des chansons qui parlent d’eux.
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Camarades, si nos arguments vous ont paru justes, diffusez et reproduisez au plus vite ce texte par tous les moyens que vous avez, ou que vous pouvez saisir. Et sinon, jetez-le à l’instant même, et commencez tout de suite à en publier d’autres, qui soient meilleurs ! Car il est hors de doute que vous avez tous le droit de juger avec rigueur nos modestes arguments. Mais ce qui est encore plus hors de doute, c’est que la scandaleuse réalité que nous avons révélée de notre mieux n’est pas, elle, un objet de votre jugement : au contraire, c’est elle qui, finalement, va vous juger tous.
Salut !
Vive la liquidation sociale !
1er septembre 1980
LES AMIS INTERNATIONAUX